Responsabilité et Expertise Technique dans le Cadre des Travaux de Construction

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Responsabilité et Expertise Technique dans le Cadre des Travaux de Construction

Le syndicat des copropriétaires a engagé la société Aristot pour un diagnostic et des travaux de remodelage de sa centrale de production d’eau chaude sanitaire, avec un contrat initial de 18 400 € HT, suivi d’un contrat de 143 000 € TTC pour les travaux. La réception des travaux a eu lieu le 6 avril 2016. D’autres travaux ont été confiés à Protherm et Era 94, ainsi qu’un contrat d’entretien avec Idex Energies. Des désordres dans la production d’eau chaude ont été constatés, entraînant la nomination d’un expert judiciaire. En juin 2020, le syndicat a cité plusieurs sociétés, dont Aristot et Idex Energies, devant le tribunal, demandant des indemnités pour les travaux de reprise des désordres et d’autres préjudices financiers. Les sociétés mises en cause ont contesté les demandes, arguant de l’absence de responsabilité et de la nullité du rapport d’expertise. Les différentes parties ont formulé des conclusions et demandes de rejet des prétentions adverses, ainsi que des demandes de condamnation pour frais et dépens. L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 octobre 2023.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

27 août 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
20/04728
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le:

6ème chambre 1ère section

N° RG 20/04728 –
N° Portalis 352J-W-B7E-CSENU

N° MINUTE :

Assignation du :
09 juin 2020

JUGEMENT
rendu le 27 août 2024
DEMANDERESSE

SDC [Adresse 4] ET [Adresse 11] repésenté par son syndic, la SAS FONCIA [Localité 15] RIVE DROITE
[Adresse 2]
[Localité 8]

représenté par Maître Didier SITBON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C2472

DÉFENDERESSES

S.A.S. ARISTOT
[Adresse 1]
[Localité 9]

représentée par Maître Jacques CHEVALIER de la SELAS CHEVALIER – MARTY – PRUVOST Société d’Avocats, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #R0085

Décision du 27 août 2024
6ème chambre 1ère section
N° RG 20/04728 –
N° Portalis 352J-W-B7E-CSENU

S.A. AXA FRANCE IARD assureur de la SAS ARISTOT
[Adresse 3]
[Localité 13]

représentée par Maître Dominique LACAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E490

S.A.S. PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU
[Adresse 5]
[Localité 10]

représentée par Maître Christophe GAGNANT de la SELARL MIELLET & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #L0281

S.A.R.L. ERA 94
[Adresse 6]
[Localité 14]

représentée par Maître Guillaume AKSIL de la SCP LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0293

Société IDEX ENERGIES
[Adresse 7]
[Localité 12]

représentée par Maître Rachel HARZIC de l’AARPI CHOURAQUI – HARZIC – NIEUVIAERT AARPI, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0058

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Céline MECHIN, vice-président
Marie PAPART, vice-président
Clément DELSOL, juge

assisté de Catherine DEHIER, greffier lors de l’audience et de Marie MICHO, greffier lors de la mise à disposition.

DÉBATS

A l’audience du 19 juin 2024 tenue en audience publique devant Clément DELSOL, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Contradictoire
en premier ressort
Décision publique
Prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Céline MECHIN, président et par Marie MICHO greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

En qualité de maître d’ouvrage, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11] a confié à la société Aristot, assurée auprès d’Axa France Iard, une mission de diagnostic, étude et remodelage de sa centrale de production d’eau chaude sanitaire suivant une offre technique et commerciale du 20 février 2015 de 18 400 € Ht soit 20 240 € Ttc.

Par la suite, il a confié à cette même société les travaux de remodelage de sa centrale de production d’eau chaude sanitaire pour un montant global et forfaitaire de 143 000 € Ttc.

Le procès-verbal de réception date du 06 avril 2016.

Concomitamment, le maître d’ouvrage a confié à la société Protherm la réalisation de travaux de réparation de résistance d’un réchauffeur du bâtiment C suivant un ordre de service du 1er mars 2016 ainsi qu’à la société Era 94 des travaux sur transfo d’isolement et dépôt et curage des armoires électrique et recréation du schéma de l’armoire suivant des factures du 24 février et du 31 mai 2016.

Par la suite, le maître d’ouvrage a conclu un contrat d’entretien de la production ECS avec la société Idex Energies le 25 mars 2016.

Divers désordres affectant la production d’eau chaude ont été constatés.

Monsieur [Z] [H], expert mandaté par le maître d’ouvrage, a établi un rapport amiable le 21 mars 2018.

Par ordonnance de référé du 14 juin 2018 sur assignations délivrées par le maître d’ouvrage le 04 et 05 avril 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a désigné Monsieur [J] [L] en qualité d’expert judiciaire au contradictoire de tous les défendeurs. Il a déposé son rapport définitif le 15 février 2020.

Par actes d’huissier de justice délivrés le 09 et 10 juin 2020, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11] a fait citer les sociétés Aristot, Axa France Iard en qualité d’assureur de cette dernière, Protherm Société d’Exploitation des Etablissements Bredeau, Era 94 et Idex Energies devant le tribunal judiciaire de Paris. Elle sollicitait notamment leur condamnation in solidum à lui payer 118 000 € Ttc au titre des travaux de reprise des désordres actualisé sur l’indice BT01, 10 % de cette somme au titre des honoraires d’architecte pour la maîtrise d’œuvre des travaux de reprise, 31 180 € Ttc au titre du préjudice financier, 20 188 € Ttc au titre des frais et honoraires du BET [H] pour les conseils techniques, 10 992 € Ttc au titre de la réalisation de l’étude et 20 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi que les dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire et dont distraction à l’avocat, avec l’exécution provisoire.

Par conclusions n°4 notifiées par voie électronique le 06 septembre 2023,le syndicat des copropriétaires forme les prétentions suivantes :
« Vu, notamment, les articles 1792, 1792-1, 1792-2 et 1792-3 et suivants du Code Civil,
Vu subsidiairement l’article 1231-1 du Code Civil (ancien article 1147 du Code Civil),
Vu les articles 1101 et 1104 du Code Civil (ancien article 1134 du Code Civil),
Vu l’article L 124-3 du Code des assurances,
Vu les articles 12, 202, 245 et 283 du CPC,
Vu les pièces produites,
Vu le rapport d’expertise judiciaire du 15 février 2020 de Mr [L],
Juger le syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, recevable et bien fondé dans ses demandes.
Entériner le rapport d’expertise judiciaire de Mr [L].
Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU et la SARL ERA 94, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, avec intérêts de droit, la somme de 118.000€ TTC au titre des travaux à entreprendre pour la suppression des désordres, dommages, non conformités, malfaçons, défaillances, sous dimensionnement, dysfonctionnements affectant les installations de la sous station de production et de distribution d’eau chaude sanitaire, somme à actualiser et à parfaire en fonction de l’indice BT01 au jour du jugement.
Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU et la SARL ERA 94, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, avec intérêts de droit, les honoraires de maîtrise d’œuvre sur ces travaux, à savoir 10% H.T. du montant TTC des travaux à entreprendre.

Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU, la SARL ERA 94 et la SAS IDEX ENERGIES, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, avec intérêts de droit, la somme de 31.180€ TTC au titre du préjudice financier, à savoir les frais et honoraires de Mr [H], conseil technique de la copropriété (20.188€ TTC) et les frais et honoraires du BET 3ia pour la réalisation de l’étude demandée par l’expert judiciaire (10.992€ TTC), ces dépenses, engagées au cours des opérations d’expertise judiciaire, ayant permis d’établir le document technique pour permettre la suppression des désordres.
Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU, la SARL ERA 94 et la SAS IDEX ENERGIES, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, avec intérêts de droit, la somme de 20.000€, sauf à parfaire, au titre du préjudice de jouissance subi.
Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU, la SARL ERA 94 et la SAS IDEX ENERGIES, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] et [Adresse 11], représenté par son syndic, la somme de 20.000€, sauf à parfaire, au titre de l’article 700 du CPC.
Débouter toutes les parties adverses, et notamment la SAS ARISTOT et la SAS PROTHERM, de toutes leurs demandes de nullité ou de rejet du rapport d’expertise judiciaire qui sera entériné.
Ecarter des débats les pièces n°6 et 9, à savoir les prétendues « attestations » produites par la SAS ARISTOT, non conformes aux dispositions de l’article 202 du CPC.
Entendre, à titre très subsidiaire, Monsieur [L], expert judiciaire, les parties présentes ou appelées, si par extraordinaire le Tribunal estimait manquer d’éléments d’informations.
Débouter la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU, la SARL ERA 94, et la SAS IDEX ENERGIES de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
Rappeler que l’exécution provisoire est de droit aux termes de l’article 514 du CPC.
Condamner in solidum la SAS ARISTOT, la SA AXA FRANCE IARD, assureur de la SAS ARISTOT, la SAS PROTHERM SOCIETE D’EXPLOITATION DES ETABLISSEMENTS BREDEAU, la SARL ERA 94 et la SAS IDEX ENERGIES, aux entiers dépens, y compris les frais et honoraires de Monsieur [L], expert judiciaire, de 10.500€ TTC, dont distraction pour ceux qui le concerne au profit de Maître Didier SITBON, avocat, conformément à l’article 699 du CPC. »

Par conclusions notifiées par voie électronique le 20 juillet 2023, la société Idex Energies forme les prétentions suivantes :
« Vu l’article 15 du Code de procédure civile,
Vu l’article 56 du Code de procédure civile,
Vu l’article 9 du Code de procédure civile,
Vu l’article 238 du code de procédure civile
Vu l’article 1231-1 du Code Civil
Vu l’article 1310 du Code civil
Il est demandé au Tribunal de :
DECLARER irrecevable l’action et les demandes formées par le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] et [Adresse 11] à l’encontre de la Société IDEX ENERGIES faute pour ce dernier de fonder en fait et en droit ses prétentions.
CONSTATER, DIRE & JUGER que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] [Adresse 11] et la Société ARISTOT ne rapporte pas la preuve d’une quelconque faute de maintenance qui aurait été commise par la société IDEX ENERGIES et qui serait en relation causale directe et certaine avec les désordres et préjudices allégués.
CONSTATER, DIRE & JUGER que Monsieur [L] ne relève aucun défaut d’entretien et aucune erreur qui aurait été commise par IDEX ENERGIES.
CONSTATER, DIRE & JUGER que les désordres allégués, dont l’identification de l’origine a nécessité des investigations techniques, ne pouvaient pas être décelée dans le cadre d’une maintenance normale (mission P2).
CONSTATER, DIRE & JUGER que la Société IDEX ENERGIES n’avait aucune obligation de procéder à un audit ni de se porter garante du bon fonctionnement d’une installation neuve.
CONSTATER, DIRE & JUGER qu’IDEX ENERGIES a parfaitement rempli son devoir de conseil en proposant des travaux au syndicat des copropriétaires lequel ne les a pas commandés.
CONSTATER, DIRE & JUGER que les investigations de Monsieur [H], puis de Monsieur [L], ont permis de mettre en évidence des erreurs de conception et d’exécution relevant exclusivement de la sphère d’intervention de la Société ARISTOT.
CONSTATER, DIRE & JUGER que Monsieur [L], expert judiciaire, a outrepassé la mission qui lui a été confiée en indiquant qu’IDEX ENERGIES n’auraient pas respecté ses obligations et manqué à son devoir de conseil alors que cette appréciation ne peut relever que de la seule compétence du Tribunal.
DIRE & JUGER que la solidarité ne se présume pas et qu’aucune condamnation in solidum ne peut être prononcée à l’encontre d’IDEX ENERGIES.
CONSTATER, DIRE & JUGER que les réclamations pécuniaires du syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] et [Adresse 11] sont excessives et injustifiées tant dans leur principe que dans leur quantum.
En conséquence,
DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] et [Adresse 11] de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre de la société IDEX ENERGIES.
DEBOUTER la Société ARISTOT de l’ensemble de ses demandes formulées à l’encontre de la société IDEX ENERGIES.
Vu l’article 699 du Code de Procédure Civile,
Vu l’article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] et [Adresse 11] et la Société ARISTOT à verser la somme de 5 000 euros chacun à la société IDEX ENERGIES au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] et [Adresse 11] et la Société ARISTOT aux entiers dépens. »

Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 06 avril 2023, la société Era 94 forme les prétentions suivantes :
« Vu les articles 1231-1 et suivants, 1353 et 1792 du Code civil,
Il est demandé à la 6e Chambre- 2 e Section du Tribunal Judiciaire de PARIS de :
JUGER que la société ERA 94 est intervenue pour réaliser des travaux d’électricité consistant en la mise en place d’isolement sur le transfo et en la réalisation d’un curage de l’armoire électrique ;
JUGER que les travaux d’électricité effectués par la société ERA 94 ne sont aucunement à l’origine des désordres affectant le fonctionnement de la sous-station et la distribution d’eau chaude sanitaire de l’immeuble sis [Adresse 4] ;
JUGER que la responsabilité décennale et la responsabilité contractuelle de la société ERA 94 ne sont pas engagées dans l’apparition des désordres affectant la chaufferie de l’immeuble sis [Adresse 4];
En conséquence,
DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] de ses demandes dirigées à l’encontre de la société ERA 94 ;
DEBOUTER toutes parties de toutes demandes, fins et prétentions dirigées à l’encontre de la société ERA 94 ;
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] ou tout succombant à verser à la société ERA 94 la somme de 2.500,00 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
CONDAMNER le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4] ou tout succombant à verser à la société ERA 94 les entiers dépens qui seront directement recouvrés par Maître Guillaume AKSIL – LINCOLN AVOCATS CONSEIL – Avocat à la Cour, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile. »
Par conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 06 avril 2023, la société Aristot forme les prétentions suivantes :
« Vu les articles 238 et 276 du Code de Procédure Civile,
Vu les articles 1792 et 1240 du Code de Procédure Civile,
Prononcer la nullité du rapport d’expertise déposé par Monsieur [L].
En conséquence, dire mal fondée la demande du Syndicat des Copropriétaires de la [Adresse 4] et le débouter de l’intégralité de ses demandes.
Subsidiairement, à défaut de nullité du rapport d’expertise, dire qu’il n’y a pas de désordre ni de non-conformité justifiant la demande du Syndicat des Copropriétaires dirigée contre la Société ARISTOT.
Débouter le Syndicat des Copropriétaires de la [Adresse 4] de l’intégralité de ses demandes.
Très subsidiairement :
Condamner la Société AXA FRANCE IARD à garantir intégralement la Société ARISTOT des condamnations prononcées contre elle.
Condamner in solidum la Société PROTHERM et la Société IDEX à garantir la Société ARISTOT des condamnations éventuellement prononcées contre elle.
Très subsidiairement :
Débouter le Syndicat des Copropriétaires de la [Adresse 4] de sa demande d’indemnisation des préjudices financiers et de troubles de jouissance.
Condamner le Syndicat des Copropriétaires de la [Adresse 4] au paiement de la somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamner la Société AXA FRANCE IARD, la Société PROTHERM et la Société IDEX au paiement d’une somme de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Et les condamner en tous les dépens dont distraction au profit de la SELAS CHEVALIER MARTY PRUVOST. »

Par conclusions récapitulatives II notifiées par voie électronique le 05 janvier 2023, la société Protherm forme les prétentions suivantes :
« Vu les articles 9 -145-237- 275- 276 du CPC,
Vu les articles 1353 et 1240 du Code Civil,
Vu la convention du 8 juin 2009,
A TITRE PRINCIPAL :
DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de l’ensemble de ses demandes en l’absence de preuve rapportée sur la base d’un rapport indigent, non conforme aux règles méthodologiques permettant son exploitation ;
DEBOUTER la société ARISTOT et toutes parties de leurs réclamations à titre principal ou en garantie ;
A TITRE SUBSIDIAIRE :
Dans l’hypothèse où le tribunal estimerait exploitable le rapport, et à l’exclusion de tout fondement sur la base de l’article 1792 et suivants du Code civil :
DEBOUTER le syndicat des copropriétaires faute de preuve d’une imputabilité technique en relation avec le périmètre d’intervention de la concluante, et de lien de causalité rapporté entre désordre revendiqué, non constaté, et une faute ou erreur dans le périmètre d’intervention de la société PROTHERM ;
PLUS SUBSIDIAIREMENT :
CONDAMNER la société ARISTOT et la société IDEX à garantir la société PROTHERM de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre;
DIRE que la part de responsabilité établie de la société concluante dans le cadre de son périmètre d’intervention n’est pas supérieure à 10 % et CONDAMNER les sociétés ARISTOT et IDEX à la garantir du surplus ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
DEBOUTER le syndicat des copropriétaires de ses demandes en réparation de préjudices financiers et préjudices de jouissance ;
Le CONDAMNER au paiement de la somme de 7.000 € sur le fondement de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens. »

Par conclusions notifiées par voie électronique le 06 septembre 2021, la société Axa France Iard forme les prétentions suivantes :
« vu l’article 1353 du Code Civil (ancien 1315), vu le rapport d’expertise, vu la police RC Entreprise souscrite par la société Aristot (CP et CG)
A titre principal,
Dans le cas où le Tribunal entrerait en voie de condamnation à l’encontre de la société Aristot sur le fondement des articles 1792 et svts du Code Civil,
Mettre la concluante purement et simplement hors de cause.
Dans le cas où le Tribunal entrerait en voie de condamnation à l’encontre de la société Aristot sur le fondement de sa responsabilité de droit commun et notamment du contrat d’entreprise,
Rejeter les demandes formées contre la concluante au titre des coûts de reprise des travaux :
118.0000 TTC au titre des travaux à entreprendre.
les honoraires de maîtrise d’oeuvre sur ces travaux, à savoir 10% H.T. du montant TTC des travaux à entreprendre.
Dire infondées les demandes formées au titre de frais financiers, de frais et honoraire de conseils techniques
Rejeter les demandes formées contre la concluante au titre des coûts de reprise des travaux :
A titre très subsidiaire, dans le cas où le Sdc viendrait à justifier devant le Tribunal tout ou partie des préjudices hors coût de reprise de l’installation qu’il invoque dans ses trois dernières demandes vu l’article L 124-3 du Code des Assurances
Dire que dans la police Responsabilité Civile Entreprise n° 3819849204 souscrite par la société Aristot auprès d’Axa France seule la garantie « RC après livraison » « dommage immatériels non consécutifs » plafonnée à 250 000 € avec une franchise de 8 000 € est susceptible de bénéficier à la société Aristot,
Prononcer condamnation contre la concluante dans ces limites. »

Pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à la lecture de leurs écritures en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture date du 19 octobre 2023.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de préciser que les demandes des parties tendant à voire « dire et juger » ou « constater » ne constituent pas nécessairement des prétentions au sens des dispositions des articles 4 et 30 du code de procédure civile dès lors qu’elles ne confèrent pas de droit spécifique à la partie qui en fait la demande. Elles ne feront alors pas l’objet d’une mention au dispositif.

S’agissant de la prétention aux fins d’irrecevabilité formée par la société Idex Energies, il convient de rappeler que le syndicat des copropriétaires mentionne des moyens de fait et de droit dans ses dernières écritures ; que les dispositions de l’article 56 du code de procédure civile invoquées par la société Energies ont pour objet les mentions obligatoires de l’assignation introductive d’instance sanctionnées de nullité pour irrégularité de forme entraînant un grief ; que les demandes en nullité et les fins de non-recevoir relèvent de la compétence exclusive du juge de la mise en état, l’assignation introduction d’instance ayant été délivrée après le 1er janvier 2020. Ainsi, la société Idex Energies est déboutée de sa demande.

I. Les prétentions aux fins de nullité du rapport

L’article 238 du code de procédure civile dispose que le technicien doit donner son avis sur les points pour l’examen desquels il a été commis. Il ne peut répondre à d’autres questions, sauf accord écrit des parties. Il ne doit jamais porter d’appréciations d’ordre juridique.

En l’espèce, la société Aristot affirme que Monsieur [L], expert judiciaire, n’a pas fourni d’avis personnel dans son rapport définitif.

Or, aucune disposition ne sanctionne de nullité l’inobservation des obligations imposées par l’article 238 au technicien commis (n°81-16.593).

Ainsi, la demande en nullité ne peut pas prospérer sur ce fondement.
*
L’article 276 du code de procédure civile dispose que l’expert doit prendre en considération les observations ou réclamations des parties, et, lorsqu’elles sont écrites, les joindre à son avis si les parties le demandent. Toutefois, lorsque l’expert a fixé aux parties un délai pour formuler leurs observations ou réclamations, il n’est pas tenu de prendre en compte celles qui auraient été faites après l’expiration de ce délai, à moins qu’il n’existe une cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fait rapport au juge. Lorsqu’elles sont écrites, les dernières observations ou réclamations des parties doivent rappeler sommairement le contenu de celles qu’elles ont présentées antérieurement. A défaut, elles sont réputées abandonnées par les parties. L’expert doit faire mention, dans son avis, de la suite qu’il aura donnée aux observations ou réclamations présentées.

En l’espèce, en page n°7 de ses dernières écritures, la société Aristot admet que l’expert à répondu à son dernier dire.

Par ailleurs, si la réponse de l’expert lui paraît peu pertinente, techniquement infondée ou inappropriée, excessivement courte ou incomplète, force est de constater que la société Aristot dispose de la possibilité de discuter contradictoirement ses conclusions dans le cadre des débats devant la juridiction, ceci de telle sorte qu’elle ne rapporte la preuve d’aucun grief.

De manière surabondante, il résulte de la lecture du rapport d’expertise judiciaire qu’en page 26, Monsieur [L] relate le dire récapitulatif de Maître Chevalier pour la société Aristot ; qu’il synthétise son contenu et rappelle les questions qui lui sont soumises ; qu’il rappelle qu’il a fait part de son premier avis technique dans le document de synthèse et qu’il expose son avis final dans le chapitre suivant ; qu’il indique qu’il n’est pas maître d’œuvre et qu’il n’est pas habilité à répondre à des questions techniques ; qu’en page 28 sous l’intitulé « Relever et décrire les désordres […] », l’expert judiciaire indique « certains logements de la résidence, situés en extrémité, manquent d’eau chaude sanitaire et l’analyse de l’eau fait apparaître la présence de légionelle » ; qu’il en résulte qu’il a personnellement constaté le désordre ; et que l’expert judiciaire a contradictoirement réalisé sa mission, motif pour lequel il se réapproprie et critique également les travaux de Monsieur [H] lequel vise expressément le DTU60.11.

En conséquence, la société Aristot est déboutée de sa demande en nullité du rapport d’expertise judiciaire.

II. Les demandes en paiement au titre du désordre affectant la production d’eau chaude sanitaire

L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Une telle responsabilité n’a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d’une cause étrangère.

Aux termes de l’article 1792-3 du code civil, les éléments d’équipement dissociables de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans à compter de sa réception.

a. La matérialité et la qualification du désordre

En l’espèce, en page n°26 du rapport d’expertise judiciaire, l’expert judiciaire indique que certains logements de la résidence, situés en extrémité, manquent d’eau chaude sanitaire et que l’analyse de l’eau sanitaire fait apparaître la présence de légionelles.

Ces constatations de l’expert judiciaire sont en corrélation directe avec :
les constatations de Monsieur [H], expert technique amiable mandaté par le syndicat des copropriétaires, dans sa note du 16 juin 2019, le courriel adressé par la société Aristot le 22 janvier 2018 à 16:11 dans lequel elle fait elle-même état de désordres et notamment la production d’eau chaude à 41°C en lieu et place des 50°C constatés au démarrage, de la présence d’un groupe de résistance hors d’usage, d’une fuite de la soupape du réchauffeur du bâtiment A et dans lequel elle indique également sous le titre « 4 responsabilités » qu’il y a des travaux de modifications qui semblent urgents,
et le courrier adressé par le maître d’ouvrage à la société Aristot le 25 janvier 2018.

Ainsi, la matérialité du désordre correspondant au manque d’eau chaude dans les logements de la résidence est établie.

S’agissant de la qualification du désordre, aucune atteinte à la solidité de l’ouvrage n’est établie, celle-ci étant même exclue par l’expert.

Par ailleurs, le syndicat des copropriétaires n’indique pas les éléments suivants lesquels ce désordre rendrait l’ouvrage impropre à sa destination dans la mesure où l’alimentation en eau chaude est insuffisante et non pas inexistante et où il n’est pas établi que la présence de légionelles atteigne un seuil nocif ou dangereux pour l’être humaine, l’expert indiquant seulement que le désordre crée « des troubles de jouissances ».

Ainsi ce désordre n’est pas de nature décennale.

En revanche, ce désordre est de nature biennal en ce qu’il affecte un élément d’équipement, le dispositif de chauffage et de distribution d’eau chaude sanitaire, lequel et dissociable de l’immeuble sans l’endommager, l’atteinte à son bon fonctionnement étant caractérisée par la réalité des désordres susvisés.

En outre, la réception de l’ouvrage date du 06 avril 2016 et l’assignation introductive d’instance délivrée par le syndicat aux défendeurs aux fins de désignation d’un expert date du 4 avril 2018.

En conséquence, le désordre est de nature biennale.

b. La responsabilité des constructeurs

Chacun des responsables d’un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité, sans qu’il y ait lieu de tenir compte du partage des responsabilités entre les divers responsables, qui n’affecte que les rapports réciproques de ces derniers. La responsabilité des intervenants ne peut cependant être recherchée que pour des dommages à la réalisation desquels ils ont concouru, pour des travaux qu’ils ont contribué à réaliser.

En l’espèce, la société Aristot ne conteste pas être intervenue au titre de missions de conception et d’exécution des travaux pour l’intégralité de l’opération de remodelage de la centrale de production d’ECS, ceci de telle sorte que le désordre lui est imputable.

Par ailleurs, la société Protherm est intervenue pour la réalisation de travaux de réparation de résistance d’un réchauffeur du bâtiment C, la fourniture et l’installation d’un détendeur régulateur, le remplacement de 3 vannes arrivée EF, tout ceci au cours des travaux de remodelage de la centrale, ceci de telle sorte que le désordre lui est également imputable.

S’agissant de la société Era 94, elle est intervenue pour des travaux sur transfo d’isolement et dépôt et curage des armoires électrique et recréation du schéma de l’armoire suivant des factures du 24 février et du 31 mai 2016, ceci de telle sorte qu’aucun lien d’imputabilité n’est établi avec la centrale de production d’ECS.

S’agissant de la société Idex Energies, elle est intervenue postérieurement au chantier dans le cadre d’un contrat d’entretien souscrit le 25 mars 2016, ceci de telle sorte qu’aucun lien d’imputabilité n’est établi avec la centrale de production d’ECS.

En conséquence, le syndicat des copropriétaires est débouté des prétentions formées contre les sociétés Era 94 et Idex Energies.

c. Le fondement contractuel

L’article 1231-1 du code civil dispose que le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires, dans ses dernières écritures, se contente de reproduire, sous forme numérisée, les développements de l’expert judiciaire, et ne caractérise ainsi aucune faute à l’encontre des sociétés Era 94 et Idex Energies.

En conséquence, le syndicat des copropriétaires échoue dans la charge de la preuve qui lui incombe et est débouté de l’intégralité des prétentions formées contre les sociétés Era 94 et Idex Energies.

d. La garantie d’Axa France Iard, assureur de la société Aristot

L’article L124-3 du code des assurances dispose que le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

En l’espèce, il est produit aux débats les conditions particulières et générales de la police n°3819849204 souscrite auprès d’Axa France Iard dont l’article 4.11 en page n°9 des premières exclut des garanties les dommages de la nature de ceux visés par les articles 1792 à 1792-6 du code civil, étant précisé que la responsabilité de la société Aristot est retenue sur le fondement de l’article 1792-3 du code civil.

En conséquence, le syndicat des copropriétaires est débouté de son action directe formée contre la société Axa France Iard.

e. Le préjudice

De jurisprudence constante en application du principe de réparation intégrale du préjudice, la victime doit être replacée dans une situation aussi proche que possible de la situation qui aurait été la sienne si le dommage ne s’était pas produit, les dommages et intérêts alloués devant réparer le préjudice subi sans qu’il en résulte pour lui ni perte, ni profit.

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires sera débouté des prétentions formées au titre du préjudice de jouissance subi par chacun des copropriétaires dans la mesure où il résulte des travaux de l’expert judiciaire ainsi que de ses propres écritures que tous les copropriétaires n’ont pas subi le trouble de
jouissance de manière identique, le désordre affectant surtout les locaux les plus éloignés de la centrale.

S’agissant du préjudice matériel, le syndicat des copropriétaires sollicite le montant de 118 000 € Ttc retenu par l’expert en page n°31 de son rapport définitif, après avoir validé le devis de la société Ceprim du 30 septembre 2019 de 130 635,33 € dont il indique qu’il « prévoit bien les remplacements et les prestations nécessaires à la mise en conformité de la sous-station », lequel est produit aux débats en pièce n°53. Ce montant n’apparaît pas disproportionné eu égard au montant du marché des travaux litigieux de 143 000 € Ttc conformément à ce qui est mentionné dans le procès-verbal de réception produit en pièce n°13. Au surplus, ce montant n’est pas contesté par les défendeurs.

Enfin, s’agissant du préjudice financier de 31 180 € Ttc correspondant à 20 188 € Ttc au titre de l’intervention de Monsieur [H] en qualité de conseil technique des copropriétaires et de 10 992 € Ttc au titre de l’intervention du bureau d’études 3ia sollicitée par l’expert judiciaire, il convient de la retenir en totalité, les travaux de ces intervenants ayant été utiles à la résolution du litige et à l’issue des opérations d’expertise judiciaire.

En conséquence, les sociétés Aristot et Protherme sont condamnées in solidum, ayant participé à la survenance du même dommage, à payer 118 000 € Ttc augmenté de 10 % au titre des honoraires de maîtrise d’oeuvre au titre du préjudice matériel et 31 180 € Ttc au titre du préjudice financier au syndicat des copropriétaires.

f. La contribution à la dette et la garantie de la société Axa France Iard

Il est de principe que dans leurs relations entre eux, les responsables ne peuvent exercer de recours qu’à proportion de leurs fautes respectives, sur le fondement des dispositions de l’article 1147 ancien du code civil s’ils sont contractuellement liés ou de l’article 1382 ancien du code civil s’ils ne le sont pas.

Idex Energies
En l’espèce, en page n°33 du rapport définitif, l’expert judiciaire indique que la société Idex Energies a commis une faute correspondant à un manquement à son devoir de conseil en ce qu’elle était chargée d’assurer la maintenance de l’installation et qu’elle n’a pas alerté le syndicat des copropriétaires des dysfonctionnements qu’elle a nécessairement constatés dans le cadre de ses attributions.

Or, aucun élément technique spécifique ne permet de démontrer que la société Idex Energies a commis une faute à l’origine des préjudices susvisés. En effet,
le manquement au devoir de conseil, à le considérer établi, n’est pas à l’origine des désordres affectant la centrale et le réseau ECS.

Ainsi, les prétentions formées contre la société Idex Energies sont écartées.

Axa France Iard
L’article L511-1 I alinéa 1er et IV dispose que la distribution d’assurances ou de réassurances est l’activité qui consiste à fournir des recommandations sur des contrats d’assurance ou de réassurance, à présenter, proposer ou aider à conclure ces contrats ou à réaliser d’autres travaux préparatoires à leur conclusion, ou à contribuer à leur gestion et à leur exécution, notamment en cas de sinistre. Pour l’activité de distribution d’assurances, l’employeur ou mandant est civilement responsable, conformément aux dispositions de l’article 1242 du code civil, du dommage causé par la faute, l’imprudence ou la négligence de ses employés ou mandataires agissant en cette qualité, lesquels sont considérés, pour l’application du présent article, comme des préposés, nonobstant toute convention contraire.

En l’espèce, s’agissant du recours formé par la société Aristot contre son assureur Axa France Iard, il convient de retenir le motif suivant lequel le contrat produit aux débats stipule dans ses conditions particulières « responsabilité civile après livraison des produits ou réception des travaux », ceci de telle sorte que le client, qui n’est pas un spécialiste du droit, pouvait légitimement s’attendre à ce que la police proposée par l’agent général d’Axa France Iard la garantisse au titre des garanties légales obligatoires ainsi qu’au titre des garanties accessoires qui s’y attachent communément et notamment au titre des désordres de l’article 1792-3 du code civil.

Ainsi, la faute de la société Axa France Iard est caractérisée.

Le préjudice correspond à la perte de chance de bénéficier d’une police d’assurance prenant en charge la garantie facultative, par usage accessoire à la garantie obligatoire relative aux désordres de l’article 1792 du code civil, des dommages qui résultent des désordres de l’article 1792-3 du code civil.

Eu égard à la nature de la garantie et aux termes, plafonds, limites et franchises qui auraient éventuellement pu être opposés, il convient de retenir une perte de chance de 50 %.

En conséquence, la société Axa France Iard sera condamnée à garantir la société Aristot à hauteur de 50 % de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris au titre des dépens et frais irrépétibles.

La fixation des parts de responsabilité
En l’espèce, la société Aristot ne conteste pas qu’elle est intervenue dans un premier temps pour établir un diagnostic du remodelage de la centrale de production d’eau chaude, mission à l’issue de laquelle elle a émis une offre commerciale valable jusqu’au 31 juillet 2015 pour laquelle le syndicat des copropriétaires a validé un ordre de service S.346-OSTW75334.

En page n°3 du diagnostic, sous l’intitulé 1.1 Contexte général, il est indiqué que son objet est de « diagnostiquer et prescrire les modifications qui apparaissent nécessaires » étant précisé que « compte-tenu de [son] expérience […] cette société est en mesure d’apporter à cette mission toutes les compétences et garanties attendues par le client ».

En l’espèce, en page n°29 du rapport d’expertise judiciaire, Monsieur [L] indique que les dimensionnements des tuyauteries et matériels et leurs installations et positionnements ne respectent pas les prescriptions des normes, DTU, schémas de principes et documents contractuels correspondant aux travaux. Or, force est de relever que l’expert judiciaire ne précise pas quels sont les normes, DTU, schémas de principes et documents contractuels ni les caractéristiques et les données techniques sur lesquels il fonde son analyse. En effet, le seul paragraphe mettant en cause la société Aristot comme ayant commis une faute est celui susvisé, lequel est reproduit à la lettre près dans les conclusions du rapport définitif en page n°33, ce qui ne permet pas d’établir une faute au stade de la conception des travaux commandée initialement.

Toutefois, le CCTP produit en pièce n°7 par le syndicat des copropriétaires indique en page n°4 sous le titre 1.5.2 Dispositions réglementaires que dans l’étude et l’exécution du marché, il doit être tenu compte des Documents Techniques Unifiées. A ce titre, Monsieur [H], dans son rapport du 30 septembre 2019 produit au cours des opérations d’expertise judiciaire, indique que le DTU 60.11 relatif aux règles de calcul des installations de plomberie sanitaire était applicable. Il ajoute que même en considérant le DTU 60.11 de 2013, la production et les réseaux des distributions d’eau chaude ont été sous-dimensionnés.

Eu égard aux erreurs de conception quant aux caractéristiques techniques du projets imputables à la société Aristot et aux manquements aux règles de l’art imputables à la société Protherme dans les travaux de moindre importance et limitativement énumérés précédemment, il convient de fixer comme suit les parties de responsabilité :
Aristot : 80 %Protherme : 20 %
En conséquence, il conviendra de condamner les parties à se garantir mutuellement au pourcentage fixé en fonction des appels en garantie formés.

III. Les décisions de fin de jugement

a. Actualisation et intérêts

La somme accordée au titre des travaux de reprise de 118 000 € sera actualisée en fonction de l’évolution de l’indice BT01 entre le 15 février 2020 date du dépôt du rapport d’expertise et le présent jugement.

Les intérêts sur les sommes dues, ne courent qu’à compter du présent jugement, qui seul détermine le principe et le montant de la créance, l’article 1231-6 du code civil n’étant applicable que dans l’hypothèse où le principe et le montant de la créance résultent de la loi ou du contrat.

b. Les dépens

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Les sociétés Axa France Iard, Protherme et Aristot succombent et sont condamnées in solidum aux dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire taxés à 10 500 € par ordonnance du 29 avril 2020.

Le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile est accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

c. Les frais irrépétibles

L’article 700 1° du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Les sociétés Axa France Iard, Protherme et Aristot succombent et sont condamnées in solidum aux dépens. L’équité commande donc de les condamner in solidum à payer 10 000,00 € au syndicat des copropriétaires et 2 500 € à la société Era 94 au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de condamner la société Aristot à payer 5 000 € à la société Idex Energies en application des mêmes dispositions.

d. L’exécution provisoire

En application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile. l’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal judiciaire statuant après débat en audience publique par jugement contradictoire en premier ressort et mis à disposition au greffe,

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires des prétentions formées contre les sociétés Axa France Iard, Idex Energies et Era 94 ;

DEBOUTE la société Aristot de sa demande de nullité du rapport d’expertise judiciaire ;

CONDAMNE in solidum les sociétés Aristot et Protherme à payer au syndicat des copropriétaires au titre des désordres affectant la centrale et le réseau de distribution ECS :
118 000 € Ttc augmenté de 10 % au titre des honoraires de maîtrise d’oeuvre au titre du préjudice matériel,31 180 € Ttc au titre du préjudice financier ;
DIT que le montant de 118 000 € sera actualisé en fonction de l’évolution de l’indice BT01 entre le 15 février 2020 date du dépôt du rapport d’expertise et le présent jugement ;

DIT que les sommes précitées porteront intérêt au taux légal à compter du jugement ;

DEBOUTE le syndicat des copropriétaires du surplus de ses prétentions indemnitaires ;

FIXE ainsi les parts de responsabilité :
Aristot : 80 %Protherme : 20 %;
CONDAMNE la société Protherme à garantir la société Aristot à hauteur de 20 % de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris au titre des dépens et frais irrépétibles ;

CONDAMNE la société Aristot à garantir la société Protherme à hauteur de 80 % de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris au titre des dépens et frais irrépétibles ;

CONDAMNE la société Axa France Iard à garantir la société Aristot à hauteur de 50 % de toutes les condamnations prononcées contre elle, y compris au titre des dépens et frais irrépétibles ;

DEBOUTE la société Aristot des prétentions formées contre la société Idex Energies ;

CONDAMNE in solidum les sociétés Axa France Iard, Protherme et Aristot aux dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire taxés à 10 500 € ;

CONDAMNE in solidum les sociétés Axa France Iard, Protherme et Aristot à payer 10 000,00 € au syndicat des copropriétaires et 2 500 € à la société Era 94 au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Aristot à payer 5 000,00 € à la société Idex Energies au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit ;

Fait et jugé à Paris le 27 août 2024

Le greffier Le président


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