La SA CREATIS a conclu un contrat de regroupement de crédits avec Monsieur [B] [S] et Madame [G] [P] le 18 octobre 2013, d’un montant de 27.700 € à un taux nominal de 8,46 %, remboursable en 144 mensualités. Après plusieurs impayés, la SA CREATIS a prononcé la déchéance du terme le 14 août 2023. Le 5 janvier 2024, elle a assigné les emprunteurs devant le juge des contentieux de la protection de Bordeaux pour obtenir le paiement de 25.982,89 € et d’autres sommes. Lors de l’audience du 2 avril 2024, l’affaire a été renvoyée en raison d’une forclusion soulevée par Monsieur [B] [S], et la SA CREATIS s’est désistée de ses demandes contre Madame [G] [P] en raison de son rétablissement personnel. À l’audience du 9 juillet 2024, la SA CREATIS a maintenu ses demandes, précisant que le premier incident de paiement date du 28 février 2023. Monsieur [B] [S] a reconnu sa dette mais a contesté la forclusion, affirmant ne pas pouvoir régler les sommes dues en raison de sa situation financière. L’affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
53B
SCI/DC
PPP Contentieux général
N° RG 24/00290 – N° Portalis DBX6-W-B7I-YWOG
S.A. CREATIS
C/
[B] [S], [G] [P] divorcée [S]
Expéditions délivrées à :
Me MAILLET
M. [S]
FE délivrée à :
Me MAILLET
Le 24/09/2024
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION
Pôle protection et proximité
[Adresse 1]
JUGEMENT EN DATE DU 24 septembre 2024
JUGE : Madame Bérengère LARNAUDIE, Vice Présidente
GREFFIER : Madame Dominique CHATTERJEE
DEMANDERESSE :
S.A. CREATIS – [Adresse 4]
Représentée par Maître Claire MAILLET de la SAS MAXWELL MAILLET BORDIEC, avocat au barreau de Bordeaux
DEFENDEURS :
1°) Monsieur [B] [S] né le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 6] (17), demeurant C/ Mme [U] [X] – [Adresse 3]
Comparant en personne
2°) Madame [G] [P] divorcée [S], demeurant [Adresse 5]
Ni présente, ni représentée
DÉBATS :
Audience publique en date du 9 juillet 2024
Articles 480 et suivants du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon une offre préalable signée le 18 octobre 2013, la SA CREATIS a consenti à Monsieur [B] [S] et Madame [G] [P] un contrat de regroupement de crédits d’un montant de 27.700 €, au taux nominal contractuel de 8,46 %, remboursable en 144 mensualités de 306,87 € hors assurance.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées malgré une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception du 10 mai 2023, la SA CREATIS a prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée avec avis de réception du 14 août 2023.
Par acte de commissaire de justice du 5 janvier 2024, la SA CREATIS a fait assigner Monsieur [B] [S] et Madame [G] [P] devant le juge des contentieux de la protection de BORDEAUX afin d’obtenir leur condamnation solidaire à lui payer :
▸ la somme de 25.982,89 € avec intérêts au taux contractuel de 8,460 % sur la somme de 23.476,72 € à compter du 19 septembre 2023, et au taux légal sur le surplus,
▸ la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
▸ les entiers dépens.
A l’audience du 2 avril 2024 au cours de laquelle l’affaire a été appelée, le dossier a été renvoyé compte tenu de la forclusion soulevée par Monsieur [B] [S]. La SA CREATIS a également indiqué se désister de ses demandes à l’encontre de Madame [G] [P] pour laquelle la Banque de France avait prononcé un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.
Lors de l’audience du 9 juillet 2024 à laquelle l’affaire a été renvoyée, la SA CREATIS a maintenu ses demandes. Elle a notamment rappelé que la Commission de surendettement a été saisie à plusieurs reprises par le défendeur, sans que le délai de forclusion ne soit expiré puisqu’à chaque fois interrompu par les mesures décidées par la Commission de surendettement ; que le premier incident de paiement non régularisé est en date du 28 février 2023, ce qui correspond à la date d’expiration du moratoire de 24 mois entré en application le 28 février 2021 au terme duquel les emprunteurs n’ont pas repris le paiement des mensualités.
La SA CREATIS a en outre exposé s’agissant d’une éventuelle cause de déchéance du droit aux intérêts, qu’elle n’était pas en mesure de produire la FIPEN, rappelant que le contrat a été souscrit sous l’empire de la loi antérieure à 2016.
Bien que régulièrement assignée par remise de l’acte en l’étude, Madame [G] [P] n’a pas comparu, ni personne pour la représenter.
Monsieur [B] [S], présent, a reconnu sa dette envers la SA CREATIS, dont il considère néanmoins que l’action est forclose en ce que le premier impayé non régularisé se situe en 2016.
Il ajoute ne pas être en mesure de régler les sommes demandées, étant sans emploi et percevant 900 € par mois au titre d’une formation rémunérée outre une prime d’activité d’un montant mensuel de 284 € ; il est hébergé dans une chambre pour une somme mensuelle de 400 €.
L’affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024.
Selon l’article 472 du code de procedure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge faisant droit à la demande s’il l’estime régulère, recevable et bien fondée.
A titre liminaire, il est rappelé que le créancier peut, à tout moment de la procédure de surendettement, agir selon les voies du droit commun pour se procurer un titre. La recevabilité/mise en place de mesures imposées par la Commission de surendettement des particuliers ne fait ainsi pas obstacle à l’action de la banque, même si le jugement sera exécuté conformément à la législation applicable en matière de surendettement. En effet, son exécution est notamment différée pendant la durée du plan arrêté par la Commission, et par ailleurs, en cas d’inexécution par le débiteur des mesures imposées, le créancier ne recouvre le droit de pratiquer des mesures d’exécution que dans le cas où il est mis fin au plan soit par une décision du juge statuant en matière de surendettement soit par l’effet d’une clause de caducité prévue par ces mesures.
Sur le désistement de la SA CREATIS à l’encontre de Madame [G] [P] :
Il convient de constater le désistement d’instance de la SA CREATIS à l’encontre de la défenderesse.
Sur la loi applicable :
Le contrat de crédit est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur numérotation et rédaction en vigueur après le 1er mai 2011, modifiées le 1er juillet 2016 à la suite de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et du décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.
Sur la forclusion :
Aux termes de l’article L 311-52 du code de la consommation dans sa numérotation applicable en l’espèce (aujourd’hui R.312-35), les actions en paiement engagées à la suite de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’évènement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion.
Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement dans le cadre d’un plan de surendettement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après l’adoption du plan conventionnel de redressement ou après décision de la commission imposant les mesures de surendettement ou la décision du juge de l’exécution homologuant les mesures de surendettement.
En l’espèce, Monsieur [B] [S] prétend sans verser aucune pièce aux débats, que le premier impayé non régularisé se situe au cours de l’année 2016.
Il résulte en réalité des documents versés à la procédure par la SA CREATIS qu’un incident de paiement est intervenu le 31 octobre 2016 ; que le 31 mars 2017, sont entrées en application les mesures imposées par la Commission de surendettement consistant en un moratoire de 24 mois s’agissant de la dette envers la SA CREATIS, ce qui a interrompu le délai de forclusion ; qu’à l’expiration de ce moratoire le 31 mars 2019, un nouveau moratoire de 24 mois est entré en application le 28 février 2021 ; qu’à l’issue de ce second moratoire, le paiement des mensualités n’a pas été repris.
Compte tenu en conséquence de l’interruption du délai de forclusion lors de la mise en œuvre de chacun des moratoires, le premier incident de paiement se situe à la date du 28 février 2023.
La demande de la SA CREATIS, introduite le 5 janvier 2024 est donc recevable.
Sur les sommes dues :
L’article L. 311-24 du code de la consommation dans sa numérotation applicable en l’espèce (aujourd’hui L.312-39) dispose qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés et jusqu’à la date de règlement effectif, les sommes restant dues produiront des intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice des dispositions de l’article 1231-5 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.
L’article D.311-6 du même code dans sa numérotation applicable en l’espèce (aujourd’hui D.312-16) précise que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L.311-24 (aujourd’hui 312-39), il peut demander une indemnité égale à 8% du capital restant dû à la date de la défaillance.
L’article L.141-4 du code de la consommation dans sa numérotation applicable en l’espèce permet au juge de relever d’office tous les moyens tirés de l’application des dispositions du code de la consommation, sous réserve de respecter le principe du contradictoire. Il a été fait application de cette disposition par le juge à l’audience.
En application de l’article L.311-6 du code de la consommation dans sa numérotation applicable en l’espèce, le prêteur doit établir et remettre à l’emprunteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, une fiche d’informations précontractuelles contenant les informations nécessaires à la comparaison des différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement ; ce à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L.311-48), étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information et que la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information précontractuelle normalisée européenne, ne peut être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire et notamment de la production de la FIPEN, de prouver l’exécution par le prêteur de son obligation d’information.
En l’espèce, la SA CREATIS a produit :
• l’offre préalable de crédit,
• la notice d’assurance,
• le justificatif de la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP),
• la fiche de renseignements (revenus et charges),
• les justificatifs de solvabilité et d’identité de l’emprunteur,
• le tableau d’amortissement,
• l’historique des règlements,
• le décompte de la créance.
Compte tenu de la défaillance de l’emprunteur, elle était bien fondée à se prévaloir de la déchéance du terme.
Elle ne démontre en revanche pas avoir remis à Monsieur [B] [S] la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN), de sorte qu’il convient de prononcer la déchéance totale du droit aux intérêts, à compter de la signature du contrat.
En conséquence, et en application des dispositions légales susvisées, Monsieur [B] [S] sera condamné à payer à la SA CREATIS la somme de 16.953,05 € correspondant au capital prêté (27.700 €) déduction faite des règlements effectués par les emprunteurs (10.746,95 €). Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la déchéance du terme par lettre recommandée avec avis de réception du 14 août 2023.
En application de l’article 1231-5 du code civil, l’indemnité de résiliation sera réduite à la somme de 200 € dans la mesure où le bénéfice d’une clause pénale à 8 % conduirait, compte tenu du préjudice réellement subi par le prêteur, à une rémunération excessive de celui-ci et à une pénalisation non moins excessive de l’emprunteur.
Sur les demandes accessoires :
Le défendeur qui succombe à l’instance sera condamné aux dépens.
Il n’apparaît pas inéquitable de le condamner à payer à la SA CREATIS une somme de 300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera donc rejetée.
La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.
Le tribunal statuant publiquement par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
CONSTATE le désistement d’instance de la SA CREATIS à l’encontre de Madame [G] [P] ;
DECLARE recevable l’action de la SA CREATIS ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts contractuels à compter de la date de signature du contrat ;
CONDAMNE Monsieur [B] [S] à payer à la SA CREATIS la somme de 16.953,05 € avec intérêts au taux légal à compter du 14 août 2023, outre la somme de 200 € au titre de l’indemnité de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter du jugement ;
CONDAMNE Monsieur [B] [S] aux dépens de l’instance, et à payer à la SA CREATIS la somme de 300 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONSTATE l’exécution provisoire.
Ainsi jugé et mis à disposition, les jour, mois et an susdits.
LA GREFFIERE LA JUGE