Mme [C] [F] a acquis un pack aérovoltaïque et un ballon de marque GSE Thermosystem auprès de la société Green Solution Energie pour 33 891 euros, financé par un crédit de la société BNP Paribas Personal Finance. Après des mensualités non réglées, la banque a prononcé la déchéance du terme et a assigné Mme [F]. Celle-ci a ensuite assigné Green Solution Energie pour obtenir des réparations et l’annulation des contrats. Le tribunal a prononcé la nullité des contrats de vente et de crédit, ordonné la dépose des matériels par Green Solution Energie, et condamné Mme [F] à rembourser la banque. Mme [F] a fait appel de ce jugement, demandant la confirmation de la nullité des contrats et la restitution du capital emprunté. La BNP Paribas et Green Solution Energie ont également interjeté appel, contestant la nullité des contrats et demandant le remboursement des sommes dues. La clôture de l’instruction a été prononcée le 26 mars 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE
VERSAILLES
Code nac : 53E
Chambre civile 1-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 17 SEPTEMBRE 2024
N° RG 23/01548 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VXCX
AFFAIRE :
[C] [Y] épouse [F]
C/
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Octobre 2022 par le Tribunal de proximité de DREUX
N° RG : 11-22-000097
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 17/09/24
à :
Me Sandra GOUIN
Me Jack BEAUJARD
Me Baudouin DE SANTI
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [C] [Y] épouse [F]
née le [Date naissance 3] 1976 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentant : Maître Sandra GOUIN de la SCP GATINEAU CHARTRAIN GOUIN, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000040
APPELANTE
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 542 .097.902 RCS PARIS
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Maître Jack BEAUJARD de la SELAS DLDA AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 543 – N° du dossier 20237558 –
Représentant : Maître Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R175
S.A.S.U. GREEN SOLUTION ENERGIE étant précisé que GREEN SOLUTION ENERGIE
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 802 015 289 RCS Bobigny
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentant : Maître Baudouin DE SANTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 522 – N° du dossier 202315
Représentant : Maître Cécile HUNAULT-CHEDRU de la SELARL POINTEL & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de ROUEN, vestiaire : 62 –
INTIMEES
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 Mars 2024, Monsieur Philippe JAVELAS, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Anne THIVELLIER, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffière, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
Greffière lors du prononcé de la décision : Madame Céline KOC
Dans le cadre d’un démarchage à domicile et suivant bon de commande signé le 22 novembre 2016, Mme [C] [F] née [Y] a fait l’acquisition auprès de la société Green Solution Energie d’un pack aérovoltaïque auto-consommation et revente en surplus d’une puissance totale de 5,13 Kwatts, et d’un ballon de marque GSE Thermosystem, pour un montant total de 33 891 euros.
Pour financer l’installation, Mme [F] a souscrit un contrat de crédit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance pour un montant de 33 891 euros le 22 novembre 2016. Des mensualités n’étant pas honorées, la banque a, après mise en demeure du 12 mars 2019 demeurée infructueuse, prononcé la déchéance du terme.
Par acte de commissaire de justice du 16 décembre 2019, la société BNP Paribas Personal Finance a fait assigner Mme [F], laquelle a ensuite fait assigner par acte de commissaire de justice du 17 septembre 2021 la société Green Solution Energie, devant le juge des contentieux et de la protection de Dreux afin de voir condamner celle-ci au paiement de la somme de 33 677,03 euros pour solde de l’offre de crédit, outre les intérêts conventionnels.
Mme [F] sollicitait l’annulation des contrats de vente et de crédit affecté, le débouté de la banque de la totalité des demandes de condamnation faites à son encontre, la condamnation de la venderesse à l’indemniser de ses préjudices moral et de jouissance, et de la banque à lui verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’elle lui avait occasionné.
Par jugement contradictoire du 25 octobre 2022, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Dreux a :
– prononcé la nullité du contrat de vente du 22 novembre 2016 conclu entre Mme [F] et la société Green Solution Energie pour le non respect des dispositions du code de la consommation,
– prononcé la nullité du contrat de crédit souscrit entre Mme [F] et la société BNP Paribas Personal Finance pour un montant de 33 677,03 euros,
– dit qu’il appartiendra à la société Green Solution Energie de mettre en ‘uvre la dépose et l’enlèvement des matériels visés par le bon de commande litigieux,
– dit qu’à défaut de reprise dans un délai de trois mois suivant la signification du jugement Mme [F] pourra librement disposer du matériel installé,
– condamné en conséquence Mme [F] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance la somme de 33 677,03 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement en remboursement du capital emprunté sous déduction des versements d’ores et déjà effectués,
– débouté les parties du surplus de leurs demandes,
– débouté les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société BNP Paribas aux dépens.
Par déclaration déposée au greffe le 9 mars 2023, Mme [F] a relevé appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 25 mars 2024, Mme [F], appelante, demande à la cour de :
– vu les pièces versées aux débats, vu les 1231-1 et 1224 et suivants, 2224 du code civil et 331 du code de procédure civile, vu les articles l 111-1, l 242-1, l 221-20, l 221-4, l 221-5 et suivants et l 312-55 du code de la condamnation, vu la jurisprudence, la déclarer recevable et bien fondée en son appel du jugement rendu par le tribunal de proximité de Dreux le 25 octobre 2022,
Y faisant droit,
– confirmer le jugement dont appel :
*en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente du 22 novembre 2016 qu’elle a conclu avec la société Green Solution Energie pour non respect des dispositions du code de la consommation,
*en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de crédit qu’elle a souscrit avec la société BNP Paribas Personal Finance pour un montant de 33 677,03 euros,
*en ce qu’il a dit qu’il appartiendra à la société Green Solution Energie de mettre en ‘uvre la dépose et l’enlèvement des matériels visés par le bon de commande,
*en ce qu’il a dit qu’à défaut de reprise dans un délai de trois mois suivant la signification de l’arrêt, elle pourra librement disposer du matériel installé,
– réformer le jugement dont appel pour le surplus.
Et statuant à nouveau,
– condamner la société Green Solution Energie à lui restituer la somme de 33 891 euros correspondant au capital emprunté par elle auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
A titre subsidiaire,
– annuler le contrat principal souscrit auprès de la société Green Solution Energie et par voie de conséquence de celle du contrat de crédit affecté souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance pour vices du consentement,
– condamner la société Green Solution Energie à lui payer la somme de 33 891 euros correspondant au capital emprunté par elle auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
A titre infiniment subsidiaire,
– déclarer recevable la demande tendant à voir prononcer la résolution du contrat principal souscrit auprès de la société Green Solution Energie et par voie de conséquence de celle du contrat de crédit affecté souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
– prononcer la résolution du contrat principal souscrit auprès de la société Green Solution Energie et par voie de conséquence de celle du contrat de crédit affecté souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
– condamner la société Green Solution Energie à lui restituer la somme de 33 891 euros correspondant au capital emprunté par elle auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
En tout état de cause,
– dire et juger que la société BNP Paribas Personal Finance a commis une faute grave qui la prive du droit de lui réclamer le remboursement de la totalité des sommes prêtées, en capital, intérêts et frais,
En conséquence,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes de condamnation de la concluante à lui payer une quelconque somme au titre du contrat de crédit souscrit le 22 novembre 2016, ainsi qu’à un quelconque article 700 du code de procédure civile,
– subsidiairement, condamner la société Green Solution Energie à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de société BNP Paribas Personal Finance,
– condamner la société Green Solution Energie à lui payer les sommes suivantes :
*3 000 euros en réparation du préjudice moral qu’elle a subi,
*4 000 euros en réparation du préjudice de jouissance subi,
– condamner la société BNP Paribas Personal Finance à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts pour le préjudice subi,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance et la société Green Solution Energie de toutes demandes contraires aux présentes,
– condamner in solidum les sociétés BNP Paribas Personal Finance et Green Solution Energie à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, pour les frais exposés en première instance ainsi qu’aux entiers dépens, qui comprendront les frais de mise en cause de la société Green Solution Energie,
– condamner in solidum la société Green Solution Energie et la société BNP Paribas Personal Finance à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel ainsi aux entiers dépens d’appel.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 15 février 2024, la société BNP Paribas Personal Finance, intimée, demande à la cour de :
vu les articles l 221-5, l 221-9, l 311-1 ; l 312-1 et suivants, l 311-32 alinéa 1 et r 312-33du code de la consommation, vu les articles 1182 et suivants du code civil,
A titre principal,
– la recevoir en ses présentes écritures et y faisant droit,
– infirmer le jugement rendu le 25 octobre 2022 par le tribunal de proximité de Dreux :
*en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente du 22 novembre 2016 conclu entre Mme [F] et la société Green Solution Energie pour non respect des dispositions du code de la consommation,
*en ce qu’il a prononcé par voie de conséquence, la nullité du contrat de crédit souscrit avec Mme [F] pour un montant de 33 677,03 euros,
Et statuant à nouveau,
– débouter Mme [F] de sa demande en nullité des contrats de vente et de crédit du 22 novembre 2016,
– débouter Mme [F] de sa demande qu’elle lui restitue la somme de 33 891 euros,
– débouter Mme [F] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement du prêteur de deniers à son devoir de conseil et de mise en garde,
Vu les articles 910-4 et 954 du code de procédure civile,
– déclarer irrecevable la demande de Mme [F] en résolution des contrats de vente et de crédit à titre infiniment subsidiaire,
En conséquence,
– condamner Mme [F] à lui payer la somme de 33 677,03 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,83 % à compter du 8 avril 2019 et jusqu’à parfait paiement,
A titre subsidiaire, si la cour venait à confirmer la nullité du contrat de vente et par voie de conséquence celle du contrat de crédit du 22 novembre 2016,
– confirmer le jugement en ce qu’il a retenu son absence de faute dans l’octroi du crédit et la mise à disposition des fonds,
En conséquence,
– condamner Mme [F] à lui payer à la concluante la somme de 31 871,00 euros avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,
A titre infiniment subsidiaire, si la Cour venait à considérer qu’elle a commis une faute dans le déblocage des fonds,
– ordonner que la nullité du contrat de crédit soit conditionnée à l’exécution par Mme [F] de son obligation de restitution du pack solaire photovoltaïque comprenant les 18 panneaux photovoltaïques et le ballon thermodynamique entre les mains de la société Green Solution Energie,
En tout état de cause,
– condamner Mme [F] à lui payer la somme 1 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [F] aux entiers dépens de première instance et d’appel par application de l’article 699 du code de procédure civile, dont le recouvrement sera effectué par la SELAS DLDA avocats représentée par Me Beaujard, avocat au Barreau des Hauts-de-Seine.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 22 mars 2024, la société Green Solution Energie, intimée, demande à la cour de :
– la recevoir en son appel incident, et la déclarer bien fondée,
En conséquence,
– infirmer le jugement du tribunal de proximité de Dreux du 25 octobre 2022 :
*en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente du 22 novembre 2016 qu’elle a conclu avec Mme [F], pour non respect des dispositions du code de la consommation,
*en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de crédit souscrit entre Mme [F] et la société BNP Paribas Personal Finance pour un montant de 33 677,03 euros,
*en ce qu’il a dit qu’il lui appartiendra, de mettre en ‘uvre la dépose et l’enlèvement des matériels visés par le bon de commande litigieux,
*en ce qu’il a dit qu’à défaut de reprise dans un délai de trois mois suivant la signification du jugement, Mme [F] pourra librement disposer du matériel installé,
Statuant de nouveau,
– déclarer irrecevable la demande de Mme [F] tendant à faire prononcer la résolution du contrat principal souscrit auprès d’elle et, par voie de conséquence, de celle du contrat de crédit affecté souscrit auprès de la société BNP Paribas Personal Finance,
– débouter Mme [F] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
Si par extraordinaire l’annulation ou la résolution des contrats était prononcée, et si la restitution du ballon thermodynamique s’avérait impossible, faute de justification par Mme [F] de la conservation en bon état du matériel,
– condamner Mme [F] au paiement de la somme de 12 000 euros au titre du ballon thermodynamique,
En tout état de cause
– condamner Mme [F] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Me Baudoin de Santi.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 26 mars 2024.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
I) Sur la demande de nullité des contrats de vente et de crédit affecté
Moyens des parties
Mme [F] conclut à la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a annulé les contrats de vente et de crédit affecté en développant les moyens suivants :
– le bon de commande ne mentionne pas les caractéristiques essentielles du bien : poids, surface et dimensions des panneaux, poids et dimensions du ballon, les démarches administratives prises en charge ne sont pas détaillées, le prix mentionné est un prix global et il n’est pas distingué entre le prix des panneaux et celui du ballon alors qu’il s’agit de deux équipements certes complémentaires mais différents et qui peuvent être vendus séparément, le délai d’exécution des travaux n’est pas indiqué de manière suffisamment précise, la période pendant laquelle les pièces détachées sont disponibles n’est pas indiquée, non plus que les coordonnées du médiateur de la consommation, de l’assureur décennal et de responsabilité civile de la société venderesse,
– elle n’a jamais confirmé le bon de commande irrégulier ni eu l’intention de réparer le vice affectant le contrat principal, dans la mesure où il n’est pas établi qu’elle ait eu connaissance de ces irrégularités,
– la nullité du contrat de vente doit entraîner la condamnation de la venderesse à lui restituer le prix de vente, soit la somme de 33 891 euros,
– à titre subsidiaire, le contrat de vente doit être annulé pour vice du consentement, parce qu’elle n’a pas été renseignée, préalablement à la vente, sur les caractéristiques et les performances des produits vendus et qu’elle a été trompée sur la rentabilité de l’opération qui, financièrement ne devait rien lui coûter, le site internet de la société précisant que l’énergie photovoltaïque est gratuite et que l’installation du ballon thermodynamique permettra de diviser par trois la facture d’eau chaude, le bon de commande lui-même mentionnant dans la désignation du produit une auto-consommation et une revente en surplus, et la simulation qui lui a été remise au moment de la signature du bon de commande présentant l’opération comme rentable,
– à titre infiniment subsidiaire, la résolution du contrat de vente doit être prononcée sur le fondement des articles 1224 et 1231-1 du code civil, les économies d’énergie promises n’ayant jamais été obtenues et le ballon thermodynamique ne fonctionnant pas correctement, si bien qu’elle a dû installer, le 27 septembre 2021, un nouveau ballon d’eau chaude,
La société Green Solution Energie conclut à l’infirmation du jugement déféré en ce qu’il a annulé le contrat de vente en développant les moyens suivants :
– le bon de commande fait apparaître les informations relatives aux caractéristiques essentielles de l’installation photovoltaïque choisie : puissance et marque des panneaux et du ballon d’eau chaude, le poids et la surface des panneaux n’étant pas des éléments déterminants du consentement des acheteurs,
– les conditions générales du contrat de vente détaillent les démarches administratives prise en charge par la venderesse,
– le code de la consommation n’exige pas que soit mentionné le prix de chaque élément composant l’installation, étant précisé que l’installation acquise fonctionne comme un tout et que le ballon d’eau chaude fonctionne grâce à l’électricité fournie par les panneaux,
– le bon de commande opère une distinction entre le délai de livraison, le délai d’installation et les délais de raccordement et de mise en service et Mme [F] savait que l’installation interviendrait dans les six mois de la signature du bon de commande, aucun engagement ne pouvant être pris sur les délais de raccordement qui dépendent de sociétés tierces,
– les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande sont parfaitement lisibles,
– Mme [F] était informée des assurances souscrites par la venderesse, les conditions générales comportant un article intitulé ‘ Garantie responsabilité’ et la facture précisant les coordonnées de son assureur décennal,
– l’information sur la durée de disponibilité des pièces détachées n’est pas exigée par les textes à peine de nullité du contrat,
– les conditions générales de vente informent le client qu’il peut recourir à une médiation conventionnelle et à tout mode alternatif de règlement des différends,
– aucune nullité du contrat n’est encourue pour dol, qui doit être prouvé et ne se présume pas, Mme [F] ne rapportant pas la preuve de l’existence de manoeuvres dolosives, aucun document contractuel ne faisant état d’un auto-financement de l’installation, dont le rendement ne dépend pas seulement des caractéristiques techniques mais également des aléas climatiques sur lesquels elle n’a aucune prise ; la simulation est fournie à titre indicatif et n’a pas de valeur contractuelle comme il est précisé sur le document ; Mme [F] a réalisé des économies d’énergie contrairement à ce qu’elle prétend et elle se garde de verser aux débats les factures de revente d’électricité,
– si la cour venait à considérer que le contrat de vente est entaché d’une nullité relative, elle considérerait que Mme [F] a manifesté sa volonté de confirmer le bon de commande, en laissant la venderesse installer le matériel, en réceptionnant l’installation, en autorisant le déblocage des fonds et en utilisant l’installation et Mme [F] était informée par les conditions générales de vente des irrégularités affectant le bon de commande,
– la demande en résolution du contrat est irrecevable au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile, pour n’avoir pas été formée dans les premières conclusions d’appelant ; elle est, au surplus, mal fondée, au visa de l’article 1224 du code civil, aucun manquement ne pouvant lui être reproché, la consommation d’électricité de Mme [F] ayant diminué, et le dysfonctionnement allégué du ballon d’eau chaude n’étant pas établi.
La société BNP Paribas Personal Finance conclut au mal fondé de la demande de nullité du contrat de vente, motif pris de ce que les caractéristiques essentielles des biens cédés sont mentionnées sur le bon de commande litigieux, ainsi que le coût total de l’acquisition et les modalités de financement de l’opération, de sorte que le bon de commande litigieux respecte les prescriptions des articles L. 121-18 et suivants, devenus l’article L.221-9 et suivants du code de la consommation.
Elle souligne, par ailleurs, que les nullités relatives du bon de commande ont été confirmées par l’exécution volontaire du contrat et que Mme [F], dont la consommation d’électricité a baissé après l’installation du matériel acquis, ne saurait invoquer utilement l’absence d’économie d’énergie aux fins d’obtenir la nullité du contrat de vente, non plus que le dysfonctionnement du ballon thermodynamique, dès lors que ce dysfonctionnement n’est intervenu que deux ans après la livraison du matériel et qu’il n’est pas établi que Mme [F] ait été contrainte de procéder au remplacement du ballon d’eau chaude.
Enfin, la banque fait valoir que la demande de résolution des contrats de vente et de crédit est irrecevable pour n’avoir pas été formée dans les premières conclusions d’appelante de Mme [F].
Réponse de la cour
A titre liminaire, la cour constate que :
– le contrat de vente souscrit le 22 novembre 2016 est soumis aux dispositions du code de la consommation, dès lors qu’il a été conclu dans le cadre d’un démarchage à domicile est soumis aux dispositions en leur version postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016,
– le contrat de crédit affecté conclu le même jour est soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, de sorte qu’il sera fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016,
– il convient de faire application des dispositions du code civil en leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats.
Les dispositions de l’article L221-9 du code de la consommation, prévues à peine de nullité du contrat en application de l’article L242 du même code, énoncent que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.
Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5.
(…) Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.
Aux termes des dispositions de l’article L. 221-5 du code de la consommation, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, notamment les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.
L’article L.111-1 du même code dispose qu’avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
– Les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du support de communication utilisé et du bien ou service concerné ;
– Le prix du bien ou du service, en application des articles L. 112-1 à L. 112-4 ;
– En l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ;
– Les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ;
– La possibilité de recourir à un médiateur de la consommation dans les conditions prévues au titre Ier du livre VI.
La liste et le contenu précis de ces informations sont fixés à l’article R.111-1 du même code.
En l’espèce, le bon de commande en litige signé par Mme [F] porte sur un pack ‘GSE18″ ‘GSE AIR SYSTEM’ comportant : 18 panneaux photovoltaïques, un onduleur, un kit GSE INTEGRATION, un boîtier DC, un câblage, une installation, un raccordement.
Le bon de commande précise la marque des panneaux – Solarworld – la puissance de chaque panneau – 2, 85 wc – la puissance totale de l’installation – 5,13 Kwc – la marque de l’onduleur – Enphase – la marque et les caractéristiques du ballon thermodynamique – GSE Thermosystem d’une capacité de 255 litres – et indique qu’un pack LCD est offert.
Le bon de commande litigieux précise, en outre, que le matériel est acquis moyennant un prix de 33 891 euros TTC, financé par l’intermédiaire de la banque Cetelem auprès de laquelle un contrat de crédit de 33 891 euros a été signé le même jour, et s’agissant de la livraison que ‘ la visite du technicien interviendra au plus tard dans les deux mois de la signature du bon de commande que la livraison des produits interviendra dans les trois mois de la pré- visite du technicien, que l’installation des produits sera réalisée : option 1 entre le 15ème et le 30ème jour suivant la livraison des produits (stockage des produits et transfert des risques chez le client) option 2 le jour de la livraison des produits et que s’agissant du délai de raccordement, SVH Energie s’engage à adresser la demande de raccordement auprès D’ERDF et/ou des régies d’électricité dès réception du récépissé de la déclaration préalable de travaux et à procéder au règlement du devis. Une fois les travaux de raccordement de l’installation réalisés, la mise en service pourra intervenir dans les délais fixés par ERDF et/ou les régies d’électricité’.
Contrairement à ce que soutient Mme [F], le bon de commande décrit de manière suffisante les caractéristiques essentielles des biens vendus et en particulier des panneaux photovoltaïques.
Le descriptif des biens vendus permettait à l’acheteuse de comparer utilement les produits proposés avec d’autres produits présents sur le marché. Il n’est pas caractérisé in concreto en quoi l’absence du poids, de la taille ou de la surface des panneaux était de nature à affecter la compréhension par l’acquéreur de l’objet du contrat. Aucune clause du contrat ne permet de dire que la société venderesse s’est engagée contractuellement en termes de rendement, de capacité de production et de performance.
Il n’est, en effet, pas étayé, au-delà de considérations générales, en quoi la mention du modèle, des références, de la dimension, du poids, de l’aspect des panneaux, du type de cellules, du modèle, des références, de la performance, de la dimension, du poids de l’onduleur ainsi que de l’ensemble des autres matériels y compris leur marque pouvaient constituer, in concreto, des caractéristiques essentielles du produit au sens de l’article précité, alors que la description du produit vendu est suffisamment détaillée au regard des exigences textuelles. Il en est de même des modalités de pose, de l’impact visuel, de l’orientation des panneaux ou de leur inclinaison. Le vendeur ne peut en aucun cas s’engager sur un délai de mise en service puisque le raccordement au réseau électrique ne dépend pas de lui.
Il est observé que, contrairement à ce que soutient Mme [F], le bon de commande produit en original est parfaitement lisible qu’il s’agisse des conditions particulières ou des conditions générales de vente figurant en son verso.
En vertu de l’article L. 211-1 du code de la consommation applicable à l’espèce, les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible.
En l’espèce, la typographie est conforme à ces dispositions en ce que les clauses sont rédigées en lettres de couleur grise sur fond blanc dans une présentation comprenant notamment des titres, des numéros et certains passages en gras permettant ainsi de repérer l’architecture du contrat, étant précisé que la disposition de l’article R. 312-10 du code de la consommation prescrivant des caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit ne s’applique pas aux contrats de vente mais aux contrats de crédit.
Le coût total de la commande est bien précisé sans que le défaut de précision du coût unitaire des matériels, du ballon thermodynamique et de la main d’oeuvre ne soit une cause de nullité du contrat.
En effet, l’article L.111-1 du code de la consommation n’impose que la mention d’un prix global; ce texte n’impose pas que le prix unitaire de chaque équipement soit mentionné. En outre, la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit qu’il ressort du libellé de l’ article 7, § 4, sous c, de la directive 2005/29/CE du Parlement et du Conseil du 11 mai 2005, dont l’ article L. 121-1, II, 3° du code précité, devenu L. 121-3, 3°, en vertu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, est la transposition en droit interne, qu’est considéré comme une information substantielle le prix d’un produit proposé à la vente, c’est-à-dire le prix global du produit, et non le prix de chacun de ses éléments, et qu’il en découle que cette disposition fait obligation au professionnel d’indiquer au consommateur le seul prix global du produit concerné.
S’agissant des modalités d’exécution, il est prévu une pré- visite du technicien dans les deux mois à compter de la signature du bon de commande et une livraison des produits dans les trois mois de la pré- visite du technicien. Ces mentions suffisent à répondre aux exigences de l’article L. 111-1, 3° précité, dès lors que le délai mentionné n’est pas un délai global, en ce qu’il est distingué entre le délai de livraison, celui de pose des modules et la réalisation des prestations à caractère administratif, de sorte qu’aucune annulation n’est encourue de ce chef, étant relevé que s’agissant du délai de réalisation du raccordement, il ne peut être reproché au vendeur de ne pas s’engager sur un tel délai, dès lors que le raccordement au réseau électrique dépend d’un tiers, la société ERDF ou les régies d’électricité.
Sont rappelées dans les conditions générales de vente, les garanties légales et notamment la garantie décennale, ainsi que la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation en cas de litige avec le vendeur, ce qui suffit à satisfaire aux prescriptions de l’article L.111-1 du code de la consommation.
Aucun texte n’impose, en effet, que les coordonnées de l’assureur professionnel figurent sur le bon de commande.
L’article R.111-2 du code de la consommation prévoit que cette information est mise à la disposition du consommateur par le professionnel.
Il ne peut donc y avoir lieu à annulation du bon de commande de ce chef.
Mme [F] fait, en outre, valoir qu’elle n’a eu aucune information sur la période pendant laquelle les pièces détachées des matériels seraient disponibles sur le marché comme exigé par l’article L.111-4 du code de la consommation.
Aux termes de l’article L.111-4 ancien du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, le fabricant ou l’importateur de biens meubles informe le vendeur professionnel de la période pendant laquelle ou de la date jusqu’à laquelle les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens sont disponibles sur le marché. Cette information est délivrée obligatoirement au consommateur par le vendeur de manière lisible avant la conclusion du contrat et confirmée par écrit lors de l’achat du bien.
Dès lors qu’il a indiqué la période ou la date mentionnées au premier alinéa, le fabricant ou l’importateur fournit obligatoirement, dans un délai de deux mois, aux vendeurs professionnels ou aux réparateurs, agréés ou non, qui le demandent les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus.
L’article 2 du décret 2014-1482 du 9 décembre 2014 indique que l’obligation d’information n’est applicable qu’aux seuls biens mis sur le marché à compter du 1er mars 2015.
Ces obligations d’information à l’égard du vendeur ne reposent sur le fabricant ou l’importateur que dès lors que celui-ci s’est engagé à fournir les pièces détachées.
Il n’est pas établi en l’espèce que le fabricant ou l’importateur avait la volonté de fournir les pièces détachées ni même d’ailleurs que le matériel vendu avait été mis sur le marché postérieurement au 1er mars 2015.
La preuve d’un manquement du vendeur à son obligation d’information à ce titre n’est donc pas rapportée et il s’ensuit que l’absence d’indication de la durée ou de la date durant laquelle les pièces détachées indispensables à l’utilisation des biens vendus seront disponibles sur le marché ne peut être sanctionnée par la nullité du bon de commande.
Il résulte de ce qui précède que la demande d’annulation des contrats de vente et de crédit n’est pas fondée et que le jugement ayant prononcé cette nullité en raison des irrégularités affectant le bon de commande doit être infirmé.
Mme [F] sollicite, par ailleurs et à titre subsidiaire, la nullité des contrats de vente et de crédits affectés sur le fondement du dol.
Selon l’article 1130 du code civil, dans sa rédaction applicable aux contrats, l’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes. Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné.
Aux termes de l’article 1131 du même code, les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
L’article 1137 du même code définit le dol par le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manoeuvres ou des mensonges ou encore par dissimulation intentionnelle par l’un des cocontractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre.
Le dol ne se présume pas et doit être prouvé.
Le moyen selon lequel le dol par réticence serait caractérisé par un défaut d’information quant aux caractéristiques essentielles de l’installation, l’imprécision du bon de commande quant aux délais de livraison, le caractère mensonger des éléments relatifs à la garantie du matériel, les lacunes du bon de commande quant aux modalités de financement, le caractère incomplet des informations relatives au droit de rétractation, est inopérant pour les motifs indiqués ci-avant.
Mme [F] soutient, en outre, que les manoeuvres dolosives résulteraient des informations mensongères sur la rentabilité de l’installation et notamment celles figurant sur la simulation qui lui a été remise par la venderesse et sur le site internet de cette dernière.
Il n’est toutefois pas démontré que le commercial de la société venderesse ait fait état de perspectives de rendement chiffrées qu’il savait fallacieuses ni que la société se serait engagée sur une quelconque rentabilité de l’installation ni sur la performance de l’installation photovoltaïque objet du contrat.
Le bon de commande ne contient aucun engagement à ce titre et le document intitulé ‘Simulation’ indique clairement qu’elle (la simulation) ‘ n’est fournie qu’à titre indicatif et ne revêt aucun caractère contractuel’.
Mme [F], au reste, ne démontre pas que cette simulation serait erronée, faute de produire une expertise probante sur la rentabilité de son installation établie sur sa durée de vie complète et les extraits du site internet de la société Green Solution Energie, produits par Mme [F], ne contiennent aucune promesse d’auto-financement.
L’installation de Mme [F] a été raccordée en auto-consommation et revente du surplus d’électricité et cette installation fonctionne.
Les factures versées aux débats par Mme [F] démontrent que, contrairement à ce qu’elle soutient, l’installation lui a permis de réaliser une économie d’énergie, sa consommation étant passée de 18 852 kwh, en 2016, à 12 132 kwh, en 2020, après la mise en place de l’installation.
Ne sont démontrés, en l’espèce, ni l’élément matériel du dol, à savoir l’existence de manoeuvres dolosives, ni l’élément intentionnel du dol, c’est-à-dire le fait d’avoir agi sciemment en vue d’induire en erreur Mme [F], ni même l’élément déterminant du dol, à savoir que Mme [F] n’eût point contracté, si les matériels acquis lui avaient été présentés sous un jour différent.
Il n’a donc pas lieu à annulation du contrat de vente sur le fondement d’un dol ni à annulation du contrat de crédit de plein droit sur le fondement de l’article L. 312-55 du code de la consommation.
À titre infiniment subsidiaire, Mme [F] demande à la cour de prononcer la résolution des contrats des contrats de vente et de crédit affecté, pour manquement des cocontractants à leurs obligations.
La venderesse et la banque concluent de concert à l’irrecevabilité de cette demande au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile.
L’article 910-4° du code de procédure civile énonce qu’« à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.
Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 902, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait. ».
Au cas d’espèce, la demande de résolution des contrats formée par Mme [F] à titre infiniment subsidiaire ne figurait pas dans ses premières conclusions d’appelantes, alors même que cette demande n’est pas destinée à répliquer aux conclusions et pièces adverses ni à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
La demande sera, en conséquence, déclarée irrecevable.
Il résulte de ce qui précède que Mme [F] sera déboutée de ses demandes en annulation des contrats de vente et de crédit affecté, et, subséquemment, de la demande en restitution de la totalité du capital emprunté soit la somme de 33 891 euros, dirigée contre la société Green Solution Energie.
Faute d’annulation du contrat de vente, Mme [F] sera pareillement déboutée de ses autres demandes indemnitaires dirigées contre la société venderesse : 3 000 euros en réparation du préjudice moral, 4 000 euros en réparation du préjudice de jouissance.
III) Sur la responsabilité de la société BNP Paribas Personal Finance et les demandes indemnitaires de Mme [F]
Moyens des parties
Mme [F] expose que la banque a engagé sa responsabilité à son égard en finançant une opération nulle et en libérant hâtivement les fonds avant l’achèvement de l’installation sur le fondement d’une simple attestation de livraison qui ne lui permettait pas de le faire.
Elle fait également grief à la banque de n’avoir pas respecté les dispositions de l’article R.312-10 du code de la consommation, ce dont il résulte que l’offre de crédit est irrégulière, et d’avoir manqué à son devoir de conseil et de mise en garde.
Elle fait valoir que cette dernière faute lui a fait perdre une chance de ne pas contracter.
Elle sollicite, en conséquence, la condamnation de l’établissement bancaire à lui payer une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice subi.
La société BNP Paribas Personal Finance réplique qu’elle n’a commis aucune faute dans l’exécution de ses obligations contractuelles, dès lors, qu’étant un tiers par rapport au vendeur, il ne lui appartenait pas de vérifier la régularité du bon de commande, dès lors qu’elle n’a procédé à la libération des fonds qu’après avoir reçu la preuve de la livraison, conforme au bon de commande, des biens acquis, que l’accord de l’acquéreur exonère l’établissement de crédit de toute responsabilité dans le versement des fonds, et que Mme [F] ne justifie, en outre, d’aucun manquement de la banque à son devoir de conseil et de mise en garde.
Réponse de la cour
Les motifs qui précèdent suffisent à écarter les griefs émis par Mme [F] à l’encontre de la société BNP Paribas Personal Finance au motif que celle-ci aurait commis une faute en finançant un contrat nul.
En revanche, l’exécution du contrat de crédit ne fait pas obstacle à ce que les emprunteurs recherchent la responsabilité du prêteur dans les obligations spécifiques qui lui incombent dans le cadre d’une opération économique unique.
En application de l’article L. 311-31 du code de la consommation, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation.
Il incombe donc au prêteur de vérifier que l’attestation de fin de travaux qui lui est adressée suffit à déterminer que la prestation promise a été entièrement achevée.
En revanche, il n’appartient pas au prêteur de s’assurer par lui-même de l’exécution des prestations et la banque intimée fait valoir à juste titre qu’elle n’est pas garante de l’exécution du contrat principal.
Il convient par ailleurs de rappeler que si, en application de l’article L. 311-51 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, le prêteur est garant du fait de l’intermédiaire pour ce qui concerne le contrat de crédit, il n’est pas garant des modalités de conclusion et d’exécution du contrat de prestation de services.
En l’espèce, la banque a débloqué les fonds sur le fondement d’un bon de travaux signé par la société venderesse le 29 décembre 2016 attestant de l’installation, sans autre forme de précision et d’un document signé par Mme [F] le 29 décembre 2016, sollicitant le déblocage des fonds, à hauteur de la somme de 33 891 euros.
L’attestation dont s’agit n’a, cependant, pas de force probante, dès lors que, si elle est signée par Mme [F], et datée, elle n’est pas de nature à identifier l’opération financée et ne permet pas de caractériser l’exécution complète du contrat principal, ni l’exécution de sa prestation par la société venderesse, en ce qu’elle ne fait pas mention de l’exécution des démarches administratives mises à la charge de la venderesse par le bon de commande.
En procédant au déblocage des fonds suite à la production d’une attestation qui ne permettait ainsi nullement à la banque de se convaincre de l’exécution complète de l’intégralité des prestations stipulées au contrat principal de vente, la banque a, contrairement à ce qu’elle soutient, commis une faute.
Cependant, Mme [F] ne justifie d’aucun préjudice en lien causal avec cette faute, dès lors qu’il est établi que le raccordement au réseau ERDF a été effectué et que l’installation est opérationnelle et produit de l’électricité, revendue à ERDF, de sorte que la responsabilité de la société BNP Paribas Personal Finance ne peut être engagée.
Mme [F] n’établit pas que le déblocage des fonds ait eu une conséquence dommageable pour elle.
Mme [F] fait également grief à la banque du fait que l’offre de crédit ne respecte pas les prescriptions de l’article R. 312-10 du code de la consommation, en ce que cette offre se borne à mentionner, s’agissant les biens et services financés ‘aérophotovoltaïque et ballon thermodynamique’ sans autre forme de précision et que le numéro du bon de commande n’est pas indiqué.
L’article R. 312-10 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, dispose:
‘ Le contrat de crédit prévu à l’article L. 312-28 est rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à celle du corps huit.
Il comporte de manière claire et lisible, dans l’ordre précisé ci-dessous :
1° L’identité et l’adresse géographique des parties contractantes ainsi que, le cas échéant, l’identité et l’adresse de l’intermédiaire de crédit concerné ;
2° L’encadré mentionné à l’article L. 312-28 qui indique en caractère plus apparents que le reste du contrat, dans l’ordre choisi par le prêteur et à l’exclusion de toute autre information :
a) Le type de crédit ;
b) Le montant total du crédit et les conditions de mise à disposition des fonds ;
c) La durée du contrat de crédit ;
d) Le montant, le nombre et la périodicité des échéances que l’emprunteur doit verser et, le cas échéant, l’ordre dans lequel les échéances seront affectées aux différents soldes dus fixés à des taux débiteurs différents aux fins du remboursement. Pour les découverts, il est indiqué le montant et la durée de l’autorisation que l’emprunteur doit rembourser ;
e) Le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux, le cas échéant tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d’adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s’appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent sur tous les taux applicables ;
f) Le taux annuel effectif global, et le montant total dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées ;
g) Tous les frais liés à l’exécution du contrat de crédit, dont, le cas échéant, les frais de tenue d’un ou plusieurs comptes destinés à la mise à disposition des fonds ou au paiement des échéances de crédit et les frais liés à l’utilisation d’un instrument de paiement déterminé, ainsi que les conditions dans lesquelles ces frais peuvent être modifiés ;
h) Les sûretés et les assurances exigées, le cas échéant ;
i) Le cas échéant, l’existence de frais de notaire ;
j) En cas de crédit servant à financer l’acquisition de bien ou service déterminés, ce bien ou ce service et son prix au comptant ;
3° Les modalités de remboursement par l’emprunteur ;
4° L’identité et l’adresse des cautions éventuelles ;
5° Une rubrique sur les conditions d’acceptation ou de rétractation du contrat de crédit qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :
a) Les informations relatives aux conditions de conclusion du contrat, dont l’existence et les modalités d’expression de l’agrément de l’emprunteur conformément aux dispositions de l’article L. 312-24 ;
b) L’existence du droit de rétractation, le délai et les conditions d’exercice de ce droit, l’obligation incombant à l’emprunteur conformément aux dispositions de l’article L. 312-26, le montant de l’intérêt journalier servant au calcul des intérêts cumulés mentionnés à ce même article ;
c) Les dispositions de l’article L. 312-25 ;
d) Le cas échéant, les droits de l’emprunteur d’un crédit affecté ainsi que leurs conditions d’exercice ;
6° Une rubrique sur les informations relatives à l’exécution du contrat qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :
a) Les conditions et modalités selon lesquelles l’emprunteur peut rembourser le crédit par anticipation, ainsi que les conditions et le mode de calcul de l’indemnité de remboursement anticipé que le prêteur peut réclamer en application de l’article L. 312-34 ;
b) Les conditions et modalités selon lesquelles l’emprunteur peut résilier le contrat ;
c) Un avertissement relatif aux conséquences d’une défaillance de l’emprunteur ;
d) Les indemnités en cas de retard de paiement et, le cas échéant, les frais d’inexécution que le prêteur peut demander à l’emprunteur en cas de défaillance, ainsi que les modalités d’adaptation et de calcul de ces indemnités et de ces frais ;
e) Pour les opérations de crédit amortissable à durée déterminée, lesquelles excluent la location-vente et la location avec option d’achat, le droit de l’emprunteur de recevoir un relevé sous la forme d’un tableau d’amortissement, à sa demande et sans frais, à tout moment durant toute la durée du contrat ;
7° Une rubrique sur les informations relatives au traitement des litiges, qui mentionne notamment, dans l’ordre choisi par le prêteur :
a) La procédure de la médiation mentionnée à l’article L. 315-1 du code monétaire et financier et ses modalités d’accès ;
b) Les dispositions de l’article R. 312-35 ;
c) L’adresse de l’autorité mentionnée à l’article L. 612-1 du code monétaire et financier et celle de l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation’.
Le moyen, qui manque en fait s’agissant de la désignation des biens financés, est inopérant, le non respect du formalisme imposé par cet article du code de la consommation étant sanctionné par la seule déchéance du droit aux intérêts, qui n’est pas sollicitée au cas d’espèce.
Enfin, il convient de relever que la banque n’était tenue d’aucun devoir de mise en garde et de conseil envers Mme [F] s’agissant de la rentabilité de l’opération, mais uniquement dans sa relation contractuelle avec sa cliente.
Au cas d’espèce, il résulte des pièces versées au dossier que la banque a satisfait aux obligations prescrites par l’article L. 312-6 du code de la consommation qui lui fait obligation de vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations.
Il apparaît, en effet, que Mme [F], au moment de la conclusion du contrat de prêt, a communiqué ses charges et revenus sur une fiche de renseignements et que les informations communiquées ont été corroborées par ses bulletins de paie et avis d’imposition à l’impôt sur le revenu de l’année 2016.
Les revenus de Mme [F] s’élevaient à la somme de 25 847 euros et la consultation du FICP a permis à la banque de constater qu’elle n’avait jamais fait l’objet d’un fichage client.
Mme [F] disposait d’un total de revenus de 2 770 euros par mois, était propriétaire de son logement, indiquait qu’elle était mariée et que le total de ses charges s’élevait à 560 euros.
Le taux d’endettement après octroi du prêt – 560 + 304 / 2770 – ressort à environ 31 %, étant relevé que Mme [F] est propriétaire de son logement et que les capacités financières de l’emprunteur doivent être appréciées, non en considération de ses seuls revenus, mais également de son patrimoine ( Cass. com., 6 déc. 2011, n° 10-24.268), à propos duquel aucune information n’est communiquée à la cour.
Il n’est donc pas démontré que la banque aurait accordé à Mme [F] un prêt disproportionné par rapport à ses capacités de remboursement.
Mme [F] sera, par suite, déboutée de sa demande de dommages et intérêts en indemnisation d’une perte de chance de ne pas contracter et de l’ensemble de ses demandes indemnitaires dirigées contre la banque.
IV) Sur l’appel en garantie de Mme [F] dirigée contre la société Green Solution Energie
Mme [F] demande à la cour de condamner la venderesse à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre au profit de la banque.
Le débouté de Mme [F] de sa demande d’annulation du contrat de vente emporte rejet de cette demande.
V) Sur la créance de la banque
Aux termes de l’article L. 312-39 du code de la consommation, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.
En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.
L’article D. 312-16 dudit code dispose que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.
La société BNP Paribas Personal Finance produit à l’appui de sa demande en paiement notamment:
– l’offre de prêt acceptée et le contrat de réaménagement,
– le tableaux d’amortissement,
– l’historique du prêt,
– la preuve de la consultation du FICP,
– la fiche de dialogue,
– les différentes pièces produites par l’emprunteur pour justifier de son identité et sa solvabilité,
– la notice d’information sur l’assurance,
– la fiche d’informations européennes normalisées en matière de crédit aux consommateurs,
– l’historique du prêt,
– les courriers de mise en demeure des 12 mars et 8 avril 2019,
– un décompte de la créance au 6 septembre 2019, la date de la déchéance du terme remontant au 8 avril 2019.
Il ressort des documents ainsi versés au débats que Mme [F] est redevable envers la société BNP Paribas Personal Finance des sommes suivantes :
– 29 346, 45 euros au titre du capital restant dû,
– 1 982,86 euros au titre des échéances impayées,
soit 31 329, 31 euros.
Il convient donc de condamner Mme [F] au paiement de cette somme qui portera intérêts au taux contractuel de 3, 83 %, à compter du 8 avril 2019, date de la mise en demeure, jusqu’à parfait paiement.
La société BNP Paribas Personal Finance sollicite également la condamnation de Mme [F] à lui verser la somme de 2 347, 72 euros au titre de l’indemnité de résiliation.
Aux termes de l’article 1231-5 du code civil, le juge peut toujours, même d’office, modérer ou réduire la pénalité prévue au contrat si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Il convient pour apprécier, d’office ou en cas de contestation, le montant contractuellement prévu de l’indemnité, de se référer à l’économie globale du contrat et à son équilibre, ainsi qu’à son application, et notamment au montant du crédit, à la durée d’exécution du contrat, au bénéfice déjà retiré par le prêteur, au taux pratiqué et au pourcentage fixé pour l’indemnité.
En l’espèce, compte tenu du montant et de la durée du prêt et du taux d’intérêt pratiqué, l’indemnité contractuelle de 8 % n’apparaît pas manifestement excessive au regard du bénéfice déjà retiré par le prêteur. Par suite, Mme [F] sera condamnée au paiement de la somme de 2347,72 euros qui portera intérêts au taux légal à compter du présent arrêt jusqu’à parfait paiement.
VI) Sur les dépens
Mme [F], qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celles ayant dit que la société BNP Paribas Personal Finance n’a commis aucune faute dans la conclusion du contrat de prêt ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés
Déboute Mme [C] [F] de la totalité de ses demandes dirigées contre les sociétés Green Solution Energie et BNP Paribas Personal Finance ;
Condamne Mme [C] [F] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance les sommes suivantes :
– 31 329, 31 euros avec intérêts au taux contractuel de 3, 83 %, à compter du 8 avril 2019, date de la mise en demeure, jusqu’à parfait paiement,
– 2 347,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt jusqu’à parfait paiement.
Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne Mme [C] [F] à payer une indemnité de 1 500 euros à la société BNP Paribas Personal Finance et une indemnité de 1 500 euros à la société Green Solution Energie ;
Condamne Mme [C] [F] aux dépens de première instance et d’appel et dit que les dépens d’appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par la société DLDA Avocats représentée par Me Jack Beaujard, et par Me Baudoin de Santi, qui en ont fait la demande.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Céline KOC Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, Le président,