Motifs
A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la Cour «’constater’» ou «’dire et juger’» ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4,5,31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
Ordonnance de référé
Selon l’article 484 du Code de procédure civile, «’l’ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires ».
Le juge des référés ne peut pas trancher des questions de fond. Il est le juge de l’évidence et de l’urgence. Statuant au provisoire, il ne peut prononcer des mesures définitives.
Mesures conservatoires et de remise en état
Selon l’article 834 du Code de procédure civile, «’dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire (…) peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend’».
Le juge des référés peut prendre toutes mesures de remise en état ou conservatoires qu’il estime nécessaire pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.
Autorisation de cession du fonds de commerce
En l’espèce, si le premier juge n’a pas visé de fondement juridique pour autoriser la cession du fonds de commerce, il a nécessairement fondé sa décision sur l’article 834 du Code de procédure civile puisqu’il a jugé que la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce ne se heurtait à aucune contestation sérieuse et présentait un certain caractère d’urgence, la cession ayant été réalisée depuis une année.
La Cour infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a ordonné une mesure définitive qui plus est en présence de contestations sérieuses et statuant à nouveau dit n’y avoir lieu à référé sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce.
Dommages et intérêts
La Cour constate que la demande de dommages et intérêts est irrecevable n’étant pas formulée sous forme de provision. Seul est visé l’article 834 du Code de procédure civile et non l’article 835 al 2 dans le dispositif des conclusions.
Sur les demandes reconventionnelles, la Cour constate que le premier juge n’a pas répondu à ces demandes reconventionnelles.
Demandes accessoires
Compte tenu de la teneur de l’arrêt infirmatif sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce, la Cour infirme l’ordonnance sur les dépens et les frais irrépétibles.
Statuant à nouveau, la Cour condamne in solidum [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H] aux dépens de première instance.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/03108
N° Portalis DBVX-V-B7G-OIPY
Décision du
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LYON
Référé
du 04 avril 2022
RG : 21/02139
SCI [Adresse 2]
C/
[U]
[Y]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
8ème chambre
ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2023
APPELANTE :
Société Civile Immobilière [Adresse 2] représentée par son représentant légal
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475
Assistée de Me Régis BERTHELON de la SELARL BERTHELON GALLONE & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 435
INTIMÉES :
Mme [B] [U] épouse [H], exerçant sous l’enseigne commerciale ‘LA CAVE AUX CURIOSITÉS’, établissement sis [Adresse 2] à [Localité 7], inscrite au RCS de LYON sous le n° A 899 348 783,
[Adresse 3]
[Localité 5]
Mme [J] [Y] épouse [U]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentées par Me Laurent BURGY de la SELARL LINK ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1748
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Date de clôture de l’instruction : 17 Janvier 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Janvier 2023
Date de mise à disposition : 22 Février 2023
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Bénédicte BOISSELET, président
– Karen STELLA, conseiller
– Véronique MASSON-BESSOU, conseiller
assistées pendant les débats de William BOUKADIA, greffier.
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
[B] [U] exerçant sous l’enseigne la cave aux curiosités et [J] [Y], sa mère, ont fait assigner en référé le 13 décembre 2021 la société SCI [Adresse 2] pour obtenir l’autorisation aux fins de procéder entre elles à la cession du fonds de commerce au moyen d’une donation et la voir condamner à leur payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts outre 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
[J] [Y] avait pris à bail commercial ce local à usage de commerce d’antiquités et d’objets de décoration. Le contrat prévoyait que le preneur puisse céder son droit au bail à l’acquéreur du fonds de commerce sous réserve d’avoir obtenu au préalable et par écrit l’agrément du bailleur.
Le 12 novembre 2020, [J] [Y] soutient avoir informé son bailleur de la cession du fonds de commerce. L’administrateur de biens de la bailleresse, l’agence centrale, en a d’ailleurs pris acte par courrier du 20 novembre. [J] [Y] a alors pris attache avec son notaire Maître [V] pour la rédaction de l’acte de donation du fonds de commerce. Le notaire a pris attache avec le bailleur mais sans pouvoir obtenir l’agrément formel de la SCI [Adresse 2]. Or, un bailleur ne peut refuser la cession sans motif légitime. S’agissant de la personne de l’acquéreur, il s’agit de sa fille qui a eu la particularité d’être salariée du magasin depuis nombreuses années ce qui est un fait notoirement connu. Le bailleur a seulement indiqué qu’il était dans l’attente de l’acte de cession et du K bis à jour. Dès lors, la cession est parfaite.
La SCI [Adresse 2] a conclu au rejet des demandes et à la condamnation de la cessionnaire à lui justifier sous astreinte des pièces fournies au centre de formalités des entreprises et au greffe du tribunal de commerce pour obtenir son immatriculation au RCS à l’adresse du [Adresse 2]. Elle demande également la condamnation sous astreinte des deux assignantes à lui déclarer si l’acte de donation a été régularisé. Elle demande de constater qu’aucune demande d’agrément ne lui a été présentée. Elle a sollicité 2 000 euros de frais irrépétibles.
Elle a fait valoir que la valeur du fonds de commerce était de 207 000 euros le 2 août 1998 Le projet de donation ne lui a pas été communiqué. En avril 2021 le notaire ne lui a fourni qu’un projet incomplet de l’acte de donation. Le courrier du 12 novembre 2020 n’était qu’une information d’un acte à venir. La demande d’autorisation de cession de fonds de commerce n’a pas de caractère d’urgence puisque le fonds est de fait exploité depuis le 4 mars 2021. La clause du contrat permet au bailleur d’agréer ou non le candidat à l’acquisition du droit au bail. Or, dans ce cas, le bailleur a été mis devant le fait accompli. Le projet ne mentionnait même pas la valeur du fonds et il n’a pas été demandé son agrément. Elle n’a reçu aucun projet complet. Les conditions de la donation sont fiscalement douteuses. En outre, l’objet du fonds de commerce n’est pas respecté car il est proposé à la vente également des accessoires textiles, vêtements et sacs à mains.
En réponse, [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] époux [H] ont exposé que l’urgence tient à des raisons de comptabilité. Le bailleur a été informé de la cession et celui-ci ne s’est pas opposé. Un preneur qui fait valoir son droit à la retraite (L 145-51 du Code de commerce) est autorisé à céder son droit au bail, le bailleur disposant d’une priorité de rachat de deux mois. A défaut, son accord est réputé acquis. Le 4 mars 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a jugé que les biens proposés à la vente sont compatibles avec la destination du bail. La remise en cause de l’agrément n’est justifié par aucun motif sérieux ou légitime. Il s’agit d’une volonté de nuire. Le bailleur souhaite actualiser le loyer à la hausse dont le terme est prévu le 30 juin 2027. Madame [H] justifie de son inscription au RCS. Le notaire préfère attendre la fin de la procédure judiciaire pour régulariser l’acte de donation du fonds de commerce.
Par ordonnance du 4 avril 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon a’:
autorisé la cession du fonds de commerce sis [Adresse 2] au moyen d’une donation de [J] [Y] épouse [U] à sa fille [B] [U] épouse [H],
rejeté la demande de dommages et intérêts,
condamné la société [Adresse 2] aux dépens,
condamné la société [Adresse 2] à payer à [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H] 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Le juge des référés a retenu en substance que
le 12 novembre 2020, [J] [U] a informé sa bailleresse par lettre recommandée avec accusé de réception de ce qu’elle ferait valoir ses droits à la retraite au 31 décembre prochain et qu’elle transmettait son activité commerciale à sa fille qui a la responsabilité du magasin depuis 1995 et qu’elle continuera l’activité à partir du 1er janvier 2021. Elle a indiqué qu’elle justifierait de la cession du bail lorsque le notaire aura établi le document. Cette notification a eu pour objet l’information au sujet de la cession et ouvre au propriétaire un délai de 2 mois selon l’article L 145 -51 du Code de commerce pour faire valoir sa priorité de rachat. Madame [U] n’a pas communiqué le montant du prix de cession. Elle a dit qu’il s’agissait d’une donation. Cet acte a été établi pour une valeur de 70 000 euros. Le défaut de communication au bailleur des chiffres d’affaires et des résultats d’exploitation n’est pas de nature à avoir une influence sur la validité de la transmission dès lors qu’il est produit des bulletins montrant que Madame [H] était salariée de l’entreprise de sa mère depuis le 1er août 1995 avec un emploi de responsable de magasin. L’autorisation de la cession ne peut être refusée que pour une raison valable. Or l’honorabilité et la solvabilité de la cessionnaire ne peuvent être mises en cause, celle-ci travaillant depuis 25 ans comme responsable de magasin. Le montant de l’évaluation du fonds de commerce ne présente pas d’intérêt pour le bailleur qui dispose d’une évaluation par expertise dans le cadre de la procédure de renouvellement du bail au cours de 2018. Il n’existe dès lors aucune contestation sérieuse alors que la situation est urgente puisque la cession a été de fait réalisée depuis une année.
La demande de dommages et intérêts est rejetée faute de preuve d’un préjudice.
Appel a été interjeté par la société civile [Adresse 2] le 28 avril 2022 à l’encontre de toutes les dispositions.
L’affaire a été orientée à bref délai suivant les dispositions des articles 905 à 905-2 du code de procédure civile et les plaidoiries fixée au 17 janvier 2023 à 9 heures.
Suivant conclusions n°3 notifiées par 20 décembre 2022, la SCI [Adresse 2] demande à la Cour de’:
infirmer l’ordonnance déférée.
Sur l’article 834 du Code de procédure civile et L 145-16 du Code de commerce,
Vu l’absence d’urgence,
Vu subsidiairement l’existence de contestations sérieuses et l’absence de différend de nature à justifier la mesure ordonnée,
rejeter toutes les demandes des consorts [U].
A titre reconventionnel et vu l’absence de motivation de sa décision de rejet par le premier juge,
vu l’article 835 du Code de procédure civile,
condamner sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d’un délai de 7 jours depuis la signification de «’sic’» l’ordonnance à intervenir [B] [H] à justifier des pièces fournies au centre de formalités de entreprises et au greffe du tribunal de commerce pour obtenir son immatriculation au RCS à l’adresse du [Adresse 2] à [Localité 8],
les condamner toutes les deux sous la même astreinte à lui déclarer si l’acte de donation et dont le projet a été produit a été régularisé,
constater qu’aucune demande d’agrément n’a été présentée à la SCI [Adresse 2],
Très subsidiairement si la Cour estimait que le montant de la cession était valablement fixé à la somme de 70 000 euros, le constater dans sa décision et dire que le délibéré fait courir le délai d’exercice de la priorité de rachat,
condamner in solidum les intimées à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens «’sic’» distraits au profit de la SCP Jacques Aguiraud et Philippe Nouvellet sur son affirmation de droit.
Suivant conclusions d’intimées n°3 notifiées par RPVA le 23 décembre 2022, [B] [U] épouse [H] et [J] [Y] épouse [U] demandent à la Cour de’:
vu l’article 834 du Code de procédure civile, L 145-16 et 51 du Code de commerce,
confirmer l’ordonnance déférée sauf sur la demande de dommages et intérêts.
Statuant à nouveau,
débouter la SCI [Adresse 2] de ses demandes, moyens et conclusions,
la condamner à leur verser 10 000 euros de dommages et intérêts,
outre 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens dont «’sic’» distraction au profit de Maître Laurent Burgy,
la condamner à payer le droit proportionnel mis à la charge du créancier par l’article A 444 32 du Code de commerce.
Les intimées font notamment valoir qu’elles ont justifié de tous les documents dont il est demandé communication sous astreinte et que le notaire préfère toujours attendre la fin de la procédure pour établir l’acte de donation.
Pour leur préjudice, elle font valoir qu’elles ont caractérisé la faute de la bailleresse car son refus d’agrément n’est pas motivé, que cette situation rend la situation juridique de la locataire instable, que l’agrément a déjà été donné de sorte que la SCI [Adresse 2] est de mauvaise foi en voulant retirer son agrément, elle ne souhaite que profiter de la situation pour actualiser le loyer à la hausse. Or, il lui est impossible de le renégocier puisque son terme est prévu au 30 juin 2027. Le préjudice consiste dans le trouble dans la jouissance paisible du local commercial. Il y a eu un véritable harcèlement procédural envers elles qui persiste pour récupérer les locaux commerciaux sans égard pour le bail. Ce harcèlement dure depuis 2007. La bailleresse a usé de prétextes fallacieux et a voulu la faire partir en 2018 mais n’a pas payé l’indemnité d’éviction. Elles ont même dû déposer une main courante contre le propriétaire. [B] [H] est victime d’angoisse et d’anxiété comme cela ressort d’attestations.
Pour l’exposé des moyens développés par les parties, il sera fait référence conformément à l’article 455 du code de procédure civile à leurs écritures déposées et débattues à l’audience du 17 janvier 2023 à 9 heures.
A l’audience, les conseils des parties ont pu faire leurs observations et/ou déposer ou adresser leurs dossiers respectifs. Puis, l’affaire a été mise en délibéré au 2 février 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la Cour «’constater’» ou «’dire et juger’» ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4,5,31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
Selon l’article 484 du Code de procédure civile, «’l’ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires ».
Le juge des référés ne peut pas trancher des questions de fond. Il est le juge de l’évidence et de l’urgence. Statuant au provisoire, il ne peut prononcer des mesures définitives.
Selon l’article 834 du Code de procédure civile, «’dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire (…) peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend’».
Selon l’article 835 alinéa 1 du Code de procédure civile : « Le président peut (‘), même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite’».
Ainsi, le juge des référés peut prendre toutes mesures de remise en état ou conservatoires qu’il estime nécessaire pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.
L’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile dispose que’:
« Le président peut (‘) dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire ».
Sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce
En l’espèce, si le premier juge n’a pas visé de fondement juridique pour autoriser la cession du fonds de commerce, il a nécessairement fondé sa décision sur l’article 834 du Code de procédure civile puisqu’il a jugé que la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce ne se heurtait à aucune contestation sérieuse et présentait un certain caractère d’urgence, la cession ayant été réalisée depuis une année.
Or, la Cour constate que le juge a pris non pas une mesure provisoire mais une mesure définitive.
Par ailleurs, la bail prévoyait bien dans ses conditions générales au titre des obligations du preneur (page 4) que selon 5° il ne peut céder son droit au bail qu’à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise qui devra avoir obtenu au préalable et par écrit l’agrément du bailleur.
Dans le présent dossier, [J] [Y] soutient que son courrier du 12 novembre 2020 par lettre recommandée avec accusé de réception vaut demande d’agrément. Or, ce courrier (pièce 4 de l’appelante) ne comporte aucun objet et est libellé comme suit’: «’Madame, je vous informe que je fais valoir mes droits à la retraite au 31 décembre 2020. De ce fait, je transmets mon activité commerciale exploitée à l’enseigne la Cave aux curiosités située [Adresse 2] à ma fille [L] [H]-[U] demeurant [Adresse 3] à [Localité 6]. Celle-ci a la responsabilité du magasin depuis 1995 et continuera l’activité de cette boutique dans son exploitation actuelle à partir du 1er janvier 2021. «’sic’» je vous justifierai la cession du bail dès réception du document du notaire. Dans cette attente, je vous prie de recevoir, Madame, mes sincères salutations.’»
Il n’apparaît aucune demande officielle d’un agrément écrit et préalable au bailleur. Il n’est fourni aucun autre document.
[J] [Y] épouse [U] soutient également que le courrier en réponse du 20 novembre 2020 qui a simplement indiqué que l’agence centrale restait dans l’attente de l’envoi de l’acte de cession et d’un k bis à jour soit la cession du fonds de commerce constituerait un agrément écrit. Or, les termes ne sont pas précis. Il n’est nullement indiqué qu’il s’agit d’un accord. Ces termes nécessitent une interprétation qui excède les pouvoirs du juge des référés, qui n’est que le juge de l’évidence.
Il ne saurait être par ailleurs prétendu que le bailleur serait dans la situation de celui qui n’a pas utilisé dans le délai de deux mois son droit de priorité au rachat, le locataire faisant valoir ses droits à la retraite car le locataire aurait dû, pour obtenir l’application de l’article L 145-51 du Code de commerce, signifier son intention de céder son bail en précisant la nature des activités dont l’exercice est envisagé mais aussi et surtout le prix proposé car la priorité au rachat ne peut s’envisager sans connaître ces deux éléments. Or, le courrier du 12 novembre 2020 ne fait aucunement mention d’un prix.
Ainsi, il y a bien contestation sérieuse faute d’avoir respecté à la lettre la procédure contractuellement prévue ou les conditions fixées par l’article L 145-51 du Code de commerce.
Dans ces conditions, qualifier le prétendu refus d’agrément du bailleur d’injustifié et d’abusif excède manifestement les pouvoirs juridictionnels du juge des référés. Seul le juge du fond saisi , le cas échéant, selon la voie de la procédure accélérée au fond s’il y a urgence, peut trancher les points de droit soulevés par la situation.
La Cour infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a ordonné une mesure définitive qui plus est en présence de contestations sérieuses et statuant à nouveau dit n’y avoir lieu à référé sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce sis [Adresse 2] au moyen d’une donation entre [J] [Y] épouse [U] à sa fille [B] [U] épouse [H].
Sur la demande de dommages et intérêts
La Cour constate que cette demande est irrecevable n’étant pas formulée sous forme de provision. D’ailleurs seul est visé l’article 834 du Code de procédure civile et non l’article 835 al 2 dans le dispositif des conclusions. Si le juge des référés peut accorder des dommages et intérêts de lui-même pour indemniser un recours en référé jugé abusif, il ne peut le faire que sous forme de provision pour les indemnisations à raison d’autres fautes ayant entraîné d’autres préjudices allégués.
Sur les demandes reconventionnelles
La Cour constate que le premier juge n’a pas répondu à ces demandes reconventionnelles. Son dispositif n’en fait pas état pas plus que sa motivation.
Les intimées ont déjà fourni les pièces sollicitées en pièce 12. Il n’est pas précisé en quoi cette communication serait incomplète.
La demande de condamnation sous astreinte de déclarer si l’acte de donation est régularisé est sans objet, les intimées ayant clairement indiqué que le notaire préfère attendra la fin de la procédure judiciaire pour régulariser l’acte.
Ainsi, la SCI [Adresse 2] ne démontre pas en quoi les intimées auraient une obligation non sérieusement contestable d’avoir à lui communiquer l’ensemble de ces pièces ni en quoi elle serait exposée, faute de ces documents, à un dommage imminent ou à un trouble manifestement illicite.
La Cour dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes reconventionnelles de la SCI [Adresse 2].
Sur les demandes accessoires
Compte tenu de la teneur de l’arrêt infirmatif sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce, la Cour infirme l’ordonnance sur les dépens et les frais irrépétibles.
Statuant à nouveau, la Cour condamne in solidum [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H] aux dépens de première instance.
La Cour les déboute de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile de première instance.
En appel, toutes les parties succombant pour partie en leurs demandes, chaque partie doit conserver le montant de ses frais et dépens.
La Cour déboute les parties de leurs demandes au titre des dépens et au titre de l’application de l’article 700 du Code de procédure civile à hauteur d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a autorisé la cession du fonds de commerce situé [Adresse 2] à [Localité 8] au moyen d’une donation de [J] [Y] épouse [U] à sa fille [B] [U] épouse [H] et en ce qu’elle a condamné la SCI [Adresse 2] aux dépens et au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Statuant à nouveau,
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande d’autorisation de cession du fonds de commerce situé [Adresse 2] à [Localité 8] au moyen d’une donation de [J] [Y] épouse [U] à sa fille [B] [U] épouse [H],
Renvoie les parties à mieux se pourvoir au fond,
Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts formulée au titre de leur appel incident par [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H],
Dit n’y avoir lieu à référé sur demandes de communication sous astreinte et de déclaration sous astreinte qu’une donation a été régularisée formulées par la SCI [Adresse 2],
Condamne in solidum [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H] aux dépens de première instance,
Déboute [J] [Y] épouse [U] et [B] [U] épouse [H] de leur demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile à l’encontre de la SCI [Adresse 2] au titre de la première instance,
Laisse à la SCI [Adresse 2] d’une part et aux consorts [U], intimées, d’autre part la charge de leurs propres frais irrépétibles et dépens d’appel,
Les déboute en conséquence de leur demandes respectives au titre des frais irrépétibles et des dépens à hauteur d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT