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1. Attention à la clarté des clauses contractuelles : Il est recommandé de rédiger les contrats de manière claire et précise, en veillant à ce que les différentes clauses soient bien structurées et ne prêtent pas à confusion. Une rédaction précise des conditions de rémunération, des obligations des parties et des modalités d’exécution peut éviter des litiges ultérieurs.
2. Il est recommandé de documenter soigneusement l’exécution des obligations contractuelles : Pour éviter tout litige sur l’exécution des obligations contractuelles, il est essentiel de conserver une documentation détaillée de toutes les étapes de la prestation de services ou de la réalisation des transactions prévues par le contrat. Cela peut inclure des rapports, des échanges de correspondance, des preuves de paiement, des rapports d’étape, etc. 3. Il est recommandé de consulter un avocat en cas de litige contractuel : En cas de désaccord entre les parties contractantes ou de litige sur l’interprétation des termes du contrat, il est conseillé de consulter un avocat spécialisé en droit des contrats. Un avocat pourra fournir des conseils juridiques personnalisés, évaluer la situation et aider à trouver une solution conforme à la loi et aux intérêts de la partie concernée. |
→ Résumé de l’affaireI- Sur le contrat conclu le 27 avril 2018 ‘assistance pour la restructuration du capital’Ce contrat, daté du 15 janvier 2018, a été signé le 27 avril 2018 par M. [P] [N], président de la société [N] industries. Il prévoyait une durée de collaboration de 12 mois, pouvant être prorogée par périodes successives de 6 mois, avec une rémunération par ‘honoraire forfaitaire de 300 000 € payable en deux fois : 200 k€ dès la cession de la société Reboul, 100 k€ à la sortie de la BPI au plus tard le 31 juillet 2018.’ Il n’est contesté par aucune des parties que la société [N] industries a réglé la totalité des honoraires de la société Clairfield international par virement du 11 juin 2018. Dès lors, il n’incombait plus à la société Clairfield de prouver le bien fondé de l’exécution de l’obligation de la société [N] industries, mais à cette dernière de démontrer que son paiement a été réalisé à la suite d’une erreur ou qu’une mauvaise exécution du contrat justifie la restitution de tout ou partie des honoraires. Ne fournissant aucun élément à ce sujet, la société appelante sera déboutée de sa demande reconventionnelle et le jugement de première instance confirmé de ce chef. II- Sur le contrat conclu le 3 mai 2018 ‘cession de Catidom’A- Les conditions de rémunération prévuesLe contrat prévoyait en premier lieu dans sa clause intitulée ‘conditions d’intervention’ plusieurs sous-chapitres : honoraires, honoraires de dédommagement en cas de refus de vente à un prix minimum, taxes et frais, durée, exclusivité. Ces sous-chapitres ne sont pas liés entre eux, aucun n’étant la subdivision d’un autre. La durée du contrat était de 12 mois, prorogeable par périodes de 6 mois, avec dénonciation possible 2 mois avant l’échéance du contrat en cours, par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce sous-chapitre mentionne ‘en tout état de cause, l’honoraire de succès prévu ci-dessus sera exigible si, dans une période de 24 mois suivant la date d’expiration du présent contrat, les actionnaires concluent une cession partielle ou totale des actions ou des actifs de la société à l’un des acquéreurs avec lesquels Clairfield international aura été en contact dans le cadre de la présente mission.’ Par souci de clarification, cette clause semble pouvoir être qualifiée de ‘clause d’intermédiaire’. Le sous-chapitre ‘honoraires’ ne mentionnait pas de prix minimum de cession, prévoyant ‘l’honoraire de succès sera dû au ‘closing’ de l’opération quelle que soit la structure retenue (cession des actions, d’actifs, paiement immédiat/différé). Il sera composé d’une partie fixe de 350 000 euros ht auquel s’ajoutera un honoraire variable, calculé sur la base de la valeur d’entreprise ‘cash free debt free’ c’est-à-dire avant déduction de la dette financière nette (‘VE’) retenue pour 100% du capital comme suit : 5,0% par tranche de VE supérieure à 23,5 m€ (vingt trois millions cinq cent mille euros).’ Enfin, situé entre les deux sous-chapitres précité, le sous-chapitre ‘honoraire de dédommagement en cas de refus de vendre à un prix minimum’ rappelait ‘il est entendu que le prix de cession minimum pour 100% des titres souhaité par les actionnaires est de 15m€. (..) Dans le cas où il serait décidé par les actionnaires de ne pas procéder à la cession, malgré la réception d’une offre ferme, après due diligence, comportant une valeur des titres minimum de 15m€, il sera versé à Clairfield international un honoraire de dédommagement de 300 000 euros ht.’ La localisation au sein du contrat du sous-chapitre ‘honoraire de dédommagement en cas de refus de vendre à un prix minimum’, située après le sous-chapitre ‘honoraires’ ne permet pas de retenir que l’honoraire de succès était conditionné à la présentation d’un acquéreur au prix minimum. Il s’agissait, certes, d’un objectif à atteindre, mais non d’une condition d’obtention de la rémunération forfaitaire ‘fixe’ de 350 000 euros HT. Ainsi, la clause d’honoraire d’intermédiaire, qui se situe dans le sous-chapitre ‘durée’ n’était pas non plus liée à une cession au prix minimal de 15 000 000 euros. B – Sur la mission de la société Clairfield internationalLe contrat précité décrivait ainsi la mission de la société prestataire : ‘- préparer, dans un but d’optimisation de la valeur de cession, les documents nécessaires pour présenter la société aux acquéreurs potentiels (ci-après dénommés les ‘acquéreurs’) comprenant le memorandum d’information décrivant l’historique, la structure juridique, les activités, la propriété intellectuelle, le positionnement concurrentiel, l’organisation, les perspectives de développement, la situation financière, les états financiers historiques et prévisionnels avec les hypothèses retenues pour leur construction/’business plan’), un profil anonyme, et une ‘management présentation’ ; – effectuer une approche de valorisation affinée de la société (..) ; – identifier les acquéreurs susceptibles d’acquérir jusqu’à 100% du capital de la société ; – contacter les acquéreurs pressentis (…) ; – coordonner et superviser la phase de data-room électronique en liaison avec le prestataire externe (…) ; – conduire les négociations pour en optimiser l’ensemble des conditions au mieux des intérêts des actionnaires et envisager les meilleurs schémas juridiques et financiers en relation avec l’opération ; – coordonner avec les avocats choisis par les actionnaires la rédaction de la documentation juridique’. Les opérations étaient prévues sur un calendrier indicatif de 8 mois minimum, entre mai-juin 2018 et début 2019. C – Sur l’exécution de la mission et la réunion des conditions de jeu de la clause d’honoraire d’intermédiaireSont versés aux débats par la société Clairfield international : – le mémorandum d’information sur la société Catidom, intitulé ‘projet calvi’, réalisé en juin 2018 ; – la copie et traduction d’une ‘offre sans engagement relative au projet Calvi’ reçue par mail le 9 novembre 2018 de M. [E] [F], représentant légal de la société Coster ; – des échanges de mails entre M. [T], chargé d’exécuter la mission litigieuse au sein de la société Clairfield et M. [V], missionné par la société Coster, courant novembre 2018, le premier cherchant à obtenir une amélioration de l’offre financière présentée par l’acquéreur potentiel ; – des échanges de courriels entre M. [T] et M. [N] courant décembre 2018, mars, avril et mai 2019 démontrant la recherche de potentiels acquéreurs par M. [T] et la conduite de négociations ; – une actualisation du mémorandum d’information au 12 avril 2019. Il résulte de ces éléments que la société Clairfield a bien réalisé la grande majorité de sa mission, et a assumé la conduite des négociations avec des acquéreurs potentiels, la fin de la mission n’ayant pas été réalisée parce qu’aucun des candidats n’avait reçu l’agrément des actionnaires, soit de la société [N]. Par ailleurs, les termes du contrat ne définissaient pas le terme acquéreur de façon précise, et l’honoraire d’intermédiaire était dû dès lors qu’une cession partielle ou totale des actions ou actifs de la société Catidom était réalisée au profit de ‘l’un des acquéreurs avec lesquels Clairfield international aura été en contact dans le cadre de la présente mission’. Il est possible d’imaginer que cette clause permet d’indemniser la société Clairfield de l’utilisation des documents établis par ses soins, et que la durée fixée soit considérée comme celle de validité des mémorandums de présentation de la société Catidom. Or, la société Coster a bien été en contact avec la société Clairfield, et le terme acquéreur ne peut se limiter aux contacts listés par M. [T] dans son mail du 7 mai 2019 adressé à M. [N], d’autant que son contenu énonce ‘un teaser a été adressé, en début de semaine, à 14 nouveaux acquéreurs potentiels que nous avons sélectionnés à partir de leur spécialité en capital développement ; 6 ont déjà accès au mémorandum (nda déjà signés).’ Par conséquent, la société Coster, qui avait bénéficié en 2018 du mémorandum établi par la société Clairfield et formulé une offre, doit bien être qualifiée d’acquéreur. Ensuite, le fait que la société Coster ait été éventuellement un client de la société Catidom et que la société [N] industries ait présenté ou non cet acquéreur potentiel à la société Clairfield international est indifférent et n’était pas une condition de rémunération, celle-ci impliquant uniquement que la société Clairfield ait bien remis le mémorandum et conduit des négociations avec l’acquéreur. En dernier lieu, il résulte des énonciations des parties et n’est contesté par aucune d’elles le fait que la société Coster a bien acquis une partie, puis la totalité des actions de la société Catidom, dans le délai de deux ans suivant l’expiration du contrat, soit avant le 4 mai 2021. Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu’il a retenu que l’honoraire d’intermédiaire inclu dans le sous-chapitre ‘durée’ était bien dû par la société [N] industries à la société Clairfield international. III- Sur la demande de dommages et intérêtsL’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. La société Clairfield estime que l’absence d’information par la société [N] industries de la cession de la société Catidom réalisée au bénéfice de la société Coster relève de la mauvaise foi. L’intimée ne démontre toutefois pas que cette absence d’information soit autre chose que de la négligence, outre le fait que le contrat était sujet à interprétation, de sorte que la preuve d’une faute de la société appelante n’est pas démontrée. Le jugement de première instance sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour indemnisation d’une résistance abusive de la société [N] industries. IV- Sur les demandes accessoiresSuccombant en son appel, la société [N] industries supportera les dépens de l’instance, ainsi qu’une indemnité procédurale au bénéfice de la société Clairfield de 2 000 euros. |
→ Les points essentielsL’affaire a été instruite et plaidée en janvier 2024, suite à une ordonnance de clôture datant du 5 décembre 2023.
Les montants alloués dans cette affaire:
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→ Réglementation applicableArticles des Codes cités et leur texte
– Article 1353 du Code civil : – Article 1240 du Code civil : |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – SELARL BOLLONJEON
– SARL BALLALOUD & ASSOCIES – Me Marine BICHET – SELEURL BC AVOCATS |
→ Mots clefs associés & définitions– Article 1353 du code civil
– Contrat d’assistance pour la restructuration du capital – Honoraires – Paiement – Obligation de prouver – Exécution du contrat – Restitution des honoraires – Clause d’intermédiaire – Cession de Catidom – Rémunération – Durée du contrat – Clause d’honoraire de succès – Valeur d’entreprise – Clause d’honoraire de dédommagement – Mission de la société Clairfield international – Négociations – Acquéreurs potentiels – Data-room électronique – Documentation juridique – Exécution de la mission – Réunion des conditions de jeu de la clause d’honoraire d’intermédiaire – Dommages et intérêts – Faute – Mauvaise foi – Négligence – Demande de dommages et intérêts – Demandes accessoires – Dépens de l’instance – Indemnité procédurale |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile – Première section
Arrêt du Mardi 09 Avril 2024
N° RG 21/01932 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GZ5O
Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce d’ANNECY en date du 14 Septembre 2021
Appelante
S.A.S. [N] INDUSTRIES, dont le siège social est situé [Adresse 1]
Représentée par la SELARL BOLLONJEON, avocats postulants au barreau de CHAMBERY
Représentée par la SARL BALLALOUD & ASSOCIES, avocats plaidants au barreau d’ANNECY
Intimée
S.A.S. CLAIRFIELD INTERNATIONAL, dont le siège social est situé [Adresse 2]
Représentée par Me Marine BICHET, avocat postulant au barreau d’ANNECY
Représentée par la SELEURL BC AVOCATS, avocats plaidants au barreau de PARIS
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Date de l’ordonnance de clôture : 05 Décembre 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 janvier 2024
Date de mise à disposition : 09 avril 2024
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Composition de la cour :
Audience publique des débats, tenue en double rapporteur, sans opposition des avocats, par Mme Hélène PIRAT, Présidente de Chambre, qui a entendu les plaidoiries, en présence de Mme Myriam REAIDY, Conseillère, avec l’assistance de Sylvie LAVAL, Greffier,
Et lors du délibéré, par :
– Mme Hélène PIRAT, Présidente,
– Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
– M. Guillaume SAUVAGE, Conseiller,
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Faits et procédure
Suivant contrat d’assistance du 15 janvier 2018, la société [N] Industries a fait appel à la société Clairfield pour une mission de restructuration de son capital, et en particulier le rachat de participation de la BPI après que cette dernière a indiqué sa volonté de sortir du capital, moyennant le prix de 360 000 euros.
Ce contrat a été signé par le président de la société [N] Industries le 27 avril 2018 et les honoraires ont été intégralement réglés par virement du 12 juin 2018.
Le 4 avril 2018, la société Clairfield a adressé également à la société [N] Industries une lettre de mission pour intervenir dans le cadre, cette fois, de la cession de la société Catidom, une des sociétés détenues par la société [N] Industries.
La lettre, comportant la description de la mission, le calendrier indicatif et les conditions d’intervention, a été paraphée et signée par le président de la société [N] Industries le 3 mai 2018.
Courant novembre 2019, le groupe Coster est entré au capital de la société Catidom puis a racheté à la société [N] Industries le solde du capital en janvier 2020. La société Clairfield a alors facturé les honoraires prévus dans la lettre de mission du 4 avril 2018 pour un montant de 420 000 euros TTC suivant courrier du 31 janvier 2020.
La société [N] Industries a répondu en demandant à la société Clairfield le remboursement de la somme de 360 000 euros résultant du contrat du 27 avril 2018, faute d’exécution de sa mission.
Par acte d’huissier 15 juin 2020, la société Clairfield a assigné la société [N] Industries devant le tribunal de commerce d’Annecy, notamment aux fins d’obtenir la condamnation de celle-ci à lui payer 420 000 euros TTC au titre des honoraires convenus.
Par jugement du 14 septembre 2021, le tribunal de commerce d’Annecy, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, a :
– Condamné la société [N] Industries à payer à la société Clairfield International la partie fixe des honoraires de succès prévus dans la lettre de mission signée le 3 mai 2018, soit la somme de 420 000 euros TTC ;
– Débouté la société Clairfield International de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
– Débouté la société [N] Industries au titre de sa demande reconventionnelle visant à lui restituer les honoraires de 360 000 euros TTC versés à la société Clairfield International ;
– Condamné la société [N] Industries à payer à la société Clairfield International la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Débouté les parties de toutes leurs autres demandes ;
– Condamné la société [N] Industries aux entiers dépens.
Au visa principalement des motifs suivants :
En payant l’intégralité de la rémunération de la société Clairfield prévue au contrat et ce, par avance, et sans la moindre contestation de sa part durant près de 2 ans, la société [N] Industries a reconnu la prestation effectuée ;
La société [N] Industries doit bien s’acquitter de la partie fixe des honoraires de succès prévue dans la lettre de mission dès lors que la transaction est intervenue et ne peut opposer un prix minimum de 15 millions d’euros, l’origine des contacts ayant permis de trouver un acquéreur ou bien la clause « durée » du contrat.
Par déclaration au greffe du 24 septembre 2021, la société [N] Industries a interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions hormis en ce qu’elle a débouté la société Clairfield International de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Prétentions et moyens des parties
Par dernières écritures du 19 mai 2022, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société [N] Industries sollicite l’infirmation de chefs critiqués de la décision et demande à la cour de :
Statuant à nouveau,
– Débouter la société Clairfield International de toutes des demandes ;
Reconventionnellement,
– Condamner la société Clairfield International à lui verser la somme de 300 000 euros perçue alors même qu’elle n’a pas réalisé sa mission sur le rachat des titres de la BPI ;
– Condamner la société Clairfield International à lui verser la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la même aux entiers dépens avec pour ceux d’appel application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Mme Bollonjeon, avocat.
Au soutien de ses prétentions, la société [N] industries fait valoir :
que la mission confiée à la société Clairfield au terme du contrat portant sur la cession des parts de la société Catidom consistait à trouver un acquéreur au prix minimum de 15 000 000 euros, et que seul un ‘honoraire de succès’ était prévu aux conditions fixées ;
que la société Clairfield n’a présenté aucun acquéreur au prix de 15 000 000 euros et qu’en outre, elle n’a jamais fait figurer la société Coster, qui est un client de la société Catidom dans le liste des contacts en tant qu’acquéreur potentiel ;
qu’en ce qui concerne sa demande de remboursement des honoraires perçus au titre du contrat de retrait de la BPI du capital social de la société [N], il appartient à la société Clairfield, en application de l’article 1353 du code civil, de rapporter la preuve que l’obligation est bien due, ce qu’elle ne fait pas.
Par dernières écritures du 21 février 2022, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Clairfield International sollicite de la cour de :
– Infirmer le jugement en ce qu’il l’a :
– Débouté de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
– Débouté de toutes ses autres demandes ;
Statuant à nouveau,
– Condamner la société [N] Industries à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
– Condamner la société [N] Industries à lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– Condamner la société [N] Industries aux entiers dépens d’appel.
La société Clairfield international expose au soutien de ses prétentions :
qu’il ne lui appartient pas de rapporter une quelconque preuve de l’exécution du contrat de sortie du capital de BPI, dans la mesure où elle ne formule aucune réclamation à ce sujet et que la société [N] industrie ne produit aucun élément sur le conflit d’intérêt qu’elle invoque ou sur l’exécution du contrat par un autre prestataire ;
que le contrat ‘cession de catidom’ prévoyait plusieurs hypothèses de rémunération : un honoraire de succès en cas de cession, avec rémunération fixe et bonus en cas de cession au prix de 23,5m€, un honoraire de dédommagement en cas de refus des actionnaires de céder au prix minimum de 15m € et un honoraire d’intermédiaire en cas de cession, dans la durée de 24 mois suivant la date d’expiration du contrat, à un acquéreur avec lequel Clairfield ‘aura été en contact dans le cadre de la présente mission’ ;
que la société [N] industries est de mauvaise foi dans l’exécution du contrat, en ce qu’elle ne l’a pas informée de la cession des parts de Catidom, et en ce qu’elle a opposé à la demande d’honoraires d’intermédiaires le prétexte de non exécution du contrat précédent, de retrait de BPI, pour éviter de s’acquitter de ses obligations, ce qui justifie l’octroi de dommages et intérêts.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience ainsi qu’à la décision entreprise.
L’article 1353 du code civil dispose : ‘Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.’
I- Sur le contrat conclu le 27 avril 2018 ‘assistance pour la restructuration du capital’
Ce contrat, daté du 15 janvier 2018, a été signé le 27 avril 2018 par M. [P] [N], président de la société [N] industries. Il prévoyait une durée de collaboration de 12 mois, pouvant être prorogée par périodes successives de 6 mois, avec une rémunération par ‘honoraire forfaitaire de 300 000 € payable en deux fois : 200 k€ dès la cession de la société Reboul, 100 l€ à la sortie de la BPI au plus tard le 31 juillet 2018.’
Il n’est contesté par aucune des parties que la société [N] industries a réglé la totalité des honoraires de la société Clairfield international par virement du 11 juin 2018.
Dès lors, il n’incombait plus à la société Clairfield de prouver le bien fondé de l’exécution de l’obligation de la société [N] industries, mais à cette dernière de démontrer que son paiement a été réalisé à la suite d’une erreur ou qu’une mauvaise exécution du contrat justifie la restitution de tout ou partie des honoraires. Ne fournissant aucun élément à ce sujet, la société appelante sera déboutée de sa demande reconventionnelle et le jugement de première instance confirmé de ce chef.
II- Sur le contrat conclu le 3 mai 2018 ‘cession de Catidom’
A- Les conditions de rémunération prévues
Le contrat prévoyait en premier lieu dans sa clause intitulée ‘conditions d’intervention’ plusieurs sous-chapitres : honoraires, honoraires de dédommagement en cas de refus de vente à un prix minimum, taxes et frais, durée, exclusivité. Ces sous-chapitres ne sont pas liés entre eux, aucun n’étant la subdivision d’un autre.
La durée du contrat était de 12 mois, prorogeable par périodes de 6 mois, avec dénonciation possible 2 mois avant l’échéance du contrat en cours, par lettre recommandée avec accusé de réception. Ce sous-chapitre mentionne ‘en tout état de cause, l’honoraire de succès prévu ci-dessus sera exigible si, dans une période de 24 mois suivant la date d’expiration du présent contrat, les actionnaires concluent une cession partielle ou totale des actions ou des actifs de la société à l’un des acquéreurs avec lesquels Clairfield international aura été en contact dans le cadre de la présente mission.’ Par souci de clarification, cette clause semble pouvoir être qualifiée de ‘clause d’intermédiaire’.
Le sous-chapitre ‘honoraires’ ne mentionnait pas de prix minimum de cession, prévoyant ‘l’honoraire de succès sera dû au ‘closing’ de l’opération quelle que soit la structure retenue (cession des actions, d’actifs, paiement immédiat/différé). Il sera composé d’une partie fixe de 350 000 euros ht auquel s’ajoutera un honoraire variable, calculé sur la base de la valeur d’entreprise ‘cash free debt free’ c’est-à-dire avant déduction de la dette financière nette (‘VE’) retenue pour 100% du capital comme suit : 5,0% par tranche de VE supérieure à 23,5 m€ (vingt trois millions cinq cent mille euros).’
Enfin, situé entre les deux sous-chapitres précité, le sous-chapitre ‘honoraire de dédommagement en cas de refus de vendre à un prix minimum’ rappelait ‘il est entendu que le prix de cession minimum pour 100% des titres souhaité par les actionnaires est de 15m€. (..) Dans le cas où il serait décidé par les actionnaires de ne pas procéder à la cession, malgré la réception d’une offre ferme, après due diligence, comportant une valeur des titres minimum de 15m€, il sera versé à Clairfield international un honoraire de dédommagement de 300 000 euros ht.’
La localisation au sein du contrat du sous-chapitre ‘honoraire de dédommagement en cas de refus de vendre à un prix minimum’, située après le sous-chapitre ‘honoraires’ ne permet pas de retenir que l’honoraire de succès était conditionné à la présentation d’un acquéreur au prix minimum. Il s’agissait, certes, d’un objectif à atteindre, mais non d’une condition d’obtention de la rémunération forfaitaire ‘fixe’ de 350 000 euros HT.
Ainsi, la clause d’honoraire d’intermédiaire, qui se situe dans le sous-chapitre ‘durée’ n’était pas non plus liée à une cession au prix minimal de 15 000 000 euros.
B – Sur la mission de la société Clairfield international
Le contrat précité décrivait ainsi la mission de la société prestataire :
‘- préparer, dans un but d’optimisation de la valeur de cession, les documents nécessaires pour présenter la société aux acquéreurs potentiels (ci-après dénommés les ‘acquéreurs’) comprenant le memorandum d’information décrivant l’historique, la structure juridique, les activités, la propriété intellectuelle, le positionnement concurrentiel, l’organisation, les perspectives de développement, la situation financière, les états financiers historiques et prévisionnels avec les hypothèses retenues pour leur construction/’business plan’), un profil anonyme, et une ‘management présentation’ ;
– effectuer une approche de valorisation affinée de la société (..) ;
– identifier les acquéreurs susceptibles d’acquérir jusqu’à 100% du capital de la société ;
– contacter les acquéreurs pressentis (…) ;
– coordonner et superviser la phase de data-room électronique en liaison avec le prestataire externe (…) ;
– conduire les négociations pour en optimiser l’ensemble des conditions au mieux des intérêts des actionnaires et envisager les meilleurs schémas juridiques et financiers en relation avec l’opération ;
– coordonner avec les avocats choisis par les actionnaires la rédaction de la documentation juridique’.
Les opérations étaient prévues sur un calendrier indicatif de 8 mois minimum, entre mai-juin 2018 et début 2019.
C – Sur l’exécution de la mission et la réunion des conditions de jeu de la clause d’honoraire d’intermédiaire
Sont versés aux débats par la société Clairfield international :
– le mémorandum d’information sur la société Catidom, intitulé ‘projet calvi’, réalisé en juin 2018 ;
– la copie et traduction d’une ‘offre sans engagement relative au projet Calvi’ reçue par mail le 9 novembre 2018 de M. [E] [F], représentant légal de la société Coster ;
– des échanges de mails entre M. [T], chargé d’exécuter la mission litigieuse au sein de la société Clairfield et M. [V], missionné par la société Coster, courant novembre 2018, le premier cherchant à obtenir une amélioration de l’offre financière présentée par l’acquéreur potentiel ;
– des échanges de courriels entre M. [T] et M. [N] courant décembre 2018, mars, avril et mai 2019 démontrant la recherche de potentiels acquéreurs par M. [T] et la conduite de négociations ;
– une actualisation du mémorandum d’information au 12 avril 2019.
Il résulte de ces éléments que la société Clairfield a bien réalisé la grande majorité de sa mission, et a assumé la conduite des négociations avec des acquéreurs potentiels, la fin de la mission n’ayant pas été réalisée parce qu’aucun des candidats n’avait reçu l’agrément des actionnaires, soit de la société [N].
Par ailleurs, les termes du contrat ne définissaient pas le terme acquéreur de façon précise, et l’honoraire d’intermédiaire était dû dès lors qu’une cession partielle ou totale des actions ou actifs de la société Catidom était réalisée au profit de ‘l’un des acquéreurs avec lesquels Clairfield international aura été en contact dans le cadre de la présente mission’. Il est possible d’imaginer que cette clause permet d’indemniser la société Clairfield de l’utilisation des documents établis par ses soins, et que la durée fixée soit considérée comme celle de validité des mémorandums de présentation de la société Catidom.
Or, la société Coster a bien été en contact avec la société Clairfield, et le terme acquéreur ne peut se limiter aux contacts listés par M. [T] dans son mail du 7 mai 2019 adressé à M. [N], d’autant que son contenu énonce ‘un teaser a été adressé, en début de semaine, à 14 nouveaux acquéreurs potentiels que nous avons sélectionnés à partir de leur spécialité en capital développement ; 6 ont déjà accès au mémorandum (nda déjà signés).’ Par conséquent, la société Coster, qui avait bénéficié en 2018 du mémorandum établi par la société Clairfield et formulé une offre, doit bien être qualifiée d’acquéreur.
Ensuite, le fait que la société Coster ait été éventuellement un client de la société Catidom et que la société [N] industries ait présenté ou non cet acquéreur potentiel à la société Clairfield international est indifférent et n’était pas une condition de rémunération, celle-ci impliquant uniquement que la société Clairfield ait bien remis le mémorandum et conduit des négociations avec l’acquéreur.
En dernier lieu, il résulte des énonciations des parties et n’est contesté par aucune d’elles le fait que la société Coster a bien acquis une partie, puis la totalité des actions de la société Catidom, dans le délai de deux ans suivant l’expiration du contrat, soit avant le 4 mai 2021.
Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu’il a retenu que l’honoraire d’intermédiaire inclu dans le sous-chapitre ‘durée’ était bien dû par la société [N] industries à la société Clairfield international.
III- Sur la demande de dommages et intérêts
L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.
La société Clairfield estime que l’absence d’information par la société [N] industries de la cession de la société Catidom réalisée au bénéfice de la société Coster relève de la mauvaise foi. L’intimée ne démontre toutefois pas que cette absence d’information soit autre chose que de la négligence, outre le fait que le contrat était sujet à interprétation, de sorte que la preuve d’une faute de la société appelante n’est pas démontrée.
Le jugement de première instance sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour indemnisation d’une résistance abusive de la société [N] industries.
IV- Sur les demandes accessoires
Succombant en son appel, la société [N] industries supportera les dépens de l’instance, ainsi qu’une indemnité procédurale au bénéfice de la société Clairfield de 2 000 euros.
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société [N] industries aux dépens de l’instance d’appel,
Condamne la société [N] industries à payer à la société Clairfield international la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 09 avril 2024
à
la SELARL BOLLONJEON
Me Marine BICHET
Copie exécutoire délivrée le 09 avril 2024
à
Me Marine BICHET