Augmentation de capital : décision du 22 novembre 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 19/00145
Augmentation de capital : décision du 22 novembre 2023 Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion RG n° 19/00145
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ARRÊT N°23/

PC

R.G : N° RG 19/00145 – N° Portalis DBWB-V-B7D-FDWO

S.A.R.L. KORBEY D’OR

C/

S.A.R.L. SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS FSL)

S.E.L.A.R.L. [Z]

S.E.L.A.R.L. ELISE DE LAISSARDIAIRE

Société SELARL AJ PARTENAIRES

RG 1èRE INSTANCE : 2018000631

COUR D’APPEL DE SAINT- DENIS

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2023

Chambre commerciale

Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL MIXTE DE COMMERCE DE SAINT PIERRE en date du 18 DECEMBRE 2018 RG n°: 2018000631 suivant déclaration d’appel en date du 28 JANVIER 2019

APPELANTE :

S.A.R.L. KORBEY D’OR représentée par son gérant, venant aux droits et actions de la SARL ADVITAM RUN SAP

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentant : Me Guillaume jean hyppo DE GERY de la SELARL GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

S.A.R.L. SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS FSL)

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentant : Me Ben ali AHMED, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

PARTIES INTERVENANTES :

SELARL [Z] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL KORBEY D’OR

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentant : Me Guillaume DE GERY de la SAS GERY-SCHAEPMAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

SELARL ELISE DE LAISSARDIAIRE es qualité d’administrateur judiciaire de la SARL KORBEY D’OR

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 10]

SELARL AJ PARTENAIRES es qualité d’administrateur provisoire de la SARL KORBEY D’OR

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentant : Me Caroline CHANE MENG HIME, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

CLÔTURE LE : 17/04/2023

DÉBATS : En application des dispositions de l’article 804 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Septembre 2023 devant la Cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Conseiller : Monsieur Laurent FRAVETTE, Vice-président placé affecté à la cour d’appel par ordonnance de Monsieur le Premier Président

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition le 22 Novembre 2023.

Greffiere lors des débats et de la mise à disposition : Madame Nathalie BEBEAU, Greffière.

ARRÊT : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 22 Novembre 2023.

* * *

LA COUR

Selon acte en date du 15 mai 2013 la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis (la SSFSL) exerçant sous l’enseigne « Pompes Funèbres et Marbrerie Les Bougainvilliers » a été créée par MM. [J]-[N] [L], [C] [X] et [I] [M] ; M. [J]-[N] [L] a été désigné comme gérant et début 2014, les associés ont été rejoints par M. [F] [E].

Le 16 avril 2015, la SARL Advitam Run Sap est devenue cessionnaire des 25 parts sociales de M. [X] pour le prix de 2.250 euros et la cession a été enregistrée au SIE de Saint-Pierre le 17 avril 2015.

Le même jour, la SSFSL a tenu une assemblée générale extraordinaire (AGE) lors de laquelle Mme [G] [D], associée de la société Advitam Run Sap a été nommée cogérante ; il a également été décidé d’augmenter le capital social pour le porter de 1.000 euros à 5.000 euros. A cette fin, 400 parts sociales d’une valeur de 10 euros ont été souscrites à hauteur de 190 attribuées à M. [L] et 210 à la société Advitam Run Sap.

Le 17 avril 2014, deux chèques d’un montant de 1.900 euros et de 2.100 euros ont été édités par la société Advitam Run Sap et libellé à l’ordre de la SARL Bougainvilliers et de M. [L].

Selon attestation en date du 11 mai 2015, la somme de 4.000 euros a été déposée en espèce à hauteur de 1.900 euros et par chèque (n° 1048278) à hauteur de 2.100 euros sur un compte de la Caisse Régionale Maritime Mutuel d’Outre-Mer dédié à l’augmentation du capital de la SSFSL.

A une date non précisée, M. [L] a reconnu devoir la somme de 1.900 euros à la société Advitam Run Sap et s’est engagé à la lui rembourser à hauteur de 10 versements mensuels de 190 euros à compter du 30 juillet 2015.

Par acte en date du 30 avril 2015, la société Advitam Run Sap a consenti à la SSFSL un prêt d’un montant de 20.000 euros, à un taux de 3 % l’an, remboursable par 36 versements mensuels, la convention de prêt prévoyant que la somme de 7.000 euros est destinée à l’acquisition d’un véhicule corbillard et que celle de 13.000 euros alimentera son fonds de roulement.

Par acte d’huissier en date du 4 août 2017, la société Advitam Run Sap a fait assigner en référé la SSFSL et MM. [L] et [E] devant le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre aux fins d’injonction donnée aux gérants de la SSFSL de convoquer l’assemblée générale ordinaire annuelle pour présentation des comptes sociaux des exercices clos les 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement assortie d’une astreinte de 500 euros par jour de retard, condamnation solidaire de la SSFSL et MM. [L] et [E] à lui rembourser les sommes de 4.000 euros au titre de l’augmentation de capital social non finalisée, 20.000 euros au titre du prêt consenti le 30 avril 2015 avec majoration d’intérêts au taux conventionnel de 5% l’an à compter du 13 juillet 2015 et anatocisme et 14.000 euros au titre du compte courant d’associé ou des sommes versées à son bénéfice et à lui payer la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par ordonnance de référé en date du 23 janvier 2018, le président du tribunal mixte de commerce de Saint Pierre a renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront et dit n’y avoir lieu à référé.

Par actes d’huissier en date du 20 février 2018, la société Advitam Run Sap a fait assigner la SSFSL et MM. [L] et [E] devant le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre aux mêmes fins, le tout, sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

Par jugement en date du 25 avril 2018, le tribunal mixte de commerce de Saint Denis a étendu à la société Advitam Run Sap la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’égard de la SARL Korbey d’Or et désigné Me [O]-Ajpartenaires en qualité d’administrateurs judiciaires avec mission d’assistance.

A l’audience, la société Advitam Run Sap a maintenu ses demandes sauf à renoncer à sa demande tendant à voir convoquer une assemblée générale ordinaire.

La SSFSL et MM. [L] et [E] ont conclu au débouté des prétentions de la société Advitam Run Sap. A titre reconventionnel, ils ont sollicité la condamnation de la société Advitam Run Sap à leur payer les sommes de 7.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles. Dans l’attente de l’aboutissement de procédures pénales en cours, ils ont demandé au tribunal de surseoir à statuer et de mettre hors de cause M. [E].

C’est dans ces conditions que, par jugement rendu le 18 décembre 2018, le tribunal mixte de commerce de Saint Pierre a :

-rejeté la demande aux fins de surseoir à statuer

-constaté que la SARL Advitam Run Sap se désiste de la demande relative à la convocation des assemblées générales de la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis

-débouté la SARL Advitam Run Sap de la demande de condamnation solidaire de la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis, de M. [L] et de M. [E] à lui rembourser la somme de 4.000 euros au titre de l’augmentation de capital social non finalisée

-condamné la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis à payer à la SARL Advitam Run Sap la somme de 7.000 euros outre intérêts au taux conventionnel majoré, soit 5% à compter du 13 juillet 2015

-dit que les intérêts produiront intérêts échus, dès lors qu’ils seront dus au moins pour une année entière à compter de la date de la présente assignation soit le 20 février 2018.

-débouté la SARL Advitam Run Sap des demandes de condamnation solidaire formées à l’encontre de M. [L] et M. [E]

-débouté la SARL Advitam Run Sap de la demande en condamnation de la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis, M. [L] et M. [E] en paiement de la somme de 14.000 euros au titre du remboursement de son compte courant d’associé

-débouté la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis, M. [L] et M. [E] de l’ensemble de leurs demandes reconventionnelles

-dit n’y avoir lieu à prononcer l’exécution provisoire de la présente décision

-rejeté les demandes en paiement formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile

-condamné la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 28 janvier 2019, la société Korbey d’Or a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt avant dire droit en date du 18 mars 2021, la cour a enjoint la société Korbey d’or de justifier de la transmission universelle du patrimoine de la société Advitam Run Sap dans son patrimoine dont elle se prévaut, invité la société Korbey d’or à donner toutes explications utiles sur la procédure collective étendue à la société Advitam Run Sap et renvoyé le dossier de l’affaire à l’audience de mise en état du 17 mai 2021 pour clôture et fixation.

Par un nouvel arrêt avant dire droit en date du 23 mars 2022, la cour a statué en ces termes :

REVOQUE l’ordonnance ce clôture ;

ORDONNE la réouverture des débats afin de permettre à la SARL Korbey d’Or de produire la décision du 10 octobre 2018, ainsi que toute autre décision intervenue postérieurement ainsi qu’un extrait K bis récent la concernant ;

ORDONNE la réouverture des débats afin de permettre à la SARL Korbey d’Or de clarifier sa situation juridique depuis le jugement du 10 octobre 2018 rendu par le tribunal mixte de commerce et de procéder, si besoin, à toutes diligences utiles pour régulariser la procédure ;

ET CE, avant le 25 mai 2022, sous peine de radiation ;

RENVOIE l’affaire à l’audience de mise en état du 20 juin 2022 à 14 heures (audience dématérialisée).

* * *

LA SELARL [Z], prise en la personne de Maître [P] [Z], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la SARL KORBEY D’OR, désignée à ces fonctions par jugement rendu par le Tribunal mixte de commerce de SAINT-DENIS le 31 août 2022, succédant à la SELARL ELISE DE LAISSARDIERE, anciennement désignée en qualité d’administrateur judiciaire avec mission de représentation de la société KORBEY D’OR, dont le mandat a pris fin le 31 mars 2023, s’est constituée intimée par acte du 13 avril 2023.

* * *

Aux termes de ses dernières conclusions N° 3 récapitulatives, remises par RPVA le 28 avril 2021, la SARL KORBEY d’OR, venant aux droits et actions de la SARL ADVITAM RUN SAP, suite de la transmission universelle de son patrimoine à la SARL KORBEY D’OR et de sa dissolution décidée le 10/10/2018, demande à la cour de :

RECEVOIR la société KORBEY D’OR, venant aux droits et actions de la société ADVITAM RUN SAP, en son appel et l’en déclarer bien fondée,

INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a débouté la société ADVITAM RUN SAP de ses demandes de paiement des sommes de 4.000 €, 13.000 € et 14.000 €,

Statuant à nouveau de ces chefs,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 4.000 € au titre de l’augmentation de capital social non finalisée,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 13.000 € au titre du prêt consenti le 30 avril 215, avec majoration d’intérêts au taux conventionnel de 5% par an à compter du 13 juillet 2015 et anatocisme,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 14.000 € au titre du remboursement des sommes versées à son bénéfice,

DEBOUTER l’intimée de toutes demandes, fins et conclusions contraires à ce qui précède,

LA CONDAMNER à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens qui pourront être recouvrés par Me LIONNET, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du nouveau code de procédure civile.

* * *

Par conclusions d’intervenante forcée déposée le 23 avril 2023, la SELARL [Z], ès qualité de liquidateur de la SARL KORBEY D’OR, demande à la cour de :

DECLARER la société KORBEY D’OR, venant aux droits et actions de la société ADVITAM RUN SAP, recevable et bien-fondée en son appel,

Y faisant droit,

INFIRMER le jugement rendu le 18 décembre 2018 par le tribunal mixte de commerce de Saint-Pierre de La Réunion en ce qu’il a débouté la société ADVITAM RUN SAP de ses demandes de paiement des sommes de 4.000,00 €, 13.000,00 € et 14.000,00 €,

Statuant à nouveau,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 4.000,00 € au titre de l’augmentation de capital social non finalisée,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 13.000,00 € au titre du prêt consenti le 30 avril 2015, avec majoration d’intérêts au taux conventionnel de 5 % par an à compter du 13 juillet 2015 et anatocisme,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 14.000,00 € au titre du remboursement des sommes versées à son bénéfice,

DEBOUTER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS de l’intégralité de ses demandes,

CONDAMNER la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT-LOUIS à payer à la société KORBEY D’OR la somme de 4.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens qui pourront être recouvrés par la SAS GERY SCHAEPMAN, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

* * *

Par conclusions remises le 13 avril 2023, la SELARL ELISE DE LAISSARDIAIRE demande à la cour de :

DECLARER que son mandat d’administrateur judiciaire de la société KORBEY D’OR a pris fin le 31 mars 2023 ;

DECLARER qu’elle n’interviendra plus dans la procédure.

* * *

Les conclusions de la SARL SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS à l’enseigne Pompes Funèbres et Marbrerie Les Bougainvilliers ont été déclarées irrecevables par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 19 février 2020.

* * *

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

* * *

MOTIFS

A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » lorsqu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

L’irrecevabilité des conclusions de l’intimée font présumer de son acceptation des motifs du jugement.

Sur la situation actuelle de la société KOBEY D’OR :

Il est désormais constant que la société KORBEY D’OR est en liquidation judiciaire depuis le jugement du tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion en date du 31 août 2022.

Le liquidateur désigné est la SELARL [Z], succédant ainsi aux fonctions d’administrateur judiciaire de la SELARL ELISE DE LAISSARDIAIRE dont le mandat a pris fin le 31 mars 2023, jour du prononcé du jugement arrêtant le plan de cession de la société KORBEY D’OR tout en mettant fin à la poursuite de son activité.

Rappel sur la dévolution de l’appel :

Compte tenu de l’ancienneté de l’appel, de deux arrêts avant dire droit, de l’intervention des organes de la procédure collective en cours d’instance, il est opportun de rappeler le périmètre de l’appel de la SARL KORBEY D’OR, prétendant venir aux droits de la SARL ADVITAM RUN SAP.

Selon les termes de la déclaration d’appel déposée le 28 janvier 2019, l’appelante faisait grief au jugement querellé d’avoir :

. Débouté la SARL ADVITAM RUN SAP de la demande de condamnation solidaire de la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS, de Monsieur [L] et de Monsieur [E] à lui rembourser la somme de 4.000 € au titre de l’augmentation de capital social non finalisée.

. Débouté la SARL ADVITAM RUN SAP de la demande en condamnation de la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS, Monsieur [N] [L] et Monsieur [F] [E] en paiement de la somme de 14.000 € au titre du remboursement de son compte courant d’associé ;

Puis de condamner la SOCIETE DES SERVICES FUNERAIRES DE SAINT LOUIS à rembourser à la Société KORBEY D’OR les sommes suivantes 

. 4.000 € au titre de l’augmentation de capital social non finalisée,

. 20.000 € au titre du prêt consenti le 30 avril 2015, avec majoration d’intérêts au taux conventionnel de 5 % par an à compter du 13 juillet 2015 et anatocisme,

. 14.000 € au titre du remboursement de son compte courant d’associé ou des sommes versées à son bénéfice,

. 4.000 € au titre de frais irrépétibles.

La cour observe que la société KORBEY D’OR n’a pas intimé Monsieur [L] et Monsieur [E]. Ses prétentions en appel ne sont dirigées que contre la SSFSL.

Il convient donc de vérifier d’abord si la société KORBEY D’OR vient aux droits et obligations de la SARL ADVITAM RUN SAP.

Sur la transmission des droits de la SARL ADVITAM RUN SAP à la SARL KORBEY D’OR :

Par son premier arrêt avant dire droit, en date du 10 mars 2021, la cour invitait la SARL KORBEY D’OR à justifier de la transmission universelle du patrimoine de la société ADVITAM RUN SAP alors que la procédure de redressement judiciaire ouverte à l’encontre de la première société a été étendue par confusion de patrimoine à la seconde.

La cour rappelait alors que « si l’extension d’une procédure collective pour fictivité apparente des structures entraîne une disparition de la personnalité morale de la société faisant l’objet de l’extension, laquelle était fictive, il n’en va pas de même en cas de confusion de patrimoines, les personnalités juridiques subsistant. »

LA SARL KORBEY D’OR avait alors exposé à la cour que, suite à l’extension de la procédure collective de la SARL ADVITAM RUN SAP, dont elle était l’associée unique, un plan de continuation a été adopté le 3 octobre 2018. Suite à ce jugement, par décision du 10 octobre 2018, il a été procédé à la transmission universelle du patrimoine de la SARL RUN SAP à son associée unique la SARL KORBEY D’OR, sans produire les éléments le justifiant, provoquant ainsi la réouverture des débats ordonnée par le second arrêt avant dire droit en date du 22 mars 2022.

En effet, la société KORBEY D’OR verse aux débats (Pièce N° 25) le procès-verbal de décisions du 10 octobre 2018, prise par l’associée unique selon lequel, la dissolution de la SARL ADVITAM RUN SAP est décidée sans liquidation tandis que la SARL KORBEY D’OR reprend tous les droits et obligations de la société dissoute.

Cette décision a bien été déclarée au CFE le 29 janvier 2019 (Pièce n° 26).

Bien que l’appelante n’ait pas produit l’extrait KBIS actualisé sollicité par la cour, il est néanmoins établi que la SARL KORBEY D’OR justifie bien de sa qualité l’autorisant à interjeter appel du jugement dans lequel était partie la SARL ADVITAM RUN SAP.

Sur la demande de remboursement des 4.000,00 euros versées par la société ADVITAM RUN SAP au titre de l’augmentation de capital social de la société SSFSL :

Le tribunal mixte de commerce a débouté la demanderesse de sa prétention visant au remboursement de la somme de 4.000,00 euros en considérant que cette somme n’a pas servi à l’augmentation de capital non finalisée, considérant particulièrement que si la somme de 4000 € a effectivement été déposée sur le compte bancaire par la société ADVITAM RUN SAP, elle l’a été à hauteur de 2.100 € pour son compte et de 1900 € pour celui de Monsieur [L], que ce dernier a par ailleurs signé une reconnaissance de dette qui indique explicitement que la somme correspondant à ses parts supplémentaires, soit 1900 €, a été versée pour son compte par la société ADVITAM RUN SAP.

L’appelante expose que, le 17 avril 2015, la SSFSL a tenu une assemblée générale extraordinaire lors de laquelle il a été décidé d’augmenter le capital social pour le porter de 1.000 € à 5.000 € et de nommer un cogérant en la personne de Madame [G] [D], celle-ci étant par ailleurs associée de la SARL ADVITAM RUN SAP (pièce 7). Compte tenu de l’absence de liquidités de Monsieur [J] [N] [L], la totalité des fonds constatant l’augmentation de capital social a été avancée par la société ADVITAM RUN SAP, soit 4.000 €, cette somme ayant été versée au compte bancaire de la SSFSL (pièces 8 et 22), les formalités déclaratives et de publicité légales ayant été effectuées (pièces 9).

Ceci étant exposé,

Il résulte des pièces versées aux débats que :

. La SARL AD VITAM RUN SAP a pris 25 parts de 10 euros dans la SARL SSFSL selon l’assemblée générale extraordinaire du 16 avril 2015 (Pièce N° 5).

. Elle a ensuite acquis les parts sociales de Monsieur [C] [X] le même jour (Pièce N° 6) au prix de 2.250,00 euros payé par chèque à l’associé sortant qui a renoncé à son compte courant dont le montant a été réduit à 3.000,00 euros.

. L’augmentation du capital, décidée le 17 avril 2015, prévoit que la SARL ADVITAM RUN SAP souscrit 210 parts supplémentaires à 10 euros chacune, soit 2.100,00 euros (Pièce N° 7).

. L’attestation de dépôt de capital social a été rédigée par la Caisse régionale d’Outre-mer, CREDIT MARITIME le 11 mai 2015 (pièce N° 8), notamment au moyen d’un chèque de 2.100,00 euros émis par la SARL ADVITAM RUN SAP le 17 avril 2015.

Ainsi, indépendamment des suites données à cette augmentation de capital par le gérant de la SARL SSFSL, il est établi que l’appelante a bien versé la somme de 2.100,00 euros à ce titre et non 4.000,00 euros comme elle le prétend, ce qu’a parfaitement relevé le premier juge.

Cependant, l’appelante invoque justement les dispositions du dernier alinéa de l’article L. 223-32 du code de commerce, prévoyant que si l’augmentation du capital n’est pas réalisée dans le délai de six mois à compter du premier dépôt de fonds, il peut être fait application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 223-8.

Le deuxième alinéa de l’article L. 223-8 du même code prévoit que si la société n’est pas constituée dans le délai de six mois à compter du premier dépôt de fonds, ou si elle n’est pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés dans le même délai, les apporteurs peuvent individuellement demander en justice l’autorisation de retirer le montant de leurs apports. Dans les mêmes cas, un mandataire, dès lors qu’il représente tous les apporteurs, peut demander directement au dépositaire le retrait des fonds.

Il se déduit de ces dispositions que la SARL KORBEY D’OR, venant aux droits de la SARL ADVITAM RUN SAP dispose bien du droit de revendiquer la restitution des fonds versés au titre de l’augmentation de capital, mais dans la limite de 2.100,00 euros.

Le jugement querellé sera infirmé dans cette mesure.

Sur la demande de remboursement du prêt de 20.000,00 euros :

Les premiers juges ont limité à la somme de 7.000,00 euros la condamnation en faveur de la SARL ADVITAM RUN SAP, estimant que cette somme a bien été débloquée mais qu’il n’est en revanche pas démontré que celle de 13 000 euros a bel et bien été versée pour le compte de la SSFSL, les seules pièces produites étant constituées par une convention et une copie de chèque sans aucun justificatif que celui-ci a bien été endossé.

L’appelante fait valoir que pour permettre le développement de l’activité de la SSFSL, la société ADVITAM RUN SAP lui a consenti, par acte en date du 30 avril 2015, un prêt d’un montant de 20.000 €, payé à hauteur de 7.000 € à la société PF2 POMPES FUNEBRES au titre de l’acquisition d’un véhicule corbillard et à hauteur de 13.000 € à la SSFSL pour alimenter son fonds de roulement (pièces 10).

Son liquidateur précise que, selon convention en date du 30 avril 2015, le prêt devait être remboursé en 36 mensualités à compter du 1er juillet 2015. Aucune mensualité n’a jamais été payée par la société SSFSL en dépit des mises en demeure de la concluante.

Selon lui, les pièces produites établissent que ces fonds ont été versés à la société SSFSL ou pour son compte, ce qui suffit à l’en rendre débitrice à l’égard de la société prêteuse :

– versement de 13.000,00 € par chèque au profit de la société SSFSL ;

– versement de 7.000,00 € pour l’achat au profit de la société SSFSL d’un véhicule corbillard, somme payée par chèque au vendeur, la société PF2 (Pièce N° 19).

En considérant que la requérante n’avait produit aucun justificatif du fait que le chèque de 13.000,00 € libellé au nom de la société SSFSL « a bien été endossé », les premiers juges ont inversé la charge de la preuve.

Sur ce,

Aux termes de l’article 1315 du code civil dans sa version applicable à la cause, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

L’appelante verse aux débats la convention de prêt conclue entre la SARL ADVITAM RUN SAP et la société SSFSL, stipulant un prêt d’un montant total de 20.000,00 euros, remis au moyen de deux chèques bancaires de 7.000,00 euros et 13.000,00 euros, remboursable en 36 mensualités payables le 10 de chaque mois à compter du 1er juillet 2015, prévoyant un taux d’intérêt de 3 % l’an (Pièce N° 10).

Elle produit aussi la mise en demeure datée du 13 juillet 2015, réclamant déjà le remboursement de la première échéance impayée (Pièce N° 19), puis celle du 10 août 2015 s’agissant de la seconde échéance mensuelle Une troisième mise en demeure a été adressée à la SARL SSFSL le 14 septembre 2015 pour avoir paiement des trois échéances impayées, correspondant à la somme de 1.211,10 euros.

Face à la preuve de l’obligation incombant à la SARL SSFSL, celle-ci n’a jamais démontré qu’elle s’était acquittée des sommes dues au titre de ce prêt.

Ainsi, l’appelante est bien fondée à solliciter le remboursement des sommes dues au titre de ce prêt dont le terme était prévu le 10 juillet 2018 compte tenu de la durée initiale du prêt.

Le jugement querellé sera infirmé partiellement de ce chef et la société SSFSL sera condamnée à payer à la SARL KORBEY D’OR, représentée par son liquidateur, la somme de 13.000,00 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5 % à compter du 13 juillet 2015.

La décision sur la capitalisation des intérêts doit être confirmée pour le tout.

Sur la demande de remboursement des 14.000,00 euros versés à la société SSFSL :

Le tribunal mixte de commerce a rejeté ces prétentions en jugeant que la copie d’un chèque d’un montant de 6.450 euros, libellé à l’attention d’un tiers, en l’espèce Transport Funéraire [L], ne constitue pas un élément de preuve de la remise de cette somme à la SSFSL. En effet il n’est pas justifié que le chèque a bien été endossé, ni que le paiement à ce tiers a été fait pour le compte de la SSFSL.

D’autre part, le chèque d’un montant de 7.550 euros, libellé à l’attention de PF le Bougainvilliers, ne constitue pas non plus une preuve du règlement de la somme.

La SARL KORBEY D’OR affirme que la société ADVITAM RUN SAP a effectué des versements au bénéfice de la société SSFSL à hauteur de 14.000,00 € en juin 2015.

Elle soutient que :

. Le 16 juin 2015, la société ADVITAM RUN SAP a réglé directement à l’entreprise de transport funéraire FTF une dette contractée par la société SSFSL à hauteur de 6.450,00 € au titre de l’utilisation de son véhicule corbillard jusqu’à mars 2015 ;

. Le 30 juin 2015, la société ADVITAM RUN SAP a versé par chèque libellé à « PF les Bougainvilliers », qui correspond au nom commercial de la société SSFSL, une somme de 7.550,00 euros.

Selon l’appelante, le chèque de 6.450,00 euros établi le 16 juin 2015 à l’ordre de « [L] Transport Funéraire » (FTF), portant le n° 3213966 a bien été débité du compte bancaire de la société ADVITAM RUN SAP le 25 juin 2015 : la copie du chèque ayant été transmise par la BNP PARIBAS, il est acquis que c’est bien FTF qui en a été créditée.

Le chèque de 7.550,00 euros, établi le 30 juin 2015 à l’ordre de « PF Les Bougainvilliers », portant le n° 1048288 a bien été débité du compte bancaire de la société ADVITAM RUN SAP le 1er juillet 2015 : la copie du chèque ayant été transmise par la BNP PARIBAS, il est acquis que c’est bien la société SSFSL « Les bougainvilliers » qui en a été créditée.

Sur ce,

Vu l’article 1315 du code civil,

Contrairement à ce que soutient l’appelante, la pièce N° 23 versée aux débats ne démontre nullement que les deux chèques susvisés auraient été tirés au profit de la SARL SSFSL, le premier ayant été émis au profit de la société PF les Bougainvilliers et le second au profit de la société [L] TRANSPORT FUNERAIRE sans que la preuve de son bénéfice au profit de la SARL SSFSL soit rapportée.

Le jugement querellé sera confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes :

Les nombreuses incertitudes pesant sur les dettes de la SARL SSFSL ont pu être provoquées par l’absence de publication de l’augmentation du capital social auquel a tenté de contribuer la SARL ADVITAM RUN SAP en 2015.

Ainsi, l’intimée supportera les dépens de première instance et d’appel ainsi que les frais irrépétibles de l’appelante, représentée par son liquidateur judiciaire, ce en quoi le jugement querellé doit être aussi infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;

DECLARE RECEVABLE l’appel de la SARL KORBEY D’OR, venant aux droits et obligations de la SARL ADVITAM RUN SAP ;

INFIRME le jugement entrepris partiellement en ce qu’il a débouté la SARL ADVITAM RUN SAP de sa demande de restitution de la somme de 4.000,00 euros au titre de sa remise de fond pour l’augmentation du capital social de la SARL SSFFSL et limité à la somme de 7.000,00 euros le remboursement du prêt consenti le 30 avril 2015 et débouté la SARL ADVITAM RUN SAP de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

CONDAMNE la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis (SSFFSL) à payer à la SARL KORBEY D’OR, venant aux droits de la SARL ADVITAM RUN SAP, la somme de 2.100,00 euros au titre de la restitution des fonds versés pour l’augmentation de capital décidée le 17 avril 2015 ;

CONDAMNE la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis (SSFFSL) à payer à la SARL KORBEY D’OR, représentée par son liquidateur, venant aux droits de la SARL ADVITAM RUN SAP, la somme de 13.000,00 euros avec intérêts au taux conventionnel de 5 % à compter du 13 juillet 2015 en plus de la somme déjà allouée à ce titre par le jugement entrepris ;

CONDAMNE la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis (SSFFSL) à payer à la SARL KORBEY D’OR, représentée par son liquidateur, venant aux droits de la SARL ADVITAM RUN SAP, la somme de 4.000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel ;

CONDAMNE la SARL Société des Services Funéraires de Saint Louis (SSFFSL) aux dépens.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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