Droit de rétractation : décision du 29 novembre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/00563
Droit de rétractation : décision du 29 novembre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/00563
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29/11/2023

ARRÊT N°446

N° RG 22/00563 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OTHR

SM/AA

Décision déférée du 16 Décembre 2021 – Juge des contentieux de la protection de TOULOUSE

(21/01237)

Mme [W]

S.A. COFIDIS

C/

[B] [H]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU VINGT NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A. COFIDIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Jérôme MARFAING-DIDIER de la SELARL DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [B] [H]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Non représenté

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant

S. MOULAYES, Conseillère, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

M. NORGUET, conseillère

S.MOULAYES, conseillère

Greffier, lors des débats : A. ASDRUBAL

ARRET :

– Défaut

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par V. SALMERON, présidente, et par C.OULIE, greffière de la chambre

Faits et procédure

Suivant une première offre préalable acceptée le 15 mai 2018, la SA Cofidis a consenti à Monsieur [B] [H] un contrat de crédit n°28951000598258 d’un montant de 32 200 euros, remboursable en 120 mensualités moyennant un TEG de 5,69% l’an, permettant le rachat de crédits.

Suivant une seconde offre préalable acceptée le 10 mai 2019, la SA Cofidis a consenti à Monsieur [B] [H] un contrat de prêt n°28933000791847 d’un montant de 4 000 euros, remboursable en 48 mensualités moyennant un TEG de 12,58% l’an.

Constatant des impayés, la banque, par courriers recommandés du 11 mars 2020, a mis en demeure Monsieur [H] de payer les sommes dues ; par courriers du 15 octobre 2020, elle a prononcé la déchéance du terme.

Par acte du 24 mars 2021, la SA Cofidis a fait assigner Monsieur [B] [H] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Toulouse en paiement des sommes exigibles au titre du contrat de prêt personnel et du regroupement de crédits.

En première instance, Monsieur [B] [H], régulièrement cité, n’était ni présent, ni représenté.

Par jugement en date du 16 décembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Toulouse a :

– condamné Monsieur [B] [H] à payer à la SA Cofidis la somme de 25 526,35 euros au titre du regroupement de crédits n°28951000598258 et 3 415,44 euros au titre du prêt personnel n°28933000791847 arrêtées au 3 février 2021 qui ne produira aucun intérêt conventionnel ou légal ;

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

– condamné Monsieur [B] [H] aux dépens ;

– ordonné l’exécution provisoire de droit.

Par déclaration en date du 4 février 2022, la SA Cofidis a relevé appel du jugement du tribunal judiciaire de Toulouse aux fins de le voir réformé en intégralité.

La clôture est intervenue le 9 octobre 2023, et l’affaire a été appelée à l’audience de plaidoirie du 8 novembre 2023.

Prétentions et moyens

Vu les conclusions notifiées le 20 avril 2022 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la SA Cofidis demandant, au visa des articles L. 311-11 et suivants du Code de la consommation et de l’article 1103 du Code civil, de :

– recevoir la société Cofidis en ses demandes et la dire bien fondée,

– confirmer le jugement rendu le 16 décembre 2021 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu’il a condamné Monsieur [B] [H] au paiement des sommes dues au titre des contrats de crédit.

A titre principal :

– infirmer le jugement rendu le 16 décembre 2021 par le juge des contentieux et de la protection du tribunal judiciaire de Toulouse en ce qu’il a déchu la société Cofidis de son droit aux intérêts contractuels.

Statuant à nouveau :

– condamner Monsieur [B] [H] à payer :

– la somme principale de 4 525,38 euros majorée des intérêts au taux de 11,910% depuis l’arrêté de compte du 3 février 2021 au titre du contrat de prêt n°28933000791847,

– la somme principale de 33 494,11 euros majorée des intérêts au taux de 5,720% depuis l’arrêté de compte du 3 février 2021 au titre du contrat de crédit n°28951000598258.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait confirmer la déchéance du droit aux intérêts contractuels :

– condamner Monsieur [B] [H] à payer :

– la somme principale de 3 415,44 euros majorée des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 15 octobre 2020 au titre du contrat de prêt n°28933000791847,

– la somme principale de 33 493,11 euros majorée des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 15 octobre 2020 au titre du contrat de crédit n°28951000598258.

Bien que régulièrement assigné devant la Cour d’appel le 27 avril 2022, par signification à domicile, Monsieur [B] [H] n’a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur la déchéance du droit aux intérêts contractuels

La SA Cofidis reproche au tribunal de l’avoir déchue du droit aux intérêts motif pris qu’il n’était pas établi la remise du bordereau de rétractation à l’emprunteur, de la fiche d’informations précontractuelles, de la notice d’information en matière d’assurance et de la rubrique sur les informations relatives aux crédits renouvelables et aux découverts.

La banque allègue verser aux débats un exemplaire vierge de l’exemplaire remis à Monsieur [H] comportant un bordereau de rétractation ainsi qu’une liasse contractuelle adressée à ce dernier et comprenant notamment la fiche d’informations précontactuelles et la notice d’information en matière d’assurance.

Aux termes de l’article L. 312-21 du Code de la consommation, afin de permettre l’exercice du droit de rétractation mentionné à l’article L. 312-19, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.

L’article L 312-12 de ce même code ajoute que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de fournit à l’emprunteur, sous forme d’une fiche d’informations, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

La sanction est, selon les articles L 341-1 et L 341-4 du Code de la consommation, la déchéance du droit aux intérêts.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations contractuelles, la signature par l’emprunteur de l’offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation, ainsi que de la fiche d’informations précontractuelles et de la notice d’information en matière d’assurance, constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

En l’espèce, Monsieur [H] a reconnu, aux termes des deux offres préalables de crédit en date du 10 mai 2019 et du 15 mai 2018, rester en possession d’un exemplaire du contrat de crédit doté d’un formulaire détachable de rétractation ainsi que de la fiche d’informations précontractuelles et de la notice d’information en matière d’assurance.

Cette reconnaissance n’est cependant qu’un indice de remise qu’il appartient à la banque de corroborer par des éléments complémentaires.

La cour constate à la lecture des pièces versées que la SA Cofidis ne produit nullement un formulaire détachable de rétractation.

Par ailleurs, si la banque produit un exemplaire de la fiche d’informations précontractuelles et la notice d’information en matière d’assurance pour chacun des contrats, la Cour relève toutefois que ces documents ne sont ni signés ni paraphés par l’emprunteur, et ne sont pas numérotés comme les autres feuilles de l’offre remise à l’emprunteur.

Un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de l’offre préalable selon laquelle la fiche d’informations précontractuelles a été remise.

Il s’ensuit que faute pour l’appelante de démontrer une remise effective du formulaire de rétractation, de la fiche d’informations précontractuelles et de la notice d’information en matière d’assurance, c’est à bon droit que le jugement a prononcé la déchéance du droit aux intérêts.

Sur le bénéfice du taux légal

La SA Cofidis demande subsidiairement à la cour d’assortir la condamnation au taux légal, en cas de déchéance du droit aux intérêts contractuels.

La déchéance du droits aux intérêts conventionnels ne dispense pas l’emprunteur du paiement des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.

Cependant, afin de garantir l’effectivité des règles de protection des consommateurs prévues par la directive 2008/48/CE, il incombe au juge de réduire d’office dans une proportion constituant une sanction effective et dissuasive du manquement du prêteur à son obligation légale d’information, le taux résultant de l’application des articles 1231-6 du Code civil et L. 313-3 du Code monétaire et financier, lorsque celui-ci est supérieur ou équivalent au taux conventionnel.

En l’espèce, le taux conventionnel du contrat de prêt n°28933000791847 étant de 11,910 % et celui du contrat de prêt n°2895100598258 de 5,72%, le bénéfice du taux légal pour le dernier contrat, aboutirait à un taux supérieur au taux conventionnel, privant la sanction de déchéance du droit aux intérêts de toute effectivité.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a prévu l’application d’aucun taux d’intérêts, la cour fixant cependant uniquement le taux d’intérêts applicable au taux légal pour le contrat n°28933000791847 à compter de la mise en demeure du 15 octobre 2020.

Sur les demandes annexes

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Partie perdante, la SA Cofidis supportera les dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement du 16 décembre 2021 rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Toulouse sauf en ce qu’il a indiqué que les condamnations ne produiraient aucun intérêt légal ;

Statuant à nouveau,

Condamne Monsieur [B] [H] à payer à la SA Cofidis la somme de 25.526,35 euros au titre du regroupement de crédit n°2895100598258 qui ne produira aucun intérêt conventionnel ou légal et 3.415,44 euros au titre du prêt personnel n°28933000791847 outre intérêts au taux légal à compter du 15 octobre 2020.

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SA Cofidis aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

.

 


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