Provision accordée pour démolition des ouvrages empiétant sur le fonds voisin

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Provision accordée pour démolition des ouvrages empiétant sur le fonds voisin

Résumé de l’affaire

M. et Mme [D] ont conclu un contrat de maîtrise d’oeuvre pour la construction d’une maison individuelle, mais ont constaté un empiètement sur la parcelle voisine. Après avoir mis en demeure l’architecte de faire cesser les travaux, ils ont fait dresser un procès-verbal d’abandon du chantier. Ils ont ensuite demandé une provision pour le coût de la destruction de l’existant et des frais liés à un sinistre lié à la consommation anormale d’eau. En défense, l’assureur a soutenu que la garantie responsabilité civile professionnelle ne couvrait pas la responsabilité contractuelle de l’architecte. L’affaire a été évoquée en audience, où M. et Mme [D] ont maintenu leurs demandes.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

9 août 2024
Tribunal judiciaire de Versailles
RG
24/00709
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
09 AOUT 2024

N° RG 24/00709 – N° Portalis DB22-W-B7I-R7MW
Code NAC : 54G

DEMANDEURS

Monsieur [E] [D]
né le 17 Avril 1959 à [Localité 5],
demeurant [Adresse 4]

Madame [U] [P] épouse [D]
née le 18 Septembre 1956 à [Localité 9],
demeurant [Adresse 4]

Représentés par Me Typhanie BOURDOT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 644

DEFENDEURS

Monsieur [C] [Y], architecte, entrepreneur individuel, immatriculée sous le n° SIREN 450 794 391, demeurant [Adresse 1]

non comparant, non représenté,

MIC INSURANCE COMPANY, société anonyme, inscrite au R.C.S PARIS sous le n° 885 241 208, dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de son président domicilié en cette qualité audit siège,
ès-qualité d’assureur Responsabilité Décennale et Responsabilité Civile de Monsieur [Y]

Représentée par Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626, avocat postulant et par Me Sandra GRASLIN LATOUR, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L 301, avocat plaidant,

***

Débats tenus à l’audience du : 11 Juin 2024

Nous, Charlotte MASQUART, Vice-Présidente, assistée de Elodie NINEL, Greffière placée,

Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, à l’audience du 11 Juin 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 26 juillet 2024, prorogée au 09 Août 2024, date à laquelle l’ordonnance suivante a été rendue :

EXPOSE DU LITIGE

Le 28 juin 2022, M. et Mme [D] ont conclu un contrat de maîtrise d’oeuvre avec M. [C] [Y], incluant la conception, le dépôt du permis de construire, les formalités administratives et le chiffrage de la construction d’une maison individuelle aux normes RE 202.

Par acte authentique du 28 juin 2023, ils ont acquis une parcelle nue situé [Adresse 2] à [Localité 8] cadastrée [Cadastre 6] et [Cadastre 7] d’une surface de 714 mètres carrés afin d’y réaliser leur projet de construction. Le permis de construire avait été obtenu par acte du 09 mars 2023.

Le 21 avril 2023, ils ont signé un second contrat de maîtrise d’œuvre avec M. [C] [Y] concernant le suivi du chantier pour un montant de 420.000 euros TTC.

Le chantier a été ouvert le 29 juin 2023.

Le 17 juillet 2023 un géomètre expert a constaté un empiètement sur la parcelle voisine de plus de huit centimètres.

Le 18 août 2023, après deux mails des 2 et 11 août 2023, M. et Mme [D] ont mis en demeure M. [Y] de faire cesser les travaux.

La parcelle voisine a été vendue le 17 août 2023.

M. et Mme [D] sont intervenus à l’acte pour reconnaître l’empiètement et s’engager à prendre à leur charge exclusive tous les frais nécessaires à la réparation de cet empiètement.

Le 25 octobre 2023, M. et Mme [D] ont mis en demeure l’architecte de :
-leur transmettre une méthodologie de reprise de l’empiètement, validée par un bureau d’étude structure
-de transmettre l’ensemble des documents nécessaires pour achever le dossier de constitution d’assurance dommage ouvrage
-transmettre tous les éléments relatifs à la gestion du sinistre lié à la consommation anormale d’eau.

Le 20 décembre 2023, M. et Mme [D] ont fait dresser un procès-verbal de constat d’avancement du chantier et d’abandon du chantier.

Le 20 janvier 2024, M. et Mme [D] ont pris attache avec la société LES MAISONS BELLES DEMEURES pour la reprise du chantier, laquelle a refusé cette reprise et estimé les travaux de démolition de l’existant à la somme de 38.160 euros.

Par actes de commissaire de justice délivrés les 14 et 16 mai 2024, M. et Mme [D] ont fait assigner M. [C] [Y] et la SA MIC INSURANCE COMPANY en sa qualité d’assureur responsabilité civile professionnelle aux fins d’obtenir leur condamnation in solidum au paiement :
D’une provision de 38.160 euros TTTC correspondant au coût de la destruction de l’existant,D’une provision de 2007,20 euros TTC correspondant au coût de la facture d’eau D’une somme de 2.800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’affaire a été évoquée à l’audience du 11 juin 2024.

A cette date, M. et Mme [D] ont maintenu leurs demandes

Au soutien de leurs prétentions ils ont exposé que la faute de l’architecte était établie, que la démolition de l’existant ne faisait pas débat, que la provision correspondait uniquement à la somme nécessaire pour faire cesser l’empiètement. Ils ont fait valoir que les contestations soulevées en défense n’étaient pas sérieuses, sans lien avec le débat puisque la responsabilité de l’architecte était engagée en raison de sa faute, que la garantie de l’assurance était mobilisable.

En défense la SA MIC INSURANCE s’est opposé à la demande de provision exposant que la garantie responsabilité civile professionnelle n’avait pas vocation à garantir le responsabilité civile contractuelle de M. [Y] laquelle était exclue des garanties de la société MIC INSURANCE COMPANY.
Elle a soutenu que l’abandon de chantier était exclu des garanties et qu’il n’y avait pas non plus eu de réception du chantier.

La demande de communication du contrat d’assurance responsabilité civile professionnelle en vigueur en 2024 contenue dans les conclusions n’ a pas été soutenue oralement.

M. [Y] n’a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur la demande de provision au titre de la démolition des ouvrages empiétant sur le fonds voisin

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, le Président du Tribunal judiciaire peut, « même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite » ; et « dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable » , « accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ».

En l’espèce les époux [D] ont signé avec M. [Y] deux contrats de maîtrise d’œuvre en exécution desquels il devait concevoir, déposer un permis de construire, chiffrer la construction de la maison individuelle et assurer le suivi du chantier.

Or, il est établi par l’ensemble des pièces du dossier et notamment le courriel de M. [Y] du 19 juillet 2023, le procès-verbal de rétablissement de limites du 1er mars 2024, et l‘acte de vente du 17 août 2023 que les fondations empiètent sur la parcelle voisine de plus de huit centimètres.

La responsabilité de M. [Y], maître d’oeuvre est donc engagée sans aucune contestation sérieuse.
Le seul moyen de faire cesser l’empiètement est la démolition de l’existant.
Les demandeurs produisent un devis à hauteur de 38.160 euros qui n’est contredit par aucune pièce.

La demande de provision dirigée contre M. [Y] ne se heurte à aucune contestation sérieuse. Il sera fait droit à la demande en son encontre.

Les époux [D] ont dirigé leurs demandes également contre la SA MIC INSURANCE COMPANY en sa qualité d’assureur responsabilité civile professionnelle.
Or la SA MIC INSURANCE COMPANY fait valoir que la garantie responsabilité civile professionnelle exclut les conséquences de la responsabilité contractuelle de M. [Y]. Les conditions particulières produites indiquent que « la garantie proposée couvre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile du souscripteur pour les dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers ».
La demande dirigée contre la SA MIC INSURACE COMPANY se heurte donc à une contestation sérieuse qui pour être tranchée nécessite une analyse des clauses du contrat qui excède les compétences du juge des référés.

Il sera dit n’y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur la demande de provision au titre de la fuite d’eau

Les pièces versées aux débats ne permettent pas d’établir avec l’évidence requise en référé la responsabilité de M. [Y] dans la consommation élevée d’eau. Il sera dit n’y avoir lieu à référé sur cette demande.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

L’équité et la situation économique des parties commandent l’application de l’article 700 du code de procédure civile ; Il y a lieu de condamner M. [Y] à payer aux demandeurs la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [Y] sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Nous, Charlotte Masquart,Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Versailles, statuant par ordonnance mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort,

Vu l’article 835 du code de procédure civile,

CONDAMNONS M. [C] [Y] à payer à M. [E] [D] et Mme [U] [D] la somme provisionnelle de 38.160 euros ;

DISONS n’y avoir lieu à référé pour le surplus des demandes ;

CONDAMNONS M. [Y] à payer à M. et Mme [D] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS M. [Y] aux dépens.

Prononcé par mise à disposition au greffe le NEUF AOUT DEUX MIL VINGT QUATRE par Charlotte MASQUART, Vice-Présidente, assistée de Elodie NINEL, Greffière placée, lesquelles ont signé la minute de la présente décision.

LA GREFFIÈRE LA VICE-PRÉSIDENTE
Elodie NINEL Charlotte MASQUART


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