Augmentation de capital : décision du 23 novembre 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 23/00508
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COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

– Me Julio ODETTI

– la ASSOCIATION CABINET JOUSSE – CAUMETTE

expédition :

la SELARL AJ UP, adm.provisoire

LE : 23 NOVEMBRE 2023

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2023

N° – Pages

N° RG 23/00508 – N° Portalis DBVD-V-B7H-DRUY

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé du Président du Tribunal Judiciaire de CHATEAUROUX en date du 01 Février 2023

PARTIES EN CAUSE :

I – M. [V] [L]

né le 17 Novembre 1958 à [Localité 4]

[Adresse 1]

– Mme [N] [C] épouse [L]

née le 27 Avril 1962 à [Localité 4]

[Adresse 1]

Représentés par Me Julio ODETTI, avocat au barreau de CHATEAUROUX

Plaidant par Me Damien LORDIER, avocat au barreau de NANCY

timbre fiscal acquitté

APPELANTS suivant déclaration du 22/05/2023

II – Mme [T] [L] épouse [F]

née le 03 Mars 1990 à [Localité 4]

[Adresse 1]

– M. [G] [L]

né le 15 Février 1987 à [Localité 4]

[Adresse 1]

– S.C.I. LA CRECHE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 1]

N° SIRET : 452 256 241

Représentés par l’ASSOCIATION CABINET JOUSSE – CAUMETTE, avocat au barreau de CHATEAUROUX

Plaidant par Me Fabrice DELINDE, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

timbre fiscal acquitté

INTIMÉS

23 NOVEMBRE 2023

N° /2

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Octobre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CIABRINI, Conseillère chargée du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CLEMENT Présidente de Chambre

Mme CIABRINI Conseiller

M. PERINETTI Conseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme JARSAILLON

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSE des FAITS

Suivant acte notarié du 22 janvier 2004, M. [V] [L] et son épouse séparée de biens, Mme [N] [C] épouse [L] ont constitué une SCI La Crèche dont le siège social était alors situé en Meurthe et Moselle, laquelle est devenue propriétaire de plusieurs biens immobiliers.

Selon résolution de l’assemblée générale du 1er mars 2013, les trois enfants aînés (sur 8) des époux [L] sont entrés dans la SCI dont le capital social a été porté à 15 800 €, M et Mme [L] ne détenant que 400 parts chacun et M. [G] [L], Mmes [H] et [T] [L], chacun 5000 parts.

Par acte du 31 août 2017, la SCI la Crèche a acquis un bien immobilier dénommé ‘[Adresse 1]’ sis à [Localité 3] (36). En l’absence d’obtention d’un prêt pour la totalité du prix, la SCI a financé l’acquisition pour partie au moyen d’un prêt et pour partie au moyen de fonds prêtés par M et Mme [V] [L].

En vertu d’une décision de l’assemblée générale du 20 novembre 2020, le siège social de la SCI a été transféré à [Adresse 1].

M et Mme [L] ainsi que 4 de leurs enfants ont occupé l’ensemble immobilier.

Des dissensions familiales sont apparues.

Le 11 mars 2020, M. [V] [L], gérant, a confié par lettre de mission à la société ACSO expertise la mission de présentation des comptes annuels à compter du 1er janvier 2020.

Suivant résolution d’assemblée générale du 21 août 2020, M. [V] [L] a été révoqué de ses fonctions de gérant et M. [G] [L] et Mme [T] [L] ont été nommés co-gérants de la SCI.

Par acte notarié du 19 février 2021, Mme [H] [L] a fait don à ses parents des parts sociales qu’elle détenait dans la SCI la Crèche.

Par jugement du 12 mars 2021, assorti de droit de l’exécution provisoire, le tribunal judiciaire de Nancy a condamné la SCI La Crèche à payer à M. [V] [L] et Mme [N] [C] épouse [L] une somme de 1 450 249 € en remboursement de leur avance en compte courant.

Appel a été interjeté par la SCI La Crèche et par ordonnance d’incident du 17 novembre 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l’affaire pour défaut d’exécution.

Par ordonnance rendue sur requête en date du 24 novembre 2021, le Président du tribunal judiciaire de Châteauroux a désigné un mandataire ad’hoc, Maître [Y] [X], afin de procéder à la mise à jour des statuts de la société.

Par acte du 1er juillet 2022, M et Mme [V] [L] ont fait assigner M. [G] [L] et Mme [T] [L] épouse [F], ès qualités de co-gérants de la SCI, ainsi que la SCI La Crèche prise en la personne de ses deux co-gérants, aux fins de voir :

– Désigner un administrateur judiciaire provisoire pour une durée initiale de 18 mois,

– Ordonner en conséquence le dessaisissement des deux co-gérants,

– Dire que l’administrateur provisoire aura les pouvoirs conférés par la loi aux gérants de sociétés civiles,

– Confier à l’administrateur provisoire la mission de gérer et d’administrer la société, la mission ayant été développée dans leurs dernières conclusions et portant notamment sur l’option à l’impôt sur les sociétés, la renégociation des engagements pris par la gérance actuelle, la conclusion de conventions d’occupation avec les occupants de la SCI, le cas échéant après expertise, et la conclusion d’un contrat de fermage avec Mme [A] [L],

– Dire que l’administrateur pourra en référer à la juridiction en cas de difficultés ou pour étendre sa mission,

– Condamner in solidum M [G] [L] et Mme [T] [L] à leur verser une somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les condamner aux dépens.

Par ordonnance de référé du 1er février 2023, le Président du tribunal judiciaire de Châteauroux a :

– Déclaré recevables les demandes formées par M. [V] [L] et Mme [N] [C] épouse [L] à l’encontre de la SCI La Crèche ;

– Dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes principales formées par M. [V] [L] et Mme [N] [C] épouse [L] ;

– Débouté ces derniers de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile

– Condamné les mêmes aux dépens.

Le juge des référés a déclaré recevable la demande au motif que si, sur le fondement de l’article 39 du décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 relatif à l’application de la loi n°78-9 du 4 janvier 1978 un associé non gérant peut demander au gérant de provoquer une délibération des associés sur une question déterminée et, dans le cas de l’opposition ou du silence du gérant gardé pendant un mois, solliciter du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, la désignation d’un mandataire chargé de provoquer la délibération, cette possibilité n’exclut pas l’intervention du juge des référés sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile.

Rappelant qu’un administrateur provisoire peut être désigné à la condition que le fonctionnement normal de la société est empêché et que ses intérêts sont menacés d’un péril imminent, le juge des référés a ensuite considéré que ces conditions n’étaient pas réunies.

Par déclaration d’appel du 22 mai 2023, M [V] [L] et Mme [N] [C] épouse [L] ont interjeté appel de cette ordonnance en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu à référé sur les demandes principales présentées par eux, les a déboutés de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile et les a condamnés aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions signifiées par RPVA le 26 juillet 2023, M. [V] [L] et Mme [N] [L] présentent les demandes suivantes :

Vu les dispositions de l’article 835 du CPC,

Vu les pièces produites,

Dire l’appel recevable et bien fondé,

Confirmer la decision entreprise en ce que le tribunal judiciaire s’est declaré compétent,

En conséquence, se déclarer compétent pour connaitre des demandes et rejeter l’exception d’incompétence,

Sur les demandes :

– Infirmer la décision entreprise en ce qu’elle a dit n’y avoir lieu a référé et en ce qu’elle n’a pas fait droit a la demande de désignation d’un administrateur provisoire et a debouté les appelants de leurs demandes,

Statuant à nouveau :

– Désigner tel administrateur judiciaire en qualité d’administrateur provisoire de la SCI La Crèche, ce pour une durée initiale de 18 mois.

– Ordonner en conséquence le dessaisissement des deux co-gérants

– Dire et juger que l’administrateur aura les pouvoirs conférés par la loi aux gérants de societes civiles,

– Confier à l’administrateur provisoire la mission de gérer et d’administrer la SCI La Crèche, tant activement que passivement,

Notamment, donner pouvoir et autoriser l’administrateur a :

– Convoquer une assemblée générale aux fins d’approbation des comptes de l’année 2020 tout en s’assurant que la proposition d’affectation du résultat tienne compte de la donation intervenue (et que celle-ci ne mentionne pas Mme [H] [L] qui était visée dans le projet d’affectation communiquée par les gérants),

– Désigner tel expert-comptable qu’il lui plaira aux fins d’établissement des comptes au 31 décembre 2022 et des exercices successifs (jusqu’à la fin de la mission) , de procéder aux déclarations fiscales idoines.

– Concernant l’option à l’IS :

*Prendre attache avec l’administration fiscale,

*Solliciter l’annulation et/ou la révocation de l’option en invoquant notamment le défaut de pouvoir du déposant, le gérant n’ayant pas pouvoir de lever seul l’option et la SCI ne pouvant être engagée pour tout ce qui excède l’objet social (1849 du Code civil).

*Procéder à l’annulation et/ou à la renégociation avec effet rétroactif de tous les engagements pris par la Gérance actuelle ayant pour effet de déclencher le seuil de l’IS (soit 10%),

*Désigner tel expert qu’il lui plaira afin de déposer des comptes et une liasse fiscale rectificative,

– D’aviser les associés et parties de ses démarches,

– Convoquer les assemblées générales imposées par la loi, jusqu’à la fin de sa mission,

– Conclure, avec effet rétroactif au 1er janvier 2021, des conventions d’occupation avec les occupants de la SCI LA CRECHE, après le cas échéant, avoir fait expertiser la valeur locative des biens. En cas de refus des occupants s’acquitter de loyers ou charges, entreprendre toute démarche aux fins d’expulsion de ceux-ci,

– Conclure avec effet rétroactif un contrat de fermage avec Madame [A] [L] qui a établi une exploitation agricole sur le site, sous les mêmes conditions.

– Fixer la rémunération de l’administrateur et dire que celle-ci sera versée par la SCI La -Crèche,

– Dire que l’administrateur pourra en référer a la juridiction en cas de difficulté ou pour étendre sa mission,

– Débouter les intimés de leurs demandes plus amples et contraires,

– Condamner Mme [T] [L] et M [G] [L] in solidum à verser 6000 Euros aux appelants sur le fondement de l’article 700 du CPC,

– Condamner les mêmes aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 26 juillet 2023, les intimés demandent à la cour de :

Vu les articles 834 et 835 du Code de procédure Civile, les articles 39, 42 et 44 du décret n°78-704 du 3 juillet 1978 ;

In limine litis,

CONSIDERANT qu’il est demandé de délibérer sur une question déterminée de l’approbation des comptes de l’année 2020 tout en s’assurant que la proposition d’affectation du résultat tienne compte de la donation intervenue.

CONSIDERANT que le gérant s’y oppose ou garde le silence en raison de difficultés comptables, fiscales et statutaires,

CONSIDERANT que l’associé demandeur doit, à l’expiration du délai d’un mois à dater de sa demande, solliciter du président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, la désignation d’un mandataire chargé de provoquer la délibération des associés. »

PRONONCER l’incompétence de la juridiction.

A titre principal

CONFIRMER la décision en date du 1er février 2023 ;

Sur l’existence de procédures civiles au fond portant sur des agissements frauduleux des

parties demanderesses qui n’agissent pas dans l’intérêt de la SCI :

CONSIDERANT que le juge de la mise en état du Tribunal judiciaire de Chateauroux est saisi d’une procédure entre les mêmes parties sur des agissements frauduleux et en responsabilité civile à l’encontre des parties demanderesses ;

CONSIDERANT que le juge de la Mise en Etat du Tribunal judiciaire de NANCY est saisi à l’encontre du cabinet d’expertise comptable ACSO en vue de l’annulation et de l’inopposabilité de l’avenant de 18 septembre 2020 ;

CONSIDERANT qu’une plainte pénale est en cours d’enquête préliminaire à l’encontre des parties demanderesses pour des faits d’abus de confiance par détournement des revenus de la production électrique de 2020 à 2022;

CONSIDERANT qu’il a été déposé au service de l’audiencement correctionnel une citation directe pour des faits de détournement de revenus en 2021 d’une convention d’occupation précaire ;

CONSIDERANT qu’il existe un risque d’infirmation de la décision du Tribunal judiciaire de

Nancy en date du 12 mars 2021 ;

CONSIDERANT les diligences entreprises pour faire citer les parties demanderesses du chef d’escroquerie pour avoir versés aux débats des documents dits : « comptes de la SCI et bilan » alors qu’il ressort clairement qu'[V] [L] a dissimulé qu’il n’était plus gérant au moment de la signature de l’avenant, que la SCI ignore les pièces justificatives comptables communiquées à l’expert-comptable en violation du principe de sincérité comptable et que ces dits documents ont déterminé la juridiction de Nancy à condamner la SCI qui les qualifie de « comptes de la SCI »(‘) « lorsque [V] [L] était gérant » ;

CONSIDERANT qu’il s’agit de contestations sérieuses mettant largement en doute la bonne foi des parties demanderesses et leur volonté d’agir dans l’intérêt de la SCI ;

PRONONCER qu’il existe des contestations sérieuses telles qu’elles sont de nature à justifier le rejet de l’intégralité des demandes des parties adverses ;

A titre subsidiaire ,

Sur la modification statutaire de l’article 7 des statuts :

CONSIDERANT le texte des résolutions proposées à la consultation écrite extraordinaire des associés expédiées le 30 août 2022 portant sur la modification statutaire de l’article 7 des statuts ;

CONSIDERANT la consultation écrite des associés en vue de l’assemblée générale extraordinaire expédiée le 20 septembre 2022 portant sur la modification de l’article 7 des statuts et dont il a été apposé les signatures des deux associés sur le même bulletin de vote ;

CONSIDERANT les observations formulées le 03 octobre 2022 par la gérance aux associés sur l’irrégularité du bulletin de vote et le refus réitéré des associés à l’envoi de nouveau bulletins de vote réguliers ;

CONSIDERANT que ces refus réitérés ne permettent pas de s’assurer d’un vote libre et éclairé ;

CONSIDERANT que selon l’article 42 du décret du 3 juillet 1978, « En cas de consultation écrite, le texte des résolutions proposées ainsi que les documents nécessaires à l’information des associés sont adressés à chacun de ceux-ci par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Chaque associé dispose d’un délai d’au moins quinze jours à compter de la date de réception de ces documents pour émettre son vote par écrit”,

PRONONCER qu’il n’a pu être procédé à la modification statutaire de l’article 7 en raison de l’irrégularité de bulletin de vote des associés [N] et [V] [L] par l’apposition de deux signatures sur un seul bulletin de vote ;

CONSIDERANT la consultation écrite des associés en vue de l’assemblée générale extraordinaire expédiée le 30 novembre 2022 ;

CONSIDERANT que ce sont les propres impérities des parties demanderesses qui n’ont pas permis les modifications statutaires ;

CONSIDERANT qu’il est de jurisprudence constante que le juge doit se placer au jour où il statue ;

PRONONCER que cette demande est devenue sans objet au jour où la juridiction statue ;

Sur la désignation d’un expert-comptable aux fins d’établissement des comptes :

CONSIDERANT qu’un cabinet d’expert-comptable est missionné par la SCI puisqu’il a rendu le dernier bilan ;

PRONONCER qu’il y a lieu de rejeter cette demande ;

Sur l’approbation des comptes de l’année 2020 :

CONSIDERANT que les associés ont été consultés par lettres recommandées les 18, 19 et 20 mai 2021 en vue de l’approbation des comptes sur l’année 2020 ;

CONSIDERANT que [H] [L] a également été consultée par lettre recommandé ;

CONSIDERANT que la signification de la donation a eu lieu le 26 mai 2021, soit postérieurement à la notification des consultations ;

PRONONCER qu’il existe une contestation sérieuse de nature à rejeter la demande ;

Sur le régime de l’impôt sur la société :

CONSIDERANT qu’il est de jurisprudence que le juge des référés n’est pas compétent pour

annuler un quelconque acte déclaratif fiscal,

CONSIDERANT que le juge des référés est juge du provisoire et n’a pas le pouvoir à trancher le fond ;

CONSIDERANT que le régime de l’impôt sur les sociétés est obligatoire au-delà du seuil de recette commerciale de 10% du chiffre d’affaires ;

CONSIDERANT que la question de trancher sur le pourcentage d’activité commerciale du chiffre d’affaires amène à trancher sur le fond ;

CONSIDERANT que le 21 septembre 2020, [V] [L] procédait à une déclaration 2072 rectificative alors qu’il n’était plus gérant ;

CONSIDERANT que la SCI a été privée d’une partie des revenus civils et commerciaux de la SCI ont été frauduleusement détournés par les parties demanderesses ;

CONSIDERANT que ces man’uvres frauduleuses ont privé la SCI de prévision sur les activités civiles et commerciales ;

CONSIDERANT l’existence de deux procédures pénales en cours sur ces faits visés pour abus de confiance ;

CONSIDERANT que les parties demanderesses arguent d’un préjudice en leur qualité de tiers détenteur d’un compte courant par ailleurs contesté et non d’associés ;

CONSIDERANT qu’il ne peut être argué sérieusement d’un motif alimentaire alors que les détournements de revenus par les parties demanderesses sont survenus pour partie après les saisies attributions à exécution successives pour un montant approximatif de 213 000 euros,

CONSIDERANT que la gérance a agi dans l’intérêt de la SCI contrairement aux parties demanderesses,

PRONONCER le défaut de pouvoir de la juridiction ;

Sur les demandes de conclusions de baux :

CONSIDERANT la conclusion de baux d’habitation et de fermage en date du 1er septembre

2022 avec [A], [E] [O] et [G] [L] ;

CONSIDERANT la proposition de conclusion de bail en date du 20 septembre 2020 à l’attention des associés [N] et [V] [L] ;

CONSIDERANT l’assemblée générale ordinaire annuelle aux fins d’approbation des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2022 en date du 30 aout 2022 ;

CONSIDERANT le texte des résolutions proposées à l’assemblée générale ordinaire annuelle en date du 17 septembre 2022 portant sur l’approbation des comptes et sur la modification des conventions d’occupation ;

PRONONCER que les demandes de conclusions de baux sont devenues sans objet :

Sur la demande de désignation d’un administrateur provisoire :

CONSIDERANT que la désignation d’un administrateur provisoire est une mesure

exceptionnelle ;

CONSIDERANT que la mésentente entre associés et gérants n’est pas de nature à justifier la désignation d’un administrateur provisoire ;

CONSIDERANT que les cogérants ont répondu aux diverses demandes des associés ;

CONSIDERANT que par le passé, les comportements et agissements frauduleux et répréhensibles de [N] et [V] [L] ont sapé la confiance dans les relations statutaires et ont eu pour effet de retarder la modification statutaire de son article 7 ;

CONSIDERANT les efforts de la SCI pour régler la dette à l’égard des parties adverses par l’obtention d’un emprunt et la vente de biens immobiliers;

CONSIDERANT enfin que la désignation d’un administrateur provisoire aurait pour effet de dessaisir l’actuel gérance de procédures actuellement en cours qui visent à assainir la situation comptable de la SCI qui en a été privée.

PRONONCER qu’il n’y a pas lieu à la désignation d’un administrateur provisoire ;

CONDAMNER [N] et [V] [L] aux entiers dépens ;

ORDONNER qu’il n’y a pas lieu à l’exécution provisoire.

En application de l’article 445 du code de procédure civile , il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour le développement de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » et en l’espèce les ‘ considérant’ ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu’il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n’y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt.

1- In limine litis, sur la recevabilité de la demande

A l’appui de l’ exception d’incompétence soulevée, la SCI La Crèche se prévaut de l’article 39 du décret n°78-704 du 3 juillet 1978 relatif à l’application de la loi du 4 janvier 1978 qui prévoit la compétence du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond lorsque sur la demande d’un associé non gérant de provoquer une délibération des associés sur une question déterminée, le gérant s’oppose à la demande ou garde le silence.

Contrairement à ce que soutiennent la SCI La Crèche et ses gérants, M et Mme [L] n’ont pas demandé au juge des référés de convoquer une assemblée générale aux fins d’approbation des comptes de l’année 2020 mais sollicitent la désignation d’un administrateur provisoire, pour plusieurs motifs exposés dans leurs conclusions qui sont bien plus étendus que la demande d’approbation des comptes pour l’année 2020 et qui vont au delà de la demande de convocation sur ‘une question déterminée’.

Par conséquent, la demande ne relève pas du Président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond et peut être présentée devant le juge des référés sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile.

C’est donc exactement que le juge des référés a retenu sa compétence.

2- Au fond, sur la demande de désignation d’un administrateur provisoire

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, dans les limites de sa compétence, même en présence d’une contestation sérieuse prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommmage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Sur ce fondement, selon une jurisprudence constante, la désignation judiciaire d’un administrateur provisoire de la société en cause suppose que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent (Cass. com. 18 mai 2010, n°09-14.838), conditions cumulatives.

Une mésentente grave entre associés, l’absence de tenue d’assemblées générales et d’accès aux documents comptables sont de nature à rendre impossible le fonctionnement normal de la société, et partant à justifier la désignation d’un administrateur provisoire ( Civ 3ème, 21 juin 2018).

En l’espèce, M. [G] [L] et Mme [T] [L] sont devenus co-gérants majoritaires de la SCI le 21 août 2020 après révocation de leur père, M. [L], sur le grief d’une confusion des patrimoines et revenus de ce dernier et de la SCI.

La SCI la Crèche, prise en la personne des ses nouveaux gérants, a engagé diverses actions pénales à l’encontre de M et Mme [L], lesquelles n’ont pas abouti.

A la suite de la donation par Mme [H] [L] de ses parts à ses parents par acte du 19 février 2021, nécessitant une modification de l’article 7 des statuts de la société, et compte tenu des difficultés à y parvenir, M et Mme [L] ont dû solliciter et ont obtenu par ordonnance sur requête la désignation d’un mandataire aux fins de mise à jour des statuts. Ce dernier a, par courrier adressé au président du tribunal judiciaire de Châteauroux, fait le constat de ce que lors de la tenue de l’assemblée générale qu’il avait convoquée pour le 15 juin 2022, aucune des résolutions n’avaient été adoptée en raison du vote négatif des co-gérants, et indiqué que la situation était ‘totalement paralysée’. Ce n’est qu’en avril 2023 que le mandataire judiciaire a pu effectuer les modifications au registre des sociétés et a achevé sa mission.

Il ressort en outre des courriers adressés par le conseil des époux [L] aux co-gérants de la SCI La Crèche que malgré la donation sus-visée, il a été proposé une résolution par consultation écrite envoyée le 18 mai 2021, contenant affectation d’ une quote-part des résultats à Mme [H] [L]. Au jour où la cour statue, il n’est pas justifié qu’il ait été remédié à cette anomalie.

Concernant les convocations aux assemblées générales, la dernière date du 8 octobre 2022 et il apparaît qu’aucune assemblée générale n’a été convoquée en 2023 pour l’approbation des comptes de l’année 2022 ( pièce 103 non produite).

Il ressort à cet égard d’un courriel du comptable de la SCI La Crèche du 10 juin 2022, qu’il se plaint de ne pas être destinataire des pièces nécessaires à la réalisation de sa mission, que le dossier est ‘très complexe’ et qu’il s’interroge ‘sur l’envoi de nouveaux éléments immédiatement consécutif à la demande du courtier d’avoir un EBE à 80 000 €, dont du chiffre d’affaires que vous ne nous aviez pas déclaré avant et qui a pour impact d’élever votre EBE à la somme de 81 000 €’, ce qui constitue un élément d’inquiétude sur la véracité des pièces produites par le gérant au comptable de la société.

Les co-gérants de la SCI La Crèche tentent en effet d’obtenir des prêts afin de satisfaire à la condamnation au paiement de la somme due à M et Mme [L] en vertu du jugement du tribunal judiciaire de Nancy du 12 mars 2021.

Par ailleurs, il apparaît que les co-gérants ont donné mandat de vendre des biens de la SCI, apportés par M et Mme [L], biens qui procurent des revenus, sans l’accord d’une assemblée générale extraordinaire. Les appelants soulèvent en outre le fait que ces ventes engendreront une fiscalité défavorable.

M et Mme [L] rappellent également la divergence importante née de l’option pour l’impôt des sociétés, sur laquelle M. [G] [L] s’est arc-bouté en décidant seul, sans l’obtention de l’unanimité des associés, malgré le rappel des principes par l’administration fiscale . Il ressort des nombreux courriers adressés par le conseil des appelants à M. [G] [L] et Mme [T] [L] et d’une note d’un cabinet fiscaliste chiffrant le préjudice résultant de cette option à 150 000 € que M. [G] [L] a agi délibérément en contradiction avec les textes applicables.

Il est encore invoqué un abus de majorité en ce que les co-gérants refusent de procéder à une augmentation de capital qui permettrait d’incorporer tout ou partie de la créance de M et Mme [L].

Ces derniers ajoutent qu’ils ont dû intenter une action oblique, afin d’obliger les deux associés majoritaires à procéder à des apports, ce qu’ils n’ont jamais fait depuis leur entrée dans la SCI La Crèche, et c’est de manière pertinente qu’ils font valoir que l’exercice d’une telle action ne témoigne pas d’ un fonctionnement normal de la société.

M et Mme [L] ont demandé à M. [G] [L], par l’intermédiaire de leur conseil, de régulariser des baux avec chacun des occupants des biens immobiliers situés [Adresse 1] à [Localité 3] (36). Si des baux ont été signés entre la SCI et certains occupants, mais à des loyers ‘dérisoires’ selon les appelants, M. [G] [L] a demandé à ses parents de verser un loyer de 2 300 € outre 825 € et les a menacés d’une procédure d’expulsion à défaut d’accord. Il est observé au surplus que des serrures ont été changées et que M et Mme [L] n’ont plus accès à la chaudière, de sorte qu’ils ont été privés de chauffage en novembre 2022.

Il faut relever également les nombreuses procédures engagées par la SCI contre M et Mme [L] qui génèrent des frais de contentieux très importants et qui démontrent amplement un fonctionnement anormal de la société.

Le fait pour la SCI La Crèche, M. [G] [L] et Mme [T] [L] de déplorer la gestion antérieure ‘frauduleuse’ de M. [V] [L], et le fait de contester chaque demande du conseil de ce dernier (ou de ne pas y donner réponse), de contester la désignation de Maître [X], d’accuser M. [V] [L] d’avoir détourné des loyers, corroborre de plus fort le grave dysfonctionnement de la société invoqué, (étant répondu aux moyens soulevés par les intimés qu’il est dépourvu de pertinence d’arguer de contestations sérieuses dans le cadre de l’article 835 du code de procédure civile).

Dans cette situation qui peut être qualifiée d’extrêmement confuse, au delà même de la mésentente patente et aigüe entre les associés ( enfants/ parents, qui peut être compréhensible et légitime, au vu des attestations et pièces produites mais qui ne saurait prévaloir sur l’aspect juridique du litige), il ressort des pièces produites que la gestion de M. [G] [L] et de Mme [T] [L] est insuffisante, qu’elle a déjà requis la désignation d’un mandataire judiciaire, qu’elle exclut les autres associés des décisions sociales en violation des règles du droit des sociétés et qu’elle met dès lors en péril la société, dont l’objet social est la détention de biens procurant des revenus et la gestion optimum desdits biens, ce qui doit en l’état être préservé. Force est de constater dans ces conditions qu’ à défaut d’une administration neutre, juridiquement et comptablement compétente, la société ne pourra qu’ être dissoute à court terme.

Il résulte donc de ces constatations et énonciations, déjà retenues par le juge des référés qui n’ en a cependant pas déduit que les conditions de désignation d’un administrateur provisoire étaient réunies , que les appelants rapportent la preuve de circonstances démontrant que le fonctionnement normal de la société est empêché et que celle-ci est confrontée à un péril imminent compromettant les intérêts sociaux.

La demande de désignation d’un administrateur provisoire est donc bien fondée et il y sera fait droit, en infirmation de l’ordonnance déférée.

La mission confiée à l’administrateur provisoire, pour une durée de 18 mois,selon ce qui est sollicité de manière raisonnable, sera précisée au dispositif du présent arrêt.

M. [G] [L] et Mme [T] [L], succombant en appel, mais non la SCI La Crèche, qui subit le dysfonctionnement et le péril imminent nés de leur gestion, seront condamnés aux dépens et verseront en équité à M et Mme [L] une somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a déclaré recevable la demande de M. [V] [L] et de Mme [N] [C] épouse [L] devant le juge des référés,

INFIRME l’ordonnance sur le surplus ;

Statuant à nouveau,

DIT bien fondée la demande de désignation d’un administrateur provisoire de la SCI la Crèche, dont le siège social est situé à [Adresse 1] ;

DESIGNE la SELARL AJ UP (Maître [P] [K]), [Adresse 2], en qualité d’administrateur provisoire de la SCI La Crèche pour une durée de 18 mois à compter du 1er jour du mois suivant la signification de l’arrêt aux intimés ;

ORDONNE en conséquence le dessaisissement des deux co-gérants à compter de ce même jour ;

DIT que l’administrateur aura les pouvoirs conférés par la loi aux gérants de societés civiles, avec la mission de gérer et d’administrer la SCI La Crèche, tant activement que passivement, ayant préalablement obtenu communication par les associés de toutes pièces utiles à sa mission, consistant notamment à :

– Convoquer une assemblée générale aux fins d’approbation des comptes de l’année 2020 en s’assurant que la proposition d’affectation du résultat tienne compte de la donation intervenue le 19 février 2021 (et que cette affectation ne concerne plus Mme [H] [L] qui était visée dans le projet communiqué par les gérants),

– Désigner tel expert-comptable qu’il lui plaira aux fins d’établissement des comptes au 31 décembre 2022 et des exercices successifs (jusqu’à la fin de la mission) , et de procéder aux déclarations fiscales,

– Concernant l’option à l’IS, après avis pris auprès de l’expert-comptable, et si tel est l’intérêt de la SCI La Crèche :

*Prendre attache avec l’administration fiscale,

*Solliciter l’annulation et/ou la révocation de l’option en invoquant notamment le défaut de pouvoir du déposant de décider seul de l’option à l’impôt sur les sociétés,

*Procéder à l’annulation et/ou à la renégociation avec effet rétroactif de tous les engagements pris par la Gérance actuelle ayant pour effet de déclencher le seuil de l’IS (soit 10%),

*Désigner tel expert qu’il lui plaira afin de déposer des comptes et une liasse fiscale rectificative,

– Etablir un état relatif aux locaux occupés à Mers-Sur-Indre (occupants, existence ou non d’un bail, date de prise d’effet, montant du loyer, paiement effectif ou non du loyer, gestion des gîtes, …) Et conclure au besoin, avec effet rétroactif au 1er janvier 2021, des conventions d’occupation avec les occupants de la SCI LA CRECHE, après le cas échéant, avoir fait chiffrer la valeur locative des biens. En cas de refus des occupants s’acquitter de loyers ou charges, entreprendre, à défaut de conciliation, toute démarche aux fins d’expulsion de ceux-ci,

– Vérifier si le montant du prix fermage contenu dans le bail rural en date du 1er septembre 2022, consenti à Mme [T] [L] est conforme aux dispositions de l’article L.411-11 du code rural ;

– Rechercher avec au besoin l’aide de l’expert -comptable, en se gardant de toute influence de quelque associé que ce soit, toutes solutions à mettre en oeuvre dans l’intérêt de la société pour parvenir à l’application du jugement du 12 mars 2021 (et notamment, quant à l’application de l’article 11-4 des statuts sur les apports des associés, à la sous-capitalisation actuellement contestée, à la vente de certains biens …) ;

– D’aviser les associés et parties de ses démarches,

– Convoquer les assemblées générales imposées par la loi, jusqu’à la fin de sa mission,

– Représenter la SCI la Crèche dans les procédures judiciaires en cours ;

DIT que l’administrateur pourra en référer à la juridiction en cas de difficulté ou pour étendre sa mission ;

DIT que l’administrateur provisoire adressera à la SCI La Crèche une note provisionnelle à valoir sur ses honoraires , à acquitter sans délai par la SCI ;

DIT qu’à l’issue de sa mission, l’administrateur provisoire adressera à la cour un état de ses honoraires aux fins de taxation ;

CONDAMNE in solidum M. [G] [L] et Mme [T] [L] à verser à M [V] [L] et Mme [N] [L] une somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum M. [G] [L] et Mme [T] [L] aux dépens de première instance et d’appel.

L’arrêt a été signé par O. CLEMENT, Présidente, et par S.MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

S. MAGIS O. CLEMENT

 


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