→ Résumé de l’affaireLa société en nom collectif Linkcity grand ouest a réalisé des travaux de rénovation et d’édification d’un ensemble immobilier, qu’elle a confiés à la société Bouygues bâtiment grand ouest. Cette dernière a sous-traité une partie des travaux à la société Paumard, qui a acquis des ardoises auprès de la société Guibout matériaux. Suite à des désordres constatés par l’acquéreur des logements, la société Archipel Habitat, la société Linkcity grand ouest a assigné la société Bouygues bâtiment grand ouest en référé pour désigner un expert et obtenir une provision. La société Bouygues bâtiment grand ouest a appelé en garantie les sociétés Etex France exteriors et Paumard. Une jonction des affaires a été prononcée et une fin de non-recevoir a été soulevée en raison d’une assignation au fond antérieure. L’affaire a été renvoyée pour permettre aux parties de présenter leurs arguments. |
→ L’essentielMotifs de la décisionLa juridiction rappelle qu’elle n’est tenue de statuer sur les demandes de «constatations», de «décerner acte » ou de «dire et juger » que lorsqu’elles constituent des prétentions (Civ 2ème 09 janvier 2020 n°18-18.778 et 13 avril 2023 n°21-21.463). Sur la fin de non-recevoir relevée d’officeL’article 754 du code de procédure civile dispose, en son premier alinéa, que : «La juridiction est saisie, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation ». Lorsqu’une demande est présentée par assignation, la date d’introduction de l’instance doit s’entendre de la date de cette assignation, à condition qu’elle soit remise au greffe (Civ. 1re 18 novembre 2015 n°14-23.411 Bull.n°286). En l’espèce, la société Linkcity grand ouest a saisi le greffe du tribunal judiciaire de Rennes d’un projet d’assignation, aux fins de prise de date, dans la perspective d’une demande de condamnation sous astreinte de la société Bouygues bâtiment grand ouest à reprendre les désordres litigieux. Toutefois, elle n’a ensuite pas transmis au greffe de ce tribunal, comme elle le prétend, l’assignation délivrée à ce constructeur, de sorte que cette juridiction n’a pas été saisie. Dès lors, le juge du fond n’ayant pas été saisi, la société Linkcity grand ouest est recevable en sa demande de mesure d’instruction. Sur la demande d’expertiseEn application de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé en référé. Sur les demandes annexesLe second alinéa de l’article 491 du code de procédure civile dispose que « le juge des référés statue sur les dépens ». Les demandeurs conserveront provisoirement la charge des dépens, les défendeurs à une mesure d’instruction à laquelle il est fait droit ne pouvant, en effet, pas être regardés comme succombants. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N°
Du 26 Juillet 2024
N° RG 24/00161 – N° Portalis DBYC-W-B7I-K26C
54Z
c par le RPVA
le
à
Me Cyril DUTEIL, Me Emilie GUILLAUME, Me Loic GUILLAUME, Me Nicolas KOHEN, Me Mikaël LE ROL, Me Florianne PEIGNE, Me François RANCHERE
– copie dossier
– 2 copies service expertises
Expédition et copie executoire délivrée le:
à
Me Cyril DUTEIL,
Me Emilie GUILLAUME,
Me Loic GUILLAUME,
Me Nicolas KOHEN,
Me Mikaël LE ROL,
Me Florianne PEIGNE,
Me François RANCHERE
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
OR D O N N A N C E
DEMANDEUR AU REFERE:
S.N.C. LINKCITY GRAND OUEST, dont le siège social est sis [Adresse 10] – [Localité 8]
représentée par Me François RANCHERE, avocat au barreau de RENNES, substitué par Me COLIN SOUBRENIE, avocat au barreau de Rennes, Me Nicolas KOHEN, avocat au barreau de Vincennes
DEFENDEURS AU REFERE:
S.A.S. BOUYGUES BATIMENT GRAND OUEST, dont le siège social est sis [Adresse 4] – [Localité 6]
représentée par Me Cyril DUTEIL, avocat au barreau de LISIEUX, Me Florianne PEIGNE, avocat au barreau de RENNES
S.A.S. PAUMARD, dont le siège social est sis [Adresse 15] – [Localité 7]
représentée par Me Mikaël LE ROL, avocat au barreau de RENNES
substitué par Me BOSSARD Georgina, avocat au barreau de Rennes,
S.A.S. ETEX FRANCE EXTERIORS, dont le siège social est sis [Adresse 2] – [Localité 9]
représentée par Me Loic GUILLAUME, avocat au barreau de PARIS, Me Emilie GUILLAUME, avocat au barreau de RENNES substitué par Me ORESVE, avocat au barreau de Rennes,
LE PRESIDENT: Philippe BOYMOND, Vice-Président
LE GREFFIER: Claire LAMENDOUR, greffier, lors des débats et Fabienne LEFRANC, lors du prononcé par mise à disposition au greffe, qui a signé la présente ordonnance.
DEBATS: à l’audience publique du 19 Juin 2024,
ORDONNANCE: contradictoire, prononcée par mise à disposition au Greffe des référés le 26 Juillet 2024, date indiquée à l’issue des débats
VOIE DE RECOURS: Cette ordonnance peut être frappée d’appel devant le greffe de la Cour d’Appel de RENNES dans les 15 jours de sa signification en application des dispositions de l’article 490 du code de procédure civile.
L’appel de cette décision n’est cependant pas suspensif de son exécution.
La société en nom collectif (SNC) Linkcity grand ouest, demanderesse à l’instance, a réalisé en tant que maître d’ouvrage l’édification et la rénovation de l’ensemble immobilier dit Hôtel Dieu sis [Adresse 14] et [Adresse 3] à [Localité 13]. Elle a confié les travaux à la société par actions simplifiée (SAS) Bouygues bâtiment grand ouest, défenderesse à l’instance (pièce n°2 demanderesse). Cette dernière a sous-traité à la SAS Paumard la couverture en ardoise des bâtiments J et K ainsi que le bardage du bâtiment K (pièce n°2 défenderesse). La société Paumard a acquis les ardoises, fabriquées par la SAS Etex France exteriors (pièce n°5 défenderesse), auprès de la société Guibout matériaux (pièce n°4 défenderesse).
La réception des ouvrages de logement du bâtiment K est intervenue le 06 mars 2023 (pièce n°3 demanderesse).
La société Archipel Habitat, acquéreur des logements (pièce n°1 demanderesse) a par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 16 février 2024, signalé à la société Linkcity grand ouest l’aggravation du désordre concernant les ardoises Vertigo qui présentent un défaut d’uniformité de teintes à plusieurs endroits et l’a mise en demeure d’y remédier avant le 05 mars 2024 (pièce n°5 demanderesse).
Par acte de commissaire de justice en date du 01er mars 2024, la société Linkcity grand ouest a assigné la société Bouygues bâtiment grand ouest devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Rennes, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de :
– recevoir la société Linkcity grand ouest en son acte introductif d’instance ;
– la déclarer recevable et bien fondée ;
– désigner un expert au bénéfice de la mission définie dans l’assignation ;
– fixer le montant de la provision prise en charge par la demanderesse ;
– réserver les dépens.
Par actes de commissaire de justice en date des 12 et 15 avril 2024, la SAS Bouygues bâtiment grand ouest a appelé à l’instance les SAS Etex France exteriors et Paumard, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de :
– joindre la présente instance avec celle introduite le 1er mars 2024 par la société Linkcity grand ouest à l’encontre de la société Bouygues bâtiment grand ouest suivant l’assignation dénoncée en tête des présentes ;
– dire et juger que l’ordonnance de désignation d’expert qui sera rendue à la requête de la société Linkcity grand ouest sera rendue opposable aux sociétés Paumard et Etex France exteriors ;
– statuer sur les dépens.
Lors de l’audience du 05 juin 2024, la jonction administrative de ces deux affaires a été prononcée sous le numéro unique 24/00161.
La société Bouygues bâtiment grand ouest ayant indiqué, dans son appel à la cause, avoir également été assignée au fond par la société Linkcity grand ouest le 23 février 2024, devant le tribunal judiciaire de Rennes, la juridiction a dès lors relevé d’office une fin de non-recevoir tirée de cette saisine du juge du fond antérieure à la sienne.
Lors de l’audience sur renvoi et utile du 19 juin 2024, la SNC Linkcity grand ouest, représentée par avocat, a sollicité le bénéfice de ses écritures et répondu que l’assignation devant le juge du fond, certes effectivement délivrée à la SAS Bouygues bâtiment grand ouest, n’a pour autant pas été remise au greffe.
Ce constructeur, pareillement représenté, a oralement formé les protestations et réserves d’usage et a sollicité le bénéfice de son assignation.
Son sous-traitant, la SAS Paumard, également représentée par avocat, a par conclusions reçues à l’audience précitée formé les protestations et réserves d’usage quant à la demande dirigée à son encontre.
Par conclusions reçues à cette même audience, la SAS Etex France exteriors, pareillement représentée, a fait de même.
La juridiction rappelle qu’elle n’est tenue de statuer sur les demandes de «constatations», de « décerner acte » ou de « dire et juger » que lorsqu’elles constituent des prétentions (Civ 2ème 09 janvier 2020 n°18-18.778 et 13 avril 2023 n°21-21.463).
Sur la fin de non-recevoir relevée d’office
L’article 754 du code de procédure civile dispose, en son premier alinéa, que :
« La juridiction est saisie, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation ».
Lorsqu’une demande est présentée par assignation, la date d’introduction de l’instance doit s’entendre de la date de cette assignation, à condition qu’elle soit remise au greffe (Civ. 1re 18 novembre 2015 n°14-23.411 Bull.n°286).
En l’espèce, la société Linkcity grand ouest a saisi le greffe du tribunal judiciaire de Rennes d’un projet d’assignation, aux fins de prise de date, dans la perspective d’une demande de condamnation sous astreinte de la société Bouygues bâtiment grand ouest à reprendre les désordres litigieux. Toutefois, elle n’a ensuite pas transmis au greffe de ce tribunal, comme elle le prétend, l’assignation délivrée à ce constructeur, de sorte que cette juridiction n’a pas été saisie.
Dès lors, le juge du fond n’ayant pas été saisi, la société Linkcity grand ouest est recevable en sa demande de mesure d’instruction.
Sur la demande d’expertise
En application de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé en référé.
En l’espèce, la SNC Linkcity grand ouest sollicite une mesure d’expertise aux fins de déterminer les causes et imputabilités du défaut d’uniformité affectant les ardoises Vertigo du bâtiment litigieux. La société Bouygues bâtiment grand ouest a formé les protestations et réserves d’usage quant à cette demande et elle a, en outre, appelé à l’instance aux mêmes fins les sociétés Etex France exteriors et Paumard. Celles-ci ayant également formé les protestations et réserves d’usage, les sociétés Linkcity grand ouest et Bouygues bâtiment grand ouest disposent dès lors d’un motif légitime à voir ordonner une expertise, comme énoncé au dispositif de la présente ordonnance et aux frais avancés de la première nommée.
Sur les demandes annexes
Le second alinéa de l’article 491 du code de procédure civile dispose que « le juge des référés statue sur les dépens ».
Les demandeurs conserveront provisoirement la charge des dépens, les défendeurs à une mesure d’instruction à laquelle il est fait droit ne pouvant, en effet, pas être regardés comme succombants.
Statuant en référé, par ordonnance contradictoire et en premier ressort :
Recevons la société Linkcity grand ouest en sa demande d’expertise ;
Ordonnons une expertise et désignons, pour y procéder, Monsieur [D] [K], expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de Rennes, domicilié [Adresse 5] à [Localité 12] port : [XXXXXXXX01] mèl [Courriel 11], lequel aura pour mission de :
– se rendre [Adresse 14] et [Adresse 3] à [Localité 13], après avoir convoqué les parties par lettre recommandée avec accusé de réception, avis étant donné à leurs avocats ;
– entendre les parties et tous sachants ;
– se faire communiquer tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission ;
– vérifier la réalité du désordre invoqué dans l’assignation de la société Linkcity grand ouest et dans ses annexes et, dans l’affirmative, le décrire ;
– en rechercher les causes ;
– indiquer l’importance, la nature, le coût et la durée des travaux de remise en état et, s’il y a lieu, le montant de la moins value résultant de l’impossibilité de reprendre tout ou partie des désordres ;
– s’adjoindre en tant que de besoin le concours de tout spécialiste de son choix dans un domaine autre que le sien, conformément aux dispositions des articles 278 et suivants du code de procédure civile ;
– de manière générale, fournir tous éléments techniques et de fait et faire toutes constatations permettant à la juridiction, le cas échéant saisie, d’apprécier les responsabilités encourues et les préjudices subis ;
Fixons à la somme de 3.000 € (trois mille euros) la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que la SNC Linkcity grand ouest devra consigner au moyen d’un chèque émis à l’ordre du régisseur du tribunal judiciaire de Rennes dans un délai de deux mois à compter de ce jour, faute de quoi la désignation de l’expert sera caduque;
Disons que l’expert commencera ses opérations après avis de la consignation qui lui sera adressé par le greffe ;
Disons qu’à l’issue de sa deuxième réunion, au plus tard, l’expert communiquera aux parties, s’il y a lieu, un état prévisionnel détaillé de l’ensemble de ses frais et honoraires et, en cas d’insuffisance manifeste de la provision allouée, demandera la consignation d’une provision supplémentaire ;
Disons que l’expert dressera un rapport de ses opérations qui sera déposé au greffe de ce tribunal dans un délai de six mois à compter de l’avis de consignation ; qu’il aura, au préalable, transmis un pré-rapport aux parties et leur aura laissé un délai suffisant pour présenter leurs observations sous forme de dires auxquels l’expert sera tenu de répondre dans son rapport définitif ;
Désignons le magistrat en charge du service des expertises pour contrôler les opérations d’expertise et, en cas d’empêchement de l’expert, procéder d’office à son remplacement ;
Laissons provisoirement aux demandeurs la charge de leurs dépens ;
Rejetons toute autre demande, plus ample ou contraire.
La greffière Le juge des référés