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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 3
ARRET DU 12 AVRIL 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00769 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CE7LN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2016 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 16/00337
APPELANT
Monsieur [W] [M]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Jérôme BORZAKIAN de la SELARL WEIZMANN BORZAKIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0242
INTIMEE
SOCIETE DIDARI clôture pour insuffisance d’actif par jugement du tribunal de commerce du 15 janvier 2022
PARTIE INTERVENANTE :
Me [C] [N] [F] (SCP [C] [N]) – Mandataire de la S.A.R.L. DIDARI
[Adresse 3]
[Localité 5]
Assignation à personne morale le 11 avril 2022
ASSOCIATION AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL de la SAS DUVAL LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Véronique MARMORAT, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Véronique MARMORAT, présidente
Madame Fabienne ROUGE, présidente
Madame Anne MENARD, présidente
Lors des débats : Madame Sarah SEBBAK, greffière stagiaire en préaffectation sur poste
ARRÊT :
– Réputé contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Madame Véronique MARMORAT, présidente et par Madame Sarah SEBBAK, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Embauché par la société Didari le 24 septembre 2012 en qualité d’assistant logistique, statut non cadre ayant une rémunération moyenne brute égale à la somme de 1 800 euros, Monsieur [W] [M], né le 3 juin 1990, a signé le 23 novembre 2015 la rupture conventionnelle du contrat de travail laquelle a été homologuée le 30 décembre 2015 par la Direccte.
Le 13 janvier 2016, le salarié a saisi en annulation de cette convention et en diverses demandes indemnitaires et salariales le Conseil des prud’hommes de Paris lequel, par jugement du 13 octobre 2016, a débouté monsieur [M] de l’intégralité de ses demandes, a débouté la société Didari de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et a condamné le salarié aux dépens.
Monsieur [M] a interjeté appel de cette décision le 4 novembre 2016.
Le 13 novembre 2018, le Tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire qui sera converti le 1er août 2019, en liquidation judiciaire. La scp [C]-[N], en la personne de maître [F] [N] a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire de la société Didari, la scp Thévenot Parteners, en la personne de maître [Z] [Y] ont été maintenus dans leurs fonctions d’administrateurs judiciaires. Par jugement du 19 janvier 2022, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la clôture de cette procédure pour insuffisance d’actifs et désigné la scp [C]-[N], en la personne de maître [F] [N], en qualité de mandataire ayant pour mission de poursuivre les procédures en cours.
Assignée en intervention forcée le 8 avril 2022, la scp [C]-[N], prise en la personne de maître [F] [N], en qualité de mandataire de la société Didari ne s’est pas constituée.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 12 avril 2017, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [M] demande à la cour d’infirmer le jugement et statuant de nouveau de :
Prononcer l’annulation de la rupture conventionnelle pour défaut de remise du double de l’exemplaire de la convention de rupture
Requalifier en conséquence la rupture des relations de travail comme s’analysant comme un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
Fixer au passif de la liquidation de la société Didari les sommes suivantes :
Titre
montant en euros
heures supplémentaires 2012 à 2015
congés payés afférents
15 992,28
1 599,22
indemnité compensatrice de préavis
congés payés
3 600
360
Indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse
10 800
manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat
3 000
article 700 du code de procédure civile
2 500
Ordonner la remise des documents de fin de contrat (attestation pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte, bulletin de paie récapitulatif) conformes à la décision à intervenir
Dire que les sommes porteront intérêt au taux légal dans les conditions prévues par les articles 1231-6 et -7 du code civil
Condamner la partie défenderesse aux éventuels dépens, article 699 du code de procédure civile
Dire la décision opposable à l’AGS.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 27 avril 2022, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l’association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest demande à la Cour de :
Déclarer irrecevables les demandes de monsieur [M]
Confirmer le jugement dont appel
Débouter monsieur [M] de ses demandes, fins et conclusions
Rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur principe ni justifiées dans leur montant et, en tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les créances susceptibles d’être fixées
Donner acte à la concluante des conditions d’intervention de l’AGS dans le cadre des dispositions du code de commerce rappelées ci-dessus, et des conditions, limites et plafonds de la garantie de l’AGS prévus notamment par les articles L 3253-6 à -17, L 3253-19 à -20 du code du travail
Rejeter toute demande contraire dirigée à l’encontre de l’AGS
Dire en tout état de cause que la décision à intervenir de fixation de créances ne sera opposable à l’AGS que dans les conditions, limites et plafond de sa garantie légale subsidiaire
Dire que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant de ces dispositions, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L 3253-20 du code du travail.
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
Sur l’exécution du contrat de travail
Sur les heures supplémentaires
Principe de droit applicable :
L’article L 3171-4 du code du travail précise qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, de répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Application en l’espèce
Monsieur [M] prétend, avoir effectué un grand nombre d’heures supplémentaires, non rémunérées que l’ensemble des éléments justificatifs démontrant le total d’heures supplémentaires réalisées sur la période 2012 à 2015 les établit et que les bulletins de paie démontrent que les heures n’ont jamais été réglées. Enfin, le salarié considère que l’absence d’entretien annuel, qui aurait permis de mettre en lumière ces difficultés (d’absence de contrôle du temps de travail des salariés), est un autre élément permettant d’établir la réalisation d’heures supplémentaires non rémunérées.
Pour établir ses heures supplémentaires, le salarié produit des courriels qu’il s’adresse à lui-même avec des mentions manuscrites sur des calculs.
Ces éléments ne distinguant ni les temps de pauses, ni les temps de trajets ni les temps de travail effectifs, de sorte, qu’il convient de confirmer la décision du Conseil des prud’hommes qui a rejeté cette demande.
Sur le manquement à l’obligation de sécurité
Principe de droit applicable :
Selon l’article L 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1, des actions d’information et de formation et la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
Application en l’espèce
Monsieur [M] considère que le fait, pour l’employeur, de lui avoir fait réaliser de telles heures supplémentaires et d’avoir laissé perdurer un contexte de travail accidentogène, démontre qu’il a manqué à son obligation de sécurité de résultat. À ce titre, il affirme que la société était alertée comme il se doit de l’existence de ces problématiques mais n’avait rien mis en oeuvre pour y remédier.
Compte tenu de ce qui précède, ce moyen ne peut être retenu.
Par ailleurs, le salarié expose que son lieu de travail serait accidentogène et s’appuie sur une lettre datée du 16 janvier 2016 de l’inspecteur du travail qui, lors d’un contrôle réalisé le 27 octobre 2015, a découvert des modalités de stockage des cartons contenant des vêtements, inappropriés et dangereuses, les cartons étant entassés les uns sur les autres sur 7 à 8 m. de haut, sans aucun rack de stockage accessible avec une seule échelle double, constatations étayées par les photographies jointes à ce courrier.
En conséquence, l’atteinte de l’obligation de sécurité étant caractérisée sur ce point, il convient d’allouer au salarié un somme de 800 euros en réparation de son préjudice.
Sur la rupture du contrat de travail
Sur la demande de nullité de la convention
Monsieur [M] soutient que la convention est nulle dès lors qu’il n’en a pas reçu un exemplaire au moment de sa signature.
La remise d’en exemplaire de la convention de rupture au salarié est nécessaire pour garantir le libre consentement de ce dernier, en lui permettant d’exercer ensuite son droit de rétractation en connaissance de cause.
À défaut par l’employeur de rapporter la preuve de cette remise, la convention de rupture sera annulée, de sorte que la rupture du contrat de travail prend les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les demandes indemnitaires
Compte tenu de son ancienneté de plus de deux ans, le salarié a le droit à une indemnité compensatrice de préavis d’un montant de 3 600 euros outre les congés payés afférents à hauteur de la somme de 360 euros.
Au vu de l’ensemble des éléments versés aux débats, compte tenu du fait que monsieur [M] a plus de deux ans d’ancienneté et la société Didari occupait habituellement au moins onze salariés au moment du licenciement, la cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer à la somme de 7 200 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l’article L 1235-3 du code du travail.
Sur la garantie de l’association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest
Les conclusions et pièces du salarié ayant été communiquées au conseil de l’association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest, ses demandes sont recevables à son égard, le jugement en cause étant consultable par ailleurs.
Il convient en conséquence, de lui rendre opposable la présente décision sous les limites et réserves définis dans le dispositif ci-dessous.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l’article 450 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement sauf en qu’il a rejeté la demande d’heures supplémentaires formée par monsieur [M].
Statuant de nouveau,
PRONONCE la nullité de la convention de rupture signée entre les parties le 23 novembre 2015.
FIXE au passif de la liquidation de la société Didari les dépens de première instance et d’appel et les sommes suivantes avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt :
800 euros au titre de la violation de l’obligation de sécurité
3 600 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre celle de 360 euros les congés payés
7 200 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l’article L 1235-3 du code du travail
1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
REND opposable la présente décision à l’association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest dans les conditions, limites et plafonds de la garantie de l’AGS prévus notamment par les articles L 3253-6 à -17, L 3253-19 à -20 du code du travail laquelle devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant de ces dispositions, limitées au plafond de garantie applicable, en vertu des articles L 3253-17 et D 3253-5 du code du travail, et payable sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire, et sur justification par ce dernier de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement en vertu de l’article L 3253-20 du code du travail.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE