M et Mme [R] ont contracté deux prêts auprès de la SA SOCIETE GENERALE, l’un en juillet 2005 et l’autre en juin 2006. Ils ont cessé de rembourser le second prêt en décembre 2017 et le premier en mai 2018. La banque a alors prononcé la déchéance des prêts et a mis en demeure M et Mme [R] de régler les montants dus. En août 2019, la banque a actionné une délégation de créance sur un contrat d’assurance-vie de M [R] pour récupérer une partie de la somme due. En octobre 2019, la banque a saisi le tribunal pour obtenir le paiement des créances restantes. En août 2020, les créances ont été cédées à un fonds de titrisation, qui a mandaté une société pour le recouvrement. Le tribunal a prononcé la déchéance du droit aux intérêts en mai 2022 et a demandé des documents supplémentaires. En février 2023, le tribunal a condamné M et Mme [R] à payer des sommes au fonds de titrisation. Ils ont interjeté appel de ce jugement. En novembre 2023, l’affaire a été radiée pour défaut d’exécution. Le fonds de titrisation a également interjeté appel d’un jugement antérieur concernant la déchéance des intérêts. M et Mme [R] ont contesté la capacité à agir du fonds, tandis que celui-ci a justifié sa légitimité. L’incident a été retenu pour une audience en septembre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COPIE OFFICIEUSE
à
– SCP ROUAUD & ASSOCIES
– SCP BLANCHECOTTE-BOIRIN
LE : 17 SEPTEMBRE 2024
COUR D’APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
O R D O N N A N C E
DU CONSEILLER DE LA MISE EN ETAT
DU 17 SEPTEMBRE 2024
N° – Pages
N° RG 23/00813 – N° Portalis DBVD-V-B7H-DSPJ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal judiciaire de NEVERS en date du 11 Mai 2022
Audience tenue par O. CLEMENT, Conseiller de la mise en état, assisté de V. SERGEANT, Greffier, le 03 septembre 2024, date à laquelle le délibéré de l’ordonnance a été renvoyé au 17 septembre 2024.
PARTIES EN CAUSE :
I – S.A.S. FONDS COMMUN DE TITRISATION CASTANEA FONDS COMMUN DE TITRISATION CASTANEA représenté par la SAS MCS ET ASSOCIES, venant aux droits de la SOCIETE GENERALE agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social:
[Adresse 2]
[Localité 5]
N° SIRET : 431 252 121
Représentée par la SCP ROUAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES, substitué par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES à l’audience
timbre fiscal acquitté
APPELANTE suivant déclaration du 07/08/2023
DEFENDERESSE A L’INCIDENT
II – M. [Z] [R]
né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 7] (38)
[Adresse 8]
[Localité 4]
– Mme [O] [R]
né le [Date naissance 3] 1965 à [Localité 6]
[Adresse 8]
[Localité 4]
Représentés par la SCP BLANCHECOTTE-BOIRIN, avocat au barreau de NEVERS
timbre fiscal acquitté
INTIMÉS
DEMANDEURS A L’INCIDENT
Nous, O. CLEMENT, Conseiller de la mise en état, assisté de S. MAGIS, Greffier, avons rendu ce jour l’ordonnance dont la teneur suit :
M et Mme [R] ont souscrit auprès de la SA SOCIETE GENERALE deux contrats de crédits :
– Le 08 juillet 2005, prêt n°806003783146 d’un montant de 66.020,00 €
– Le 19 juin 2006, prêt n°806003244735 d’un montant de 16.332,00 € .
À compter du 7 décembre 2017, M et Mme [R] ont cessé de rembourser les échéances du second prêt n°806003244735 et à compter du 16 mai 2018, ils ont cessé de rembourser les échéances du premier prêt n°806003783146.
La SA SOCIÉTÉ GENERALE a prononcé la déchéance du terme des deux prêts, et a mis en demeure M. et Mme [R] de payer les sommes de 5.800,15 € au titre du solde du prêt n° 806003244735 et 76.927,20 € au titre du solde du prêt
n° 806003783146.
M. et Mme [R] n’ont procédé à aucun règlement.
Le 6 août 2019, la SA SOCIÉTÉ GENERALE a actionné la délégation de créance consentie sur un contrat d’assurance-vie souscrit par M [R] auprès de la société CARDIF ASSURANCES, sollicitant le règlement d’une somme de 28.854,98 €, qui sera versée par cette dernière.
Par actes d’huissier de justice en date du 1er octobre 2019, la SA SOCIETE GENERALE a saisi le Tribunal de Grande Instance de NEVERS d’une demande en paiement des sommes restant dues.
Par acte sous seing privé en date du 3 août 2020 déposé au rang des minutes de l’Office notarial de Maître [M] [E], la SA SOCIETE GENERALE a cédé les créances détenues à l’encontre de M et Mme [R] au Fonds commun de titrisation (FCT) CASTANEA représenté par sa société de gestion la SAS EQUITIS GESTION.
La SAS EQUITIS GESTION a confié à la société MCS et ASSOCIES le suivi et le recouvrement des créances du fonds.
La cession intervenue a dûment été signifiée à M et Mme [R] par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 septembre 2020.
Par jugement du 11 mai 2022, le tribunal judiciaire de Nevers a prononcé la déchéance du droit aux intérêts pour les deux prêts et a ordonné la réouverture des débats en invitant le FCT Castanea à produire l’historique complet des règlements depuis la souscription de chacun des contrats de prêt.
Par jugement du 29 juillet 2022, le même tribunal a ordonné une réouverture des débats en invitant M. et Mme [R] à produire un courrier de Cardif Assurances attestant du versement de la somme de 28.854,98 €.
Par jugement du 1er février 2023, le tribunal a condamné solidairement M. et Mme [R] à payer au FCT CASTANEA représenté par la SAS MCS ET ASSOCIES les sommes de :
– 46.268,97 € avec intérêt au taux conventionnel de 4,10% à compter du 28 août 2019 et jusqu’à complet paiement au titre du prêt n°806003783146,
– 5.813,46 € avec intérêt au taux conventionnel de 4,00% à compter du 28 août 2019 et jusqu’à complet paiement au titre du prêt n°80600324473.
-1 200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
M et Mme [R] ont interjeté appel limité du jugement du 1er février 2023.
Par ordonnance du 21 novembre 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la radiation de l’affaire pour défaut d’exécution des causes du jugement.
Par déclaration d’appel du 7 août 2023, le Fonds commun de titrisation CASTANEA, ayant pour société de gestion la SAS EQUITIS GESTION, aujourd’hui dénommée SA IQ EQ MANAGEMENT, et pour recouvreur la SAS MCS ET ASSOCIES, a interjeté appel du jugement du 11 mai 2022 ayant prononcé la déchéance du droit aux intérêts.
Par conclusions initiales d’incident signifiées le 31 janvier 2024 et dernières conclusions signifiées le 18 juin 2024, M. et Mme [R] ont saisi le conseiller de la mise en état aux fins de :
– juger les demandes du Fonds commun de titrisation CASTANEA, qui ne justifie pas de son existence ni de sa capacité à agir, irrecevables en application de l’article 122 du code de procédure civile ;
– le condamner aux dépens.
Par conclusions récapitulatives d’incident signifiées le 11 avril 2024, le Fonds commun de titrisation CASTANEA demande au conseiller de la mise en état de :
– juger que la capacité à agir du Fonds commun de titrisation CASTANEA, ayant pour société de gestion la SAS IQ EQ MANAGEMENT, anciennement dénommée EQUITIS GESTION, représenté par la SAS MCS ET ASSOCIES est parfaitement justifiée,
En conséquence,
– débouter M et Mme [R] de leurs demandes,
– condamner in solidum M et Mme [R] à payer au FCT CASTANEA, ayant pour société de gestion la SAS IQ EQ MANAGEMENT, anciennement dénommée EQUITIS GESTION, représenté par la SAS MCS ET ASSOCIES, la somme de 1.000,00 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile,
– les condamner de même en tous les dépens de l’incident.
L’incident a été retenu à l’audience du 03 septembre 2024.
Aux termes de l’article 122 du code de procédure civile , « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa
demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »
Il est rappelé que selon l’article L.124-169 du code monétaire et financier, alinéa V, V.
1° L’acquisition ou la cession de créances par un organisme de financement s’effectue par la seule remise d’un bordereau dont les énonciations et le support sont fixés par décret, ou par tout autre mode d’acquisition, de cession ou de transfert de droit français ou étranger.
[…]
2° Lorsqu’elle est réalisée par voie du bordereau mentionné au 1°, l’acquisition ou la cession des créances prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d’échéance ou d’exigibilité des créances, sans qu’il soit besoin d’autre formalité, et ce quelle que soit la loi applicable aux créances et la loi du pays de résidence des débiteurs ;
3° La remise du bordereau entraîne de plein droit le transfert des sûretés, des garanties et des autres accessoires attachés à chaque créance, y compris les sûretés hypothécaires et les créances professionnelles cédées à titre de garantie ou nanties dans les conditions prévues par les articles L. 313-23 et suivants, de même que l’opposabilité de ce transfert aux tiers sans qu’il soit besoin d’autre formalité. »
En vertu de l’article L.214-180 alinéas 1 et 2 du code monétaire et financier, ‘ le Fonds commun de titrisation est un organisme de titrisation constitué sous la forme de copropriété, qui n’est pas doté de la personnalité morale.’
Selon l’article L.214-81 du même code, ‘ le fonds commun de titrisation est constitué à l’initiative de la société de gestion mentionnée au III de l’article L.214-168 […].
Aux termes de L’article L.214-183, ‘ la société de gestion du fonds commun de titrisation représente le fonds à l’égard des tiers et dans toute action en justice’.
La société de gestion tire dès lors son pouvoir de représentation et d’agir en justice de la loi.
L’article L.214-172 alinéa 2 du Code monétaire et financier dispose que la société de gestion, en tant que représentant de l’organisme, peut confier le recouvrement des créances, par voie de convention, à une autre entité désignée à cet effet.
S’agissant du recouvrement, l’article L214-172 alinéa 1 du code monétaire et financier prévoit en effet que ‘Toutefois, tout ou partie du recouvrement de ces créances peut être assuré directement par la société de gestion ou confié par elle, par voie de convention, à une autre entité désignée à cet effet. Chaque débiteur est informé de ce changement »
Ainsi la société de gestion peut agir en recouvrement des créances cédées, elle même pouvant confier ce recouvrement à une autre société.
Tel est le cas en l’espèce. Il ressort d’un ‘certificat de création’ établi le 3 août 2020 que la SAS Equitis Gestion a constitué le FCT Castanea le 30 juillet 2020 et que ‘l’entité en charge du recouvrement des créances du FCT Castanea est la société MCS &Associés qui est autorisée à représenter seule et directement le Fonds dans toutes les actions en justice liées à la gestion et au recouvrement des créances cédées, y compris toute déclaration de créance et toute mesure d’exécution, sans mentionner la Société de Gestion dans ces actes’.
Par conséquent, il est établi par la loi et l’acte de création du 3 août 2023 que le fonds commun de titrisation Castanea constitué par la société Equitis Gestion devenue la société IQ EQ Management à compter du 12 septembre 2023 qui le représente dans toute action en justice est également représenté par la société MCS Associés chargée du recouvrement des créances.
La société de gestion et la société MCS & Associés n’ont dès lors pas à justifier d’un mandat contrairement à ce que soutiennent M. et Mme [R], dont le moyen s’analyserait plûtôt comme un défaut de pouvoir, qui constitue au surplus une irrégularité de fond qui n’est pas de la compétence du conseiller de la mise en état.
Les conclusions des parties ont porté sur un défaut de qualité à agir. Le droit d’agir – par représentation – ressort des textes ci-dessus visés et de l’acte de création du FCT.
L’incident formé par les intimés est donc mal fondé et sera rejeté.
Au regard des situations économiques des parties, aucune considération d’équité ne conduit à faire application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la défenderesse à l’incident.
– Disons que le fonds commun de titrisation Castanea ayant pour société de gestion la société IQ EQ Management et représenté par la société MCS Associés a qualité à agir;
– Déboute M. et Mme [R] de son incident ;
– Disons n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de l’appelant ;
– Condamnons M. et Mme [R] aux dépens de l’incident.
Le Greffier, Le Conseiller de la mise en état,
S. MAGIS O. CLEMENT