Démarchage Téléphonique : décision du 24 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/11968

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Démarchage Téléphonique : décision du 24 novembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/11968

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-3

ARRÊT AU FOND

DU 24 NOVEMBRE 2022

N° 2022/263

N° RG 19/11968

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEUZH

SARL O2 TOIT AIX EN PROVENCE

C/

[O] [W]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean VOISIN

Me Lauriane BUONOMANO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance d’Aix-en Provence en date du 02 Juillet 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 18/02396.

APPELANTE

SARL O2 TOIT AIX EN PROVENCE,

sis [Adresse 1]

représentée par Me Jean VOISIN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME

Monsieur [O] [W]

demeurant [Adresse 2]

représenté par Me Lauriane BUONOMANO, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

plaidant par Me Karine LEBOUCHER, avocat au barreau de MONTPELLIER substituée par Me Marie CHAREAU, avocat au barreau de MONTPELLIER

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 07 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Florence TANGUY, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente

Mme Béatrice MARS, Conseiller

Mme Florence TANGUY, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marjolaine MAUBERT.

Directrice des services de greffe judiciaires lors du prononcé : Madame [G] [D]

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 10 Novembre 2022, prorogé au 24 Novembre 2022.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022,

Signé par Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Présidente et Madame Aurélie MAUREL, directrice de greffe des services de greffe judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

M. [O] [W], qui a été démarché par la société 02 Toit Aix-en-Provence au mois d’octobre 2017, a signé deux bons de commande successifs’:

-le premier n°5318, le 9 octobre 2017, pour la fourniture, la livraison et la pose d’un kit solaire 2 Kw avec système domotique FHE, onduleur central garanti 25 ans autoconsommation et la reprise de l’éolienne,

-le deuxième n°4557, le 12 octobre 2017, pour la rénovation de quatre fenêtres, trois volets battants

et trois volets roulants et des travaux de maçonnerie.

-ainsi que deux demandes de crédit successives.

La société 02 Toit Aix-en-Provence a procédé aux travaux, remplacé un mur en forme d’arcade et déposé l’éolienne de M. [W], mais des infiltrations étant apparues dans les jours suivants, M. [W] a alerté la société O2 toit Aix-en-Provence par plusieurs mises en demeure non suivies d’effet.

Le 14 mai 2018, M. [W] a assigné la société O2 Toit Aix-en-Provence devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence et a sollicité, à titre principal, la caducité des deux bons de commande en raison de son droit de rétractation, et le remboursement des sommes payées avec les pénalités prévues à l’article L.221-24 du code de la consommation, à défaut que soit prononcée la nullité des contrats en raison de la violation des lois régissant le démarchage à domicile, et très subsidiairement, la caducité des engagements contractuels en l’état du refus de financement exprimé par les prêteurs.

Par jugement du 2 juillet 2019, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence a :

-débouté M. [W] de sa demande tendant à faire constater qu’il avait utilement usé de son droit de rétractation s’agissant du bon de commande n° 5318 ;

-prononcé la nullité de ce bon de commande pour défaut de la mention des caractéristiques essentielles des biens ;

-constaté que M. [W] avait fait usage de son droit de rétractation s’agissant du bon de commande n° 4557 ;

-en conséquence dit que le bon de commande n° 4557 est caduc ;

-condamné la société O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [W] :

*en restitution des sommes qu’il a payées : la somme de 25 805 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

*au titre de la remise en état de son bien : la somme de 1 873,99 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

*au titre de la dépose des installations : la somme de 1 824 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

*au titre des majorations : la somme de 11 910 euros avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

-condamné la Sarl O2 Toit Aix-en-Provence à restituer à M. [O] [W] l’éolienne qui a été reprise dans le cadre du bon de commande n°5318, et ce dans le délai d’un mois suivant la signification du présent jugement, et passé ce délai sous astreínte provisoire de 150 euros par semaine de retard pendant six mois ;

-condamné la Sarl O2 Toit Aix-en-Provence à justifier auprès de M. [O] [W] de son assurance décennale dans le délai d’une semaine suivant la signification du présent jugement, et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 150 euros par semaine de retard pendant six mois ;

-condamné la Sarl O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [O] [W] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 500 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

-ordonné l’exécution provisoire ;

-débouté les parties de toutes autres demandes ;

-condamné la Sarl O2 Toit Aix-en-Provence aux dépens ;

-débouté M. [O] [W] de sa demande au titre des frais d’exécution.

Par déclaration du 22 juillet 2019, la société O2 Toit Aix-en-Provence a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe le 21 octobre 2019, et auxquelles il y a lieu de se référer, elle demande à la cour :

-de réformer la décision dont appel en ce qu’elle a :

*prononcé la nullité du BC 5318 pour défaut de la mention des caractéristiques essentielles des biens,

*constaté que M. [W] avait fait usage de son droit de rétractation et, en conséquence, dit que le BC 4557 était caduc,

*condamné la société O2 Toit à payer à M. [W] :

a) 25 805 euros au titre de la restitution des sommes payées avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

b) 1 873,99 euros au titre de la remise en état du bien, avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

c) 1 824 euros au titre de la dépose des installations avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

d) 11 910 euros au titre des majorations avec intérêt au taux légal à compter du jugement,

e) 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

*condamné la société O2 Toit :

a) dans le délai d’un mois, suivant la signification de la décision puis sous astreinte de 150 euros par semaine de retard pendant 6 mois à restituer l’éolienne,

b) dans le délai d’une semaine, suivant la signification de la décision puis sous astreinte de 150 euros par semaine de retard pendant 6 mois à justifier de son assurance décennale,

-ce faisant,

-de débouter M. [W] de l’intégralité de ses demandes afférentes au BC 5318,

-de dire et juger que la résolution par notification du BC 4557 du 22 décembre 2017 est abusive,

-à titre reconventionnel, de condamner M. [W] à payer à la société O2 Toit :

*la somme de 11 910 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice,

*la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

*les entiers dépens.

Par conclusions remises au greffe le 15 janvier 2020, et auxquelles il y a lieu de se référer, M. [W] demande à la cour :

-vu les articles L. 111-1 s. et L. 221-1 s. L. 211-1 et L. 311-1 s. L. 341-1, L. 312-48 s. et L. 242-1 du

code de la consommation (rédaction en vigueur au 1er juillet 2016),

-vu les articles 1103, 1104 et 1224, 1227 et 1228 du code civil (rédaction antérieure au 1er octobre 2016),

-vu l’article L. 243-3 du code de la construction,

-vu l’article 1792 suivants du code civil,

-de confirmer le jugement en ce qu’il a constaté le juste exercice du droit de rétractation pour le contrat n° 4557,

-et réformer le jugement en ce qu’il a refusé d’appliquer le droit de rétractation pour le contrat n° 5318,

-et en conséquence,

-de constater que M. [W] fait exercice de son droit de rétractation au titre de tout engagement signé avec la société O2 Toit Aix-en-Provence,

-de dire et juger que les deux bons de commande conclus avec O2 Toit Aix-en-Provence sont caducs,

-de dire et juger qu’en cas d’anéantissement du contrat fondé sur l’exercice du droit de rétractation, la société O2 Toit Aix-en-Provence sera condamnée en plus à verser à M. [W] une indemnité au titre du taux de pénalité applicable selon l’article L. 221-24 du code de la consommation, à savoir :

*majoration de la somme du taux d’intérêt légal entre 0 et 10 jours de retard ;

*pénalité de 5% entre 10 et 20 jours de retard,

*pénalité de 10% entre 20 et 30 jours de retard,

*pénalité de 20% entre 30 à 60 jours de retard,

*pénalité de 50% entre 60 et 90 jours de retard,

*5% supplémentaire par nouveau mois de retard au-delà,

-subsidiairement, sur la nullité des contrats,

-d’ordonner la nullité des deux contrats n° 4557 et 5318 conclu entre O2 Toit Aix-en-Provence et M. [W] au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile,

-très subsidiairement, sur la caducité,

-d’ordonner la caducité des engagements contractuels en l’état du refus de financement exprimé par

les prêteurs dans le cadre des demandes de crédits affectés,

-en toutes hypothèses,

-de débouter O2 Toit Aix-en-Provence de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

-de déclarer irrecevable la demande indemnitaire de 11 910 euros formée par la société O2 Toit, pour la première fois en cause d’appel, au-delà des chefs de jugements critiqués,

-de condamner O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [W] la somme de 25 805 euros au titre des restitutions réciproques découlant de la caducité ou nullité des contrats de vente, avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 22.12.2017,

-de condamner O2 Toit Aix-en-Provence à prendre en charge le coût des travaux de dépose et de remise en état, soit 1 824 euros,

-de condamner O2 Toit Aix-en-Provence à prendre en charge le montant des préjudices causés à l’immeuble du fait des infiltrations, soit 1 873,99 euros,

-de condamner O2 Toit Aix-en-Provence à rembourser le montant de l’éolienne, soit 6 000 euros selon le devis O2 Toit,

-de condamner O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens, en ce compris les coûts des deux constats d’huissier.

-de dire que sur le fondement de l’article R631-4 du code de la consommation, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par les requises, en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 septembre 2022.

Motifs :

Aux termes de l’article L.221-18 du code de la consommation qui est d’ordre public, le consommateur dispose d’un droit de rétractation d’un délai de 14 jours pour les contrats conclus à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissements, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.

Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-24′;

2° De la réception du bien par le consommateur (…) pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

En ce qui concerne la commande n°5318 du 9 octobre 2017, le contrat comporte à la fois la livraison de panneaux photovoltaïques et la fourniture d’une prestation de service de mise en oeuvre de l’installation. Cependant, le point de départ du délai de rétractation court à compter à compter du jour de la conclusion du contrat, s’agissant d’un contrat conclu à domicile donc hors établissement. La date de conclusion du contrat étant le 9 octobre 2017, le délai expirait le 23 octobre 2017. M. [W] a exercé son droit de rétractation par lettre recommandée avec AR en date du 28 décembre 2017, soit après l’expiration du délai, de sorte que sa demande tendant à voir déclarer caduc ce bon de commande n°5318 doit être rejetée.

En ce qui concerne la commande n°4557 du 12 octobre 2017, le délai de rétractation court à compter de la livraison du dernier bien. La société O2 Toit prétend que M. [W] aurait renoncé à son droit de rétractation en exerçant une action en résolution du contrat par lettre recommandée avec AR du 27 décembre 2017, avant l’expiration du délai de rétractation.

Cette lettre qui ne constitue pas une mise en demeure conforme aux exigences des articles 1344 et 1226 alinéa 2 du code civil n’a pu entraîner la résolution du contrat et renonciation par M. [W] à son droit de rétractation.

En l’absence de preuve de la livraison des biens commandés, l’exercice du droit de rétractation par le consommateur par lettre recommandée avec AR en date du 28 décembre 2017 rend caduc le bon de commande n°4557.

M. [W] conclut à la nullité du bon de commande n°5318 pour violation des dispositions d’ordre public de l’article L. 111-1 du code de la consommation qui impose notamment au professionnel de fournir au consommateur, de manière lisible et compréhensible, à peine de nullité, les informations relatives notamment aux caractéristiques essentielles du bien ou du service, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à délivrer le bien ou à exécuter le service.

Or, le bon de commande précité, qui ne précise ni le délai ferme de livraison ni les caractéristiques essentielles du bien puisqu’il ne mentionne pas le nombre de panneaux, leur puissance, leur fabricant, encourt la nullité.

L’anéantissement des deux contrats impose de replacer les parties dans la situation qui préexistait aux contrats.

La société O2 Toit Aix-en-Provence sera donc condamnée à payer à M. [W] les sommes qu’il a payées au titre des prestations stipulées (11 910 euros + 13 895 euros), soit 25 805 euros, outre les frais de dépose du matériel de l 824 euros et de remise en état du toit de 1 873,99 euros.

La société O2 Toit Aix-en-Provence sera également condamnée à restituer à M. [W] l’éolienne qu’elle a enlevée dans le cadre du bon de commande n°5318, et le jugement sera confirmé en ce qu’il a assorti cette condamnation d’une astreinte.

C’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a condamné la société O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [W] la somme de 11 910 euros au titre des majorations en application de l’article L. 242-4 du code de la consommation.

Enfin, la société O2 Toit Aix-en-Provence sera condamnée sous astreinte à communiquer à M. [W] les justificatifs de son assurance décennale pour la période au cours de laquelle les travaux de pose et de dépose de l’installation ont été réalisés.

Si en application de l’article R. 631-4 du code du commerce, «’lors du prononcé d’une condamnation, le juge peut, même d’office, pour des raisons tirées de l’équité ou de la situation économique du professionnel condamné, mettre à sa charge l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution’», rien ne permet à la cour de déroger aux dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 relatif aux frais d’huissier mettant à la charge du créancier une partie des frais de recouvrement ou d’encaissement. Cette demande formée par M. [W] sera donc rejetée.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [W] les frais irrépétibles qu’il a exposés.

Par ces motifs’:

Statuant publiquement et contradictoirement

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions’;

Y ajoutant,

Condamne la société O2 Toit Aix-en-Provence à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’;

Condamne la société O2 Toit Aix-en-Provence aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés contre elle conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LA DIRECTRICE DES SERVICES LA PRÉSIDENTE

DE GREFFE JUDICIAIRES

 


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