Démarchage Téléphonique : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/05168

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Démarchage Téléphonique : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 21/05168

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

1ère CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 01 FEVRIER 2024

N° RG 21/05168 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MJ6O

[J] [X]

[Z] [T]

c/

S.A. COFIDIS

S.A.S. SOLUTION ECO ENERGIE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décisions déférées à la cour : jugements des 3 septembre 2020, 8 janvier 2021, 30 juillet 2021 (RG : 11-19-000024) et jugement rectificatif du 9 février 2021 (RG : 11/21/000038) rendus par le tribunal de proximité d’ARCACHON suivant déclaration d’appel du 15 septembre 2021

APPELANTS :

[J] [X]

né le 27 Mai 1948 à [Localité 4] (33)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

[Z] [T]

née le 04 Avril 1950 à [Localité 6] (60)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 1]

Représentés par Maître Christophe GARCIA de la SELARL CHRISTOPHE GARCIA, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

S.A. COFIDIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 5]

Représentée par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOËT, avocat plaidant au barreau d’ESSONNE

S.A.S. SOLUTION ECO ENERGIE, dont le siège social est sis [Adresse 3], représentée par Maître [M] [U] demeurant [Adresse 2], agissant en sa qualité de mandataire liquidateur dans la procédure de liquidation judiciaire de la S.A.S. SOLUTION ECO ENERGIE, suivant jugement du Tribunal de Commerce de Bobigny en date du 21 mai 2021

Non représentée, assignée selon dépôt de l’acte à l’étude d’huissier

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 décembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Paule POIREL, Présidente, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Président : Mme Paule POIREL

Conseiller : Mme Bérengère VALLEE

Conseiller : M. Emmanuel BREARD

Greffier : Mme Evelyne GOMBAUD

ARRÊT :

– par défaut

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 19 septembre 2017, à la suite d’un démarchage téléphonique, Mme [Z] [T] a passé commande auprès de la SAS Solution Eco Energie d’un ensemble photovoltaïque et de pose d’un chauffe-eau thermodynamique pour un montant total de 29 900 euros TTC.

Afin de financer cette opération, par acte du 26 septembre 2017, Mme [T] et son compagnon, M. [J] [X], ont souscrit un prêt auprès de la SA Cofidis pour un montant de 29 990 euros remboursable en 120 mensualités de 306,12 euros après un différé d’amortissement de 6 mois au taux effectif global de 3,96% l’an.

L’installation a été mise en place le 30 novembre 2017.

Cependant, l’installation a cessé de fonctionner.

Par courrier recommandé du 12 septembre 2018, les consorts [T]-[X] ont exercé leur droit de rétractation.

Par acte d’huissier du 11 janvier 2019, les consorts [T]-[X] ont fait assigner les sociétés Solution Eco Energie et Cofidis devant le tribunal de proximité d’Arcachon aux fins d’annulation du contrat de fourniture et d’installation photovoltaïque et par conséquent du contrat de prêt.

Par jugement du 3 septembre 2020, le tribunal de proximité d’Arcachon a :

– ordonné aux parties de transmettre le protocole d’accord au 12 novembre 2020,

– ordonné la réouverture des débats à l’audience du 20 novembre 2020,

– dit que le jugement vaut convocation des parties,

– dit que chaque partie pourra transmettre ses conclusions au vu du dit protocole,

– sursis à statuer sur l’ensemble des demandes.

Par jugement du 8 janvier 2021, le tribunal de proximité d’Arcachon a, notamment, ordonné une mesure d’expertise judiciaire et désigné M. [Y] [C] pour y procéder.

Un jugement rectificatif du 9 février 2021 est intervenu pour rectifier le nom de la partie devant consigner.

Par ordonnance en date du 1er mars 2021, le tribunal de proximité d’Arcachon a constaté la caducité de la mesure d’expertise pour défaut de consignation.

Puis, par jugement contradictoire en date du 30 juillet 2021, le tribunal de proximité d’Arcachon a :

– débouté Mme [T] et M. [X] de leurs demandes principales non fondées,

– condamné reconventionnellement et solidairement Mme [T] et M. [X] à payer à la société Cofidis la somme de 33 059,26 euros au taux contractuel de 3,96% l’an à compter du 11 janvier 2019, date de l’assignation,

– dit que cette condamnation se fera en deniers et quittance,

– condamné la société Solution Eco Energie à verser à Mme [T] et M. [X] la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices subis,

– rejeté toutes demandes plus amples ou contraires,

– condamné la société Solution Eco Energie à payer à Mme [T] et M. [X] la somme de 2 000 euros sur le fondement de I’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Solution Eco Energie à payer la société Cofidis la somme de 1 000 euros sur le fondement de I’article 700 du code de procédure civile,

– ordonné l’exécution provisoire,

– condamné la société Solution Eco Energie aux dépens de l’instance.

Par jugement du 21 mai 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé l’ouverture d’une liquidation judiciaire simplifiée de la société Solution Eco Energie. Maître [M] [U] a été désignée mandataire judiciaire.

Par déclaration électronique en date du 15 septembre 2021, Les consorts [T]-[X] ont relevé appel :

-du jugement du tribunal de proximité d’Arcachon du 30 juillet 2021

-du jugement du tribunal de proximité d’Arcachon du 9 février 2021

-du jugement du tribunal de proximité d’Arcachon du 8 janvier 2021

-du jugement du tribunal de proximité d’Arcachon du 3 septembre 2020,

en toutes leurs dispositions et y ont intimé la sa Cofidis et la SAS Solution Eco Energie.

Par acte d’huissier en date du 1er septembre 2023, les consorts [T]-[X] ont fait assigner et dénoncer à Me [U], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Solution Eco Energie, la procédure pendante devant la cour d’appel de Bordeaux.

Les consorts [T]-[X], dans leurs dernières conclusions déposées le 21 novembre 2023, demandent à la cour de :

A titre liminaire,

– constatant la mise en cause de Me [U], mandataire liquidateur de la société Solution Eco Energie,

– ordonnant la jonction de la présente instance avec celle objet de la mise en cause,

Réformant partiellement lesdits jugements, et statuant à nouveau :

– prononcer la caducité du contrat du 19 septembre 2017, suite à la rétractation de Mme [T] et M. [X],

En conséquence,

– prononcer la nullité du contrat de crédit consenti par Cofidis à M. [X] et Mme [T],

– décharger en conséquence les consorts [X] [T] de toute obligation à rembourser l’emprunt,

A titre subsidiaire,

– prononcer la nullité du contrat du 19 septembre 2017 faute de respect du formalisme contractuel édicté par le code de la consommation,

En conséquence,

– prononcer la nullité du contrat de crédit consenti par Cofidis à M. [X] et Mme [T],

– décharger en conséquence les consorts [X] [T] de toute obligation à rembourser l’emprunt,

A titre infiniment subsidiaire,

Avant dire droit,

– ordonner le fonctionnement d’une expertise judiciaire la confiant à l’expert qu’il plaira à la cour avec mission ordinaire et de droit en matière de construction afin que soit identifier la cause et les désordres affectant l’installation des panneaux photovoltaïques,

– prononcer la résiliation du contrat signé le 19 septembre 2017 aux torts exclusifs de la société Solution Eco Energie,

– prononcer la résiliation du contrat de crédit consenti par Cofidis à M. [X] et Mme [T],

– décharger en conséquence les consorts [X] [T] de toute obligation à rembourser l’emprunt,

En tout état de cause,

– condamner la société Solution Eco Energie à rembourser à Mme [T] et M. [X] les échéances du crédit Cofidis réglées par eux,

– rejeter toute demande de condamnation dirigée à l’encontre de M. [X] et Mme [T],

– rejeter toute demande de restitution dirigée contre M. [X] et Mme [T] du fait de la faute commise par Cofidis,

– ordonner la reprise du matériel installé aux seuls frais de la société Solution Eco Energie, ou quoi que soit, de Cofidis et ordonner la remise en état de l’immeuble appartenant à Mme [T] et M. [X] dans un état identique à celui connu avant l’installation,

– ordonner pour ce faire que les travaux seront précédés d’un constat établi par huissier de justice, aux frais de la société Solution Eco Energie ou de la société Cofidis,

– assortir cette obligation de travaux d’une astreinte d’un montant de 250 euros par jour de retard à compter du mois suivant la signification de la décision à intervenir, et ce pendant un délai de deux mois, délai au-delà duquel elle sera différemment fixée,

– ordonner à la société Cofidis de procéder à l’effacement de toutes les données inscrites au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers de son chef concernant M. [X] et Mme [T], et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter d’un délai d’un mois après la signification de la décision à intervenir, astreinte qui courra pendant deux mois, délai au-delà duquel elle sera différemment fixée,

– condamner la société Cofidis à régler à Mme [T] et M. [X] la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts compensatoires,

– condamner la société Cofidis à régler à Mme [T] et M. [X] la somme de 3 600,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de la procédure.

La société Cofidis , dans ses dernières conclusions en date du 16 novembre 2023, demande à la cour de :

– déclarer M. [X] et Mme [T] irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

– déclarer la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

Infirmer les jugements des 8 janvier 2021 et 9 février 2021 en ce qu’ils ont ordonné une expertise judiciaire,

Confirmer le jugement du 30 juillet 2021 en toutes ses dispositions,

A titre subsidiaire,

Si la cour venait à prononcer la nullité ou la résolution judiciaire des conventions,

– condamner solidairement M. [X] et Mme [T] à rembourser à la société Cofidis le capital emprunté d’un montant de 29 900 euros au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, en l’absence de faute de la concluante et en toute hypothèse en l’absence de préjudice et de lien de causalité,

En tout état de cause,

– condamner solidairement M. [X] et Mme [T] à payer à la société Cofidis la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, – les voir condamner solidairement aux entiers dépens.

La société Solution Eco Energie n’a pas constitué avocat. Elle a été assignée par remise de l’acte à l’étude.

Maître [U], ès qualités, n’a pas davantage constitué avocat.

L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 07 décembre 2023.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 23 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes à défaut de mise en cause du liquidateur de la société Solution Eco Energie:

La société Cofidis soutient que les demandes des appelants devant la cour d’appel sont irrecevables en ce qu’elles tendent à voir ordonner une expertise, mais également à solliciter la nullité ou la résolution judiciaire des conventions en litige faute d’avoir mis en cause le liquidateur de la société Solution Eco Energie et, à tout le moins, de l’avoir fait tardivement.

Selon les dispositions de l’article 396 du code de procédure civile les instances auxquelles le débiteur est partie sont interrompues par l’effet du jugement qui prononce la sauvegarde, le redressement ou la liquidation judiciaire.

Selon l’article L 622-21 du code de commerce, rendu applicable à la liquidation judiciaire par les dispositions de l’article L 641-3, le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance n’est pas mentionnée à l’article L 622-17 et tendant notamment :

1° – à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent,

2° – à la résolution du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

Selon l’article L 622-22 du code de commerce sous réserve des dispositions de l’article L 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance . Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L 626-25 dûment appelés mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

Si d’un point de vue temporel la suspension de l’instance est la seule sanction applicable à l’absence du liquidateur à la présente instance et à la non déclaration de la créance des appelants, et non pas l’irrecevabilité des demandes, dès lors que l’ouverture du redressement judiciaire en date du 21 mai 2021 est intervenue après que par jugement du 8 janvier 2021, rectifié le 9 février 2021, une mesure d’expertise a notamment été ordonnée avec renvoi de l’affaire à la mise en état, en sorte que l’instance était en cours, cette sanction n’est pas applicable à l’espèce alors, d’une part, que l’instance ne tend pas au principal au paiement d’une somme d’argent à l’encontre du vendeur, ni à l’annulation du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent et que, d’autre part, le liquidateur de la société Solution Eco Energie a bien été mis en cause en la personne de maître [M] [U], ès qualités de mandataire judiciaire.

Les demandes des consorts [T]/[X] telles que formulées devant la cour sont en conséquence recevables à l’exception de leur demande tendant à voir condamner la société Eco Energie à rembourser à Mme [T] et à M. [X] les échéances du crédit immobilier, en l’absence de toute déclaration de créance de ce chef.

Sur l’exercice du droit de rétractation :

Le jugement du 8 janvier 2021 a débouté les appelants de leur demande relative au droit de rétractation pour avoir été exercé tardivement, au delà du délai de 14 jours, au motif que le contrat contenait les informations relatives au droit de rétractation tant sur le bon de commande que sur l’offre de crédit affecté et qu’ils présentaient un formulaire détachable permettant l’exercice du droit de rétractation en sorte que les consorts [T]/ [X] ne pouvaient se prévaloir de la prorogation de délai de 12 mois

Les appelants sollicitent la réformation du jugement observant que les mentions relatives au droit de rétractation figurant au bon de commande sont erronées au regard de la législation alors en vigueur, le délai courant dans l’hypothèse d’un contrat mixte portant sur la livraison d’un bien et sur son installation et mise en service à compter de la livraison du bien, de sorte qu’ils sont fondés à se prévaloir de la prorogation du délai de rétractation et à se prévaloir de leur rétractation opérée par lettre recommandée du 12 septembre 2018.

La société Cofidis n’a pas conclu sur ce point.

La société Solution Eco Energie et Maître [U] ès qualités, qui n’ont pas constitué avocat, sont réputés s’en remettre aux dispositions du jugement déféré en ce qu’elles ont fait droit à leurs demandes, soit en ce qu’elles ont retenu que les consorts [T]/ [X] avaient été pleinement informés des modalités de leur droit de rétractation qu’ils avaient exercé tardivement.

Cependant, selon les dispositions de l’article L 221-5 du code de la consommation dans sa version en vigueur entre le 1er juillet 2016 et le 28 mai 2022, applicable au présent contrat, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :

1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’Etat ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation.

Conformément aux dispositions de l’article L221-18 du code de la consommation, dans sa version en vigueur à compter du 1er juillet 2016, le consommateur dispose dans le cas des contrats conclus à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement, d’un délai de 14 jours pour exercer son droit de rétractation, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d’autres coûts que ceux prévus aux articles L 221-3 à L 221-5, à compter :

1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l’article L. 221-4 ;

2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.

Dans le cas d’une commande portant sur plusieurs biens livrés séparément ou dans le cas d’une commande d’un bien composé de lots ou de pièces multiples dont la livraison est échelonnée sur une période définie, le délai court à compter de la réception du dernier bien ou lot ou de la dernière pièce.

Pour les contrats prévoyant la livraison régulière de biens pendant une période définie, le délai court à compter de la réception du premier bien.

Enfin, conformément aux dispositions de l’article L 221-20, lorsque les informations relatives au droit de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° de l’article L 221-5, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L. 221-18.

Toutefois, lorsque la fourniture de ces informations intervient pendant cette prolongation, le délai de rétractation expire au terme d’une période de quatorze jours à compter du jour où le consommateur a reçu ces informations.

Il est constant que le contrat ayant pour objet à la fois la fourniture d’une prestation de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente.

En conséquence, conformément aux dispositions de l’article L 221-18- 2°, le délai de rétractation de 14 jours court à compter de la réception du bien par le consommateur.

Or, le bon de commande litigieux signé à Lanion par Mme [T], soit hors établissement, le 19 septembre 2017, comporte bien un bon de rétractation détachable à envoyer ‘par lettre recommandée avec accusé de réception dans les 14 jours de la commande’ en sorte qu’il comporte une mention erronée quant point de départ du délai de rétractation et partant aux conditions d’exercice du droit de rétractation, comportant de surcroît la mention de l’article L 121-17 abrogé par l’ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016.

Les textes du code de la consommation visés dans le corps du contrat ne font également référence qu’à une rétractation dans le délai de 14 jours à compter de la ‘commande’ ou de ‘l’engagement d’achat’, en sorte que Mme [T] était en droit de se prévaloir d’un délai de rétractation augmenté de 12 mois.

En conséquence, n’étant pas contesté que Mme [T] a exercé son droit de rétractation le 12 septembre 2018, soit dans l’année de la commande et donc nécessairement de la livraison, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à la société Soleco, mais également pour information à la société Cofidis, l’engagement de Mme [T] envers la société Solution Eco Energie s’est trouvé anéanti emportant la caducité du contrat, en sorte que le jugement entrepris est infirmé en ce qu’il a débouté les consorts [T]/[X] de leurs demandes relativement à l’exercice du droit de rétractation.

En conséquence, il appartiendra à la société Solution Eco Energie de reprendre le matériel installé à ses seuls frais avec remise en état de l’immeuble de Mme [T] et M. [X] dans son état antérieur à l’installation, ce après constat de l’état des lieux effectué par un commissaire de justice aux frais de la société Solution Eco Energie, sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte.

Sur le sort du contrat de crédit affecté :

Dans son jugement du 30 janvier 2021, le tribunal de proximité d’Arcachon, après avoir constaté que les demandes au titre de la rétractation avaient été tranchées par le jugement du 8 janvier 2021, a débouté les consorts [T]/[X] de leurs demandes en nullité du contrat de crédit affecté à l’encontre de la société de crédit ayant retenu que le contrat signé le 27 septembre 2017, après sept jours de réflexion, était régulier, que les demandeurs ne justifiaient pas avoir subi un préjudice en signant le dit contrat, que la banque n’avait elle-même commis aucune faute n’ayant libéré les fonds qu’après avoir été en possession des attestations de livraison et de conformité, ni ne démontraient avoir alerté la société Cofidis sur un refus de déblocage des fonds par suite du défaut de conformité du contrat principal.

Mme [T] et M. [X] demandent la réformation de ce jugement poursuivant la nullité du contrat de crédit par suite de la caducité du contrat principal et à défaut sa nullité intrinsèque pour non respect du formalisme, demandant à être dispensés du remboursement du capital emprunté en raison de la faute de la banque

La société Cofidis met essentiellement en avant l’absence de résolution possible du contrat initial dès lors que la preuve n’est pas rapportée du défaut d’exécution par la société Solution Eco Energie de ses obligations qui ne saurait résulter uniquement d’une attestation d’un concurrent qui ne respecte pas les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile et qui ne constitue pas une expertise judiciaire, insistant au contraire sur le fait que les appelants justifient d’une baisse de leur consommation électrique depuis 2017, qu’elle n’a commis aucune faute dans la libération des fonds, qu’elle n’avait aucune obligation de vérifier la mise en service et que l’installation en autoconsommation fonctionnant, peu important l’attestation de livraison, les acquéreurs ne peuvent se prévaloir d’aucun préjudice pour se voir dispensés du remboursement du capital emprunté.

Il est constant et non discuté que l’anéantissement du contrat principal entraîne la caducité du contrat de crédit affecté et en conséquence la remise des choses en l’état soit notamment, la restitution par l’acquéreur du capital emprunté versé au vendeur, n’étant pas discuté ici l’interdépendance des deux contrats participant d’une opération commerciale unique.

Or, ne saurait être remise en cause l’obligation pour la société de crédit qui ne peut débloquer les fonds avant l’expiration du délai de rétractation du contrat qu’elle finance de vérifier la régularité du contrat principal au regard de ce droit à rétractation ce que n’a à l’évidence pas fait la société Cofidis puisqu’elle a libéré les fonds nonobstant l’irrégularité de l’information relative à la rétractation et du formulaire détachable y afférent, ce qui suffit à caractériser une faute de sa part, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur les autres fautes susceptibles de la priver de son droit à restitution du capital emprunté.

Cependant, le prêteur qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal, et ce quelle que soit la cause d’irrégularité, ne saurait être privé de sa créance de restitution qu’autant que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.

Or, force est de constater que les appelantes sont défaillantes dans la démonstration d’un préjudice. En effet, le seul fait que la société Solution Eco Energie se trouve actuellement en liquidation judiciaire n’est pas en soi constitutif d’un préjudice alors que cette situation remet au contraire en cause la reprise du matériel qui a été livré et installé et dont le dysfonctionnement n’est pas établi, alors qu’il permet au contraire aux appelants de produire de l’électricité domestique et qu’ainsi que l’avait relevé le tribunal, leur consommation d’électricité de l’année 2018 par rapport à celle de 2017, est effectivement en légère baisse.

Mais surtout, les consorts [T]/ [X], sur lesquels pèsent la charge de la preuve du dysfonctionnement allégué de l’installation à l’appui de leur demande indemnitaire, alors qu’une expertise avait été ordonnée dans leur intérêt pour mettre en évidence d’éventuels dysfonctionnements, n’ont jamais offert de consigner aux lieu et place de la société Solution Eco Energie le montant de la consignation mis anormalement à sa charge, ainsi qu’ils en avaient la possibilité, se contentant de produire aux débats l’avis technique de la société ‘Aquitaine Bardage Couverture’ en date du 7 septembre 2021 lequel ne remplit, ni les conditions d’une attestation, ne comportant aucune des mentions exigées par les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile dont celle de la connaissance par le rédacteur qu’elle est destinée à être produite en justice, ni celle d’une expertise privée dès lors qu’elle émane d’une société concurrente directement intéressée par ces travaux. Dès lors, n’étant corroboré par aucun autre élément, cet ‘avis’ intervenu quatre ans après la mise en service dont il ressortirait que l’onduleur doit être remplacé, que le branchement du ballon ECS est non conforme pour absence d’un disjoncteur, qu’il faut reprendre le câblage au niveau de l’arrivée EDF, reparamétrer le compteur FHE et reprendre la pose des tores de comptage pour la production photovoltaïque, est dépourvu de valeur probante.

En effet, il ne saurait être considéré que cet avis vient corroborer les doléances des appelants telles qu’elles résultent d’un échange de messages électroniques ou SMS (leurs pièces 7,8 et 9), alors notamment que les SMS ne sont pas datés et que l’ échange de messages électroniques entre le 20 juin 2018 et le 10 septembre 2018 atteste à tout le moins que l’installation mise en place en novembre 2017 a fonctionné sans réserves durant plusieurs mois, les consorts [T]/[X] indiquant eux mêmes avoir constaté des difficultés avec l’onduleur à la suite d’un orage, sans autre précision.

Enfin, c’est vainement que les appelants reprochent à la société de crédit, sans en tirer d’ailleurs aucune autre conséquence de droit, de n’avoir pas vérifié avant le déblocage des fonds la conformité des signatures figurant au bon de commande dont elle disposait, avec celles figurant sur un exemplaire de ce même bon de commande détenu par les appelants et dont aucun élément n’indique qu’elle disposait pour pouvoir opérer une comparaison d’écritures, étant par ailleurs étrangère à la signature du bon de commande.

En tout état de cause, la carence probatoire des appelants dans la démonstration d’un désordre affectant l’installation et en conséquence d’un préjudice, ne permet pas de faire droit à leur demande de dispense de restitution du capital emprunté et il sera fait droit au contraire à la demande de la société Cofidis en paiement de celui-ci à hauteur de la somme de 29 900 euros outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, sans qu’il y ait lieu au regard de ce qui a été sus retenu quant à l’absence de consignation en vue d’une expertise judiciaire, d’ordonner avant dire droit une mesure d’expertise.

Le jugement du 30 juillet 2011 qui a condamné les consorts [T]/ [X] au paiement de la somme de 33 059,26 euros avec intérêts au taux contractuel de 3,96 % l’an à compter du 11 janvier 2019 est en conséquence infirmé.

Il n’y a pas lieu d’infirmer les jugements des 8 janvier 2021 et 9 février 2021 en ce qu’ils ont ordonné une mesure d’expertise, cette demande étant sans objet dès lors que cette mesure est devenue caduque à défaut de consignation par la société Solution Eco Energie dans le délai requis ou par toute autre partie y ayant intérêt, dont au premier chef les appelants.

N’étant pas critiqué plus avant, le jugement du 30 juillet 2021 est confirmé pour le surplus de ses dispositions non contraires au présent arrêt, les appelants qui succombent en leur appel étant condamnés au dépens du présent recours et à payer à la SA Cofidis une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour

Rejetant toute demande plus ample ou contraire des parties.

Déclare recevable les demandes de Mme [Z] [T] et de M. [J] [X] à l’encontre de la société Solution Eco Energie à l’exception de leur demande de remboursement par cette dernière des échéances du crédit qu’ils ont acquittées.

Déclare sans objet l’appel à l’encontre des jugements des 8 janvier 2021 et 9 février 2021 en ce qu’ils ont ordonné une expertise.

Infirme partiellement le jugement du 8 janvier 2021 pour le surplus,

Statuant à nouveau du chef réformé :

Constate l’anéantissement du contrat conclu le 19 septembre 2017 avec la société Solution Eco Energie du fait de la rétractation des acquéreurs.

Ordonne la reprise du matériel installé aux seuls frais de la société Solution Eco Energie avec remise en état de l’immeuble de Mme [T] et M. [X] dans son état antérieur à l’installation, ce après constat de l’état des lieux effectué par un commissaire de justice aux frais de la société Solution Eco Energie.

En conséquence :

Infirme le jugement du 30 juillet 2021.

Statuant à nouveau des chefs réformés :

Constate la caducité du contrat de crédit affecté conclu avec la société Cofidis le 16 septembre 2017.

Condamne solidairement Mme [Z] [T] et M. [J] [X] à payer à la SA Cofidis la somme de 29 900 euros outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Confirme les jugements entrepris pour le surplus de leurs dispositions non contraires au présent arrêt et y ajoutant :

Condamne solidairement Mme [Z] [T] et M. [J] [X] à payer à la SA Cofidis la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne Mme [Z] [T] et M. [J] [X] aux dépens du présent recours.

Le présent arrêt a été signé par Mme Paule POIREL, président, et par Mme Evelyne GOMBAUD, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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