Démarchage Téléphonique : décision du 31 mars 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02354

·

·

,

Démarchage Téléphonique : décision du 31 mars 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/02354

ARRET

N° 358

S.A.R.L. [6]

C/

URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 31 MARS 2023

*************************************************************

N° RG 21/02354 et N° RG 21/02355

JUGEMENTS DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DOUAI (Pôle Social) EN DATE DU 29 mars 2021 (N° registre 1ère instance : 19/00530 et 20/00018)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE (RG 21/02354 et RG 21/02355 )

La société [6] (SARL), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée et plaidant par Me Mourad BOURAHLI de la SELARL CAPSTAN NORD EUROPE, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0053

ET :

INTIME (RG 21/02354 et RG 21/02355)

L’URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE

DEBATS :

A l’audience publique du 17 Janvier 2023 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 31 Mars 2023.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 31 Mars 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

La société [6] a fait l’objet d’un contrôle de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires, portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31décembre 2015 pour les deux établissements qu’elle exploite à Le Cateau et [Localité 5].

L’Urssaf a établi des lettres d’observations en date du 22 mars 2016, puis, après échange contradictoire avec la cotisante, a décerné des mises en demeure d’avoir à régler les sommes de

23 852 euros pour l’établissement de [Localité 5] et de 9 133 euros pour l’établissement de le Cateau, au titre des cotisations et majorations de retard.

Par actes d’huissier de justice en date du 18 novembre 2019, l’Urssaf a fait signifier à la société [6] deux contraintes pour des montants respectifs de 23 852 euros et 9 133 euros.

Par requêtes en date du 6 août 2018, la société [6] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Douai d’une contestation de ces deux mises en demeure.

Les deux affaires ont été radiées par le tribunal judiciaire de Douai le 14 octobre 2019, puis réinscrites le 6 janvier 2020 et fixées à l’audience du 25 janvier 2021.

Par jugement prononcé le 29 mars 2021, le tribunal judiciaire de Douai, auquel il est renvoyé pour l’exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent, a :

– ordonné la jonction des deux procédures,

– rejeté le recours formé par la SARL [6] contre les deux mises en demeure de l’Urssaf Nord Pas-de-Calais du 2 juin 2016,

– condamné la SARL [6] à payer à l’Urssaf les sommes de 23 852 euros et 9 133 euros au titre des mises en demeure du 2 juin 2016,

– rejeté la demande de la société [6] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe en date du 29 novembre 2019, la société [6] a formé opposition aux deux contraintes.

Par jugement prononcé le 29 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Douai a :

– ordonné la jonction des deux instances,

– validé la contrainte signifiée le 18 novembre 2019 à l’encontre de la SARL [6] par l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais pour un montant de 23 797 euros,

– validé la contrainte signifiée le 18 novembre 2019 à l’encontre de la SARL [6] par l’Urssaf du Nord Pas-de-Calais pour un montant de 9 133 euros,

– condamné la SARL [6] au paiement de ces sommes à l’Urssaf,

– condamné la SARL [6] à payer à l’Urssaf les frais de signification des deux contraintes et dit que les frais éventuels d’exécution de la décision seraient mis à sa charge,

– condamné la SARL [6] aux entiers dépens.

Par deux déclarations au greffe de la chambre de la protection sociale de la présente cour en date du 29 avril 2021, la société [6] a relevé appel de ces jugements qui lui avaient été notifiés par lettres recommandées dont elle avait accusé réception le 6 avril 2021.

Les deux appels ont été enrôlés sous les numéros de répertoire général 21/02354 et 21/02355.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 23 mai 2022, date à laquelle elle a fait l’objet d’un renvoi à la demande des parties, et un calendrier de procédure a été établi, fixant la date des plaidoiries au 17 janvier 2023.

A l’audience, les parties ont sollicité la jonction des deux procédures.

Aux termes de ses conclusions oralement développées à l’audience, la société [6] demande à la cour de :

– infirmer les deux jugements,

– annuler les mises en demeure notifiées le 3 juin 2016 par l’Urssaf pour les deux établissements exploités par la société [6],

– annuler les contraintes,

– condamner l’Urssaf Nord Pas de Calais à lui payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, la société [6] invoque les dispositions de l’article R 243-58 du code de la sécurité sociale, et soutient que du fait d’un accord antérieur de l’Urssaf à l’occasion d’un contrôle opéré en 2010, aucun redressement ne pouvait lui être notifié au titre de la déduction forfaitaire spécifique, alors qu’elle pratiquait de la même façon, et que les contrôleurs, bien qu’ayant vérifié les dispositifs d’exonération, n’avaient fait aucune observation.

A titre subsidiaire, elle conclut à la nullité du contrôle dans la mesure où l’Urssaf n’a explicité la remise en cause du statut de ses VRP qu’en réponse à ses observations, et en faisant état de l’audition d’un négociateur, sans produire le moindre écrit justifiant du contenu de celle-ci.

Elle soutient également qu’à partir de cette audition, l’Urssaf s’est livrée à une extrapolation en violation des dispositions de l’article R 243-59-2 du code de la sécurité sociale.

Elle conteste la remise en cause du statut de VRP de ses négociateurs, soutenant que la seule référence dans leur contrat de travail à une rémunération indexée sur le SMIC ne suffit pas à écarter le statut de VRP.

D’autre part, et contrairement à ce qu’a soutenu l’Urssaf, et à ce qu’ont validé les premiers juges, les négociateurs perçoivent bien une rémunération calculée sur le chiffre d’affaires des ventes réalisées.

Aux termes de ses conclusions reçues par le greffe le 19 août 2022, l’Urssaf demande à la cour de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

– condamner la société [6] à payer à l’Urssaf Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société [6] aux entiers dépens de l’instance.

L’Urssaf soutient que lors du contrôle précédent, les inspecteurs du recouvrement n’ont pas examiné la déduction forfaitaire spécifique, la lettre d’observations du 14 septembre 2010 excluant ce point des vérifications opérées.

Au fond, elle fait valoir que l’examen de la situation des négociateurs montre qu’ils travaillent en réalité comme des salariés et non des VRP alors qu’ils sont payés au SMIC, sauf à bénéficier de commissions, ce qui n’est pas un critère opérant, qu’il n’est pas justifié que leur activité principale soit celle de la prospection, précisant que la convention collective nationale de l’immobilier prévoit expressément que les négociateurs payés au SMIC et soumis à la durée du travail ne sont pas des VRP.

L’Urssaf conclut au rejet des moyens tendant à faire prononcer la nullité du contrôle alors que la lettre d’observations explicitait clairement la position des inspecteurs du recouvrement, que l’inspecteur du recouvrement peut tout à fait au cours de l’échange contradictoire, préciser certains points en réponse aux observations de l’employeur, en l’occurrence, l’audition d’un négociateur.

D’autre part, les inspecteurs n’ont pas eu recours à l’extrapolation, puisque la lettre d’observations précise que leur analyse est fondée sur l’examen des bulletins de paie et des contrats de travail.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.

Motifs

Dans un souci de bonne administration de la justice, il convient de prononcer la jonction des affaires enrôlées sous les numéros de répertoire général 21/2354 et 21/ 2355.

Sur l’accord tacite invoqué par la société [6]

En vertu des dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, l’absence d’observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l’organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l’objet d’un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n’ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

La décision implicite suppose une législation identique applicable dans les contrôles en cause, une identité de situation de fait dans les contrôles en cause et enfin, la preuve établie par l’employeur que le précédent inspecteur du recouvrement, en s’abstenant de redresser, s’est prononcé en toute connaissance de cause.

En l’espèce, la société [6] soutient qu’elle pratiquait déjà la déduction forfaitaire spécifique appliquée sur la rémunération des négociateurs immobiliers lors du contrôle opéré par l’Urssaf en 2010 sur la période du 1er janvier au 31 décembre 2008, et que l’Urssaf, a consulté les livres de paie, les fiches de paie de l’année contrôlée, la DADS et les tableaux récapitulatifs annuels. Or, les fiches de paie faisaient bien apparaître la déduction forfaitaire spécifique appliquée à hauteur de 30 % sur la rémunération de ses VRP.

Elle se prévaut également des indications figurant au début de la lettre d’observations, où les inspecteurs du recouvrement précisent les points non vérifiés (assiette minimum conventionnelle, contrat de retraite et de prévoyance, frais professionnels, accord d’intéressement) ce qui signifie a contrario que ceux non listés ont été vérifiés, dont la déduction forfaitaire spécifique.

L’Urssaf oppose à juste titre que précisément, cette déduction n’a pas été vérifiée, puisqu’elle est liée aux frais professionnels, lesquels n’ont pas été vérifiés.

La lettre d’observations du 14 septembre 2010 précise en effet de manière très claire, que les inspecteurs du recouvrement n’ont pas examiné les frais professionnels.

De plus, la société [6] affirme que la situation était identique, mais sans en rapporter la preuve, alors qu’elle ne produit aucun élément démontrant que des VRP travaillaient dans les mêmes conditions pendant la période contrôlée.

Dès lors, la société [6] ne peut prétendre que l’Urssaf aurait accepté la pratique des déductions forfaitaires spécifiques et le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur le chef de redressement n° 1 de la lettre d’observations-frais professionnels-déduction forfaitaire spécifique- conditions d’accès aux négociateurs immobiliers

Sur les irrégularités invoquées par la société [6]

L’employeur soutient avoir appris que le redressement était fondé sur les dires d’un négociateur, lequel aurait indiqué ne pas effectuer de démarchage ou de prospection en vue de rechercher une clientèle dans un secteur déterminé, ce que ne mentionnait pas la lettre d’observations.

En vertu des dispositions de l’article R 243-59 du code de la sécurité sociale, « les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l’indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l’indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L 243-7-2, L 243-7-6 et L 243-7-7 qui sont envisagées. Les observations sont faites au regard des éléments déclarés à la date d’envoi de l’avis de contrôle ».

La lettre d’observations rappelait les règles de l’assiette des cotisations de sécurité sociale, et rappelait ensuite que l’assiette minimale des cotisations de sécurité sociale par référence au SMIC n’est pas applicable aux personnes dont les conditions de travail interdisent le bénéfice de la législation sur le salaire minimum de croissance.

Au titre des constatations, les inspecteurs du recouvrement indiquaient : « Sur place, il a été relevé que tous les négociateurs immobiliers travaillaient exclusivement pour l’agence.

Sur la période contrôlée, l’analyse des contrats de travail et des bulletins de salaires a permis de constater que tous les négociateurs immobiliers, sauf M. [N], sont rémunérés en fonction d’un nombre d’heures de travail multiplié par le taux horaire du SMIC.

La convention collective prévoit que les négociateurs immobiliers non VRP sont soumis à la réglementation sur la durée du travail.

La CCN de l’immobilier fixe leur rémunération minimale mensuelle au SMIC.

Les dispositions relatives à l’assiette minimum par référence au SMIC leur sont applicables dans les conditions de droit commun.

L’analyse de la paie démontre d’ailleurs qu’en présence de l’abattement, l’assiette minimum a été limitée au SMIC.

Ces personnels non VRP ne peuvent bénéficier de la déduction forfaitaire spécifique… »

Le texte impose à l’Urssaf d’expliquer au cotisant la nature du redressement envisagé, ses motifs afin que celui-ci puisse faire ses observations. En l’espèce, la lettre d’observations assurait cette information et permettait à la société [6] d’y répondre.

Le contrôle par échantillonnage et extrapolation consiste à limiter la vérification détaillée à un échantillon représentatif de salariés concernés puis à extrapoler les résultats. Cette méthode statistique constitue une alternative à l’examen exhaustif des chefs de redressement potentiels sur la totalité des salariés de l’entreprise contrôlée.

Contrairement à ce que soutient la société [6], les inspecteurs du recouvrement n’ont pas appliqué cette méthode, puisqu’ils ont étudié la situation de chacun des salariés, en calculant le montant de la déduction pratiquée pour chacun, pour la réintégrer dans l’assiette des cotisations.

Au fond

En vertu des dispositions de l’article L 242-1 du code de la sécurité sociale, tout avantage en argent ou en nature alloué en contrepartie à l’occasion du travail doit être soumis à cotisation à l’exclusion des sommes représentatives de frais professionnels lorsqu’elles respectent les conditions et limitées fixées par arrêté interministériel. L’arrêté du 20 décembre 2002, modifié par l’arrêté du 25 juillet 2005, fixe les conditions d’exonération des remboursements de frais professionnels.

Peuvent bénéficier d’une déduction forfaitaire spécifique les professionnels listés à l’article 5 de l’annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000 dont les voyageurs, représentants et placiers de commerce ou d’industrie.

L’annexe IV du code général des impôts prévoit au titre du secteur de l’immobilier l’application d’une déduction forfaitaire spécifique au profit des négociateurs immobiliers exerçant leur activité dans les conditions de l’article L 7313-1 du code du travail et qui effectue des démarchages pour trouver des vendeurs, acquéreurs, loueurs ou locataires de biens immobiliers au taux de 30 %.

Selon l’article L 7313-1 du code du travail toute convention dont l’objet est la représentation, conclue entre un voyageur, représentant ou placier et un employeur est, nonobstant toute stipulation expresse du contrat ou en son silence, un contrat de travail.

Enfin, en vertu de l’article L 7311-3 du code du travail, est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui :

1° travaille pour le compte d’un ou plusieurs employeurs,

2° exerce en fait d’une façon exclusive et constante une profession de représentant,

3° ne fait aucune opération commerciale pour son propre compte,

4° est liée à l’employeur par des engagements déterminant :

a) la nature des prestations de services ou des marchandises offertes à la vente

b) la région dans laquelle il exerce son activité ou les catégories de clients qu’il est chargé de visiter

c) le taux des rémunérations.

Ces modalités sont cumulatives et appréciées au regard des modalités effectives de l’activité professionnelle. A défaut, et même si le contrat de travail en dispose autrement, le statut légal ne s’applique pas. Ce statut légal d’ordre public est complété par des textes conventionnels, notamment l’accord interprofessionnel du 3 octobre 1975.

En l’absence de définition légale du statut de VRP, la jurisprudence l’a définie comme étant l’activité qui consiste à visiter la clientèle en vue de prendre des ordres pour l’employeur et de transmettre les commandes. Elle implique donc une activité de prospection de la clientèle en dehors des locaux de l’entreprise.

La jurisprudence admet également que le VRP est admis à accomplir d’autres tâches au profit de son employeur pour qui il exerce une activité commerciale, dès lors qu’elles restent accessoires à son activité principale.

L’attribution d’un secteur de prospection déterminé et fixe est une condition déterminante du statut de VRP (Soc.10.05.1989).

Pour fonder le redressement, les inspecteurs du recouvrement ont retenu que l’analyse des contrats de travail et des bulletins de salaires a permis de constater que tous les négociateurs immobiliers, sauf l’un d’entre eux, sont rémunérés en fonction d’un nombre d’heures de travail multiplié par le taux horaires du SMIC. Or, la convention collective prévoit que les négociateurs rémunérés au SMIC sont des négociateurs.

Toutefois, l’appréciation du statut réel du salarié doit s’apprécier au regard des dispositions légales, et des conditions réelles de l’exercice de son activité professionnelle, peu important la référence à une convention collective.

Il y a lieu de rappeler qu’il résulte, d’une part, de la décision rendue le 17 janvier 1986 par le Conseil d’État, qui a annulé l’arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale du 5 octobre 1983 élargissant l’accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 (CE, 17 janvier 1986, n° 55717-57404), que cet accord ne s’applique pas aux salariés relevant de la branche des agents immobiliers et des mandataires en vente de fonds de commerce. D’autre part, selon l’avenant n° 31 du 15 juin 2006, relatif au nouveau statut de négociateur immobilier, à la convention collective nationale de l’immobilier du 9 septembre 1988, étendu par arrêté du 5 juin 2007, les dispositions de l’accord national interprofessionnel des VRP précité ne sont pas applicables aux négociateurs immobiliers VRP lesquels dépendent exclusivement de la convention collective de l’immobilier (2e Civ 30/09/2020 18.18-266).

L’employeur produit les contrats de travail des salariés bénéficiaires de la déduction supplémentaire.

Ces contrats font apparaître que leur rémunération est composée d’une part d’une rémunération fixe correspondant au SMIC, mais également d’une rémunération variable pour les commissions, et comprenant une prime si le client souscrit un financement.

L’employeur démontre ainsi, contrairement à ce qu’affirmait l’Urssaf, que la rémunération n’est pas calculée en fonction du nombre d’heures de travail, mais bien sur la base de la prospection réalisée par les salariés. En revanche, et conformément à la convention collective des VRP, un salaire minimum est prévu, calculé sur la base du SMIC.

L’objet de l’activité est de rechercher pour le compte de la SARL [6] et pour le compte de celle-ci les immeubles d’habitation ou tout bien immobilier entrant dans l’objet de la société.

Le salarié s’engage également à suivre l’exécution des ordres passés par la clientèle et à prêter son concours au service compétent de la société pour l’aplanissement de toutes les difficultés ou le règlement de tous les litiges pouvant naître avec la clientèle.

Il résulte ainsi de ces contrats que l’activité des différents salariés est bien de prospecter la clientèle en vue d’obtenir la signature de nouveaux contrats au bénéfice de la société [6].

Chaque contrat définit un secteur d’activité dévolu au salarié.

La société [6] justifie également par la production des livres de paie du règlement d’un salaire de base, mais également de commissions.

Enfin, les salariés ont établi des attestations dans lesquelles ils indiquent que l’essentiel de leur activité se déroule à l’extérieur de l’agence et consiste à démarcher les clients soit sur le terrain, soit sous la forme de démarchage téléphonique, ou par la distribution de prospectus et que leurs passages à l’agence ont pour objet d’effectuer les démarches administratives, l’impression des documents nécessaires à leur activité et leur signature par les clients.

Les éléments produits par l’employeur, et notamment les contrats de travail, établissent que les salariés travaillent en autonomie, à charge pour eux d’obtenir la signature de contrats au bénéfice de la société [6].

L’employeur démontre ainsi que les salariés qu’ils emploient sont des VRP, leur activité répondant aux critères posés par l’article L 7311-3 du code du travail.

La société [6] était dès lors bien fondée à appliquer la déduction forfaitaire spécifique applicable aux VRP.

Il convient par conséquent d’annuler les redressements notifiés pour les deux établissements de la société [6], de [Localité 5] et Le Cateau.

Les jugements déférés doivent par conséquent être infirmés en ce qu’ils ont rejeté les demandes d’annulation des mises en demeure et validé les deux contraintes.

Dépens

Conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, l’Urssaf Nord Pas-de-Calais est condamnée aux entiers dépens.

Demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile

La demande formée par l’Urssaf à ce titre ne peut qu’être rejetée.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société [6] les frais non compris dans les dépens qu’elle a été contrainte d’exposer pour assurer sa défense.

En conséquence, l’Urssaf est condamnée à lui verser la somme de 1 500 euros sur le fondement du texte précité.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoire, en dernier ressort,

Ordonne la jonction des procédures ouvertes sous les numéros RG 21/02354 et RG 21/0 2355 sous le numéro RG 21/02354,

Infirme les jugements déférés sauf en ce qu’ils ont rejeté les demandes de la société [6] tendant à voir reconnaître un accord tacite et la nullité du redressement,

Statuant à nouveau,

Annule le redressement,

Annule en conséquence les mises en demeure décernées par l’Urssaf Nord Pas-de-Calais,

Déclare les oppositions à contrainte bien fondées, et annule en conséquence les contraintes décernées,

Condamne l’Urssaf Nord Pas-de-Calais aux entiers dépens de première instance et d’appel,

La déboute de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

La condamne à payer à la société [6] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x