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ARRÊT N°23/14
PC
N° RG 21/00091 – N° Portalis DBWB-V-B7F-FPWF
S.A.R.L. AREMA ENERGIES
C/
[U]
[E] ÉPOUSE [U]
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 03 FEVRIER 2023
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE SAINT-DENIS en date du 30 novembre 2020 suivant déclaration d’appel en date du 22 janvier 2021 RG n° 1118000304
APPELANTE :
S.A.R.L. AREMA ENERGIES
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Nathalie JAY, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
INTIMÉS :
Monsieur [D] [U]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Céline CABAUD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [L] [E] ÉPOUSE [U] épouse [U]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentant : Me Céline CABAUD, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Sophie MARGAIL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DATE DE CLÔTURE : 09 septembre 2021 puis le 23 juin 2022.
DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Novembre 2022 devant Monsieur CHEVRIER Patrick, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s’y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 03 Février 2023.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré
greffier lors des debats : Véronique FONTAINE, Greffier
greffier lors du prononce : Marina BOYER, Greffier
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 03 Février 2023.
* * * * *
LA COUR :
Par acte délivré le 15 mars 2018, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a fait assigner Monsieur [D] [U] et Madame [L] [U] devant le tribunal d’instance de Saint-Denis de la Réunion aux fins de :
Constater la déchéance du terme ;
Les condamner solidairement à lui payer la somme de 22.830,99 euros outre les intérêts au taux contractuel de 4,80 % à compter du 15 juin 2017, date de la mise en demeure ;
Ordonner la capitalisation des intérêts ;
Les condamner in solidum au paiement d’une indemnité de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Monsieur et Madame [U] ont fait intervenir à la procédure la société ARMEA ENERGIES par acte d’huissier délivré le 17 décembre 2018.
Par jugement du 11 juillet 2019, le tribunal d’instance de Saint Denis a :
– constaté que tous les documents litigieux ont été signés par Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E], épouse [U], (bon de commande du 5 novembre 2014 daté du 9 novembre 2014 et bon de commande du 24 janvier 2015 pour un même montant correspondant manifestement à la même prestation et les offres de prêt du 6 mars 2015) ;
– débouté Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de leur demande de vérification d’écriture avant-dire droit.
Par jugement en date du 30 novembre 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Denis tribunal judiciaire de Saint Denis a:
– Déclaré l’action de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, recevable.
Vu le jugement du 11 juillet 2019,
– Déclaré irrecevable la demande de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E], épouse [U], tendant à voir constater l’inexistence des contrats de vente et de crédit en l’absence de rencontre des volontés des parties,
– Prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 24 janvier 2015 entre Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E], épouse [U], et la société AREMA,
– Constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt souscrit le 6 mars 2015 entre Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] et la société SYGMA BANQUE,
EN CONSEQUENCE,
– Ordonné la restitution par les époux [U] du matériel photovoltaïque installé à leur domicile par la société AREMA en exécution du contrat de vente annulé,
– Dit que Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] tiendront ce matériel à la disposition de la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, qui devra procéder à son enlèvement à ses frais,
– Condamné la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, à rembourser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] la somme de 19.737 euros correspondant au prix de vente du matériel ;
– Condamné solidairement Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] à rembourser à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, le capital emprunte de 19.737,00 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;
– Ordonné la capitalisation des intérêts échus sur cette somme à compter du 15 mars 2018;
– Débouté Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de leur demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral;
– Débouté la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
– Ordonné à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, de faire procéder auprès de la banque de France à la radiation de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) ;
– Condamné la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, à verser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] une somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, et la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Rejeté toute autre demande.
Par déclaration au greffe notifiée par RPVA le 22 janvier 2021, la SARL AREMA ENERGIES a relevé appel du jugement.
La SARL AREMA ENERGIE a déposé ses premières conclusions d’appelante au greffe de la cour le 21 avril 2021.
Monsieur et Madame [U] ont déposé leurs premières conclusions d’intimée par RPVA le 20 juillet 2021.
La société BNP PARIBAS (la BNP) a déposé ses premières conclusions d’intimée le 20 juillet 2021 par RPVA.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 09 septembre 2021.
Par arrêt avant dire droit en date du 1er avril 2022, la cour a statué en ces termes :
Fait injonction à la société ARMEA Energies et à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de produire le bon de commande/ contrat de vente du 24 janvier 2015 passé par les époux [U] à la société ARMEA et le jugement du 11 juillet 2019 ;
ORDONNE la révocation de l’ordonnance de clôture du 09 septembre 2021;
RENVOIE le dossier à l’audience de la mise en état du 23 juin 2022 à 9 h 30 pour clôture et nouvelle fixation après production des pièces manquantes ;
RÉSERVE l’ensemble des demandes ;
RÉSERVE les dépens.
Les pièces sollicitées ont été versées aux débats sans nouvelles conclusions des parties selon bordereau de communication de pièces en date du 5 avril 2022.
La clôture est intervenue le 23 juin 2022.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 21 avril 2021, la SARL AREMA ENERGIES demande à la cour au visa des articles 1108,1338 du Code civil tels qu’en vigueur au moment des faits, des articles L. 111-1, L. 111-7 et L. 121-17 du Code de la consommation de :
– Rejeter toutes conclusions contraires comme étant injustes ou mal fondées,
– Accueillir l’appel et le déclarer bien fondé ;
– REFORMER le jugement entrepris en ce qu’il a :
‘ Prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 24 janvier 2015 entre Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] Épouse [U] et la société AREMA ;
‘ Ordonné la restitution par les Époux [U] du matériel photovoltaïque installé à leur domicile par la société AREMA en exécution du contrat de vente annulé ;
‘ Dit que Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] tiendront ce matériel à la disposition de la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, qui devra procéder à son enlèvement à ses frais;
‘ Condamné la société AREMA ENERGIE, anciennement société AREMA, à rembourser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] la somme de 19.737 euros correspondant au prix de vente du matériel;
‘ Débouté la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
‘ Condamné la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, à verser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] une somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
‘ Débouté la société BNP PARIBAS PERSONNAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, et la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
‘ Rejeté tout autre demande,
‘ Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision
STATUANT A NOUVEAU,
A TITRE PRINCIPAL,
– Constater que le bon de commande du 9 novembre 2014 tient lieu de loi entre les parties,
– DECLARER que le bon de commande du 9 novembre 2014 est valable au regard des dispositions du code de la consommation,
– REJETER l’ensemble des demandes de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U],
A TITRE SUBSIDIAIRE,
– Constater que le bon de commande du 9 novembre 2014 a été porté à la connaissance et signé par Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U],
– DIRE ET JUGER que les éventuelles irrégularités ne pourraient encourir qu’une nullité relative, laquelle est couverte par les actes réalisés postérieurement à la conclusion du contrat et manifestant la volonté non équivoque de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de confirmer le contrat de vente,
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
– CONDAMNER Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] à verser la somme de 5.000 € à titre d’indemnisation de ses préjudices moraux,
– CONDAMNER Monsieur [D] [U] et Madame [L] [U] à verser à la SARL AREMA ENERGIES la somme de 4.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile et de dire qu’il sera condamné au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel,
– CONFIRMER la décision entreprise pour le surplus,
– CONDAMNER Monsieur [D] [U] et [L] [E] épouse [U] à verser à la SARL AREMA ENERGIES la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
– LES CONDAMNER aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Selon l’appelante, le 5 novembre 2014 Monsieur [D] [U] et Madame [L] [U] ont signé un bon de commande pour l’achat d’un kit de centrale photovoltaïque, les conditions de fournitures et de pose des panneaux photovoltaïques. Monsieur [D] [U] a donné mandat le 5 novembre 2014 à la société AREMA pour effectuer en son nom et pour son compte les démarches nécessaires auprès d’ERDF, gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité, sur la ou les communes concernées par cette opération, pour le raccordement du ou des sites dont il est le maître d’ouvrage ainsi que pour effectuer les démarches administratives nécessaires à la faisabilité du projet photovoltaïque et à l’installation de l’ouvrage. Le 19 mars 2015, le matériel a été livré par la société AREMA et réceptionné par Monsieur [U] le 19 mars 2015 sans réserve, ni observation. La société AREMA a émis une facture acquittée de 19.737,30 euros au nom de Monsieur [U] le même jour. Par un courrier du 24 mars 2015, la société SYGMA BANQUE a transmis à Monsieur [U] le tableau d’amortissement relatif au crédit affecté. Monsieur [U] a renvoyé le 14 mars 2016 à la Région Réunion les documents nécessaires pour pouvoir bénéficier du chèque énergie d’un montant de 3.000 euros.
L’appelante soutient que le bon de commande signé entre les époux [U] et la société AREMA ENERGIES comporte et détaille toutes les mentions obligatoires prescrites par le code de la consommation et qu’il doit donc être considéré comme parfaitement valable.
Elle fait valoir que :
– le bon de commande émis le 5 novembre 2014 et signé le 9 novembre 2014 par les époux [U] contient et détaille tous les éléments essentiels pour constituer une offre ;
– les conditions générales de vente sont jointes ;
– les époux [U] ont manifesté leur acceptation pure et simple de l’offre proposée en signant le bon de commande et en précisant la mention manuscrite « lu et approuvé bon de commande et conditions générales de vente » ;
– la rencontre des volontés a eu lieu au moment de la signature en date du 9 novembre 2014, nonobstant la réitération d’un bon de commande intervenu pour la même prestation le 24 janvier 2015 ;
-les conditions de fourniture et de pose, signées avec la mention « lu et approuvé » par les époux [U] détaillent de façon exhaustive les éléments relatifs à la fourniture et à la pose du matériel commandé ;
– le bon de commande signé le 9 novembre 2014 stipule « Délai de pose maximum: 2 mois après la pose des compteurs par EDF Cf. Art. 6 des CGV » ; que ces stipulations donnent toutes les précisions nécessaires quant aux délais d’installation et de raccordement et que les délais stipulés ont parfaitement été respectés.
-le bon de commande signé le 9 novembre 2014 précise le coût des différents éléments du devis
-le bon de commande comporte également un encart parfaitement visible intitulé « Modalités de paiement ».
Elle fait valoir que si par extraordinaire la cour devait considérer que le bon de commande du 9 novembre 2014 ne tient pas initialement lieu de loi entre les parties, il conviendra de considérer que les époux [U] ont eu connaissance de tous les éléments et précisions relatifs à l’offre et à la prestation, celle-ci étant purement identique que celle évoquée dans le bon de commande du 24 janvier 2015 se contentant simplement de réitérer strictement la même opération.
Elle fait observer que les consorts [U] ont laissé le contrat s’exécuter sans manifester la volonté d’y mettre fin et sans engager d’action en nullité, que l’éventuelle nullité relative encourue par le bon de commande est couverte par le comportement non équivoque de Monsieur et Madame [U], lesquels ont ainsi manifesté leur volonté, même tacite, de bénéficier de l’installation et de confirmer l’acte de vente et ce, à chaque étape du long processus de validation, de financement, d’installation et de raccordement de la centrale.
La SARL AREMA ENERGIES demande que les époux [U] soient déboutés de leur demande de nullité du contrat principal et qu’ils soient condamnés au paiement de la somme de 5.000 € à titre d’indemnisation de ses préjudices moraux subis du fait de l’atteinte au droit à la protection de son nom, de son domicile, de ses correspondances et de sa réputation.
* * * * *
Dans ses conclusions notifiées par RPVA le 20 juillet 2021, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, demande à la cour de :
‘ INFIRMER le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Saint-Denis le 30 novembre 2020 en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat principal de vente conclu entre Monsieur [D] [U], Madame [L] [U], et la société AREMA ENERGIES, en ce qu’il a constaté la nullité du contrat de crédit affecté conclu entre Monsieur [D] [U], Madame [L] [U], et la société SYGMA BANQUE, et en ce qu’il a rejeté en conséquence la demande de la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE visant à la condamnation solidaire de Monsieur [D] [U] et de Madame [L] [U] à lui régler la somme de 22.830,99 € avec intérêts au taux contractuel de 4,80 % l’an sur la somme de 21.207,30 € à compter du 24/05/2017 en remboursement du crédit affecté ;
Subsidiairement, si la cour devait confirmer le prononcé de la nullité des contrats,
CONFIRMER la condamnation Monsieur [D] [U] et de Madame [L] [U] à régler à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 19.737 € au titre de la restitution du capital prêté.
Statuant à nouveau sur les chefs critiqués,
A titre principal,
DECLARER irrecevable la demande de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] en nullité du contrat conclu avec la société AREMA ENERGIES ; DECLARER, par voie de conséquence, irrecevable la demande de Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] en nullité du contrat de crédit conclu avec la société SYGMA BANQUE;
DIRE ET JUGER subsidiairement que les demandes de nullité des contrats ne sont pas fondées ; DEBOUTER Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de leur demande en nullité du contrat conclu avec la société AREMA ENERGIES, ainsi que de leur demande en nullité du contrat de crédit conclu avec la société SYGMA BANQUE ;
CONSTATER que la déchéance du terme a été prononcée, à défaut PRONONCER judiciairement la résiliation du contrat de crédit au vu des impayés avec effet au 13/09/2016 ;
En tout état de cause,
CONDAMNER solidairement Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] à payer à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 22.830,99 € avec les intérêts au taux contractuel de 4,80 % l’an à compter du 24/05/2017 sur la somme de 21.207,30 € et au taux légal pour le surplus, en remboursement du crédit affecté ;
Subsidiairement, en cas de nullité des contrats, CONDAMNER in solidum, Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] à régler à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 19.737 € en restitution du capital prêté ;
‘ DEBOUTER Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] de toutes autres demandes, fins et conclusions ;
‘ ORDONNER le cas échéant la compensation des créances réciproques à due concurrence ;
En tout état de cause,
CONDAMNER in solidum Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] au paiement à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles d’appel de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Les CONDAMNER in solidum aux entiers dépens de l’instance avec distraction au profit de Maître Sophie MARGAIL ;
La BNP invoque le caractère irrecevable, à tout le moins infondé de la demande de nullité du contrat de vente en l’absence d’irrégularité formelle du bon de commande.
Elle fait observer que la sanction du non-respect des dispositions du code de la consommation concernant la régularité formelle du bon de commande est une nullité relative du contrat et que le seul constat d’irrégularités formelles ne suffit pas à fonder le prononcé de la nullité du contrat en l’absence de la preuve par l’acquéreur de son préjudice.
Elle rappelle que la nullité relative est susceptible de confirmation en cas d’exécution volontaire du contrat.
La BNP Paribas fait valoir que les caractéristiques du produit étaient mentionnées sur le bon de commande, que le prestataire n’avait pas d’autre choix que de prévoir un délai courant à compter de la pose préalable des compteurs par EDF et que la mention des modalités de paiement à crédit n’était pas exigée à peine de nullité du contrat.
Elle fait observer que le bon de commande vise en son recto un délai de rétractation de 14 jours à compter de la signature du bon de commande.
Elle soutient que les époux [U] ne justifient pas d’un préjudice qui résulterait des irrégularités alléguées, qu’en présence de simples irrégularités formelles, qu’ils ont poursuivi l’exécution des contrats pendant de nombreux mois en connaissance des caractéristiques de l’installation utilisée, en connaissance des modalités d’exécution du contrat qui étaient achevées, en connaissance du prix et des modalités de paiement à crédit.
Elle rappelle qu’en l’absence de nullité du contrat principal, le contrat de crédit est maintenu, que la déchéance du terme au vu des impayés a été prononcée et qu’elle est donc bien fondée à solliciter la condamnation solidaire de Monsieur et Madame [U] à lui régler la somme de 22.830,99 € avec les intérêts au taux contractuel de 4,80 % l’an à compter du 24/05/2017 sur la somme de 21.207,30 € et au taux légal pour le surplus.
Elle rappelle que l’annulation ou la résolution du contrat de vente emporte l’annulation ou la résolution du contrat de prêt et l’obligation pour l’emprunteur de restituer les fonds prêtés au prêteur et l’obligation pour le prêteur de rembourser les sommes versées par l’emprunteur.
Elle sollicite, en l’absence de faute de sa part, la condamnation des époux [U] à restituer à la banque le capital prêté en l’absence de faute imputable à cette dernière.
* * * * *
Dans leurs conclusions notifiées par RPVA le 20 juillet 2021, les époux [U] demandent à la cour de :
CONFIRMER le jugement entrepris le 30 novembre 2020 dans toute ces dispositions et notamment en ce qu’il a :
– Prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 24 janvier 2015 entre Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] et la société AREMA,
– Ordonné la restitution par les époux [U] du matériel photovoltaïque installé à leur domicile par la société AREMA en exécution du contrat de vente annulé,
– Dit que Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] tiendront ce matériel à la disposition de la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, qui devra procéder à son enlèvement à ses frais,
– Condamné la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, à rembourser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] la somme de 19.737 euros correspondant au prix de vente du matériel,
– Débouté la société AREMA ENERGIES, anciennement AREMA, de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
– Condamné la société AREMA ENERGIES, anciennement nommé AREMA, à verser à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E] épouse [U] une somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Débouté la société BNP PARIS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE et la société AREMA ENERGIES, anciennement société AREMA, de leurs demandes au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– PRENDRE ACTE que le jugement a été exécuté par toutes les parties ;
EN CONSEQUENCE,
-PRONONCER la nullité absolue du contrat de commande ;
-DIRE que le contrat de commande n’a jamais existé et l’annuler de manière rétroactive ;
-ORDONNER la restitution du matériel aux frais de la société AREMA ENERGIES;
Y AJOUTANT,
-CONDAMNER la société AREMA ENERGIES à verser aux époux [U] la somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-CONDAMNER la société AREMA ERNERGIES aux entier dépens.
Les époux [U] soutiennent que les nombreuses mentions prescrites à peine de nullité par le code de la consommation ont été omises dans la rédaction des bons de commande, si bien que ceux-ci encourent donc la nullité et que la nullité du contrat de vente entraîne l’effacement rétroactif du contrat.
Les époux [U] font valoir s’agissant des deux bons de commandes datés respectivement du 09 novembre 2014 et du 24 janvier 2015, que le premier bon de commande n’a plus de contenu et d’existence juridique du fait de la signature du second bon de commande qui tient lieu de loi entre les parties.
Ils font valoir que tant le bon de commande du 09 novembre 2014 que celui du 24 janvier 2015 ne respectent pas les dispositions du code de la consommation et encourent donc la nullité.
Ils relèvent que les caractéristiques essentielles du service fourni par la société AREMA ne sont pas clairement identifiées sur le bon de commande communiqué, que les caractéristiques techniques sont largement insuffisantes sur le bon de commande du 24 janvier 2015 puisqu’il n’est fait état d’aucune de ces informations, et que la simple précision sur le bon de commande d’un kit centrale photovoltaïque de 3 KW ne peut suffire à remplir les conditions posées par le code de la consommation.
Ils font observer qu’aucune précision concernant le financement ne figure sur le bon de commande et ce alors même que le crédit affecté à l’achat de ce bien n’a été régularisé que le 6 mars 2015, soit postérieurement à la signature du contrat de vente et enfin qu’aucune information relative à l’identité complète de la société AREMA ne figure sur le bon de commande ou dans les conditions générales prétendument communiquées.
Ils soulignent que si le bon de commande mentionne simplement le droit de rétractation il ne communique nullement les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation.
Ils relèvent que le délai de pose maximum de 2 mois après la pose des compteurs par EDF est particulièrement flou du fait que l’intervention d’EDF n’est pas encadrée dans le temps, et n’est pas maîtrisé par la société AREMA.
Les époux [U] sollicitent le rejet de la demande de préjudice moral de la société Arema Energies qui ne démontre nullement l’existence d’un préjudice moral.
* * * * *
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS
A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur le contrat applicable :
Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
Les parties discutent du bon de commande applicable à la cause car, un premier bon de commande aurait été signé par les parties le 5 novembre 2014, suivi d’un second régularisé le 24 janvier 2015.
La société AREMA ENERGIES plaide que le bon de commande du 9 novembre 2014 est valable au regard des dispositions du code de la consommation. Sa régularité permettrait de considérer que le bon de commande daté du 24 janvier 2015 n’encourt plus la nullité de ce fait.
La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, fait grief au jugement entrepris d’avoir prononcé la nullité du contrat sans préciser de quel bon de commande est né le contrat de prêt.
Ceci étant exposé,
L’offre préalable de prêt, proposée par la société SYGMA BANQUE, est datée du 4 mars 2015. Elle a été acceptée et signée par les emprunteurs le 6 mars 2015.
Le certificat de livraison du bien acheté avec ce crédit affecté a été signé par Monsieur [U] le 19 mars 2015 et par le vendeur le 23 mars 2015.
Le second bon de commande, daté du 24 janvier 2015, concerne les mêmes parties, le même matériel et le même montant, correspondant aussi au montant de l’offre de prêt.
Monsieur et Madame [U] établissent aussi qu’une première offre de prêt leur avait été soumise le 20 février 2015 au motif qu’une « petite erreur de signature » a été faite sur les premières offres de prêt signées concernant le financement du projet photovoltaïque.
Cette offre était valable jusqu’au 14 mars 2015 et aurait donc pu être signée par les emprunteurs le 6 mars 2015.
La cour observe que les offres de prêt versées aux débats, le courrier adressé par AREMA ENERGIES à Monsieur et Madame [U], les deux bons de commandes, la facture non signée par les acquéreurs en date du 19 mars 2015, ne comportent aucune référence, apparente ou lisible, permettant de les relier entre elles.
Pour démontrer que le bon de commande daté du 9 novembre 2014 doit être pris en compte, la société AREMA produit notamment une procuration datée du 5 novembre 2014, lui donnant mandat de procéder aux démarches administratives nécessaires pour réaliser le raccordement au réseau public d’électricité du système photovoltaïque acquis par Monsieur et Madame [U].
Cependant, ce mandat, non signé par la société AREMA ENERGIES, est antérieur au bon de commande du 9 novembre 2014 et n’établit donc pas le lien entre ce contrat et le bon de commande, d’autant qu’il n’existe aucune référence précise permettant de vérifier le lien direct entre les deux actes.
Secondairement, la cour observe que ce mandat est donné pour une centrale de 9KW alors que les deux bons de commande portent sur une centrale photovoltaïque de 3 KW.
En outre, le premier bon de commande ne contient aucun tampon de la société AREMA ENERGIES, contrairement à celui du 24 janvier 2015.
Enfin, la société AREMA ENERGIES n’explique pas pourquoi un second bon de commande aurait été nécessaire le 24 janvier 2015 si le premier avait été régulier et valide, d’autant que la date des offres de prêt, celle de l’installation du matériel, de l’attestation de livraison et de la facture correspondent à la période plus proche du bon de commande du 24 janvier 2015.
L’ensemble de ces éléments permet de retenir que le bon de commande applicable au litige est bien celui daté du 24 janvier 2015 et non celui du 9 novembre 2014.
L’absence de référence au bon de commande du 9 novembre 2014 dans le bon de commande du 24 janvier 2015 conduit aussi à écarter l’hypothèse d’un quelconque avenant ou d’une régularisation qui n’est même pas évoquée dans le second acte.
En conséquence, le premier juge a parfaitement jugé la nullité du bon de commande du 24 janvier 2015 par des motifs que la cour adopte, s’agissant du non-respect des dispositions d’ordre public du code de la consommation.
Le jugement querellé doit être confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 24 janvier 2015 et, en conséquence, prononcé la nullité du contrat de prêt consenti par la société SYGMA BANQUE le 6 mars 2015.
Sur les conséquences de la nullité de la vente :
Entre Monsieur et Madame [U] et la société AREMA ENERGIES :
Le jugement querellé sera confirmé en ce qu’il a ordonné la restitution du matériel photovoltaïque à la société AREMA ENERGIES tandis que cette dernière est redevable de la somme de 19.737,00 euros envers Monsieur et Madame [U] au titre de la restitution du prix de la vente.
Entre Monsieur et Madame [U] et la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE :
Aux termes du 9° de l’article L. 311-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur au moment de la conclusion du prêt litigieux,
Un contrat de crédit affecté ou contrat de crédit lié est un crédit servant exclusivement à financer un contrat relatif à la fourniture de biens particuliers ou la prestation de services particuliers ; ces deux contrats constituent une opération commerciale unique. Une opération commerciale unique est réputée exister lorsque le vendeur ou le prestataire de services finance lui-même le crédit ou, en cas de financement par un tiers, lorsque le prêteur recourt aux services du vendeur ou du prestataire pour la conclusion ou la préparation du contrat de crédit ou encore lorsque le contrat de crédit mentionne spécifiquement les biens ou les services concernés.
Il résulte d’une jurisprudence constante qu’en cas de résolution ou d’annulation judiciaire du contrat principal, l’emprunteur est tenu de restituer le capital emprunté, sauf si le prêteur a commis une faute en omettant de vérifier l’exécution complète du contrat principal, ou de s’assurer de sa régularité, notamment au regard de la législation relative au démarchage à domicile, sauf à observer qu’il incombe à l’emprunteur de caractériser l’existence d’un préjudice.
En l’espèce, Monsieur et Madame [U] ne forment aucun grief à l’encontre du jugement les ayant condamnés solidairement à rembourser à la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, venant aux droits de la société SYGMA BANQUE, le capital emprunté de 19.737,00 euros, avec les intérêts au taux légal à compter du jugement, tout en ordonnance la capitalisation des intérêts échus sur cette somme à compter du 15 mars 2018.
Subsidiairement, la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE conclut, en cas de nullité des contrats, à la confirmation du jugement, de ce chef.
Sur les autres demandes :
La société AREMA ENERGIES, doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts compte tenu de la nullité du bon de commande qu’elle a présenté elle-même aux intimés en méconnaissance des régules d’ordre public du code de la consommation.
Succombant en son appel, elle supportera les dépens et les frais irrépétibles de Monsieur et Madame [U] en appel tandis que le jugement querellé sera confirmé aussi de ce chef.
La société AREMA ENERGIES devra donc payer à Monsieur et Madame [U] la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en appel.
Il est enfin équitable de laisser la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE supporter ses frais irrépétibles en la déboutant de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, en matière civile, par sa mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
DEBOUTE la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société AREMA ENERGIES à payer à Monsieur [D] [U] et Madame [L] [E], épouse [U], la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en appel ;
CONDAMNE la société AREMA ENERGIES aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Marina BOYER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE signé LE PRÉSIDENT