Droit de rétractation : décision du 23 novembre 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/01534
Droit de rétractation : décision du 23 novembre 2023 Cour d’appel d’Amiens RG n° 22/01534
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ARRET

S.A. CREATIS

C/

[B] [Z]

[O]

[O]

OG

COUR D’APPEL D’AMIENS

CHAMBRE ÉCONOMIQUE

ARRET DU 23 NOVEMBRE 2023

N° RG 22/01534 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IMVK

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 14 FÉVRIER 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A. CREATIS, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Margot ROBIT substituant Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocats au barreau d’AMIENS, vestiaire : 65

Ayant pour avocat plaidant, Me Francis DEFFRENNES, avocat au barreau de LILLE

ET :

INTIMES

Madame [K] [B] [Z] épouse [O]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assignée à domicile, le 09/05/22

Monsieur [D] [O]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assigné à personne, le 09/05/22

Monsieur [J] [O]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Assigné à domicile, le 09/05/22

DEBATS :

A l’audience publique du 26 Septembre 2023 devant Mme Odile GREVIN, entendue en son rapport, magistrat rapporteur siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 805 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 Novembre 2023.

GREFFIER : Mme Charlotte RODRIGUES

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Odile GREVIN en a rendu compte à la Cour composée de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Valérie DUBAELE, Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 23 Novembre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2ème alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ; Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, Greffier.

DECISION

Selon offre préalable acceptée le 23 décembre 2014 la SA Créatis a consenti à M. [E] [O] et son épouse un prêt personnel aux fins de regroupement de crédits d’un montant de 54900 euros au taux débiteur de 7,50% l’an remboursable en 144 mensualités de 579,32 euros.

M. [E] [O] est décédé le [Date décès 1] 2020 laissant pour lui succéder Mme [K] [B] [Z] épouse [O], Mme [D] [O] et M. [J] [O] ( les consorts[O])

Se prévalant d’échéances impayées la SA Créatis a, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 9 juillet 2021, adressé aux consorts [O] une mise en demeure de régler les sommes dues sous peine de déchéance du terme.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 27 août 2021 la SA Créatis a prononcé la déchéance du terme.

Par acte d’huissier en date du 26 novembre 2021 la SA Créatis a fait assigner les consorts [O] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Beauvais aux fins de les voir condamner solidairement au paiement de la somme de 43600, 30 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,50% sur le principal à compter du 10 septembre 2021 et la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens.

Par jugement contradictoire en date du 14 février 2022 le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Beauvais a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et condamné solidairement les consorts [O] à payer à la SA Créatis la somme de 18316,75 euros pour solde du prêt sans intérêt et a accordé aux consorts [O] la faculté d’apurer leur dette en 23 mensualités équivalentes de 300 euros, la 24ème mensualité correspondant au solde de la somme due, les paiements s’imputant en priorité sur le capital. La SA Créatis a été déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et les consorts [O] ont été condamnés in solidum aux entiers dépens.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 1er avril 2022, la SA Créatis a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels et donc du chef du quantum de la condamnation prononcée.

Aux termes de ses conclusions remises le 23 juin 2022, expurgées des demandes ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile et auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des moyens invoqués, la SA Créatis demande à la cour d’infirmer la décision entreprise sur ces chefs et statuant de nouveau de condamner solidairement les consorts [O] à lui payer la somme en principal de 43600,30 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 10 septembre 2021ainsi que la somme de 1500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et de les condamner in solidum aux entiers frais et dépens y compris ceux d’appel dont distraction au profit de la SELARL Delahousse et associés.

La déclaration d’appel a été signifiée aux intimés défaillants par actes d’huissier en date du 9 mai 2022 remis à personne pour Mme [D] [O] et à domicile pour Mme [K] [O] et M. [J] [O].

Les conclusions de l’appelante leur ont été signifiées le 1er juillet 2022 par acte d’huissier remis à personne pour M. [J] [O] et à domicile pour les deux autres parties.

Les consorts [O] n’ont pas constitué avocat.

SUR CE,

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Le premier juge a prononcé la déchéance du droit aux intérêts au motif que le prêteur ne justifiait pas de la remise aux emprunteurs d’un formulaire détachable relatif au droit de rétractation.

La SA Créatis soutient que la faculté de rétractation ne bénéficiant qu’à l’emprunteur l’existence du bordereau de rétractation sur le seul exemplaire qui lui est destiné est suffisante ainsi que l’ont jugé de nombreuses cours d’appel et que l’a entériné l’article L 311-12 du code de la consommation en sa version entrée en vigueur au 1er mai 2011 selon laquelle il est précisé qu’un formulaire détachable à l’effet d’exercer le droit de rétractation est joint à l’exemplaire de l’emprunteur.

Elle ajoute qu’elle verse aux débats la liasse contractuelle intégrale intitulée ‘Dossier de financement’ qui comporte trois exemplaires du contrat de prêt celui devant être renvoyé au prêteur et ceux destinés à être conservés par chaque emprunteur qui comportent incontestablement un bordereau de rétractation.

Elle ajoute que l’offre préalable mentionne au dessus de la signature des emprunteurs qu’ils sont restés en possession d’un exemplaire de l’offre doté d’un formulaire détachable de rétractation.

Aux termes de l’article L311-12 du code de la consommation en sa version applicable à compter du 1er mai 2011, afin de permettre l’exercice du droit de rétractation accordé à l’emprunteur, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.

Il est admis que si aucune disposition légale n’impose au prêteur de conserver un exemplaire du bordereau de rétractation joint à l’exemplaire de l’offre communiqué à l’emprunteur, il lui incombe de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations précontractuelles et la signature par l’emprunteur de l’offre préalable comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à ce dernier de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires, comme cela résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et appliquée par les juridictions françaises.

En l’espèce outre la reconnaissance dans l’offre de prêt par les emprunteurs du fait qu’ils sont restés en possession d’un exemplaire du contrat de crédit doté d’un formulaire détachable de rétractation, il est produit par la SA Créatis le dossier de financement entier comportant trois exemplaires de l’offre de crédit, l’une à renvoyer au prêteur et les deux autres à conserver par les emprunteurs qui comportent bien un bordereau de rétractation.

Il ne saurait être exigé que l’exemplaire du prêteur conservé par lui comporte ce formulaire détachable dès lors que ce formulaire n’est qu’un document accessoire au contrat et qui échappe à l’exigence d’identité des exemplaires détenu par chaque partie.

Par ailleurs il ne peut être exigé davantage du prêteur que de produire la copie de l’exemplaire destiné à l’emprunteur rempli mais non signé, l’original devant être conservé par l’emprunteur.

Au demeurant Mme [K] [O] a comparu en première instance et a reconnu sa dette sans contester avoir reçu un exemplaire doté d’un formulaire détachable de rétractation.

Il convient en conséquence d’infirmer la décision entreprise et de dire n’y avoir lieu au prononcé de la déchéance du terme.

Sur les sommes dues

Il résulte des documents produits, offre de prêt, tableau d’amortissement, historique de compte et décompte au 9 septembre 2021 que les consorts [O] sont redevables des sommes suivantes :

Capital restant dû au 19.08.21 32012,22 euros

échéances impayées 8319,04 dont 5277,17 en capital

indemnité conventionnelle 2983,15

Il convient de condamner solidairement les consorts [O] au paiement de la somme de 43314,44 euros avec intérêts au taux contractuel sur la somme de 37289,39 euros à compter du 10 septembre 2021.

Il conviendra de déduire les sommes éventuellement versées en exécution de l’échelonnement accordé en première instance conformément aux dispositions de celui-ci, la SA Créatis ayant limité son appel au prononcé de la déchéance du terme et au quantum de la condamnation prononcée sans intérêt .

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de condamner les consorts [O] in solidum aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction pour ces derniers au profit de la SELARL Delahousse et associés et de dire n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile tant en pemière instance qu’à hauteur d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition de la décision au greffe ,

Confirme la décision entreprise excepté en ce qu’elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts ;

Statuant à nouveau ;

Condamne solidairement Mme [K] [B] [Z] veuve [O], Mme [D] [O] et M. [J] [O] à payer à la SA Créatis la somme de 43314,44 euros avec intérêts au taux contractuel sur la somme de 37289,39 euros à compter du 10 septembre 2021.

Y ajoutant,

Déboute la SA Créatis de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum Mme [K] [B] [Z] veuve [O] et Mme [D] [O] et M. [J] [O] aux entiers dépens d’appel dont distraction au profit de la SELARL Delahousse et associés.

Le Greffier, La Présidente,

 


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