Droit de rétractation : décision du 14 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/07053
Droit de rétractation : décision du 14 mars 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 20/07053
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N° RG 20/07053 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NJH7

Décision du

TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de LYON

Au fond

du 13 octobre 2020

RG : 15/14251

ch n°

[K]

[X]

S.C.I. MATLOREN

C/

S.A. BPE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1ère chambre civile B

ARRET DU 14 Mars 2023

APPELANTS :

M. [E] [K]

né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740

ayant pour avocat plaidant Me Thibault DU MANOIR DE JUAYE de la SELEURL DU MANOIR DE JUAYE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0240

Mme [P] [X] épouse [K]

née le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740

ayant pour avocat plaidant Me Thibault DU MANOIR DE JUAYE de la SELEURL DU MANOIR DE JUAYE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0240

La SCI MATLOREN

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740

ayant pour avocat plaidant Me Thibault DU MANOIR DE JUAYE de la SELEURL DU MANOIR DE JUAYE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0240

INTIMEE :

Société BPE anciennement dénommée BANQUE PRIVEE EUROPEENNE

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Florence CHARVOLIN de la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON, toque : 1086

ayant pour avocat plaidant Me Katia SITBON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0296

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 20 Janvier 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 24 Janvier 2023 prorogée au 14 Mars 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Olivier GOURSAUD, président

– Stéphanie LEMOINE, conseiller

– Bénédicte LECHARNY, conseiller

assistés pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffier

A l’audience, un des membres de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Olivier GOURSAUD, président, et par Elsa SANCHEZ, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte sous seing privé du 5 juin 2007, la SCI Matloren, dont les époux [K] sont les associés, a souscrit un prêt auprès de la BPE, d’un montant de 280 000 €, destiné à financer, à hauteur de 260 000€, un bien à usage locatif situé à Luzarches (Val d’Oise) et à hauteur de 20 000 €, les frais de notaire. Le prêt était garanti par une hypothèque conventionnelle sur le bien acheté, un cautionnement solidaire des époux [K], une cession de loyers et le nantissement de quatre contrats d’assurance-vie souscrits par les époux [K].

A la suite de difficultés financières, la SCI Matloren a procédé à la vente d’une partie des biens, au prix de 125 000 €. Elle a alors sollicité la mainlevée partielle de l’hypothèque dont bénéficiait la BPE. En contrepartie, la BPE a imposé de nouvelles conditions aux garanties prises à la souscription du prêt, et notamment, de placer la somme de 15 000 € sur le ou les contrats d’assurance-vie nantis, de placer la somme de 5 000 € sur le produit d’épargne BPE Trésorerie, de prendre un abonnement mensuel de 300 € sur le ou les contrats d’assurance-vie et d’accorder la main levée sur les contrats d’assurance externe souscrits auprès de la compagnie épargne pension et nantis au profit du prêt.

En septembre 2013, la société Matloren a racheté le prêt grâce à des fonds investis dans des contrats d’assurance-vie des époux [K] et au moyen d’un prêt amortissable souscrit auprès d’un autre établissement de crédit.

Par acte d’huissier de justice du 26 décembre 2013, M. [K] a fait assigner la BPE aux fins d’être indemnisé pour un manquement de la banque à ses obligations professionnelles d’informations et de conseil. Mme [K] et la SCI Matloren sont intervenus volontairement à la procédure.

Par jugement du 13 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Lyon a :

– déclaré irrecevables les demandes en nullité et déchéance du droit aux intérêts de la SCI Matloren comme étant prescrites,

– rejeté la fin de non-recevoir opposée aux époux [K],

– débouté les époux [K] et la SCI Matloren de toutes leurs prétentions,

– condamné in solidum les époux [K] et la SCI Matloren à payer à la BPE la somme de 1 500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la BPE pour le surplus,

– condamné les époux [K] et la SCI Matloren aux dépens, avec droit de recouvrement direct dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile au profit de l’avocat adverse.

Par déclaration du 14 décembre 2020, les époux [K] et la SCI Matloren ont interjeté appel.

Au terme de leurs dernières conclusions notifiées le 10 septembre 2021, les époux [K] et la SCI Matloren demandent à la cour de :

– dire et juger qu’ils sont recevables et bien fondés en leur action,

– débouter la BPE de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions et appel incident,

au titre de l’appel incident formé par la BPE,

– débouter la BPE de son appel incident,

– dire et juger que les époux [K] ont qualité ou intérêt à agir,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 13 octobre 2020 en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir et a reconnu leur qualité et intérêt à agir,

au titre de l’appel principal,

– infirmer le jugement pour le surplus,

et, jugeant à nouveau,

sur la responsabilité de la BPE au titre de son devoir de mise en garde,

– dire et juger que les époux [K] sont des emprunteurs non avertis,

– dire et juger que la SCI Matloren est un emprunteur non averti,

– dire et juger que la BPE a failli à son devoir de mise en garde et a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité vis-à-vis de chacun des trois appelants,

sur le problème du TEG et de l’année lombarde,

– dire et juger comme non prescrites les demandes de la SCI Matloren relatives au calcul du TEG et de l’année lombarde,

– dire et juger erroné le montant du TEG indiqué dans le contrat de prêt,

– dire et juger que le TEG est de 5,109% et est donc supérieur au TEG de 4,83% indiqué dans le contrat de prêt,

– dire et juger que l’erreur emporte comme sanction la totale déchéance des intérêts au taux conventionnel du prêt,

– dire et juger que le calcul des intérêts du prêt porte sur 360 jours au lieu de 365 jours,

en conséquence,

– condamner la BPE à restituer à la SCI Matloren la somme de 47 968,50€,

vu le caractère non-fondé de l’indemnité de remboursement anticipée,

– condamner la BPE à titre principal à payer à la SCI Matloren une somme de 14 536,66€ et, subsidiairement, limiter la condamnation à la somme de 8 206,66€ et ce au visa des articles L312-21 et R312-2 du code de la consommation,

vu l’article 1147 du code civil et l’absence de convention d’assurance-vie,

– condamner la BPE à reverser à M. [K] une somme 1 169€,

– condamner la BPE à renverser à Mme [K] une somme de 1 050€,

vu l’article 1147 du code civil et le préjudice moral des concluants,

– condamner la BPE à régler à chacun des concluants une somme de 3 000€ au titre du préjudice moral,

en tout état cause,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la BPE de sa demande au titre de la procédure abusive,

– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné les appelants à verser à la BPE la somme de 1 500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la BPE à leur verser une somme de 2 500€ chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter la BPE de sa demande de condamnation des appelants à payer un article 700,

– condamner la BPE aux entiers dépens.

Au terme de ses dernières conclusions notifiées le 11 juin 2021, la BPE demande à la cour de :

– la déclarer recevable en son appel incident,

– dire et juger que les époux [K] n’ont pas de qualité ou d’intérêt à agir,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 13 octobre 2020 en ce qu’il a rejeté sa fin de non-recevoir,

statuant à nouveau,

– déclarer l’action des époux [K] irrecevable pour défaut d’intérêt et de qualité à agir,

au titre de l’appel principal,

– dire et juger qu’elle n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité,

– dire et juger que les époux [K] et la SCI Matloren n’ont subi aucun préjudice,

– déclarer irrecevables les actions en nullité et en déchéance du droit aux intérêts formés par les époux [K] et la SCI Matloren comme prescrites,

en conséquence,

– confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lyon le 13 octobre 2020 pour le reste de ses dispositions,

– débouter les époux [K] et la SCI Matloren de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

subsidiairement,

– dire et juger que les époux [K] et la SCI Matloren ne rapportent pas la preuve que le taux effectif global tel que mentionné dans le contrat de prêt du 5 juin 2007 est erroné,

– dire et juger que la sanction applicable est la déchéance du droit aux intérêts,

– dire et juger que les époux [K] et la SCI Matloren n’apportent pas la preuve d’un préjudice consistant en une perte de chance,

en tout état de cause,

– débouter les époux [K] et la SCI Matloren de l’ensemble de leurs demandes, prétentions et moyens,

– condamner in solidum les époux [K] et la SCI Matloren au paiement d’une somme de 4 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner in solidum les époux [K] et la SCI Matloren aux entiers dépens,

– admettre Me Florence Charvolin, avocat, au bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 20 janvier 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

POINTS DE LA DISCUSSION :

Sur l’intérêt à agir de M et Mme [K]

La banque demande de constater le défaut d’intérêt à agir des époux [K], dès lors que c’est la SCI Matloren qui a souscrit le contrat de prêt litigieux.

Les époux [K] font valoir que la SCI Matloren est une société transparente avec des associés responsables sur leurs biens propres, qui ont donc un intérêt à agir. Ils ajoutent qu’ils possèdent une action directe et personnelle contre la banque, qui a souscrit, sans leur accord, un contrat d’assurance-vie Myrialis, portant sur la somme de 76 532,01 euros en juin 2013, outre des dommages-intérêts en réparation de leur préjudice moral.

Réponse de la cour

C’est par des motifs pertinents, que la cour adopte expressément, que les premiers juges ont retenu qu’en sollicitant le remboursement des sommes qu’ils estiment avoir, personnellement, indûment payées au titre de leurs contrats d’assurance-vie, outre l’indemnisation de leur préjudice moral, ils ont qualité et intérêt à agir.

Dès lors, par confirmation du jugement, il convient de déclarer recevables les demandes de M et Mme [K].

2. Sur le caractère erroné du TEG

La SCI Matloren demande à bénéficier des dispositions protectrices du droit de la consommation pour le contrat de prêt souscrit le 27 juin 2007 dès lors qu’elle ne peut pas être considérée comme un professionnel. Elle soutient que le délai de prescription pour contester le TEG mentionné dans le contrat de prêt immobilier, n’est pas expiré, M. [K] ayant eu connaissance de l’erreur l’affectant, seulement lorsque son conseil, puis un expert, ont examiné l’offre de prêt. Elle en conclut qu’à la date du 25 juin 2014, qui correspond à la date à laquelle elle a contesté pour la première fois le TEG mentionné dans le contrat, le délai de prescription n’était pas expiré.

Elle ajoute qu’elle peut demander, sur le fondement de l’article L. 314-1 du code de la consommation, la nullité de la stipulation conventionnelle d’intérêts ou bien la déchéance du droit aux intérêts.

Elle fait encore valoir qu’au cas d’espèce, le TEG, qui ne prend pas en compte le coût des deux assurances sur la vie souscrites antérieurement au prêt et qui constituaient une condition d’attribution du prêt, est erroné. Elle ajoute que l’analyste chargé d’examiner pour leur compte le TEG a calculé, si l’on inclut les frais d’assurance vie, ainsi que les frais de dossier, un taux de 5,109, alors que le taux mentionné est de 4,83%.

Enfin, elle indique que lorsque les intérêts sont calculés sur 360 jours au lieu d’être calculés sur l’année civile, comme c’est le cas en l’espèce, la nullité de la clause d’intérêt doit être prononcée et les intérêts au taux contractuel doivent être remplacés par les intérêts au taux légal.

La banque fait valoir que le prêt souscrit par la SCI Matloren le 5 juin 2007 a une nature professionnelle, de sorte que le point de départ du délai de prescription qui s’applique est le jour de l’acceptation de l’offre.

Par ailleurs, la banque considère que les époux [K] ne peuvent former aucune demande d’indemnité quant à l’erreur du TEG puisque c’est la SCI Matloren qui a souscrit le prêt litigieux. Elle fait également valoir que qu’il appartient à l’emprunteur de démontrer le caractère erroné du TEG, et que celui-ci est inexact au dixième, ce qu’il ne fait pas.

Elle explique que les charges liées aux garanties dont les crédits sont assortis ne sont pas compris dans le taux effectif global lorsque son montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat. Enfin, elle indique que l’emprunteur ne démontre pas que la banque a fait application de l’année lombarde pour calculer le TEG.

Enfin, elle indique que la déchéance du droit aux intérêts est une simple faculté offerte au juge et non une obligation imposée par la loi et qu’il peut en moduler la proportion.

Réponse de la cour

sur le caractère averti de la SCI Matloren

Le caractère averti de l’emprunteur, personne morale, s’apprécie en la personne de son représentant légal.

Selon l’extrait Kbis produit aux débats, Mme [K] est la gérante de la SCI Matloren, qui est l’emprunteur, et cette dernière a pour objet social, l’acquisition, la location, la gestion d’immeubles, opérations financières, mobilières ou immobilières de caractère civil.

Or, le contrat de prêt conclu le 5 juin 2007 a pour objet la vente, par M et Mme [K], à la SCI Matloren de biens immobiliers anciens, destinés à la location.

Par ailleurs, il résulte de ‘l’attestation confidentielle de charges et de patrimoine’, qui a été complétée et signée par M et Mme [K] le 27 mai 2007, en leur qualité de gérant et d’associés de la SCI Matloren, qu’outre l’achat de leur maison principale, ils ont constitué une SCI Nuances, qui a acquis un immeuble pour la somme de 47 250 euros, fait des travaux d’extension, d’un montant de 15 000 euros et construit des logements pour la somme de 101 250 euros, ainsi que des boxes, ce qui leur permettait, à cette date, de percevoir des loyers d’un montant total mensuel de (470 + 2610 + 21 376 + 855) 25 311 euros, tout en remboursant divers prêts dont les échéances s’élevaient à la somme mensuelle totale de (1521 + 1230 + 2311 + 436) 5 498 euros.

Même si l’extrait Kbis établit que M. [K] est le gérant de la SCI Nuances, ainsi que de la SCI Malena, qui est également propriétaire d’un bien immobilier destiné à la location, force est de reconnaître que Mme [K] a mentionné sur l’attestation de charges et patrimoine remise à la banque, que les biens immobiliers détenus par ces SCI faisaient également partie de son patrimoine, alors qu’elle est mariée sous le régime de la séparation de biens, de sorte qu’il y a lieu de considérer qu’elle est associée à leur gestion.

Enfin, il est expressément mentionné dans l’acte de prêt, qu’il n’est pas soumis aux dispositions des articles L. 311-1 et suivants et L. 312-1 du code de la consommation et la SCI Matloren a expressément renoncé, dans l’acte authentique de vente aux dispositions protectrices de l’acquéreur immobilier non professionnel prévues par l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation.

Ainsi, Mme [K] en sa qualité de gérante de la SCI Matloren, disposait à l’époque où cette dernière a contracté l’emprunt litigieux, d’un patrimoine immobilier important, impliquant la souscription de plusieurs prêts et d’une certaine expérience des affaires, dans le domaine de l’immobilier, nonobstant le fait qu’elle exerce la profession de masseur-kinésithérapeute.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments, constituant un faisceau d’indices suffisants, que la SCI Matloren doit être considéré comme étant un emprunteur avisé.

Sur la sanction et la prescription applicables

En premier lieu, il résulte de l’article L. 313-4 du code monétaire et financier, que lorsque le TEG mentionné dans un contrat de prêt immobilier souscrit par un emprunteur avisé est erroné, la sanction applicable est la déchéance du droit aux intérêts conventionnels, dans la proportion arrêtée par le juge, et non pas la nullité de la stipulation conventionnelle.

Dès lors, les appelants sont déboutés de leur demande d’annulation de la stipulation d’intérêts conventionnels.

Par ailleurs, la SCI Matloren étant un emprunteur avisé, la circonstance que les intérêts conventionnels soient calculés sur une année de 360 jours ou que le TEG mentionné sur le contrat de prêt n’inclut pas certains frais, avait un caractère apparent, de sorte que le délai de prescription a commencé à courir à compter de la date de signature du contrat, soit en l’espèce, le 29 juin 2007.

En second lieu, en application de l’article L 110-4 du code de commerce, dans sa version alors applicable, l’action relative à la déchéance du droit aux intérêts se prescrit par dix ans, de sorte qu’elle est acquise, ainsi que l’ont pertinemment retenu les premiers juges, depuis le 18 juin 2013, compte tenu des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, ayant réduit le délai de prescription à cinq ans.

La SCI Matloren reconnaît avoir demandé que la banque soit déchue du droit aux intérêts conventionnels, pour la première fois le 25 juin 2014.

En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de déclarer irrecevable la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels, ainsi que toutes les demandes qui en sont le corollaire.

3. Sur le devoir de mise en garde et le devoir de conseil

La SCI Matloren et M et Mme [K] font valoir qu’ils sont des emprunteurs non avertis et qu’ils n’avaient pas les compétences pour apprécier le risque lié au crédit sollicité et aux contrats d’assurance-vie souscrits. Ils en concluent que la banque avaient envers eux un devoir de mise en garde. Ils ajoutent que dès lors que c’est la banque qui est à l’origine du montage financier litigieux, cette dernière devait éclairer l’emprunteur sur le risque financier encouru.

La banque fait valoir qu’elle n’était débitrice d’aucun devoir de mise en garde envers les emprunteurs. Elle considère que les époux [K] et la SCI Matloren étaient en mesure d’appréhender les risques de l’opération ; qu’ils auraient procédé à l’opération de revente de leur propre bien immobilier à la SCI pour éviter une plus-value fiscale ; que M. [K] a une formation d’ingénieur et occupe un poste de direction dans une division commerciale ; que les époux [K] sont par ailleurs associés et gérants d’autres SCI, la société Nuances et la société Malena.

Réponse de la cour

En premier lieu, le prêteur de deniers n’est tenu d’un devoir de mise en garde qu’à l’égard de l’emprunteur non averti.

Or, il vient d’être démontré que la SCI Matloren et Mme [K] ont la qualité d’emprunteur averti. M [K] également, puisque outre le fait qu’il soit cadre commercial, directeur d’une division commerciale, ainsi qu’il l’indique lui-même dans un courrier adressé à la banque le 24 septembre 2013, il est le gérant des SCI Nuances et Malena, qui ont également souscrit des emprunts immobiliers et ont pour objet de générer des revenus fonciers.

En conséquence, par confirmation du jugement, il convient de retenir que la banque n’était tenue d’aucun devoir de mise en garde à leur égard.

En second lieu, les appelants, qui se bornent à indiquer que la banque est tenue à leur égard d’un devoir de conseil, ne précise pas, devant la cour, en quoi la banque aurait failli dans l’exécution de cette obligation.

En conséquence, il convient de rejeter le moyen tiré d’un manquement par la banque à son devoir de conseil.

4. Sur l’indemnité de remboursement anticipé du prêt

La SCI Matloren soutient que l’indemnité de remboursement anticipé du prêt, d’un montant de 14 536,66 euros doit lui être remboursée au motif que c’est l’attitude de la banque qui l’a contrainte à réaliser un tel remboursement, en n’exécutant pas le contrat de bonne foi, en lui adressant des lettres de relances à un prix exorbitant et en renégociant le contrat, remboursable in fine en un prêt amortissable, à un taux exorbitant de 5,9% hors assurance, alors qu’une autre banque lui a proposé un taux de 3,05%.

A titre subsidiaire, elle fait valoir qu’en application de l’article R. 312-2 du code de la consommation, la pénalité de remboursement, qui ne pouvait excéder 3% du solde restant dû, devait s’élever au maximum à la somme de 8 400 euros.

La banque fait valoir que la pénalité de remboursement anticipé du prêt a été calculée conformément aux stipulations contractuelles et que les dispositions de l’article R. 321-3 du code de la consommation ne sont pas applicables aux prêts destinés à financer une activité professionnelle. Elle ajoute que si la proposition d’une autre banque était plus intéressante, elle était libre de s’adresser à elle.

Réponse de la cour

C’est par de justes motifs que la cour adopte expressément, que les premiers juges ont rejeté les demandes de ce chef, étant précisé qu’il ne peut être reproché à la banque de faire preuve de mauvaise foi, alors, d’une part, qu’elle se borne à appliquer les stipulations du contrat de prêt et à calculer l’indemnité de remboursement du prêt ainsi convenue et, d’autre part, à faire une proposition de transformation du prêt initial, remboursable in fine, en prêt amortissable, que l’emprunteur est libre d’accepter ou de refuser.

Enfin, ainsi que l’ont pertinemment retenu les premiers juges, les dispositions de l’article R. 321-3 du code de la consommation ne sont pas applicables en l’espèce, le prêt ayant été consenti à la SCI Matloren pour financer son activité professionnelle.

En conséquence, il convient, par confirmation du jugement, de rejeter la demande de remboursement de l’indemnité de remboursement anticipé ou une fraction de celle-ci.

5. Sur la souscription forcée des contrats d’assurance-vie

M et Mme [K] soutiennent que la banque ne leur a pas notifié leur droit de rétractation de 30 jours, ni ne les a prévenus qu’ils pouvaient renoncer aux contrats d’assurance-vie sans frais, ce qui leur a causé un préjudice d’un montant de 2 219, 43 euros, correspondant aux frais de souscription, ainsi qu’à la somme de 220 euros, correspondant aux frais de découvert.

Réponse de la cour

Contrairement à ce qui est soutenu par les appelants, la banque leur a rappelé dans un courriel du 29 mai 2013, qu’ils disposaient d’un délai de rétractation de 30 jours, qui leur permettait de renoncer aux contrats sans frais.

Par ailleurs, les frais dont les appelants font état et dont ils demandent le remboursement ne sont pas justifiés par un document autre que l’estimation qu’ils ont faites eux-mêmes et qui n’a aucune valeur probante.

Au regard de ces éléments, il convient, par confirmation du jugement, de débouter M et Mme [K] de ces demandes.

6. Sur l’échéance du prêt débitée à tort

La SCI Matloren, qui sollicite le remboursement de la somme de 1 122, 33 euros, correspondant au prélèvement d’intérêts, fait valoir que contrairement à ce qui est soutenu par la banque, elle a remboursé cette échéance en deux temps, à la date du 3 septembre pour un montant de 183 280,86 € et à la date du 16 septembre pour un montant de 190 000 €. Elle ajoute qu’il n’était pas indiqué que le remboursement devait avoir lieu en une seule échéance.

La banque fait valoir qu’elle a reçu les fonds le 16 septembre 2013, qui n’ont pu être encaissés que le 17 septembre, de sorte que l’échéance du 15 septembre 2013 de 1 122,33 euros, qui règle les intérêts du 16 août au 15 septembre 2013, est due.

Réponse de la cour

Il est justifié que les fonds en provenance du Crédit Lyonnais selon courrier daté du 9 septembre 2013, envoyé le 11 septembre 2013, qui sont arrivés dans les livres de la banque le 16 septembre 2013, destinés à solder le prêt, ont été encaissés le 17 septembre 2013.

C’est dès lors à bon droit que l’échéance du 15 septembre 2013 de 1 122,33 euros, qui règle les intérêts du 16 août au 15 septembre 2013, a été prélevée, étant précisé que le décompte de remboursement produit par la SCI Matloren a été établi antérieurement, le 15 août 2013, et sous réserve des intérêts courant jusqu’à parfait paiement.

Le jugement est confirmé de ce chef.

7. Sur la demande indemnitaire pour non-exécution de bonne foi du contrat et pour préjudice moral

Les époux [K], comme la SCI Matloren ayant été déboutés de l’intégralité de leurs demandes, il convient, par confirmation du jugement, de les débouter de leurs demandes de dommages-intérêts complémentaires.

8. Sur les autres demandes

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la banque, en appel. M et Mme [K] et la SCI Matloren sont condamnés in solidum à lui payer à ce titre la somme de 3.000 €.

Les dépens d’appel sont à la charge de M et Mme [K] et la SCI Matloren qui succombent en leur tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne in solidum M et Mme [K] et la SCI Matloren à payer à la société BPE, la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

Déboute les parties de toutes leurs autres demandes.

Condamne in solidum M et Mme [K] et la SCI Matloren aux dépens de la procédure d’appel, et accorde aux avocats qui en ont fait la demande le bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

La greffière, Le Président,

 


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