Droit de rétractation : décision du 21 mars 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/00021
Droit de rétractation : décision du 21 mars 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/00021
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ARRET N°126

CL/KP

N° RG 21/00021 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GFB4

S.A.R.L. BR HOLDING

C/

[H]

[X] ÉPOUSE [H]

S.A. CA CONSUMER FINANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 21 MARS 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00021 – N° Portalis DBV5-V-B7F-GFB4

Décision déférée à la Cour : jugement du 05 octobre 2020 rendu par le Juge des contentieux de la protection de SAINTES.

APPELANTE :

S.A.R.L. BR HOLDING SARL prise en la personne de son gérant, en exercice, et de tous autres représentants légaux domiciliés ès-qualité audit siège.

[Adresse 10]

[Localité 6]

Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Wilfried MEZIANE, avocat au barreau de BORDEAUX.

INTIMES :

Monsieur [I] [H]

né le [Date naissance 4] 1953 à [Localité 9] (71)

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON – YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Marie-Emilie PHAN, avocat au barreau de PAU.

Madame [G] [X] épouse [H]

née le [Date naissance 1] 1940 à [Localité 8] (92)

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Yann MICHOT de la SCP ERIC TAPON – YANN MICHOT, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Marie-Emilie PHAN, avocat au barreau de PAU.

S.A. CA CONSUMER FINANCE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 7]

Ayant pour avocat postulant Me Philippe GAND de la SCP GAND-PASCOT, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me William MAXWELL, avocat au barreau de BORDEAUX.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 16 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Fabrice Vetu, Conseiller

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

Madame Estelle LAFOND, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Fabrice VETU, Conseiller en remplacement du Président légitimement empêché et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Monsieur [I] [H] et Madame [G] [X] épouse [H] (les époux [H]) ont conclu avec la société à responsabilité limitée Office des Pathologies du Bâtiment (la société Opb), aux droits de laquelle est ensuite venue la société à responsabilité limitée Br Holding (l’entrepreneur):

– le 30 mai 2018, un contrat de traitement bois et couverture pour un montant total de 2.265,18 euros, financé en totalité par un contrat de prêt signé le même jour auprès de la société anonyme CA Consumer Finance (la banque), moyennant un taux effectif global de 6,9% et prévoyant un remboursement d’un montant de 38,44 euros avec assurance pendant 80 mensualités;

– le 29 juin 2018 un contrat de travaux de couverture pour un montant total de 21.081,49 euros, financé en totalité par un contrat de prêt signé le même jour auprès de la banque moyennant un teg de 5,85% et prévoyant un remboursement d’un montant de 199,75 euros avec assurance pendant 180 mensualités;

– le 27 juillet 2018 un contrat de travaux de couverture pour un montant total de 45.049,16 euros, financé en totalité par un contrat de prêt signé le même jour auprès de la banque, moyennant un teg de 5,85% et prévoyant un remboursement d’un montant de 426,85 euros avec assurance pendant 180 mensualités.

Les 17 octobre 2018 et 10 décembre 2018, les époux [H] ont déposé plainte à l’encontre de la société Opb pour abus frauduleux de l’état d’ignorance et de faiblesse et escroquerie.

Les 28 juin 2018 et 3 juillet 2018, les époux [H] ont fait assigner la société Br et la banque pour demander :

– à être déclarés recevables en leurs demandes,

A titre principal,

– que fût prononcé la nullité des contrats précités des 30 mai et 29 juin 2018 et qu’il fût dit qu’il n’y aurait pas lieu à restitution en nature de leur part;

– la condamnation des sociétés adverses à leur régler la somme de 23.346,67 euros au titre de leur préjudice financier, que fût ordonnée la compensation entre cette somme et celle correspondant à la restitution en valeur des prestations exécutées par l’entrepreneur et le retrait de leur inscription au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers;

A titre subsidiaire,

– la déchéance des intérêts des contrats de prêts précités ;

En tout état de cause,

– la condamnation des deux sociétés défenderesses in solidum à leur verser les sommes de 6.000 euros au titre de leur préjudice moral, de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

A l’audience, le premier juge a soulevé d’office la question de la déchéance des intérêts en l’absence de justification de consultation du fichier des incidents de crédit et de paiement, de notice d’assurance, de précision de la prestation financée par le contrat de crédit et de justificatifs d’identité, d’adresse, de ressources et des charges des emprunteurs lors de la souscription des prêts en cause.

Par jugement en date du 6 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Sainte a:

– prononcé la nullité des contrats de prestations de services en date des 30 mai et 29 juin 2018 conclus entre la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br, et les époux [H] ;

– prononcé la nullité des contrats de financements y afférents conclus les mêmes jours entre la banque et les époux [H] ;

– constaté que les parties ne pouvaient être remises dans l’état antérieur et que seule la valeur des travaux pouvait être restituée ;

– condamné solidairement les époux [H] à restitution à la banque des sommes avancées de 21.081,49 euros et de 2.265,18 euros, restitution qui serait garantie par la société Opb, aux droits de laquelle venait la société Br ;

– condamné in solidum la banque et la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br, à régler aux époux [H] les montants de 5.000 euros au titre de leur perte de chance et de 3.000 euros au titre de leur préjudice moral ;

– ordonné la compensation entre les différentes sommes dues par les parties précitées et condamné les époux [H] à verser à la banque la somme de 15.346,67 euros, que la société Opb aux droits de laquelle venait la société Br, serait condamnée à garantir, cette dernière devant également relever indemne la société bancaire d’un montant de 4000 euros ;

– rejeté le surplus des demandes faites par les parties lors du présent litige, en ce compris celles faites au titre des frais irrépétibles ;

– condamné les époux [H] d’une part, et la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br, aux droits de laquelle venait la société Br, à supporter la moitié des dépens.

Le 4 janvier 2021, la société Br a relevé appel de ce jugement.

Monsieur [I] [H] n’a pas constitué avocat.

Le 2 mars 2021, la société Br a signifié sa déclaration d’appel à Monsieur [I] [H] à sa personne.

Par jugements du 16 juin 2021, le juge des tutelles du tribunal judiciaire de Saintes a placé chacun des époux [H] sous tutelle et a désigné l’Udaf 17 en qualité de tuteur.

Par ordonnance du 12 novembre 2021, le juge des tutelles du tribunal judiciaire de Sainte a désigné Madame [Y] [M], fille de Madame [G] [H], en qualité de tutrice de cette dernière.

Le 4 décembre 2021, [I] [H] est décédé.

Par arrêt avant dire droit en date du 24 mai 2022, la cour de céans a :

– ordonné la réouverture des débats ;

– invité les parties à développer leurs observations avant le 30 juin 2022 sur les moyens suivants, relevés d’office par la cour :

– sur le moyen tiré de l’absence de caractère aisément détachable à l’appui de la demande de nullité des contrats principaux des 30 mai 2018 et 28 juin 2018, en application des dispositions des articles L. 221-5, L. 221-9, et L. 242-1 du code de la consommation (et ses conséquences sur la nullité du contrat de crédit) :

– sur le moyen tiré de la privation de la banque à son droit à restitution des fonds résultant de la libération des fonds sans contrôle de la régularité du contrat principal, en application des articles L. 312-48 et L. 312-55 du code de la consommation – à l’appui de la demande de confirmation du chef du dispositif du jugement entrepris ayant condamné la banque à leur payer les sommes de 5000 euros de dommages-intérêts (perte de chance) et 3000 euros de dommages-intérêts (préjudice moral) ;

– ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture et renvoyé l’examen de l’affaire à la mise en état.

Le 30 juin 2022, la société Br demande à la cour de :

– déclarer la Société Br recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

– juger que les bordereaux de rétractation ne sont entachés d’aucune irrégularité ;

En conséquence,

– écarter le moyen relevé d’office tiré de l’absence de caractère aisément détachable des bordereaux de rétractation ;

– statuer ce que de droit sur le moyen tiré de la privation de la banque de son droit à restitution des fonds ;

Infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

– prononcé la nullité des contrats de prestations de services en date des 30 mai et 29 juin 2018 conclus entre la société Opb aux droits de laquelle vient la société Br et les époux [H] ;

– prononcé la nullité des contrats de financements y afférents conclus les mêmes jours entre la banque et les époux [H] ;

– constaté que les parties ne pouvaient être remises dans l’état antérieur et que seule la valeur des travaux peut être restituée ;

– condamné solidairement les époux à restituer à la banque les sommes avancées de 21.081,49 euros et de 2.265,18 euros, restitution qui sera garantie par la société Opb, aux droits de laquelle venait la société Br ;

– condamné in solidum la banque et la société Opb, aux droits de laquelle venait la société Br, à régler aux époux [H] les montants de 5.000 euros au titre de leur perte de chance et de 3.000 euros au titre de leur préjudice moral;

– ordonné la compensation entre les différentes sommes dues par les parties précitées et a condamné les époux [H] à verser à la banque la somme de 15.346,67 euros, que la société Opb aux droits de laquelle vient la société Br, serait condamnée à garantie; cette dernière devant également relever indemne la société bancaire d’un montant de 4.000 euros ;

– rejeté le surplus des demandes faites par la société Br lors du présent litige, en ce compris celles faites au titre des frais irrépétibles ;

– rappelé que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire ;

– condamné Monsieur [I] [H] et Madame [G] [X] épouse [H] d’une part, et la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br, d’autre part, à supporter la moitié des dépens de la présente instance;

Et statuant à nouveau :

– débouter Madame [G] [H], représentée par Madame [Y] [M] en sa qualité de tutrice, de sa demande de nullité des contrats de prestations de services conclus les 30 mai 2018 et 29 juin 2018, et plus généralement de l’intégralité de ses prétentions formées à son encontre ;

– juger que Madame [G] [H], représentée par Madame [Y] [M] en sa qualité de tutrice, ne sollicite plus l’infirmation, mais la confirmation du jugement déféré des chefs de ses préjudices financiers, de perte de chance de ne pas contracter et préjudice moral ;

– débouter en tout état de cause Madame [G] [H], représentée par Madame [Y] [M] ès qualités, de son appel incident ;

– débouter la banque de l’ensemble de ses demandes dirigées à son encontre de la Société Br ;

– débouter la banque de son appel incident et subsidiairement confirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum la banque et la Société Br à régler aux époux [H] la somme de 5.000 euros au titre de leur perte de chance et la somme de 3.000 euros au titre de leur préjudice moral ;

– condamner Madame [G] [H], représentée par Madame [Y] [M] èsqualités, à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 29 juin 2022, Madame [Y] [M] ès qualités demande à la cour de :

– la déclarer recevable et bien fondée en l’intégralité de ses demandes ;

– déclarer son intervention volontaire de Madame [Y] [M], recevable et bien fondée ;

– débouter la société Br et la banque de l’intégralité de leurs demandes ;

A titre principal,

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la nullité des contrats de prestation de services du 30 mai 2018 et du 29 juin 2018 de la société Ber, venant aux droits de la société Opb ;

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a prononcé la nullité des contrats de prêt de la banque du 30 mai 2018 et du 29 juin 2018 ;

– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a jugé ne pas avoir lieu à restitution en nature de la part des époux [H] ;

Infirmer le jugement en ce qu’il a :

– condamné solidairement les époux [H] à restitution à la banque des sommes avancées de 21.081,49 euros et de 2.265,18 euros, restitution qui serait garantie par la société Opb, aux droits de laquelle venait la société Br ;

– condamné in solidum la banque et la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br, à régler aux époux [H] les montants de 5.000 euros au titre de leur perte de chance et de 3.000 euros au titre de leur préjudice moral;

– ordonné la compensation entre les différentes sommes dues par les parties précitées et condamné les époux [H] à verser à la banque la somme de 15.346,67 euros, que la société Opb aux droits de laquelle venait la société Br, serait condamnée à garantir, cette dernière devant également relever indemne la société bancaire d’un montant de 4000 euros;

– rejeté le surplus des demandes faites par les parties lors du présent litige, en ce compris celles faites au titre des frais irrépétibles;

Statuant à nouveau:

– constater la privation de la créance de restitution du capital emprunté de la banque ;

– condamner in solidum la société Br e la banque à lui régler la somme de 15 000 euros au titre du préjudice de perte de chance de ne pas contracter ;

– condamner in solidum la société Br et la banque à lui régler la somme de 5000 euros au titre du préjudice moral subi ;

A titre subsidiaire :

– condamner la société Br ès qualités, à la garantir et relever indemne de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

En tout état de cause :

– ordonner à la banque le retrait de son inscription du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, dans le délai d’un mois à compter de l’arrêt à venir ;

– condamner in solidum la société Br ès qualités et la banque à lui payer la somme de 5000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le 28 juin 2022, la banque demande à la cour:

– d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée à régler aux époux [H] la somme de 3000 euros au titre de leur préjudice moral ;

– d’infirmer, en conséquence, le jugement en ce qu’il a, après compensation, condamné les époux [H] à lui verser la somme de 15.346,67 euros, que la société Br serait condamnée à garantir, cette dernière relevant indemne la société bancaire d’un montant de 4000 euros ;

Statuant à nouveau :

– de débouter les époux [H] de leur demande au titre d’un préjudice moral ;

– de condamner, après compensation, Madame veuve [H] à lui verser la somme de 18.346,67 euros, que la société Br sera condamnée à garantir, cette dernière relevant indemne la société bancaire ;

– confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;

– condamner tout succombant à lui régler la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

Le 2 janvier 2023, a été rendue l’ordonnance de clôture de l’instruction de l’affaire.

MOTIVATION :

Sur la nullité des contrats principaux :

Selon l’article L. 221-5 du code de la consommation, issu de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, reprenant l’article L.121-17, I du même code dans sa version antérieure, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes (‘.):

2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État ;

3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;

4° L’information sur l’obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d’un contrat de prestation de services, de distribution d’eau, de fourniture de gaz ou d’électricité et d’abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l’exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l’article L. 221-25 ;

5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercée en application de l’article L. 221-28, l’information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;

L’article L. 221-9, reprenant les dispositions de l’article L. 121-18-1, dispose que le professionnel fournit au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement exprès des parties.

Ce contrat comprend toutes les informations prévues à l’article L. 221-5.

Le contrat mentionne, le cas échéant, l’accord exprès du consommateur pour la fourniture d’un contenu numérique indépendant de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.

Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2° de l’article L. 221-5.

Selon l’article L. 242-1 du même code (anciennement L. 121-18-1), les dispositions de l’article précédent sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.

À peine de nullité, le formulaire détachable destiné à faciliter pour le client la faculté de rétractation doit comporter, sur une face, l’adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, et sur l’autre face, les modalités d’annulation de la commande, sans qu’aucune autre mention que celle visée par les textes applicables ne puisse figurer sur ce formulaire (Cass. 1ère civ. 21/11/2006, n°05-20.706, Bull. 2006, I, n°510).

Ainsi, un bordereau de rétractation ne peut réunir sur une même face l’adresse d’envoi et les modalités d’annulation de la commande, et sur l’autre, faire figurer des stipulations contractuelles sans rapport avec la faculté de rétractation.

En application de l’article L.312-55 du code de la consommation, dans sa version issue de l’ordonnance du 14 mars 2016 et de l’ancien article L.312-21 dont il reprend la teneur, la résolution ou l’annulation d’un contrat de crédit en conséquence de l’annulation du contrat constatant la vente qu’il finançait emporte pour l’emprunteur, hors les cas d’absence de livraison du bien vendu ou de faute du prêteur dans la remise des fonds prêtés, l’obligation de rembourser au prêteur le capital prêté, sauf la faculté, pour le prêteur, d’appeler le vendeur en garantie.

Il est constant entre partie que les contrats litigieux sont des contrats hors établissement.

En l’espèce, le bordereau de rétractation sur les contrats produits en pièces n°5 et 12 des consommateurs, correspondant aux pièces n°1 et 4 de la société appelante, n’est pas aisément détachable dès lors que son utilisation ampute le contrat d’une partie essentielle, à savoir une partie des conditions générales situées au verso.

Surtout, il comporte à son verso les conditions générales de l’entrepreneur, totalement étrangères à l’exercice par le consommateur de sa faculté de rétractation.

Ces bordereaux de rétractation ne répondent pas aux exigences formelles qui leur sont applicables.

En outre, et contrairement aux allégations de la société Br, ces documents correspondent très exactement aux contrats visés à l’article L.221-9 du code de la consommation, puisqu’ils comportent la précision de l’ensemble des obligations des parties, et non un simple caractère informatif (à la différence des devis produits en pièces n°8 et 15 par les consommateurs).

Or, le défaut de respect de la présentation de ce formulaire de rétractation dans les contrats visés à l’article L.221-9 est sanctionné par la nullité en application de l’article L.242-1 du code de la consommation par référence, dans le premier de ces textes, à l’article L.221-5, dont le 2° fait référence au formulaire type de rétractation.

Il y aura donc lieu de prononcer la nullité des contrats de prestation de services des 30 mai 2018 et 29 juin 2018, et le jugement sera confirmé de ce chef.

Subséquemment, il y aura lieu de prononcer la nullité de contrats de financement y afférents, et le jugement sera encore confirmé de ce chef.

Sur les conséquences de l’annulation du contrat de crédit affecté :

Il résulte de l’article 1178 du code civil que le contrat annulé est censé n’avoir jamais existé ; les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9; indépendamment de l’annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation des dommages subis dans les conditions du droit commun de la responsabilité extra-contractuelle.

Selon l’article 1352-8 du même code, la restitution d’une prestation de service a lieu en valeur; celle-ci est appréciée à la date à laquelle elle a été fournie.

Eu égard à la nature du contrat, consistant en travaux de construction ou de réparation, la seule remise en l’état antérieur ne peut que se résoudre en restitution de la valeur des travaux ainsi réalisés.

Sur les manquements de la banque et son intermédiaire dans la souscription du contrat de crédit :

Il ressort des articles L. 312-12 et L. 312-14 l’obligation, pour le prêteur ou l’intermédiaire de crédit, avant la conclusion du contrat de crédit, de fournir à l’emprunteur une fiche d’information afférente au contrat souscrit, le cas échéant portant sur la souscription d’une assurance, et de fournir à l’emprunteur les explications lui permettant de déterminer si le contrat de crédit est adapté à ses besoins ou sa situation financière.

Avec le premier juge, il sera observé que ni le prêteur ni l’intermédiaire ne versent aux débats aucune fiche de dialogue, fiche d’information européenne normalisée, ou justificatif d’explication.

Ils ont ainsi manqué à leurs obligations précontractuelles d’information.

Il ressort des articles L. 312-16 et L. 312-17 du code de la consommation qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur est tenu de vérifier la solvabilité de l’emprunteur, et que s’agissant notamment des opérations de crédits conclues sur le lieu de vente, de fournir une fiche de renseignement comportant notamment les éléments relatifs aux ressources et aux charges de l’emprunteur, corroborées le cas échéant par des pièces justificatives.

Avec le premier juge, il écherra de relever que l’établissement de crédit n’a pas versé la fiche de renseignement afférente au premier contrat litigieux du 30 mai 2018.

En outre, la fiche de renseignement afférente au second contrat litigieux du 29 juin 2018 ne fait pas ressortir la charge d’emprunt afférent au premier crédit affecté souscrit le 30 mai précédent, alors que l’entrepreneur, intermédiaire de ce premier contrat, ne pouvait ignorer la charge d’emprunt en résultant.

Le prêteur et l’intermédiaire ont ainsi manqué à leur obligation de vérifier la solvabilité des emprunteurs.

L’article L. 312-18 dispose que l’offre de crédit doit être établie sur support papier et fournie en autant d’exemplaires que de parties, la remise de l’offre à l’emprunteur obligeant le prêteur à en maintenir les conditions pendant un délai minimal de 15 jours à compter de cet envoi.

Sur la teneur de ce texte ainsi rapportée, l’appelante observe l’absence de signature ou date du prêteur ou de l’intermédiaire de crédit, sans qu’y figure le délai de 15 jours de l’offre, ni la date du contrat de crédit; elle fait ainsi grief à ses adversaires d’une absence de signature du contrat en bonne et due forme et signé par l’ensemble des parties, alors que l’acceptation des crédits par les époux [H] aurait lieu bien au-delà du délai de 7 jours.

Mais le texte visé par les Madame [H] n’est pas de nature à sanctionner les manquements éventuels qu’elle soutient en l’espèce.

Dès lors, la banque et l’établissement de crédit n’ont commis aucune faute fondée sur ce dernier texte.

Sur la privation du droit à restitution de la banque :

Sur l’absence alléguée de contrôle de la régularité du contrat principal par la banque (moyen soulevé d’office par l’arrêt avant-dire droit du 22 mai 2022):

Selon l’article L. 311-48 du code de la consommation, dans sa version issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :

« Les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation; en cas de contrat de vente de prestations de services à exécution successives, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci.

Commet une faute le prêteur qui verse les fonds sans procéder aux vérifications préalables lui permettant de relever que le contrat principal est affecté d’une cause de nullité; en revanche, l’emprunteur, qui n’établit pas avoir subi de préjudice consécutif à la faute de la banque demeure tenu de rembourser le capital emprunté.

Il s’évince de ce qui précède que la banque, avant de consentir à l’offre de crédit, n’a pas procéder à la vérification de la régularité formelle du contrat principal, dont le formulaire de rétractation n’est pas conforme aux exigences légales applicables.

Ainsi, la banque a commis une faute.

Mais Madame [H] n’a jamais justifié d’une mauvaise exécution des prestations commandées, de telle sorte que par son silence à cet égard, elle défaille ainsi à démontrer l’existence d’un préjudice en lien de causalité avec la faute ainsi imputée à la banque.

Sur l’absence alléguée de vérification de la parfaite exécution du contrat principal :

Il résulte de la teneur de la disposition légale susmentionnée que les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de l’exécution de la prestation de services qui doit être complète, hors le cas d’une prestation de services à exécution successive, et que commet une faute à l’égard de l’emprunteur le prêteur qui délivre des fonds au vendeur sans s’assurer que celui-ci a exécuté son obligation (Cass. 1ère civ. 16 janvier 2013, n°12-13.022, Bull. 2013, I, n°6).

La libération des fonds intervient au vu d’une attestation de fin de travaux, laquelle est opposable à l’emprunteur si elle permet de vérifier l’exécution complète du contrat principal; elle lui est en revanche inopposable si son contenu ne permet pas se convaincre d’une telle exécution complète.

Il appartient au prêteur de démontrer l’exécution du contrat principal, et non à l’emprunteur d’en démontrer l’inexécution.

L’emprunteur qui détermine l’établissement de crédit à verser les fonds au vendeur au vu de la signature par lui du certificat de livraison du bien n’est plus ensuite recevable à soutenir, au détriment du prêteur, que le bien ne lui avait pas été livré (Cass. 1ère civ., 14 novembre 2001, n°99-15.690, Bull. 2001, I, n°280).

Madame [H] fait grief à la banque d’avoir libéré au fond au vu d’une attestation de fin de travaux en date du 19 juillet 2018 uniquement signée par Monsieur [H], et non pas elle-même, et de n’avoir apporté aucune preuve de la réalisation effective des prestations litigieuses.

Mais il ressort des deux demandes de financement signées les 28 juin 2018 et 19 juillet 2018 par l’emprunteur, désignant le bien ou la prestation de service, qualifié de ‘bâtiment’, que ce dernier certifie que la livraison du bien et ou la fourniture de la prestation de service a été pleinement effectuée conformément au bon de commande ou à la facture.

La seule teneur de ce document permet ainsi à la banque, qui n’est tenue à aucune autre vérification, d’être avisée de l’exécution totale des ventes et prestations objet des contrats de crédit sollicités.

Et la circonstance que cette attestation comporte la seule signature de Monsieur [H], et non de son épouse, n’est pas la démonstration suffisante d’une faute de la banque.

Dès lors, la banque n’a pas commis de faute tenant à l’absence de vérification de la parfaite exécution du contrat principal.

Sur les préjudices des emprunteurs :

Sur la perte de chance de ne pas contracter:

Constitue une perte de chance la disparition certaine d’une éventualité favorable, et celle-ci ne peut jamais être égale à cette occurrence, si elle s’était produite.

Il ressort du dispositif de la banque que celle-ci ne demande pas l’infirmation du jugement, en ce qu’il l’a condamnée, solidairement avec l’entrepreneur, à payer aux époux [H] la somme de 5000 euros à titre de perte de chance.

Il ressort du dispositif des écritures de l’entrepreneur que celui demande l’infirmation du jugement, en ce qu’il l’a condamnée, solidairement avec la banque, à payer aux époux [H] la somme de 5000 euros à titre de perte de chance.

Mais il ressort des motifs de ses écritures (pages 12 et 13) que celui-ci se borne à critiquer l’existence du préjudice moral des époux [H], évalué par le premier juge à hauteur de 3000, et au paiement duquel il a été condamné solidairement avec la banque.

Ainsi, la société Br ne vient présenter aucun moyen tendant à critiquer les appréciations du premier juge tenant à l’existence et au quantum de la perte de chance ainsi indemnisée.

Madame [H] soutient que l’évaluation de ce poste doit être rehaussée à 15 000 euros,

en ce qu’elle et son époux ont été les proies de personnes mal intentionnées, coutumières du fait, qui ont abusé de leur vulnérabilité à des fins pécuniaires.

Mais alors que la vulnérabilité des emprunteurs a déjà été prise en compte par le premier juge, les éléments ainsi exposés sont insuffisants à caractériser en quoi ce poste devrait recevoir un quantum supérieur.

Sur le préjudice moral :

Il appartient à celui se prévalant d’un préjudice d’en rapporter la preuve.

Madame [H] soutient que les parties adverses ont manifestement abusé de l’évidence vulnérabilité mentale et intellectuelle des deux époux, pour procéder à un véritable stratagème, et soutient que tous deux ont été particulièrement affectés et perturbés par les manoeuvres qu’ils ont subies.

L’importance de la dégradation psychique des deux époux, telle qu’elle ressort notamment des certificats du médecin spécialisé en date du 21 octobre 2020 préalable à leur mise sous tutelle, démontre sa nécessaire préexistence de tels troubles, ne fût-ce qu’à un stade moins avancé au moment de la formation contractuelle, de son exécution, et des litiges ultérieurs.

Les tracas liés à l’exécution fautive des deux contrats afférents et au contentieux qui s’en est suivi a nécessairement généré, chez ses deux personnes âgées et vulnérables, un préjudice moral qui sera entièrement réparé par l’allocation d’une indemnité de 5000 euros.

Et il sera précisé que ce dommage, résultant de l’exécution fautive des contrats litigieux susdits, finalement annulés, est distincte de celui réparé au poste précédent, afférent à la perte de chance de ne pas contracter.

Sur les condamnations:

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la banque et la société Br ès qualités à payer aux époux [H] les sommes de 5000 euros au titre de leur perte de chance et de 3000 euros au titre de leur préjudice moral.

Sur les restitutions:

En ordonnant compensation des créances réciproques, il y aura lieu de condamner les époux [H] à verser à la banque la somme de 15 346,47 euros, et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les appels en garantie:

Selon l’article L. 312-56 du code de la consommation,

Si la résolution judiciaire ou l’annulation du contrat principal survient du fait du vendeur, celui-ci peut, à la demande du prêteur, être condamné à garantir l’emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice de dommages et intérêts vis à vis du prêteur et de l’emprunteur.

Il ressort des observations qui précèdent que l’annulation des contrats principaux a été prononcée eu égard à l’irrespect du formalisme légal qui leur est applicable, et qui exclusivement imputable au vendeur ou au prestataire de service, la société Opb, aux droits de laquelle vient la société Br.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit que la société Br ès qualités sera condamnée à garantir les époux [H] du paiement à la banque de la somme de 15 346,67 euros.

Et la société Br ès qualité ne présente aucun moyen pertinent à l’égard de la décision du premier juge, qui a exactement retenu qu’elle devait en sus relever et garantir la banque à hauteur de la moitié des indemnités allouées aux emprunteurs, soit de la somme de 4000 euros: le jugement sera encore confirmé de ce chef.

Sur la demande de radiation du fichier des incidents de paiement:

Selon l’article L. 752-1 dernier alinéa du code la consommation, les informations relatives aux incidents de paiement, caractérisés dans les conditions précisées par l’arrêté mentionnée à l’article L. 751-6, sont radiées immédiatement à la réception de la déclaration de paiement intégral des sommes effectuées par l’entreprise à l’origine de l’inscription au fichier.

Il ressort de l’arrêté du en date du 26 octobre 2010, relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, pris en application de l’article L. 751-6 susdit, en son article 4 (définition des incidents de paiement), que constituent des incidents de paiement caractérisés au sens de l’arrêté:

1°Pour un même crédit comportant des échéances, les défauts de paiement atteignant un montant cumulé au moins égal:

i°) pour les crédits remboursables mensuellement, à la somme du montant des deux dernières échéances dues;

ii°) Pour les crédits qui ont des échéances autres que mensuelles, à l’équivalent d’une échéance, lorsque ce montant demeure impayé pendant plus de 60 jours;

2° Pour un même crédit ne comportant pas d’échéance, le défaut de paiement des sommes exigibles plus de 60 jours après la date de mise en demeure du débiteur, notifiée de manière formelle, d’avoir à régulariser la situation, dès lors que le montant des sommes impayées est au moins égal à 500 euros;

3° Pour tous les types de crédit, les défauts de paiement pour lesquels l’établissement ou l’organisme mentionné au 1° engage une procédure judiciaire ou prononcer la déchéance du terme après mise en demeure du débiteur restée sans effet. Les établissements et organismes mentionnés à l’article 1er peuvent ne pas inscrire les retards de paiement d’un montant inférieur à 150 euros pour lesquels la déchéance du terme n’a pas été prononcée.

Il ressort de ces éléments qu’un incident de paiement ne peut porter que sur un contrat valablement formé.

Or, si les époux [H] demeurent devoir restituer à la banque les sommes susdites, c’est exclusivement à raison de la nullité du contrat de crédit.

Il y aura donc lieu d’ordonner à la banque de radier Madame [H] du fichier des incidents de paiement dans un délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt.

* * * * *

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté les parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles de première instance, qu’aucune considération d’équité ne conduire à allouer à quiconque, et a condamné les époux [H] et la société Br à supporter la moitié des dépens de première instance.

Succombantes à hauteur d’appel, la société Br et la banque seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles d’appel, et seront condamnées in solidum à payer à la tutrice de Madame [H] la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

La société Br sera condamnée aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Ordonne à la société anonyme CA Consumer Finance De radier Madame [G] [X] épouse [H] du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers dans un délai d’un mois suivant la signification du présent arrêt ;

Déboute la société à responsabilité limitée Br Holding et la société anonyme CA Consumer Finance de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d’appel;

Condamne in solidum la société à responsabilité limitée Br Holding et la société anonyme CA Consumer Finance à payer à Madame [Y] [M], en sa qualité de tutrice de Madame [G] [X] épouse [H], la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;

Condamne la société à responsabilité limitée Br Holding, aux entiers dépens d’appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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