Contrat d’apporteur d’affaire : les factures de commissions

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Contrat d’apporteur d’affaire : les factures de commissions
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Contrat d’apporteur d’affaire : les factures de commissions

Motifs de la décision

La décision rendue concerne un litige entre la société GSolutions et la société Energies Comtoises. Les parties avaient conclu un contrat d’apport d’affaire ainsi qu’un accord verbal pour une participation active de GSolutions au fonctionnement d’Energies Comtoises. Cependant, des désaccords ont conduit à la rupture des conventions.

Sur les factures d’accompagnement d’entreprise

Les parties étaient engagées par deux conventions, dont une pour la participation de GSolutions au fonctionnement d’Energies Comtoises en vue de son entrée au capital. La société Energies Comtoises était tenue de rémunérer cette coopération jusqu’au 2 février 2020. Cependant, le premier juge n’a pas retenu la preuve du contrat, limitant ainsi la condamnation de la société Energies Comtoises.

Sur les factures de commissions

Des factures de commissions ont également été contestées. La société GSolutions réclame le paiement de commissions pour des marchés apportés. La société Energies Comtoises prétend avoir déjà payé une partie, mais ne fournit pas de preuves suffisantes. La dette est établie mais non son paiement, donc la société GSolutions est condamnée à être payée pour son entier montant.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts

La société GSolutions a continué à agir auprès des clients d’Energies Comtoises après la rupture des contrats, utilisant abusivement le nom de l’entreprise et dénigrant son gérant. La société Energies Comtoises a subi un préjudice, notamment au niveau de matériel électronique non restitué et de perte de confiance de la clientèle. La cour condamne la société GSolutions à payer des dommages et intérêts à Energies Comtoises.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

JFL/FA

COUR D’APPEL DE BESANÇON

– 172 501 116 00013 –

ARRÊT DU 06 JUIN 2023

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique du 04 avril 2023

N° de rôle : N° RG 22/00290 – N° Portalis DBVG-V-B7G-EPJR

S/appel d’une décision du TRIBUNAL DE COMMERCE DE BESANCON en date du 20 octobre 2021 [RG N° 2020003424]

Code affaire : 50B Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

S.A.R.L. ENERGIES COMTOISES C/ S.A.R.L. GSOLUTION

PARTIES EN CAUSE :

S.A.R.L. ENERGIES COMTOISES

Sise [Adresse 1]

Inscrite au RCS de Besançon sous le numéro 750 951 980

Représentée par Me Nathalie ROTA de la SELARL NATHALIE ROTA, avocat au barreau de BESANCON

APPELANTE

ET :

S.A.R.L. GSOLUTION

Sise [Adresse 2]

Inscrite au RCS de Besançon sous le numéro 753 750 801

Représentée par Me Michel MIGNOT de la SELARL JURIDIL, avocat au barreau de BELFORT

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre.

ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX et Monsieur Jean-François LEVEQUE, conseillers

GREFFIER : Madame Fabienne ARNOUX, Greffier

Lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Michel WACHTER, Président de chambre,

ASSESSEURS : Madame Bénédicte MANTEAUX, conseiller et Monsieur Jean-François LEVEQUE, magistrat rédacteur.

L’affaire, plaidée à l’audience du 04 avril 2023 a été mise en délibéré au 06 juin 2023. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Exposé du litige

Un contrat d’apporteur d’affaire a été consenti le 2 mai 2018 entre la SARL Energies Comtoises, vendeur de produits et matériels de chauffage, sanitaire et accessoires, prestataire d’entretien, gérée par [N] [I], à la SARL GSolution, gérée par M. [P] [S], à qui toutefois le contrat a été dénoncé le 5 mars 2020.

Sur opposition de la société Energies Comtoises à une ordonnance du 11 août 2020 lui enjoignant de payer une certaine somme à la société GSolution au titre d’un solde de commissions et de rémunération d’accompagnement d’entreprise, et sur demande reconventionnelle de la société Energies Comtoises en dommages et intérêts pour concurrence déloyale postérieure à la rupture du contrat, le tribunal de commerce de Besançon, par jugement du 20 octobre 2021, a :

– déclaré l’opposition recevable ;

– condamné la société Energies Comtoises à payer à la société GSolutions la somme de 10 137,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2020 ;

– débouté la société Energies Comtoises de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;

– condamné la société Energies Comtoises à payer à la société GSolutions la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les dépens.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que la société Energies Comtoises ne contestait pas les commissions réclamées mais ne démontrait pas les avoir en parties payées, les paiements dont elle justifiait correspondant à des factures de prestations de management distinctes des ventes ; que la société GSolutions n’apportait pas la preuve du contrat spécifique à l’accompagnement du directoire ou de l’entreprise au titre duquel elle réclamait une rémunération ; et que si la société Energies Comtoises établissait que M. [S] avait continué à utiliser une tablette informatique, une adresse mail de la société et les cordonnées d’au moins un de ses clients, elle ne démontrait pas pour autant que M. [S] lui avait fait perdre des affaires.

La société Energies Comtoises a interjeté appel de cette décision par déclaration parvenue au greffe le 17 février 2022. L’appel critique expressément tous les chefs de jugement, sauf la recevabilité de l’opposition.

Par conclusions transmises le 7 novembre 2022, l’appelante demande à la cour de :

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

– débouter la société GSolutions de ses demandes ;

– la condamner à lui payer 40 000 euros de dommages et intérêts ;

– la condamner à lui payer 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les dépens.

L’appelante soutient que la société GSolutions, demanderesse, a la charge de prouver la réalité des prestations dont elle demande paiement ; que la liste des affaires apportées permet de calculer un total de commissions de 26 679,85 euros TTC, dont 23 437,36 ont déjà été réglés, ne laissant qu’un reste dû de 3 239,49 euros TTC ; que par ailleurs les prétendues prestations d’accompagnement ne sont pas prévues par le contrat, ne correspondent à aucune réalité, n’ont jamais été réglées par le passé, et ne sont pas démontrées par les documents et attestations produits.

Sur la demande reconventionnelle, elle soutient que la société GSolutions a conservé la tablette et le logiciel BatAppli, dont la synchronisation avec l’informatique d’Energies Comtoises a permis de constater qu’elle s’est rendue coupable de concurrence déloyale, lui causant un préjudice de 40 000 euros comprenant le prix du logiciel, celui de la tablette, la perte d’une marge brute de 40 % sur les contrats détournés et le temps passé pour endiguer le travail de sape initié par GSolutions auprès de la clientèle.

La société GSolutions, par conclusions transmises le 5 août 2022 indiquant porter appel incident et visant les articles 1415 et 1416 du code civil, demande à la cour de :

– confirmer le jugement ‘en toutes ses dispositions’;

– débouter l’appelante de ses demandes ;

‘y ajoutant, sur l’appel incident’

– condamner la société Energies Comtoises à lui payer la somme de 4 800 euros TTC outre intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2020 à valoir sur une facture n°1-20-02-3 du 10 février 2020 ;

– la condamner à lui payer 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les dépens d’appel.

L’intimée soutient que les parties avaient convenu lors d’une réunion du 29 août 2019 consacrée à l’entrée au capital de M. [S], que celui-ci, devant se consacrer à la société Energies Comtoises, serait rémunéré au titre d’une mission d’accompagnement par un forfait mensuel de 4 000 euros HT, doit 4 800 euros TTC à compter de septembre 2019, outre une commission de 2 % sur le chiffre d’affaire réalisé ; qu’à ce titre les factures de mission d’accompagnement émises jusqu’au 11 janvier 2020 ont été payées ; qu’en conséquence le premier juge ne pouvait refuser de condamner la société Energies Comtoises à la facture d’accompagnement suivante.

L’intimée soutient ensuite que la demande indemnitaire formée par la société Energies Comtoises n’est pas fondée même s’il a conservé la tablette pour gérer les contrats en cours à la date de la rupture ; que GSolutions avait normalement été contactée par les clients des marchés en cours, après la rupture, mais les avait toujours loyalement re dirigés vers Energies Comtoises ; et qu’elle n’avait pas fait croire qu’elle était encore en lien avec Energies Comtoises, s’étant juste abstenue de faire état de la rupture du lien.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs moyens de fait et de droit, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction a été clôturée le 14 mars 2023. L’affaire a été appelée à l’audience du 4 avril 2023 et mise en délibéré au 6 juin suivant.

Motifs de la décision

Sur les factures d’accompagnement d’entreprise

Les compte-rendus de réunion, attestations, factures et justificatifs de paiement produit de part et d’autres établissent que les parties n’ont pas seulement conclu le contrat d’apport d’affaire du 2 mai 2018 par lequel la société GSolutions serait rémunérée pour les marchés apportés à la société Energies Comtoises, mais qu’elle se sont également accordées verbalement, dans le cadre d’un projet d’entrée de la première au capital de la seconde, pour que la première participe activement au fonctionnement de celle-ci, avec une répartition des tâches laissant la direction stratégique à la société Energie Comtoises et confiant la mise en oeuvre commerciale à la société GSolutions, moyennant une rémunération mensuelle de 4 800 euros TTC, qui, en exécution de cet accord, a été facturée et payée chaque mois, sous les mentions ‘Mission accompagnement directoire ‘ et ‘Mission accompagnement entreprise’, du mois de septembre 2019 au mois de décembre 2019.

Les parties étaient ainsi engagées par deux conventions. La première rompue a été la convention portant sur la participation de la société GSolutions au fonctionnement de la société Energies en vue de son entrée au capital, suivant message SMS du 2 février 2020 par lequel son gérant écrivait à celui de la société GSolutions : ‘Salut Seb, après une longue réflexion j’ai décidé que tu ne feras pas partie d’Energies Comtoises (…) Nous restons donc sur notre relation de travail dans laquelle tu es apporteur d’affaire’. La convention d’apports d’affaire est restée en vigueur un mois de plus, jusqu’à sa dénonciation par la société Energies Comtoises par courrier recommandé du 5 mars 2020. Il apparaît ainsi qu’en application de la convention verbale de coopération préalable à l’entrée au capital, la société Energies Comtoises était tenue de rémunérer cette coopération, dont la réalité est confirmée par plusieurs attestations, jusqu’au 2 février 2020.

Mais le premier juge, ayant retenu, à la différence de la cour, que la preuve du contrat n’était pas établie, a implicitement débouté de ce chef la société GSolutions, en condamnant la société Energies Comtoises à lui payer seulement le montant de commissions et non la rémunération de coopération du mois de janvier 2020.

Pour autant, aucun appel incident n’a été formé de ce chef par la société GSolutions, intimée, qui demande à la cour de confirmer le jugement ‘en toutes ses dispositions’ et, ‘y ajoutant, sur l’appel incident’, de condamner la société Energies Comtoises à lui payer la somme de 4 800 euros TTC outre intérêts au titre de la facture impayée, mais sans avoir demandé l’infirmation du rejet de cette demande par le premier juge, ce qui était indispensable pour que ce rejet soit dévolu à cour, qui en conséquence n’en est pas saisie.

Sur les factures de commissions

La première facture litigieuse, en date du 10 février 2020, porte sur les commissions demandées au titre de 26 marchés désignés chacun par le nom du client, pour un total de 5 731,04 euros et non de 4 931,04 euros comme retenu par le premier juge, qui a par erreur soustrait du total de la facture un montant de 4 800 euros et non le montant de 4 000 euros indiqué sous la rubrique ‘Accompagnement directoire’.

La seconde facture litigieuse, en date du 24 avril 2020, porte sur neuf marchés pour un montant global de 5 206,80 euros, soit pour les deux factures un total de 10 937,84 euros. Le droit de la société GSolutions à ces commissions n’est pas discuté par la société Energies Comtoises, qui prétend seulement en avoir déjà payé une partie.

Pour en apporter la preuve, qui lui incombe, la société Energies Comtoises, au lieu de justifier de ses paiements sous une forme permettant de les relier aux commissions réclamées, se borne à soutenir qu’elle a déjà réglé un total de 23 437,36 euros entre septembre 2019 et décembre 2020, mais de façon inopérante dès lors que d’une part cette somme comprend quatre fois 4 800 euros qui correspondent en réalité aux prestations d’accompagnement précédemment examinées, et dès lors que les pièces produites ne permettent pas d’affecter le solde, d’un montant de 4 237,36 euros, au détail des commissions demandées.

Ainsi, la dette étant établie mais non son paiement, elle est due pour son entier montant de 10 937,84 euros. La condamnation à payer à ce titre la somme de seulement 10 137,84 euros sera cependant confirmée, conformément à la demande de la société GSolutions au-delà de laquelle la cour ne peut aller.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts

La cour a précédemment relevé que le contrat de coopération entre les parties avait cessé le 2 février suivant et que le contrat d’apporteur d’affaire avait été dénoncé par la société Energies Comtoises le 5 mars 2020, avec un effet immédiat non contesté. Il en résulte qu’à compter de cette date, la société GSolutions devait cesser toute activité auprès des clients ayant contracté avec la société Energies Comtoises, ne plus utiliser et restituer la tablette et la clé d’accès au logiciel professionnel qui lui avait été confiée, de même que l’adresse électronique de l’entreprise, et informer les clients venant à elle qu’elle n’agissait plus pour le compte de la société Energies Comtoises.

La société GSolutions a au contraire conservé la tablette et le logiciel BatAppli, dont la synchronisation avec l’informatique d’Energies Comtoises a permis de constater que son ancienne partenaire avait tenté plusieurs fois de mettre à jour l’application, avait continué d’échanger avec ceux qui n’étaient plus ses clients par de nombreux messages SMS et mails versés aux débats, l’avait dénigrée en traitant notamment son gérant d’abruti dans une correspondance avec un client, avait falsifié une facture pour en réduire le montant de 30 %, et avait continué à utiliser sans droit le nom d’Energies Comtoises dans ses correspondances et documents, notamment en utilisant l’adresse électronique [Courriel 3].  Elle manifeste d’ailleurs involontairement sa mauvaise foi en admettant, croyant se justifier, que contactée par les clients des marchés en cours ignorants de la rupture, elle ne leur avait pas fait croire qu’elle était encore en lien avec Energies Comtoises, mais s’était juste abstenue de faire état de la rupture du lien, chose que pourtant la loyauté aurait dû la conduire à faire avant toute autre.

Si la société Energies Comtoises justifie du préjudice qu’elle a subi au titre du matériel électronique non restitué, à hauteur de 1 099 euros pour le logiciel et de 954 euros pour la tablette, elle échoue à démontrer avec certitude qu’elle aurait perdu des marchés précis à cause de l’utilisation de l’apparence d’un de ses collaborateurs à laquelle la société GSolutions s’est livrée activement, abusivement et continûment de mars 2019 à mai 2020, ainsi qu’en attestent les multiples mails et messages SMS produits. Toutefois, ce comportement nuisible et persistant auprès de sa clientèle, de nature à induire celle-ci en erreur et à diminuer sa confiance, a nécessairement causé un préjudice, dont la cour estime la réparation à 15 000 euros.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a débouté de ce chef la société Energies Comtoises, à qui la société GSolutions sera condamnée à payer la somme de 17 053 euros (1099 + 954 + 15 000).

Par ces motifs

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement rendu entre les parties le 20 octobre 2021 par le tribunal de commerce de Besançon, sauf en ce qu’il a débouté la société Energies Comtoises de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts ;

statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Condamne la société GSolutions à payer à la société Energies Comtoises la somme de 17 053 euros ;

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société GSolutions aux dépens d’appel.

Ledit arrêt a été signé par M. Michel Wachter, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Fabienne Arnoux, greffier.

La greffière Le président de chambre

 


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