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15/11/2023
ARRÊT N°621/2023
N° RG 22/04035 – N° Portalis DBVI-V-B7G-PDDQ
CBB/MB
Décision déférée du 10 Novembre 2022 – Président du TC de Toulouse ( )
[P] [F]
S.A.R.L. DIGITMIND
C/
S.A.S. ALLIANCE4U
S.A.S. [Y] CONSULTING
Société PLATINE HLD
[J] [A]
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU QUINZE NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A.R.L. DIGITMIND prise en la personne de son représentant légal et agissant es-qualité d’associée de la société ALLIANCE4U
[Adresse 2]
[Localité 8]
Représentée par Me Jean-christophe CHABAUD de la SELARL JURIVOX, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉES
S.A.S. ALLIANCE4U
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
S.A.S. [Y] CONSULTING
[Adresse 9]
[Localité 7]
Représentée par Me Jérôme CARLES de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE
PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES
Société PLATINE HLD
représenté par son gérant, [X] [H]
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Anne-Marie ABBO de la SELARL ABBO, avocat au barreau de TOULOUSE
Monsieur [J] [A]
[Adresse 3]
[Localité 11]
Représenté par Me Anne-Marie ABBO de la SELARL ABBO, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C.BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:
C. BENEIX-BACHER, président
O. STIENNE, conseiller
E.VET, conseiller
Greffier, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par I. ANGER, greffier de chambre
FAITS
La SAS Alliance4u a été constituée le 7 avril 2021entre la Société civile CPJB Consulting dirigée par Monsieur [I] [G] et la SARL DigitMind dirigée par Monsieur [K] [N].
M. [G] en est le président et M. [N] le directeur général.
Elle avait pour but d’acquérir la totalité des titres et des droits de vote des sociétés suivantes’:
– la SAS [Y] Consulting, ayant pour activité principale la réalisation de prestations de services et de conseils en informatique, détenue par la société CPJB Consulting ([G]),
– la SAS Settis, ayant pour activité principale la réalisation de toutes prestations de services en ingénierie informatique, détenue par la SARL DigitMind ([N]).
Pour cette acquisition concrétisée le 28 avril 2021 il a été contracté 2 emprunts auprès de la Société Générale et le Crédit Agricole. Et la BNP Paribas Développement est entrée au capital dans le cadre d’une augmentation de capital par l’émission d’obligations. (lettre du 7 avril 2021).
Le capital social de la SAS Alliance4u est donc réparti de la manière suivante :
– CPJB Consulting (M.[G]) : 55.93 %
– Divers associés minoritaires (Sté Platine HLD et M. [A]) : 14.63 %
– DigitMind (M. [N]) : 18.09 %
– BNP Paribas : 11.36 %.
Un organe extrastatutaire dénommé «’Comité de suivi’» a été instauré au travers d’un pacte d’associés du 7 avril 2021 comprenant les associés de la SAS Alliance4u (PJ. [G], L. [N]), les associés minoritaires et la BNP (en sa qualité d’investisseur) pour faire le point sur la situation du groupe, sur les perspectives de développement et sur tout autre sujet que l’un de ses membres jugerait utile.
M. [N] et la BNP se sont inquiétés des méthodes de gestion d’Alliance4u et d'[Y] Consulting par M. [G].
Par courrier du 24 janvier 2022, la société BNP Paribas Developpement faisait ainsi usage de son droit d’alerte, et par courrier du 27 janvier 2022 M.[N] dénonçait des dysfonctionnements et irrégularités.
PROCEDURE
Par acte du 24 juin 2022, la SARL DigitMind et Monsieur [K] [N] ont assigné la SAS Alliance4u et la SAS [Y] Consulting devant le juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse pour obtenir la désignation d’un administrateur provisoire aux lieu et place de M. [G], sur le fondement des articles 872 et 873 du code de procédure civile.
Par ordonnance contradictoire en date du 10 novembre 2022, le juge a rejeté la demande en présence de contestations sérieuses vu le défaut de justification de paralysie de la société et de péril imminent.
La SA DigitMind a relevé appel de la décision par déclaration du 21 novembre 2022 en demandant à la cour d’infirmer l’ordonnance en ce qu’elle a:
– constaté que les demandes présentées se heurtent à des contestations sérieuses et excèdent les pouvoirs du juge des référés,
– invité les parties à mieux se pourvoir devant les juges du fond,
– condamné la SARL DigitMind et Monsieur [K] [N] aux entiers dépens.
Par ordonnance en date du 14 mars 2023, les conclusions de la SARL Alliance4u du 9 février 2023 ont été déclarées irrecevables.
Par conclusions du 29 septembre 2023, la SA Platine HLD et M. [A] ont déposé des conclusions d’intervention volontaire.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 octobre 2023.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
La SA DigitMind, dans ses dernières conclusions en date du 4 octobre 2023, demande à la cour au visa des articles 872 et 873 du Code de procédure civile, L 225-10, L 225-150, L 225-147 et R 225-170 du Code de commerce, de’:
– Réformer l’ordonnance du 10 novembre 2022 rendue par le Président du Tribunal de commerce de Toulouse en ce qu’elle a :
*constaté que les demandes présentées se heurtent à des contestations sérieuses et excèdent les pouvoirs du juge des référés,
*invité les parties à mieux se pourvoir devant les juges du fond,
*condamné Sarl Digitmind et Monsieur [K] [N] aux entiers dépens
Statuant à nouveau :
– Désigner au bénéfice des sociétés Alliance4u et [Y] Consulting un administrateur provisoire qui pourra être la Selarl Vigreux [Adresse 10],
– Dire et juger que l’administrateur provisoire désigné aura pour mission :
*d’administrer et de gérer les sociétés Alliance4u et [Y] Consulting aux lieu et place de Monsieur [I] [G] avec les pouvoirs les plus étendus et de prendre toutes les mesures qu’imposent l’urgence et la nécessité,
*de prendre toutes mesures utiles à la sauvegarde des intérêts de la société,
*d’exercer toute action, y compris, en responsabilité afin de préserver les intérêts sociaux de la société Alliance4u et de son groupe,
*de vérifier les comptes et les déclarations fiscales, le cas échéant procéder à l’établissement des comptes des sociétés Alliance4u et [Y] Consulting,
*de convoquer toute assemblée générale ordinaire ou extraordinaire utile au fonctionnement des sociétés Alliance4u et [Y] Consulting,
– Fixer la durée de la mission de l’administrateur provisoire à six (6) mois et juger que cette durée pourra être prorogée sur requête.
– Condamner in solidum les sociétés Alliance4u et [Y] Consulting à verser à l’appelante la somme de 4000 € aux titres des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamner in solidum les sociétés Alliance4u et [Y] Consulting aux dépens d’instance.
Statuant sur l’intervention volontaire :
– La déclarer irrecevable et en tout cas mal fondée ;
– Condamner in solidum la société Platine HLD et M. [A] à 5 000€ chacun pour procédure abusive ;
– Condamner en tout état de cause in solidum Platine HLD et M. [A] à 3500€ au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens d’instance.
La Société civile Platine HLD et M. [A], dans leurs conclusions en date du 29 septembre 2023, demandent à la cour au visa des articles 554, 872 et 873 du Code de Procédure Civile, de’:
– Déclarer recevable l’intervention volontaire de la société Platine et de Mr [J] [A],
– Confirmer l’ordonnance du 10 novembre 2022,
– Condamner la société DigitMind à payer à la société la société Platine et de Mr [J] [A] une somme de 1000 € a` chacune d’entre elles,
– Condamner l’appelant au paiement des entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 octobre 2023.
MOTIVATION
Sur la recevabilité des interventions volontaires
L’intervention volontaire en cause d’appel se régularise par voie de conclusions.
En vertu de l’article 554 du code de procédure civile, « Peuvent intervenir en cause d’appel dès lors qu’elles y ont intérêt les personnes qui n’ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité. »
En l’espèce, la SC Platine HLD et M. [A] n’étaient pas parties en première instance. Agissant en qualité d’associés minoritaires de la SAS Alliance4u,ils ont un intérêt propre à intervenir dans la procédure qui a pour objet de dessaisir l’organe légal de représentation, c’est-à-dire les dirigeants de la personne morale, pour lui substituer un administrateur provisoire qui dispose d’un mandat général d’administration courante.
Ils interviennent donc au même titre que la SA DigitMind elle-même actionnaire de la SAS Alliance4u. Leur intervention volontaire est donc recevable.
Sur la désignation d’un administrateur provisoire
Aux termes des dispositions de l’art. 872 du Code de procédure civile, « dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend ».
Et l’article 873 alinéa 1er du même Code dispose : « même en présence d’une contestation sérieuse, le président du tribunal de commerce peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.»
La désignation judiciaire d’un administrateur provisoire d’une société est une mesure exceptionnelle qui suppose rapporter la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent, ces deux conditions étant cumulatives. Une telle désignation est une dérogation aux règles de gestion normales de la société. Elle n’est justifiée que si l’intérêt social même est mis en cause.
Il convient donc de démontrer la gravité de la crise sociale vécue par la société et l’urgence du fait du péril imminent. La demande ne peut donc être fondée que sur l’article 873 du code de procédure civile.
En l’espèce, la SAS Alliance4u a été créée pour regrouper SAS [Y] Consulting et la Société Settis’; la transmission des titres et droits a été opérée par apports et par cessions, la BNP intervenant en qualité d’investisseur. Aux termes du pacte d’associés la SAS Alliance4u devait être dirigée par un président, M. [G] et un directeur général M. [N], les règles de gouvernance étant déterminées par un comité de suivi destiné à statuer sur toutes les décisions majeures.
La SA DigitMind soutient pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire, qu’il existe une situation de blocage de nature à nuire au fonctionnement normal de la société au vu’:
– des dissensions entre le président et le directeur général dénoncées par la BNP dans un rapport du 29 juin 2021 qui signalent des risques financiers et fiscaux et du favoritisme à l’égard d’une société Hygia détenue par M.[G],
– des man’uvres de la part de M. [G] lui ayant permis par le biais de sa société CPJB de détenir frauduleusement la majorité du capital social puisqu’elle a voté sur son propre apport en nature en violation de l’article L225-10 du code de commerce à l’ AG du 28 avril 2021,
– des omissions d’informations auprès du commissaire aux comptes relatives à la valorisation des titres d'[Y] dès l’origine’; absence de réunion du comité de suivi de la SAS Alliance4u depuis fin 2021′; pas de réunion d’ AG pour l’agrément des comptes de l’exercice 2021,
– des problèmes de management et de politique générale ayant entraîné le départ de 28 salariés en quelques mois avant 2021, ce qui a eu pour effet d’amputer la capacité de production (cf audit de février 2022′; cf alerte du CSE du 14 février 2022, CODIR du 15 septembre 2021),
– des menaces sur la situation économique et juridique de la SAS Aliance4 en ce que’:
*M. [G] a poursuivi un projet économique contraire à l’intérêt social en favorisant une société dans laquelle il a des intérêts personnels (Hygia) et qui présente des risques financiers (cf le rapport de l’expert comptable [M]’: factures impayées, engagement de moyens importants au bénéfice de cette société sans contrepartie),
*les risques financiers entraînent des risques fiscaux quant au crédit d’impôt et un risque de remboursement de subventions (cf rapport BNP du 25 octobre 2021),
*la trésorerie est en chute,’ce qui signe une exploitation déficitaire’: un million d’euros environ de perte entre décembre 2021 et juin 2022.
La SA DigitMind soutient également l’existence d’un péril imminent en ce que la BNP principal investisseur, envisage de se retirer (Cf l’audit qui dénonce des dysfonctionnements dans la gestion et au niveau des ressources humaines).
La SAS Alliance4u et la SAS [Y] Consulting soutiennent au contraire, l’absence de preuve d’une paralysie des organes de gestion et l’absence de péril imminent en ce que’:
– le comité de suivi s’est réuni le 28 janvier 2022 et peut être réuni à la demande du président comme du directeur général mais également à la demande de tout associé voire de l’investisseur,
– l’audit de la BNP n’est pas déterminant en ce qu’il émane de l’investisseur qui n’est pas associé aux décisions relatives à la gestion’et que s’il dénonce des faits fautifs de la part du dirigeant, il ne fait pas la preuve de la paralysie de la société,
– M. [M] commissaire aux comptes ayant validé le crédit d’impôt il n’est donc pas justifié d’un risque fiscal,
– M. [N] est le responsable RH de la société de sorte qu’il est partie prenante dans les difficultés managériales qu’il dénonce par la voix de sa société’; toutefois des recrutements sont actuellement en cours,
– les différents organes et comités fonctionnent’: le comité de suivi s’est réuni les 23 juin et 16 septembre 2022′; le CODIR, le comité trimestriel et le COMOP se réunissent régulièrement,
– les comptes de l’exercice 2021 ont été approuvés par l’ AG du 2 décembre 2022, certes avec retard mais avec l’accord du juge,
– la BNP n’a pas indiqué son v’u de se retirer de la structure sociétale,
– le péril financier n’est pas avéré et notamment le chiffre d’affaires, la trésorerie et l’endettement ne démontrent pas un tel risque.
Il ressort de l’ensemble des pièces et éléments du dossier que les dirigeants des deux sociétés qui ont fusionné (Eole et Settis) n’ont pas su créer dès l’origine, un esprit d’entreprise avec un objectif commun et une gouvernance unique en raison de leurs fortes dissensions personnelles qui s’est conclue par la révocation de M. [N] de ses fonctions de directeur général de la SAS Alliance4u suivant procès-verbal d’ assemblée générale extraordinaire du 19 décembre 2022.
M. [N] et la SA DigitMind ont déposé plainte auprès du procureur de la république le 6 avril 2023 pour’:
– majoration frauduleuse d’apport en nature en violation de l’article L 242-2 du code de commerce,
– faux et usage de faux et escroquerie pour obtenir une subvention de la Région au bénéfice d’ [Y], un crédit d’impôt, le chômage partiel pendant le Covid et des indemnités kilométriques en raison de fausses déclarations concernant les prestations qui auraient été exécutées par des salariés d'[Y] au bénéfice d’Hygia (société détenue par M. [G]) et [Y],
– abus de biens sociaux par M. [G] en sa qualité de président de la SAS Alliance4u et d'[Y] Consulting dans le but de favoriser Hygia ou ses associés,
– abus de pouvoirs ou de voix dans le but d’influencer le comité de suivi du 16 décembre 2022 pour obtenir la révocation de M. [N] en qualité de directeur général,
– prêt de main d’oeuvre illicite (16 contrats) par [Y] au bénéfice d’Hygia.
La SA DigitMind fonde sa demande de désignation d’un administrateur provisoire sur le rapport du commissaire aux apports en date du 22 avril 2021, sur le rapport de l’expert comptable [M] du 28 février 2022, sur le rapport d’alerte du CSE du 14 septembre 2022, le risque de désengagement de la BNP (courriel du 7 juin 2022), l’impossibilité pour l’expert de certifier les comptes 2021 (courriel du 31 août 2022), l’alerte du CODIR le 15 septembre 2022 aux deux dirigeants.
La SA DigitMind soutient que les apports en nature n’ont pas été correctement évalués, ce qui a faussé le rapport de force dans les votes ; mais cette question est actuellement soumise au juge du fond de sorte qu’il existe une contestation sérieuse du caractère manifestement illicite du trouble invoqué pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire.
Le rapport de l’expert comptable [M] du 28 février 2022, commandé par l’investisseur BNP Paribas Développement, propose des pistes de réflexion et d’amélioration dans le cadre d’un projet dit «Alliance’» composé des sociétés Alliance4u, Sttis et [Y] Consulting. Il s’agit donc d’un rapport d’information à usage strictement interne qui, de l’aveu même de l’expert et suivant la lettre de mission qui lui a été confiée, ne s’analyse pas en une procédure de vérification des actifs, ni un examen sur les risques et passifs éventuels, ni une revue fiscale approfondie du CIR (Crédit d’impôt), ni de la subvention. Et il est clairement indiqué que ce document n’a pas été soumis à la direction des sociétés pour en vérifier l’exactitude.
Dans ces conditions, ce document est insuffisant à servir de fondement à la SA DigitMind pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire chargé d’un mandat général d’administration courante aux lieu et place des organes sociaux, qu’il dessaisit provisoirement de leurs attributions.
Alerté par le CSE, l’inspection du travail a par courriel du 29 mars 2023 fait valoir qu’elle a réalisé un contrôle dans l’entreprise au cours duquel elle a rappelé’:
– le contenu des informations qui doivent figurer sur la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE) à remettre au CSE,
– plusieurs points de santé-sécurité au travail dont l’évaluation des risques psycho-sociaux et, la consultation du CSE sur le DUERP.
Ce document apparaît donc insuffisant à servir de fondement à la SA DigitMind pour justifier la désignation d’un administrateur provisoire chargé d’un mandat général d’administration courante aux lieu et place des organes sociaux, qu’il dessaisit provisoirement de leurs attributions.
Aux termes de son courriel du 31 août 2022, le commissaire aux comptes (M.[E]) mentionne «’une dégradation importante de la situation économique et financière des sociétés [Y] et Settis.
Toutefois, il n’est pas contesté que les comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2021 de la SAS Alliance4u ont été approuvés à l’AG du 2 décembre 2022 à laquelle la SA DigitMind a été convoquée par courrier du 17 novembre 2022, auquel était joint le rapport du commissaire aux comptes sur cet exercice. Et ce, alors que les intimées soutiennent que les termes de comparaison proposés par l’appelante ne sont pas identiques. Par ailleurs, il est soutenu que la situation financière est obérée au point que l’investisseur a menacé de se retirer. Or, s’il est exact que par courriels des 24 et 31 janvier 2022 la BNP s’est inquiétée de la mauvaise gestion financière et sociale de la société et des relations «’anormales’» entretenues par la SAS Alliance4u et la société Hygia (société détenue majoritairement et dirigée par M. [G]) et que par courriel du 7 juin 2022, elle a menacé de se retirer, la SA DigitMind ne justifie pas d’un tel retrait, ni même que cette menace est toujours d’actualité, de sorte qu’il n’est pas démontré une situation de crise financière.
Enfin, s’il est démontré la dégradation du climat social dans l’entreprise vu l’importance des démissions et les récriminations de la direction des ressources humaines portées à la connaissance du président de la SAS Alliance4u, il ressort toutefois du document «’Vision budgétaire’» (pièce 43 produite par la SA DigitMind) qu’il a été procédé à 77 recrutements pour 47 départs soit un solde positif de 25.
Dans son compte-rendu du 15 septembre 2022, le CODIR déplore la mésentente entre le président M. [G] et le directeur général M. [N] qui conduit à une impasse et le manque d’information utile et nécessaire préalable à la validation du budget ou des décisions essentielles, ce qui l’a amené à proposer un plan de transformation avec une réorganisation urgente de l’entreprise. Le comité de direction insistait sur le fait que «’vos divergences divisent les équipes et nous amènent à cette situation regrettable’».
En réponse, le président de la SAS Alliance4u a procédé à la convocation d’une assemblée générale pour voter la révocation de son directeur général laquelle a été actée suivant procès-verbal du 16 décembre 2022.
Il a donc été mis fin (à tort ou à raison) à la mésentente entre les organes de direction de sorte, la situation d’impasse invoquée par le CODIR a disparu.
Ainsi, il ressort de l’ensemble des pièces des dossiers des parties, que, dès lors que les assemblées générales se tiennent de même que les divers comités et que les risques financiers n’apparaissent pas avec l’évidence nécessaire devant le juge des référés, la preuve n’est pas suffisamment rapportée d’une crise sociale et d’une situation de blocage de nature à rendre impossible le fonctionnement normal de la société et d’une gravité telle qu’elles mettent en péril la structure à court terme ou l’expose à un péril imminent menaçant la société.
Dans ces conditions, en l’absence de preuve suffisantes d’un trouble manifestement illicite, il y a lieu de confirmer la décision qui a rejeté la désignation d’un administrateur provisoire de la SAS Alliance4u.
Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA DigitMind la totalité des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, ce qui commande le rejet des demandes contre elle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour
– Reçoit les interventions volontaires de la société civile Platine HLD et de M.[A].
– Confirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Toulouse en date du 10 novembre 2022 en toutes ses dispositions.
– Condamne la SA DigitMind aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
I. ANGER C. BENEIX-BACHER