Le Passage Rapide Aux Frontières Extérieures ouvert aux voyageurs de pays tiers
Le Passage Rapide Aux Frontières Extérieures ouvert aux voyageurs de pays tiers
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Le Décret no 2024-477 du 27 mai 2024 a pour objet d’adapter le traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « PARAFE » au système européen d’entrée/de sortie dont la mise en œuvre est autorisée par les règlements (UE) 2016/399 et 2017/2226 du Parlement européen et du Conseil. Le Décret permet l’utilisation de sas PARAFE par les ressortissants de pays tiers qui se sont préalablement pré-enregistrés dans le système européen d’entrée-sortie (« entry-exit system » ou « EES »).

Il ajoute parmi les accédants au traitement PARAFE les agents du programme Frontex. Il vise également à élargir l’utilisation du dispositif PARAFE à certaines collectivités d’outre-mer. 

Le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication et la condition posée à l’article 1er est opposable aux intéressés à compter de l’entrée en service du système européen d’entrée/de sortie créé par le règlement (UE) 2017/2226 du 30 novembre 2017. 

Traitement de Données Personnelles PARAFE

Introduction au Système PARAFE

Le système PARAFE (Passage Automatisé Rapide des Frontières Extérieures) est un dispositif mis en place pour faciliter le passage des frontières pour les voyageurs. Ce système utilise des données biométriques pour vérifier l’identité des individus et accélérer les contrôles aux frontières.

Types de Données Collectées

Données Biométriques

Le système PARAFE collecte principalement des données biométriques telles que les empreintes digitales et la reconnaissance faciale. Ces données sont utilisées pour identifier de manière unique chaque voyageur.

Données Personnelles

Outre les données biométriques, PARAFE collecte également des informations personnelles comme le nom, le prénom, la date de naissance, et les informations contenues dans le passeport.

Finalités du Traitement des Données

Sécurité et Contrôle aux Frontières

Le traitement des données par PARAFE a pour objectif principal d’assurer la sécurité aux frontières. En vérifiant l’identité des voyageurs de manière rapide et efficace, le système contribue à prévenir les entrées non autorisées et à lutter contre la fraude.

Facilitation du Passage des Voyageurs

Un autre objectif du système PARAFE est de faciliter le passage des voyageurs en réduisant le temps d’attente aux contrôles de frontière. Les données biométriques permettent une vérification rapide et automatisée, améliorant ainsi l’expérience des voyageurs.

Durée de Conservation des Données

Les données collectées par le système PARAFE sont conservées pendant une période limitée, conformément aux réglementations en vigueur. La durée de conservation peut varier en fonction de la nature des données et des exigences légales.

Droits des Personnes Concernées

Accès et Rectification

Les individus ont le droit d’accéder à leurs données personnelles collectées par le système PARAFE. Ils peuvent également demander la rectification de données inexactes ou incomplètes.

Opposition et Suppression

Les personnes concernées peuvent, sous certaines conditions, s’opposer au traitement de leurs données personnelles ou demander leur suppression. Ces demandes doivent être adressées aux autorités responsables du système PARAFE.

Sécurité des Données

Mesures de Protection

Le système PARAFE met en œuvre diverses mesures de sécurité pour protéger les données personnelles et biométriques des voyageurs. Ces mesures incluent le chiffrement des données, des contrôles d’accès stricts et des audits réguliers pour garantir la conformité aux normes de sécurité.

Responsabilité des Autorités

Les autorités responsables du système PARAFE sont tenues de garantir la protection des données personnelles et de respecter les réglementations en matière de protection des données. Elles doivent également informer les voyageurs de leurs droits et des modalités de traitement de leurs données.

Textes associés au Traitement Parafe

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, notamment son article 77 ;

Les accords relatifs à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes signés par certains des Etats membres de l’Union européenne à Schengen le 14 juin 1985 et le 19 juin 1990, ainsi que les accords connexes et les règles adoptées sur la base desdits accords, intégrés dans le cadre de l’Union européenne, notamment les articles 5, 6 et 92 ;

Le règlement (CE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 modifié établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), notamment ses articles 6, 8 et 11 ;

Le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et abrogeant la directive 95/46/CE ;

Le règlement (UE) 2017/2225 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2017 modifiant le règlement (UE) 2016/399 en ce qui concerne l’utilisation du système d’entrée/de sortie ;

Le règlement (UE) 2017/2226 du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2017 portant création d’un système d’entrée/de sortie (EES) pour enregistrer les données relatives aux entrées, aux sorties et aux refus d’entrée concernant les ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des Etats membres et portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives, et modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et les règlements (CE) 767/2008 et (UE) 1077/2011 ;

Le règlement (UE) 2019/1896 du Parlement européen et du conseil du 13 novembre 2019 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et abrogeant les règlements (UE) 1052/2013 et (UE) 2016/1624 ;

Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, notamment ses articles L. 233-1L. 233-2L. 233-5L. 311-1 et R. 221-1 à R. 221-2 ;

Le code de la sécurité intérieure, notamment ses articles R. 232-6 à R. 232-11-2 ;

La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment son article 32 ;

Le régime juridique du traitement Parafe

Le traitement PARAFE est encadré par les articles R. 232-6 à R. 232-11-2 du code de la sécurité intérieure (CSI). Il repose sur le déploiement de sas destinés à améliorer et faciliter les contrôles de police aux frontières extérieures.

En pratique, les voyageurs aériens, maritimes et ferroviaires éligibles au dispositif peuvent volontairement emprunter un sas PARAFE s’ils disposent d’un passeport comportant des données biométriques. Le contrôle aux frontières est alors réalisé au moyen d’une authentification biométrique du voyageur, via le traitement de l’image numérisée du visage.

Le traitement a été récemment modifié pour, en particulier, étendre le périmètre des voyageurs éligibles (v. CNIL, SP, 11 mai 2023, avis sur projet de décret, PARAFE, n° 2023-045, publié).

Un dispositif complémentaire de facilitation des contrôles aux frontières sera prochainement déployé. Il s’agit des systèmes en libre-service (kiosques ou dispositifs mobiles) pour le pré-enregistrement de ses données dans le système européen d’entrée / de sortie (« entry-exit system » ou « EES »). A cet égard :

  • l’EES permettra, en remplacement du système actuel d’estampillage des passeports, l’enregistrement électronique des entrées, sorties et refus d’entrée des ressortissants de pays tiers admis pour un court séjour sur le territoire ou pour lesquels l’entrée a été refusée ;
  • le pré-enregistrement dans l’EES repose sur le volontariat des voyageurs.

L’utilisation de ces systèmes implique la mise en œuvre d’un traitement de données à caractère personnel, sur lequel la CNIL s’est prononcée (CNIL, SP, 9 juin 2022, avis sur projet de décret, dispositif de pré-enregistrement, n° 2022-066, publié).

Pour assurer la transparence des traitements et l’effectivité des droits, les personnes devront être informées :

  • par les gestionnaires d’infrastructures (aéroports, ports maritimes, gares ferroviaires), de leur éligibilité aux sas PARAFE et du caractère optionnel de leur utilisation ;
  • de l’articulation de PARAFE avec les dispositifs de pré-enregistrement (v. CNIL, SP, 11 mai 2023, avis sur projet de décret, PARAFE, n° 2023-045, publié).

En particulier :

  • la signalétique mise en place pourrait être complétée par l’affichage ou la fourniture d’une information écrite avant le passage de la frontière ;
  • les personnels chargés d’orienter et d’informer les voyageurs devront être déployés en nombre suffisant (v. en ce sens l’article 8 quater du règlement (UE) 2016/399 ou « code frontières Schengen ») et bénéficier d’une formation appropriée.

Lors de l’instruction de la saisine, le projet de décret a été modifié pour étendre le périmètre des personnes qui, pour pouvoir utiliser PARAFE, devront préalablement passer par un dispositif de pré-enregistrement. Il s’agira :

  • en plus des ressortissants de pays tiers éligibles à l’EES (catégories de personnes initialement visées par le projet de décret) ;
  • des ressortissants de pays tiers non éligibles à l’EES (à l’exception des ressortissants d’Andorre, de Monaco et de Saint-Martin) qui incluent, par exemple, les ressortissants de pays tiers disposant d’un titre de séjour.

Selon les précisions apportées, il est prévu que le dispositif de pré-enregistrement, qui concerne actuellement les seuls ressortissants de pays tiers éligibles à l’EES (en vue de leur enregistrement dans ce dernier système), soit étendu aux ressortissants de pays tiers disposant d’un titre de séjour ou d’un visa long séjour délivré par la France.

Saisie pour avis, la CNIL souligne qu’il conviendra :

  • de s’assurer de la conformité des évolutions projetées avec les dispositions pertinentes de droit de l’Union européenne ;
  • de prévoir la modification du décret encadrant le dispositif de pré-enregistrement, dont elle devra être saisie.

Sur l’articulation des traitements PARAFE, « dispositif de pré-enregistrement » et EES

a) L’architecture de PARAFE et du dispositif de pré-enregistrement

Selon les précisions apportées, les traitements « dispositif de pré-enregistrement » et PARAFE reposeront sur le déploiement d’un central commun aux frontières (CCAF), qui permettra :

  • d’interroger certains fichiers (le fichier des personnes recherchées ou « FPR », par exemple) et de consulter le résultat de ces interrogations (« hit »/« no hit ») dans le cadre des vérifications aux frontières ;
  • pour le dispositif national de pré-enregistrement dans l’EES, d’interroger l’EES pour déterminer l’éligibilité de la personne et de stocker temporairement les données pré-enregistrées ;
  • pour PARAFE, de demander la création d’une fiche (d’entrée ou de sortie) dans l’EES.

Il conviendra de garantir la possibilité de distinguer les données et opérations relevant de PARAFE d’une part, et du dispositif de pré-enregistrement d’autre part. Cela permettra, en particulier, de garantir l’effectivité des droits des personnes concernées et d’assurer le contrôle et la sécurité de chacun des traitements indépendamment l’un de l’autre.

b) Les vérifications effectuées au moyen de ces traitements

Lorsqu’une personne utilise le dispositif de pré-enregistrement puis PARAFE, la consultation des bases de données pour les vérifications aux frontières est effectuée à deux reprises, au niveau de chaque dispositif.
Dans cette hypothèse, une interrogation des bases de données à partir de PARAFE ne serait pas nécessaire.
Dès lors, des mesures devront être mises en place pour garantir que cette consultation n’est pas effectuée, au niveau de PARAFE, pour les personnes pré-enregistrées dans l’EES.

c) La création de fiches dans l’EES à partir de PARAFE

Les sas PARAFE permettront la création dans l’EES de fiches d’entrée et de sortie, en communiquant à ce dernier système des informations relatives à l’entrée et à la sortie (à ce propos, v. not. les art. 14, 16 et 17 du règlement (UE) 2017/2226).

Dans cette perspective, le décret autorise le traitement, dans PARAFE, des informations relatives à la date et l’heure de l’entrée et de la sortie, au point de passage frontalier d’entrée et de sortie, et à l’autorité qui a autorisé l’entrée.

Selon les précisions apportées, ces données seront collectées pour les seuls voyageurs de nationalité éligible à l’EES (identifiée à partir de la bande MRZ du document de voyage).

Il conviendra, également, de prendre en compte le pré-enregistrement préalable de la personne dans l’EES. La prise en compte de ce critère permettrait de prévenir la collecte, non nécessaire, de données relatives aux personnes de nationalité couverte par l’EES mais non éligibles à ce dernier dispositif (ressortissants de pays tiers bénéficiant d’un titre de séjour, par exemple).

Sur les mises en relation avec d’autres traitements

a) Le périmètre des mises en relation projetées

PARAFE est actuellement mis en relation avec le fichier des personnes recherchées (FPR), le système informatique national du système d’information Schengen (N-SIS) et le fichier des documents de voyage volés et perdus d’Interpol (SLTD). Ces mises en relation s’inscrivent dans le cadre des vérifications aux frontières (v. supra, §§17-26).

Le ministère prévoit que PARAFE sera, dans cette même perspective, interconnecté avec le traitement TDAWN d’Interpol.

Au regard de l’architecture du traitement et des flux de données projetés (v. supra, §§17-31), la CNIL estime que PARAFE sera également mis en relation avec les traitements EES et « dispositif de pré-enregistrement ».

Les AIPD de ces traitements devront être complétées en ce sens, ce à quoi le ministère s’engage.
Par ailleurs, le périmètre des mises en relation diffère selon le territoire sur lequel les sas sont mis en place. Dans la mesure où les territoires d’outre-mer se situent en dehors de l’espace Schengen, les sas qui y sont déployés ne pourront interroger les systèmes d’information européens (EES) ni les traitements nationaux associés (dispositif de pré-enregistrement ; N-SIS).

b) Les transferts de données qu’impliquent certaines mises en relation

Les mises en relation avec les traitements SLTD et TDAWN d’Interpol impliquent un transfert de données vers une organisation internationale au sens du chapitre V du RGPD. En effet :

  • ces mises en relation reposent sur la transmission de données à caractère personnel relatives au document de voyage ;
  • ces données sont communiquées par un responsable de traitement soumis au RGPD à un responsable de traitement « importateur » qui est une organisation internationale (v. Lignes directrices 05/2021 sur l’interaction entre l’application de l’article 3 et des dispositions relatives aux transferts internationaux du chapitre V du RGPD, adoptées le 14 février 2023).

De tels transferts ne pourront être opérés que sous réserve du respect des conditions énoncées aux articles 45 et suivants du RGPD.

Sur les mesures de sécurité

L’extension du dispositif aux titres d’identité comportant des données biométriques n’appelle pas de mesures de sécurité spécifiques mais appelle à accroître la vigilance à porter sur les performances biométriques des systèmes déployés, en raison de l’augmentation prévisible du nombre de personnes concernées par le traitement. La CNIL incite le ministère à suivre la performance des dispositifs biométriques dans le temps et pour chaque déploiement au regard des critères détaillés dans l’une de ses délibérations précédentes (CNIL, SP, 28 janvier 2016, avis sur projet de décret, PARAFE, n° 2016-012, publié).

Les nouveaux accédants prévus par le décret seront soumis à la même politique d’authentification et d’habilitation spécifique que les accédants actuels, permettant un niveau de sécurité approprié en ce qui concerne le contrôle d’accès logique.

L’audit de sécurité, initialement prévu pour arriver à son terme avant fin 2023 dans le cadre de l’homologation SSI, a débuté mais n’est pas terminé. La CNIL encourage le ministère à déployer les efforts nécessaires à l’aboutissement rapide de cet audit de sécurité, en particulier en raison de la mutualisation de certains dispositifs, tels que le CCAF, avec d’autres traitements de données, qui peut être source d’accroissement des risques.

Sur l’analyse de risques

La CNIL considère que les risques issus de la nouvelle architecture basée sur CCAF devraient faire partie de l’analyse. Aussi, elle considère que les risques liés à l’indisponibilité des données devraient être évalués et positionnés dans la cartographie, en cohérence avec les échelles de gravité et de vraisemblance, en raison de leur impact sur la vie privée des personnes.


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