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Une société n’encourt aucune condamnation si elle justifie, pour ses visuels, travailler avec le même studio photos qui a utilisé le même décor que celui de ses concurrents pour plusieurs de ses produits.
En l’occurrence, il s’agit d’un décor régulièrement proposé par le studio à ses clients, et il est en effet ‘banal’ de présenter à des fins publicitaires un produit à fonction culinaire au sein d’une cuisine : une cuisine avec des carreaux blancs et un plan de travail en bois sont des éléments communs, qui ne présentent pas d’originalité particulière et qui correspondent également aux tendances du moment. |
→ Résumé de l’affaireLa SAS Béaba et la SAS Babymoov Group sont en concurrence sur le marché des articles de puériculture. Un litige a éclaté entre les deux sociétés concernant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme. La SAS Béaba a accusé la SAS Babymoov Group de reproduire ses produits et marques, créant ainsi un risque de confusion pour les consommateurs. La SAS Béaba a demandé des mesures d’interdiction et de rappel des produits litigieux, ainsi que des dommages et intérêts. Le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a débouté la SAS Béaba de ses demandes, mais cette dernière a interjeté appel. La SAS Béaba demande à la cour d’infirmer le jugement et de condamner la SAS Babymoov Group pour ses pratiques déloyales. La SAS Babymoov Group, de son côté, demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner la SAS Béaba à lui verser des dommages et intérêts.
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→ Les points essentielsContexte de l’affaireLa SAS Béaba et la SAS Babymoov Group sont en concurrence sur le marché des articles de puériculture. La SAS Béaba accuse la SAS Babymoov Group de concurrence déloyale et de parasitisme en s’appuyant sur sa notoriété pour promouvoir ses propres produits, créant ainsi un risque de confusion dans l’esprit du public. Actes parasitaires et fautifs reprochés à la SAS Babymoov GroupLa SAS Béaba reproche à la SAS Babymoov Group d’avoir copié certains de ses produits, notamment le Nutribaby +XL bleu nuit/cuivre/rose poudré et son emballage. Cependant, la cour constate que les différences entre les produits et les emballages ne créent pas de risque de confusion dans l’esprit du consommateur. Utilisation des marques de la SAS Béaba pour le référencement des produits BabymoovLa SAS Béaba accuse la SAS Babymoov Group d’avoir utilisé ses marques déposées comme mots-clés pour le référencement de ses produits sur la plateforme Amazon. Cependant, la cour conclut que la SAS Babymoov Group n’a pas créé de risque de confusion entre ses produits et ceux de la SAS Béaba. Reproduction des mécanismes de promotions et de la marque BabycookLa SAS Béaba reproche à la SAS Babymoov Group d’avoir reproduit ses mécanismes de promotions et d’avoir utilisé la marque Babycook pour promouvoir son produit Nutribaby sur Instagram. Cependant, la cour estime que ces reproches ne sont pas valablement établis. Décision de la courLa cour conclut que les actes de concurrence déloyale et de parasitisme allégués par la SAS Béaba ne sont pas démontrés. Aucun risque de confusion n’existe entre les produits des deux sociétés. Par conséquent, l’ensemble des demandes de la SAS Béaba est rejeté, et le jugement est confirmé. La SAS Béaba est condamnée aux dépens d’appel et à verser une somme de 5 000 euros à la SAS Babymoov Group au titre des frais irrépétibles exposés en appel. Les montants alloués dans cette affaire: – SAS Béaba doit payer à SAS Babymoov Group : 5 000 euros (selon l’article 700 du code de procédure civile)
– SAS Béaba doit payer les dépens d’appel. |
→ Réglementation applicableLa protection contre la concurrence déloyale se fonde sur l’article 1240 du code civil: c’est la faute qui est au coeur de la matière. Copier la production non protégée d’autrui, ou le signe sous lequel ce dernier fait commerce, ne caractérise pas en soi une telle faute. C’est la manière de le faire qui peut révéler qu’on capte ainsi indûment le profit de ses investissements, ou que l’on lui cause préjudice en brouillant les repères du public concerné.
En matière de concurrence déloyale, ni l’imitation, ni la reproduction servile ne suffisent à engager la responsabilité civile de son auteur ; il faut encore qu’elles soient fautives, puisqu’il n’existe pas de droit exclusif et donc point d’interdiction de copie. Il faut examiner, au regard de l’existence d’un risque de confusion ou d’une captation parasitaire, l’ensemble des facteurs soumis au débat, tels que l’ancienneté d’usage de l’objet copié, la réalité du public concerné, l’intensité de la reconnaissance acquise auprès de ce public, le caractère plus ou moins arbitraire, original, distinctif ou fonctionnel de cet objet, le caractère systématique ou répétitif de la copie, bref de façon générale, évaluer tout ce qui peut être utile à conclure, ou à exclure, que cette imitation soit fautive et dommageable. (Rapp. C. Cass. 2007 relatif à Cass. Com., 12 juin 2007, n°05-17.349). |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT
– Me Marie DUVERNE-HANACHOWICZ de la SELARL MDH AVOCAT – Me Henri ARSAC de la SCP ARSAC |
→ Mots clefs associés & définitions– Protection contre la concurrence déloyale
– Faute – Imitation – Reproduction servile – Risque de confusion – Captation parasitaire – Public concerné – Notoriété – Intentionnalité – Imprudence – Négligence – Consommateur d’attention moyenne – Référencement – Amazon – Marques déposées – Mots-clés – Plateforme Amazon – Promotion – Réseaux sociaux – Dépens d’appel – Frais irrépétibles – Protection contre la concurrence déloyale : Mesures légales visant à empêcher les pratiques commerciales qui trompent ou sont susceptibles de tromper le consommateur et qui affectent ou sont susceptibles d’affecter la concurrence sur le marché.
– Faute : Tout acte ou omission qui viole une norme juridique ou un devoir de soin, entraînant un préjudice pour autrui. – Imitation : Acte de copier un produit, un service ou une idée sans autorisation, pouvant induire en erreur les consommateurs sur l’origine ou la qualité. – Reproduction servile : Copie exacte et intégrale d’un produit ou d’une œuvre protégée sans l’autorisation du titulaire des droits. – Risque de confusion : Probabilité que le consommateur moyen puisse croire que deux produits ou services proviennent de la même source ou de sources liées en raison de leur similitude. – Captation parasitaire : Exploitation non autorisée des efforts ou de la réputation d’autrui, souvent en imitant des produits ou services pour tirer profit de leur notoriété. – Public concerné : Groupe de consommateurs ciblés par un produit ou un service, dont les caractéristiques et les attentes sont prises en compte dans l’évaluation de la concurrence déloyale. – Notoriété : Degré de reconnaissance d’une marque, d’un produit ou d’une entreprise par le public, souvent utilisé comme critère dans les cas de concurrence déloyale ou de protection des marques. – Intentionnalité : État d’esprit caractérisé par la volonté de commettre un acte, sachant que les conséquences en découleront. – Imprudence : Manque de précaution ou de diligence raisonnable dans l’exécution d’un acte, pouvant causer un dommage. – Négligence : Manquement à un devoir de soin, entraînant un risque ou un dommage que la personne aurait dû raisonnablement prévoir. – Consommateur d’attention moyenne : Concept juridique désignant un consommateur hypothétique doté d’un niveau moyen d’attention, utilisé pour évaluer le risque de confusion. – Référencement : Processus d’amélioration de la visibilité d’un site web ou d’un produit sur les moteurs de recherche ou les plateformes en ligne. – Amazon : Plateforme de commerce électronique où les vendeurs peuvent proposer des produits aux consommateurs. – Marques déposées : Signes distinctifs enregistrés officiellement pour identifier les produits ou services d’une entreprise et les protéger contre l’utilisation non autorisée. – Mots-clés : Termes utilisés pour décrire le contenu d’un site web ou d’un produit, importants pour le référencement sur les moteurs de recherche et les plateformes. – Plateforme Amazon : Système en ligne utilisé par Amazon pour faciliter la vente de produits entre vendeurs et acheteurs. – Promotion : Activités marketing destinées à augmenter la visibilité et les ventes d’un produit ou service. – Réseaux sociaux : Plateformes en ligne où les utilisateurs peuvent créer des profils, partager des contenus et interagir. – Instagram : Réseau social centré sur le partage de photos et de vidéos, utilisé également pour des activités promotionnelles. – Dépens d’appel : Frais de justice engagés lors d’une procédure d’appel, généralement attribués à la partie perdante. – Frais irrépétibles : Frais de justice qui ne sont pas couverts par les dépens et que la partie gagnante peut demander à la partie perdante de rembourser. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°147
DU : 20 Mars 2024
N° RG 23/00165 – N° Portalis DBVU-V-B7H-F6H3
VTD
Arrêt rendu le vingt Mars deux mille vingt quatre
décision dont appel : Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce de CLERMONT FERRAND, décision attaquée en date du 12 Janvier 2023, enregistrée sous le n° 2020010495
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Virginie THEUIL-DIF, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
S.A.S. BEABA
immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 352 684 377
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentants: Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND et Me Marie DUVERNE-HANACHOWICZ de la SELARL MDH AVOCAT, avocat au barreau de LYON
APPELANTE
ET :
S.A.S. BABYMOOV GROUP
immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le numéro 413 027 129
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentant : Me Henri ARSAC de la SCP ARSAC, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
INTIMÉE
DEBATS : A l’audience publique du 24 janvier 2024 Madame THEUIL-DIF a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 13 mars 2024.
ARRET :
Prononcé publiquement le 20 Mars 2024, arpès prorogé du délibéré initialement prévu le 13 mars 2024, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Cécile CHEBANCE, Greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SAS Béaba et la SAS Babymoov Group sont des sociétés spécialisées dans la fabrication et la commercialisation d’articles de puériculture.
La première créée le 15 novembre 1990 a son siège social à [Localité 5], la seconde créée le 1er août 1997 a son siège social à Clermont-Ferrand.
Elles sont en situation de concurrence directe sur un même marché.
Un premier litige a opposé les parties devant le juge des référés parisien. En effet, par ordonnance du 6 novembre 2020, le président du tribunal de commerce de Paris statuant en référé a dit que ‘la diffusion par Béaba de la lettre circulaire de septembre 2020 à des acteurs de la distribution d’articles de puériculture constitue un trouble illicite et un acte de concurrence déloyale vis-à-vis de Babymoov’, et a ordonné à la SAS Béaba :
– de ‘cesser les pratiques litigieuses, notamment cesser toute référence faite par les salariés de Béaba au courrier litigieux de la fin du mois de septembre 2020, dans leurs relations avec les acteurs de la distribution d’articles de puériculture’,
– de ‘communiquer à Babymoov dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’ordonnance, la liste de l’exhaustivité des destinataires auxquels Béaba a adressé son courrier dénigrant’,
– de ‘envoyer à l’ensemble des destinataires du courrier dénigrant dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’ordonnance, un nouveau courrier en contredisant les termes et confirmant les regrets de Béaba ainsi que la loyauté de la concurrence animée par Babymoov Group’,
– et de ‘publier dans un délai de 8 jours à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir sur la page d’accueil de son site internet www.beaba.com/fr/, un démenti’.
La SAS Béaba a interjeté appel de l’ordonnance, et par arrêt du 25 juin 2021, la cour d’appel de Paris a seulement confirmé l’ordonnance en ce qu’elle a dit que la diffusion par la SAS Béaba de la lettre circulaire de septembre 2020 à des acteurs de la distribution d’articles de puériculture constituait un trouble illicite et un acte de concurrence déloyale vis-à-vis de la SAS Babymoov Group, et elle a a ordonné à la SAS Béaba de cesser toute pratique de dénigrement à l’égard de la SAS Babymoov Group à l’instar de la lettre circulaire adressée en septembre 2020 à ses distributeurs, et ce, sous astreinte provisoire de 10 000 euros par infraction constatée, pendant un délai de trois mois courant à compter du lendemain de la signification de l’apprêt.
Parallèlement, par acte d’huissier du 2 décembre 2020, la SAS Béaba a fait assigner la SAS Babymoov Group devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, au visa des articles 1240, 1241 du code civil, L.131-1 et L.131-2 du code des procédures civiles d’exécution, aux fins de voir :
– dire et juger que les sociétés Béaba et Babymoov Group sont en situation de concurrence directe, puisqu’elles fabriquent et commercialisent des articles de puériculture à destination d’une même clientèle;
– dire et juger que la SAS Babymoov Group reproduit pour ses propres produits, les éléments esthétiques caractéristiques des produits de la SAS Béaba quelques temps après leur sortie, ce qui conduit inévitablement à créer un risque de confusion dans l’esprit du public;
– dire et juger que la SAS Babymoov Group s’est appropriée et utilise illégitimement les appellations de produits et marques déposées de la SAS Béaba, à l’occasion de son référencement sur internet, notamment sur Amazon sans y avoir été autorisé par la SAS Béaba ;
– dire et juger que ces violations répétées procurent un avantage illicite à la SAS Babymoov Group, lui permettant d’accroître sa visibilité de manière frauduleuse sur le marché et de profiter de la notoriété dont jouissent les produits et la SAS Béaba, sans bourse délier ;
– dire et juger que ces agissements constituent des actes de concurrence déloyale et de parasitisme à l’égard de la SAS Béaba engageant la responsabilité délictuelle de la SAS Babymoov Group;
– dire et juger que la SAS Babymoov Group a causé de ce fait un préjudice à la SAS Béaba ;
– en conséquence, ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser ses agissements déloyaux, notamment tout acte de parasitisme, pour l’avenir et sous astreinte de 1 000 euros par acte fautif
constaté ;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, la commercialisation, la diffusion, la représentation, de manière directe ou indirecte par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, de son produit Nutribaby + XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, ainsi que son emballage reprenant les mêmes coloris avec un motif géométrique origami, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de rappeler tous les produits Nutribaby+XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, disponibles chez tous les revendeurs de la SAS Babymoov Group, ainsi que dans tout autre local où serait détenu les exemplaires du produit litigieux, dans un délai de trente jours, à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, l’utilisation, l’achat, l’enregistrement de tous mots-dés et références, de manière directe ou indirecte par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, sur tout support et en quelque lieu que ce soit, y compris tout site marchant quel qu’il soit, reprenant les appellations de produits et marques déposées par la SAS Béaba, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date ;
– condamner la SAS Babymoov Group à payer à la SAS Béaba la somme de 445 856,40 euros, en réparation des préjudices qu’elle subit et qui résultent des pratiques illicites et actes de concurrence déloyale et de parasitisme de la SAS Babymoov Group;
– condamner la SAS Babymoov Group à verser à la SASBéaba la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonner la publication des condamnations prononcées à l’encontre de la SAS Babymoov Group dans 4 revues professionnelles du choix de la SAS Béaba et à la charge de la SAS Babymoov Group, ainsi que sur le site internet de la SAS Babymoov Group au moyen de l’apposition d’une bannière en caractères apparents sur la page d’accueil (https://www.babymoov.com) et ce, pendant une durée de 2 mois à compter de la signification du jugement à intervenir;
– condamner la SAS Babymoov Group aux entiers dépens de l’instance.
Dans ses dernières conclusions, la SAS Béaba a en outre sollicité de :
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, la commercialisation, la diffusion, la représentation, de manière directe ou indirecte par personne
interposée et sous quelque forme que ce soit, de son produit Nutribaby Glass avec le coloris vert eucalyptus, ainsi que sa gamme de vaisselle d’apprentissage en silicone et sa portion isotherme en inox, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de rappeler tous les Produits Nutribaby Glass avec le coloris vert eucalyptus, tous les produits de la gamme de vaisselle d’apprentissage en silicone ainsi que la portion isotherme inox, disponibles chez tous les revendeurs de la SAS Babymoov Group, ainsi que dans tout autre local où serait détenu les exemplaires du produit litigieux, dans un délai de trente jours, à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par jugement du 12 janvier 2023, le tribunal a :
– dit la SAS Béaba recevable mais mal fondée en ses demandes ;
– en conséquence, débouté la SAS Béaba de l’ensemble de ses demandes ;
– condamné la SAS Béaba à payer et porter à la SAS Babymoov Group la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SAS Béaba aux dépens de l’instance.
Le tribunal a estimé que la SAS Babumoov Group n’avait créé aucun risque de confusion entre ses produits et ceux commercialisés par la SAS Beaba.
La SAS Béaba a interjeté appel du jugement le 26 janvier 2023.
Par conclusions déposées et notifiées le 13 septembre 2023, l’appelante demande à la cour, au visa des articles 1240 et 1241 du code civil, L.131-1 et L.131-2 du code des procédures civiles d’exécution, de l’article 700 du code de procédure civile, de :
– infirmer le jugement en ce qu’il :
l’a dite recevable mais mal fondée en ses demandes ;
l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes ;
l’a condamnée à payer et porter à la SAS Babymoov Group la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
l’a condamnée aux dépens de l’instance ;
– statuant à nouveau :
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser ses agissements déloyaux, notamment tout acte de parasitisme, pour l’avenir et sous astreinte de 1 000 euros par acte fautif constaté;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, la commercialisation, la diffusion, la représentation, de manière directe ou indirecte par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, de son produit Nutribaby + XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, ainsi que son emballage reprenant les mêmes coloris avec un motif géométrique origami, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date ;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, la commercialisation, la diffusion, la représentation, de manière directe ou indirecte par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, de son produit Nutribaby + XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, son produit Nutribaby Glass avec le coloris vert eucalyptus, son produit Nutribaby avec le coloris opale green ainsi que sa gamme de vaisselle d’apprentissage en silicone et sa portion isotherme en inox, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de rappeler tous les produits Nutribaby + XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, tous les produits son produit Nutribaby + XL avec les coloris bleu nuit, cuivre et rose poudré, Nutribaby Glass avec le coloris vert eucalyptus, son produit Nutribaby avec le coloris opale green, tous les produits de la gamme de vaisselle d’apprentissage en silicone ainsi que la portion isotherme inox, disponibles chez tous les revendeurs de la SAS Babymoov Group, ainsi que dans tout autre local où serait détenu les exemplaires du produit litigieux, dans un délai de trente jours, à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
– ordonner à la SAS Babymoov Group de cesser immédiatement et pour l’avenir, l’utilisation, l’achat, l’enregistrement de tout mots-clés et références, de manière directe ou indirecte par personne interposée et sous quelque forme que ce soit, sur tout support et en quelque lieu que ce soit, y compris tout site marchant quel qu’il soit, reprenant les appellations de produits et marques qu’elle a déposées, dans un délai de 48 heures à compter de la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 1 000 euros pour chaque violation qui serait constatée après cette date;
– condamner la SAS Babymoov Group à lui payer la somme de 445 856,40 euros, en réparation des préjudices qu’elle subit et qui résultent des pratiques illicites et actes de concurrence déloyale et de parasitisme de la SAS Babymoov Group ;
– condamner la SAS Babymoov Group à lui verser la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
– ordonner la publication des condamnations prononcées à l’encontre de la SAS Babymoov Group dans 4 revues professionnelles de son choix et à la charge de la SAS Babymoov Group, ainsi que sur le site internet de la SAS Babymoov Group au moyen de l’apposition d’une bannière en caractères apparents sur la page d’accueil (https://www.babymoov.com) et ce, pendant une durée de 2 mois à compter de la signification du jugement à intervenir;
– débouter la SAS Babymoov Group de ses demandes ;
– condamner la SAS Babymoov Group aux entiers dépens de l’instance.
Aux termes de ses conclusions déposées et notifiées le 17 juillet 2023, la SAS Babymoov Group demande à la cour, au visa de l’article1240 du code civil, 9 et 700 du code de procédure civile, de :
– confirmer les dispositions du jugement ;
– débouter en conséquence la SAS Béaba de son appel ;
– y ajoutant :
– condamner la SAS Béaba à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties, à leurs dernières conclusions.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2023.
La protection contre la concurrence déloyale se fonde sur l’article 1240 du code civil: c’est la faute qui est au coeur de la matière. Copier la production non protégée d’autrui, ou le signe sous lequel ce dernier fait commerce, ne caractérise pas en soi une telle faute. C’est la manière de le faire qui peut révéler qu’on capte ainsi indûment le profit de ses investissements, ou que l’on lui cause préjudice en brouillant les repères du public concerné.
En matière de concurrence déloyale, ni l’imitation, ni la reproduction servile ne suffisent à engager la responsabilité civile de son auteur ; il faut encore qu’elles soient fautives, puisqu’il n’existe pas de droit exclusif et donc point d’interdiction de copie. Il faut examiner, au regard de l’existence d’un risque de confusion ou d’une captation parasitaire, l’ensemble des facteurs soumis au débat, tels que l’ancienneté d’usage de l’objet copié, la réalité du public concerné, l’intensité de la reconnaissance acquise auprès de ce public, le caractère plus ou moins arbitraire, original, distinctif ou fonctionnel de cet objet, le caractère systématique ou répétitif de la copie, bref de façon générale, évaluer tout ce qui peut être utile à conclure, ou à exclure, que cette imitation soit fautive et dommageable. (Rapp. C. Cass. 2007 relatif à Cass. Com., 12 juin 2007, n°05-17.349).
La faute sera souvent caractérisée par la démonstration de la création d’un risque de confusion.
Il sera précisé qu’en matière de concurrence déloyale par création d’un risque de confusion, il n’est pas nécessaire que la recherche de la confusion soit intentionnelle, l’imprudence ou la négligence étant punissable sur le fondement de l’article 1240. Il en va différemment lorsqu’une faute de parasitisme est invoquée. Parasitisme et concurrence déloyale par création d’un risque de confusion se distinguent au sens où le simple concurrent déloyal recherche la confusion et de le détournement de clientèle alors que le ‘parasite’ copie avec la volonté de se placer dans le sillage du parasité et de bénéficier de sa notoriété, indépendamment de toute recherche d’une confusion dans l’esprit du consommateur.
La référence au consommateur d’attention moyenne est l’étalon à l’aune duquel se trouve apprécié le risque de confusion. L’appréciation du risque de confusion s’effectue de façon concrète en tenant compte des modalités d’usage du signe et par référence à l’impression d’ensemble dégagée par les produits ou services litigieux. Pour apprécier le risque de confusion, il faut tenir compte des ressemblances entre original et reproduction et non des différences, et rechercher si l’impression d’ensemble est susceptible de générer une confusion dans l’esprit du consommateur.
En l’espèce, il n’est pas contesté que la SAS Béaba et la SAS Babymoov Group, sociétés spécialisées dans la fabrication et la commercialisation d’articles de puériculture, sont en situation de concurrence directe sur un même marché.
La SAS Béaba reproche à la SAS Babymoov Group de s’appuyer sur sa notoriété pour promouvoir ses propres produits, ce qui entraîne un risque de confusion dans l’esprit du public, résultant d’une similitude visuelle et conceptuelle sciemment entretenue par la SAS Babymoov Group entre ses produits et ceux de la SAS Béaba. Elle lui reproche également une utilisation frauduleuse de ses marques pour le référencement de ses produits. Elle qualifie ces agissements d’actes de concurrence déloyale et de parasitisme.
Elle considère que le tribunal a pris chacun des produits isolément, a constaté des différences entre eux, et a conclu à l’absence de risque de confusion, alors qu’il lui était demandé de juger que l’ensemble des agissements de la SAS Babymoov Group, qui s’immisce systématiquement dans son sillage, était déloyal et fautif.
– Sur les actes parasitaires et fautifs reprochés à la SAS Babymoov Group
Afin de caractériser la concurrence déloyale, la SAS Béaba s’est livrée à une analyse comparative de certains de ses produits avec ceux distribués par la SAS Babymoov Group. Il convient de reprendre la liste des produits incriminés.
le Nutribaby +XL bleu nuit/cuivre/ rose poudré et son emballage
Il s’agit du seul produit qui était visé initialement dans l’assignation.
> La SAS Béaba soutient que quatre mois après le lancement de son produit Babycook Neo en juin 2018, pour lequel elle avait choisi un assortiment de trois coloris original et innovant (bleu nuit, cuivre et rose poudré), la SAS Babymoov Group a adopté le même agencement de couleurs pour son produit concurrent le Nutribaby +XL; que la réutilisation de ces trois coloris démontre la volonté de la SAS Babymoov Group de se placer dans son sillage du fait du succès de ce produit ; que si prises séparément, ces couleurs ne sont pas originales car déjà employées dans divers produits monochromes, l’association des trois dans le domaine de la puériculture et des robots culinaires destinés à la petite enfance constitue une innovation originale sur laquelle elle a communiqué pour créer une identification de l’association des couleurs à sa marque ; que cette alliance de coloris constitue l’élément principal et caractéristique de sa nouvelle gamme de produits sortie depuis juin 2018.
Elle reconnaît que le Nutribaby +XL n’est pas une copie de son Babycook Neo, toutefois elle ne fonde pas son action sur le fondement de la contrefaçon de ses droits d’auteur, mais sur le parasitisme.
Il sera au préalable constaté qu’en effet, le Nutribaby +XL de la SAS Babymoov Group et le produit Babycook Neo de la SAS Béaba présentent un design très différent, que ce soit au niveau esthétique, de la forme, des dimensions ou des fonctionnalités (le Babycook est composé de deux éléments alors que le Nutribaby de trois ; le premier contient un seul bol, le second un bol et des emplacements permettant de cuire à la vapeur ; et les commandes des produits ne se situent pas au même endroit).
S’agissant de la répartition des trois couleurs, elle est également différente entre les deux produits, sachant en outre que le Babycook contient un bol blanc, couleur qui ne figure pas sur le Nutribaby.
La SAS Babymoov Group fait en outre observer de manière pertinente que le produit Babycook est commercialisé dans d’autres couleurs, de même que son Nutribaby. Ainsi, les coloris bleu nuit/cuivre/rose poudré, comme l’association de ces trois couleurs, ne peuvent être considérés comme un élément caractéristique et distinctif de la marque ou des produits Béaba.
La SAS Babymoov Group justifie en pages 13 à 19 de ses conclusions, par la reproduction de photographies que de nombreux produits d’électroménager, de puériculture ou de décoration reprennent ces mêmes coloris. Ainsi, l’assemblage du bleu et du rose sur un produit avec une couleur plus neutre comme le cuivre s’inscrit dans l’évolution du marché visant à offrir des produits mixtes et moins genrés. Leur assemblage est le reflet d’une tendance commune au moment de la conception des produits litigieux. Le tribunal a donc à juste titre considéré que le choix de ces coloris, somme toute communs, par la SAS Béaba comme par la SAS Babymoov Group, ne paraissait pas dicté par le souhait d’imiter son concurrent, mais davantage par celui de coller aux tendances du marché.
De surcroît, la SAS Babymoov Group qui a sorti le produit litigieux en novembre 2018, justifie avoir envisagé les couleurs de son produit dès le mois d’octobre 2017, la décision définitive ayant été prise au mois de janvier 2018. Or, le Babycook Neo bleu nuit/cuivre/rose poudré de la SAS Béaba n’a été commercialisé qu’en juin2018.
Outre le fait que la SAS Béaba ne justifie pas d’un droit exclusif sur l’association de ces trois couleurs, la seule reprise d’une ou plusieurs couleurs ne peut constituer à elle seule un risque de confusion.
Il n’existe ainsi aucun risque de confusion entre les deux produits et les marques Béaba ou Babymoov.
> S’agissant toujours du produit Nutribaby +XL bleu nuit/cuivre/ rose poudré, la SAS Béaba soutient que pour son emballage, la SAS Babymoov Group a repris le design origami dessiné par ses soins à l’occasion d’une édition spéciale de son Babycook Neo et les couleurs de l’emballage de son Babycook Neo ; que la SAS Babymoov Group s’inspire en conséquence largement des idées qui ont fait le succès des produits de la SAS Béaba pour en tirer avantage sans bourse délier ; que la reprise de la combinaison des couleurs et du design origami de l’emballage démontre que l’intimée tente de créer la confusion dans l’esprit des utilisateurs pour profiter de l’avantage concurrentiel que la SAS Béaba s’est créée par ses choix spécifiques de formes et de couleurs.
La SAS Béaba reproche ainsi à la SAS Babymoov Group la réalisation d’un emballage pour son produit Nutribaby +XL similaire non pas à celui de son produit Babycook Neo lancé en juin 2018, mais à l’emballage de son produit précédent le Babycook.
Or, la SAS Babymoov Group établit avoir utilisé dès janvier 2018, un graphisme de type origami pour sa gamme de vaisselle où l’on retrouvait des triangles identiques positionnés sur un quadrillage.
De surcroît, ce décor origami par l’assemblage de triangles existe déjà sur de nombreux articles de puériculture.
Sur ce point également, la SAS Béaba ne justifie pas d’un droit exclusif sur l’utilisation d’un décor origami composé d’un assemblage de triangles, en produisant par exemple un dépôt de modèle.
Enfin, la comparaison des assemblages conduit à la conclusion qu’il n’existe aucun risque de confusion entre les produits et les marques : ainsi que l’a relevé le tribunal, l’identification des marques et des produits sur chacun des emballages est claire, l’emballage du Babycook associe majoritairement des couleurs claires et celui du Nutribaby +XL majoritairement des couleurs sombres, les triangles sont de tailles différentes et agencés différemment, et les emballages comme les produits sont de tailles différentes.
> La SAS Béaba soutient également que la SAS Babymoov Group s’est largement inspirée de la présentation et de l’ambiance de lancement du Babycook de Béaba pour la sortie de son Nutribaby +XL : elle a mis en scène son produit sur un plan de travail en bois avec un fond de cuisine à carreaux blancs. Elle en conclut que la combinaison de couleurs, la similarité d’emballage et la présentation du produit conduisent le consommateur à donner aux produits commercialisés par les deux sociétés une origine commune ; qu’il en résulte pour l’utilisateur une impression visuelle d’ensemble susceptible d’entraîner un risque de confusion.
Toutefois, la SAS Babymoov Group justifie travailler avec le même studio photos qui a utilisé ce même décor pour plusieurs de ses produits. Il s’agit d’un décor régulièrement proposé par le studio à ses clients, et il est en effet ‘banal’ de présenter à des fins publicitaires un produit à fonction culinaire au sein d’une cuisine : une cuisine avec des carreaux blancs et un plan de travail en bois sont des éléments communs, qui ne présentent pas d’originalité particulière et qui correspondent également aux tendances du moment.
Le tribunal a énoncé : ‘Considérant la liste des reproches formulés dans ses dernières demandes à l’encontre de la SAS Babymoov Group par la SAS Béaba, le tribunal constatera que la SAS Babymoov Group n’a commis aucun acte de parasitisme’.
L’appelante reproche au tribunal de ne pas avoir analysé l’ensemble des comportements de la SAS Babymoov Group dans leur globalité. Toutefois, il est nécessaire dans un premier temps d’analyser chacun des faits reprochés et ensuite de les apprécier dans leur globalité.
Outre le fait que la chronologie des événements ne permet pas d’affirmer que la SAS Babymoov Group a tenté de ‘copier’ les produits ou les stratégies de la SAS Béaba, les produits ne se ressemblent pas, l’emballage incriminé ne correspond pas au produit qui aurait été ‘imité’ et la présentation du Nutribaby+XL est intervenue dans un cadre excessivement banal (une cuisine à carreaux blancs avec un plan de travail en bois). Il n’existe aucun risque de confusion dans l’esprit du consommateur contrairement à ce que prétend la SAS Béaba, et il ne suffit pas d’affirmer qu’il est nécessaire d’apprécier les faits de manière globale pour considérer que la démonstration d’actes de parasitisme serait établie. La SAS Babymoov Group mise en cause par son concurrent se trouve bien dans l’obligation de démontrer point par point que les actes reprochés ne correspondent pas à la réalité.
les autres produits
> La SAS Béaba soutient que la SAS Babymoov persévère et réitère son comportement déloyal à l’occasion de la sortie d’une nouvelle version de son robot-cuiseur : le Nutribaby Glass qui reprend le coloris vert eucalyptus d’un autre modèle de la gamme Babycook Neo de Béaba sorti en novembre 2019. Elle affirme que l’intimée a opté pour exactement le même coloris que celui choisi par Béaba, et il est en outre équipé pour la première fois d’un bol en verre et d’une cuve inox, et d’un bouton de commande unique qui ne figuraient pas sur les versions précédentes, et qui sont spécifiques, selon elle, à Béaba. Elle considère que le Babycook Neo était le seul produit du marché à cumuler un coloris moderne, un bouton unique, un bol en verre et un panier inox; que c’est la combinaison de l’ensemble qui crée la confusion dans l’esprit de la clientèle. Elle ajoute que le prix est identique à son produit alors même qu’il est fabriqué en Chine (le sien est produit en France) ; que ce changement de politique tarifaire a également pour objectif de se placer dans son sillage.
Elle observe également que la SAS Babymoov a lancé son produit Nutribaby Opale Green avec une couleur hautement similaire à celle du Babycook solo/duo Pine Green.
Outre le fait qu’il existe des différences significatives de design et de dimensions entre les deux produits, il n’est pas établi que les coloris verts utilisés par chacune des parties seraient identiques, alors même que la SAS Babymoov Group revendique un vert’sapin’ dont la référence pantone est 5497C.
Par ailleurs, le coloris vert est répandu dans le domaine des produits de puériculture, et au-delà puisque couleur symbole de la nature et de l’environnement. Ainsi que l’a énoncé le tribunal, ce coloris ne constitue pas à l’évidence un élément caractéristique et distinctif de la marque ou des produits Béaba, la SAS Béaba ne versant en outre aucun élément aux débats justifiant d’un droit exclusif sur l’utilisation du ‘vert eucalyptus’.
De surcroît, les bols en verre, le panier en inox, les fonctions vapeur et mixage sont des composants et fonctions purement techniques, très répandus parmi les robot-cuiseurs destinés à l’alimentation des bébés (l’inox est plus résistant à la chaleur que le verre et le plastique, il s’agit d’un matériau promu pour les ustensiles de cuisine en raison de sa forte résistance, des qualités d’hygiène et environnementales). La SAS Babymoov Group expose notamment que le fait de remplacer les bols en plastique par des bols en verre et en inox s’inscrit dans la démarche ‘Greenmoov’ initiée par la société et des actions éco-responsables qu’elle a mises en place. D’évidence, l’adoption de la couleur verte et l’abandon du plastique en faveur du verre ou de l’inox répondent aux attentes actuelles des consommateurs et à une évolution générale des produits dans tous les secteurs.
Enfin, le principe du bouton central ne présente pas une originalité particulière, plusieurs produits concurrents reprennent ce principe, tel que le démontre la SAS Babymoov Group.
Les faits reprochés par la SAS Béaba portent en réalité sur des éléments communs et non-fautifs, reflétant l’exercice d’une concurrence normale.
La SAS Béaba reproche également à la SAS Babymoov Group de s’immiscer dans son sillage à travers la sortie de son préparateur de biberon : elle pointe la ressemblance avec son produit sorti un an avant et dont le nom a la même sonorité ‘Milkeo’ pour Béaba et ‘Milky Now’ pour Babymoov. Elle estime qu’il en va de même s’agissant des portions en verre ou des cuillères en silicone, de la gamme de vaisselles et accessoires repas en silicone, la portion thermos en inox, ou encore de sa chaise haute avec la particularité du design unique des pieds qui a été reproduit.
Elle soutient que dans chacune de ces situations, la SAS Babymoov Group a sorti son produit après elle, parasitant ses efforts et investissements tant en termes de technologie que de design.
Sur ce point, la cour adopte les motifs retenus par le tribunal, à savoir que la cuillère en silicone est un produit manifestement commun sur le marché de la puériculture et que le design des cuillères de la SAS Béaba et de la SAS Babymoov Group est différent, de sorte qu’aucun risque de confusion n’existe ; que les pots en verre, les chaises hautes ou les préparateurs de biberons sont également des produits particulièrement communs sur le marché de la puériculture et que les designs des sociétés Béaba et Babymoov étant très largement différents, il n’existe aucun risque de confusion entre les marques et les produits.
Il convient de surcroît d’observer que la SAS Béaba ne formule aucune demande spécifique relative à ces différents produits.
– Sur l’utilisation des marques de la SAS Béaba en tant que mots-clés pour le référencement des produits Babymoov
> La SAS Béaba soutient que la reproduction par la SAS Babymoov Group des caractéristiques de ses produits s’est accompagnée de l’utilisation par celle-ci de plusieurs marques déposées par la SAS Béaba en tant que mots-clés de référencement sur la plateforme Amazon ; qu’ainsi, lorsqu’un utilisateur recherchant un produit Béaba saisissait l’un de ces mots-clés sur la plateforme Amazon, les produits de la SAS Babymoov Group apparaissaient dans leur résultat de recherche, ce qui constitue un acte de concurrence déloyale lui permettant d’augmenter la visibilité de ses produits et de capter la clientèle de la SAS Béaba. Elle fait valoir que la SAS Babymoov Group a réitéré ses agissements fautifs en 2022.
Elle ajoute que la SAS Babymoov Group plagie sur la plateforme Amazon la présentation et le descriptif des produits Béaba.
Sur le premier point, à savoir l’utilisation des marques de la SAS Béaba par la SAS Babymoov Group en tant que mots-clés pour le référencement sur la plateforme Amazon, le tribunal a justement énoncé qu’Amazon avait confirmé par un courriel du 27 juillet 2020, avoir corrigé dès le 15 mai 2020 le catalogue Babymoov au niveau du vendeur, puis au niveau des produits le 17 juillet 2020 ; qu’il n’était pas contesté que depuis cette date la SAS Babymoov Group n’utilisait plus aucune marque en mots-clés pour le référencement de ses produits sur la plateforme.
Il a en outre relevé que l’affichage des résultats de recherche versé aux débats démontrait qu’il n’existait pas de risque de confusion entre les produits, puisque les produits Béaba s’affichaient, et que le seul bénéfice tiré de l’utilisation de mots-clés constitués par une marque concurrente résidait dans le fait que lorsqu’un client faisait par exemple une recherche sur le produit Babycook de Béaba, il voyait aussi s’afficher les produits concurrents aux fonctions similaires aux côtés des produits de la SAS Béaba.
La cour confirme le jugement en ce qu’il a jugé que la SAS Babymoov Group n’avait créé aucun risque de confusion entre ses produits et ceux commercialisés par la SAS Béaba, et qu’elle n’avait commis aucun acte de concurrence déloyale ou de parasitisme.
Au surplus, la prétendue réitération des faits en décembre 2022 ne repose que sur de simples allégations contenues dans un courrier que la SAS Béaba a elle’même rédigé, et ne sont corroborées par aucun élément de preuve.
Sur le second point, la SAS Babymoov fait justement valoir que la présentation commerciale des produits visibles sur le site marchand d’Amazon résulte de la structure des pages produits pré-établies par la société Amazon dans le cadre du service ‘A+Premium’ qu’elle propose à ses clients. Elle expose que pour mettre en ligne un produit sur le site, elle se contente de sélectionner des options et modules de présentation payants proposés par Amazon sur l’interface du compte ‘Seller Central A+ Premium’. Ces reproches ne sont donc pas fondés.
> La SAS Béaba reproche enfin à la SAS Babymoov Group de reprendre ses mécanismes de promotions, notamment ceux des promotions pour la rentrée 2021 qui ont été identiques, et elle soutient également qu’en décembre 2021, l’intimée a utilisé et reproduit la marque Babycook de la SAS Béaba pour promouvoir son produit Nutribaby sur le réseau social Instagram.
Sur ce dernier point, il sera rappelé que la cour saisie d’un appel contre un jugement du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, n’est pas compétente pour se prononcer sur des faits de contrefaçon de marque.
En outre, il s’agit d’une simple capture d’écran non datée, réalisée par la SAS Béaba, alors même que la SAS Babymoov conteste être l’auteur du texte reproduisant la marque Babycook.
Le fait reproché n’est donc pas valablement établi.
Quant à la campagne de promotion visée, ce type d’offre promotionnelle progressive est une technique classique dont l’objectif est d’inciter le consommateur à augmenter son panier moyen par l’achat de plusieurs produits ; il s’agit d’un mécanisme répandu, notamment à l’approche de la rentrée des classes, période à laquelle les ménages renouvellent ou s’équipent en fournitures et produits, notamment dédiés aux enfants. Ce type de communication ne peut caractériser un manquement de la part de la SAS Babymoov Group.
Ainsi, le Nutribaby +XL, le packaging, la communication ou encore les autres produits commercialisés par la SAS Babymoov Group ne constituent pas des imitations des produits de la SAS Béaba. Le risque de confusion fait défaut. Les actes de concurrence déloyale et de parasitisme allégués ne sont pas démontrés. Ainsi que le conclut l’intimée, l’appelante se contente de lui reprocher des actions commerciales courantes dans la vie des affaires sur un marché concurrentiel.
Dans ces conditions, l’ensemble des demandes de la SAS Béaba doit être rejeté, et le jugement confirmé.
Succombant à l’instance, la SAS Béaba sera condamnée aux dépens d’appel, et à verser à la SAS Babymoov Group une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction;
Confirme le jugement entrepris ;
Condamne la SAS Béaba à payer à la SAS Babymoov Group la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Béaba aux dépens d’appel.
Le Greffier La Présidente