Augmentation de capital : décision du 23 novembre 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 23/00727
Augmentation de capital : décision du 23 novembre 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 23/00727
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SM/RP

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

– la SCP DROUOT AVOCATS

– la SELARL CREALEX

LE : 23 NOVEMBRE 2023

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2023

N° – Pages

N° RG 23/00727 – N° Portalis DBVD-V-B7H-DSIT

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé du Tribunal de Commerce de BOURGES en date du 04 juillet 2023

PARTIES EN CAUSE :

I – Mme [Z] [C]

née le [Date naissance 2] 1968 à

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée et plaidant par la SCP DROUOT AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 19/07/2023

II – S.A.R.L. INVESTABM , agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 3]

N° SIRET : 530 49 8 4 68

Représentée par la SELARL CREALEX, avocat postulant, du barreau de BOURGES

Plaidant par Me Jean-Pierre THUILLANT, avocat au barreau de PARIS

timbre fiscal acquitté

INTIMÉE

23 NOVEMBRE 2023

N° /2

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 octobre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. TESSIER-FLOHIC, Président de chambre chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. TESSIER-FLOHIC Président de Chambre

M. PERINETTI Conseiller

Mme CIABRINI Conseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

**************

Exposé :

La société INVESTABM , dont le capital social est détenu à hauteur de 37,57 % par son gérant [E] [S], à hauteur de 37,86 % par l’ex-épouse de celui-ci [Z] [C], et les 24,57 % restants par 12 associés en proportion variable, exerce une activité de holding et détient, à ce titre, 100 % du capital des trois filiales suivantes : SARL AB [S], SCEV [Adresse 3] et SCEV LE CLAUX DELORME, également dirigées par [E] [S].

Pour permettre aux filiales d’obtenir une modification du plan de sauvegarde dont elles bénéficiaient depuis 2014, la société INVESTABM a accepté, sur demande des banques, d’abandonner les comptes courants de ces dernières par le biais desquels elle les a soutenues, de sorte que ses capitaux propres sont devenus inférieurs à la moitié du capital social.

À l’occasion d’une consultation du 10 mai 2021, il a été décidé la poursuite de son activité.

Une assemblée générale extraordinaire de la société INVESTABM a été, dans ces conditions, convoquée pour le 21 février 2023 en vue de la reconstitution des capitaux propres avec réduction du capital, suivie d’une augmentation du capital réservée aux associés.

Considérant que ces propositions portaient une atteinte disproportionnée aux droits des associés, en diluant excessivement la participation de ceux ne souhaitant pas souscrire à l’augmentation de capital , [Z] [C] a, par courrier de son conseil en date du 17 février 2023, indiqué s’opposer à cette opération, faisant également part de son intention de céder sa participation.

C’est dans ces conditions que Monsieur [S], agissant en qualité de gérant de la SARL INVESTABM, a assigné par acte du 20 mars 2023 Madame [C] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bourges aux fins de juger qu’elle a commis un abus de minorité et, par conséquence, de désigner un mandataire ad hoc chargé de voter, en ses lieu et place, aux assemblées générales de la société.

Par ordonnance du 4 juillet 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Bourges a :

‘ Rejeté les conclusions de Madame [C] notifiées le 29 avril 2023 comme tardives,

‘ Constaté l’usage abusif de sa minorité de blocage par Madame [C],

‘ Désigné Maître [T] [N], membre de la SELARL AJ ASSOCIES, en qualité de mandataire ad hoc avec pour mission d’exercer en ses lieu et place le droit de vote attaché aux 62 399 parts sociales détenues par Madame [C] dans le capital de la société INVESTABM , et ce dans l’intérêt de cette dernière,

‘ Dit que les frais du mandataire susnommé seront avancés par la société INVESTABM,

‘ Débouté la société INVESTABM de sa demande tendant à voir dire et juger que l’obstruction de Madame [C] lui a causé un préjudice de 10 000 €,

‘ Condamné Madame [C] au paiement d’une indemnité de 1000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Le juge des référés a principalement retenu, en effet, que Madame [C], consécutivement à la perte de plus de la moitié de son capital social et à la décision des associés de poursuivre l’activité, était tenue, en application de l’article L223 ‘ 42 du code de commerce, de reconstituer ses capitaux propres et que sa décision, telle qu’exprimée dans un courrier du 17 février 2023, apparaissait contraire à l’intérêt social et relevait d’un intérêt purement personnel.

[Z] [C] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 19 juillet 2023 et demande à la cour, dans ses dernières écritures en date du 26 septembre 2023, à la lecture desquelles il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile :

Vu les articles 56 et 873 du Code de procédure civile,

Vu l’article L 223-42 du Code de commerce,

Vu l’article 1844-7 du Code civil,

D’INFIRMER PARTIELLEMENT l’ordonnance du juge des référés du Tribunal de commerce de BOURGES du 4 juillet 2023 en ce qu’il a :

Rejeté les conclusions de Madame [Z] [C] notifiées le 29 avril 2023, comme tardives,

Constaté l’usage abusif de sa minorité de blocage par Madame [Z] [C],

Désigné Maître [T] [N], membre de la SELARL AJASSOCIES, en qualité de mandataire ad hoc avec pour mission d’exercer en ses lieu et place, le droit de vote attaché aux 62 399 parts sociales détenues par Madame [Z] [C] dans le capital de la société INVESTABM (SARL), et ce, dans l’intérêt de cette dernière,

Condamné Madame [Z] [C] à verser à la société INVESTABM (SARL), une indemnité d’un montant de 1 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Et statuant à nouveau sur ces points, in limine litis,

ANNULER l’assignation délivrée par la SARL INVESTABM à Madame [Z] [C] en date du 20 mars 2023,

A titre principal,

Se déclarer incompétent et renvoyer la SARL INVESTABM à mieux se pourvoir au fond,

DEBOUTER la SARL INVESTABM de l’intégralité de ses demandes,

En conséquence,

ANNULER l’assemblée générale de la SARL INVESTABM du 28 juillet 2023,

La CONDAMNER à verser à Madame [Z] [C] la somme de 10.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

La CONDAMNER aux entiers dépens dont distraction requise au profit de Me Marie MANDEVILLE, avocat aux offres de droit.

La SARL INVESTABM demande pour sa part à la cour, dans ses dernières écritures en date du 4 septembre 2023, à la lecture desquelles il est pareillement renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, de :

‘ Confirmer l’ordonnance rendue le 4 juillet 2023 par le président du tribunal de commerce de Bourges en ce qu’elle a désigné Me [N] comme mandataire ad hoc avec pour mission d’exercer, en ses lieu et place, le droit de vote attaché aux 62 399 parts sociales détenues par Mme [C] dans le capital de la société INVESTABM et ce dans l’intérêt de cette dernière,

‘ Débouter Madame [C] de toutes ses demandes visant tant à annuler l’assignation en référé qui lui a été délivrée le 20 mars 2023 qu’à se déclarer incompétent et au renvoi devant le juge du fond,

‘ Juger qu’il n’y a pas lieu d’annuler les résolutions votées par Me [N] aux lieu et place de Madame [C] lors de l’assemblée générale du 28 juillet 2023,

‘ Condamner Madame [C] à lui verser une indemnité de 10 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de son conseil.

L’affaire relevant des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile a été fixée à l’audience du 4 octobre 2023 et la décision a été mise en délibéré pour le 23 novembre 2023.

Sur quoi :

I) sur la demande de Madame [C] tendant à l’annulation de l’assignation qui lui a été délivrée par la société INVESTABM en date du 20 mars 2023 :

Selon l’article 56 du code de procédure civile, « l’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 (‘) un exposé des moyens en fait et en droit ».

Le défaut de la mention ainsi requise par ce texte constitue un vice de forme entraînant la nullité de l’assignation s’il est démontré qu’il en est résulté un grief pour la partie assignée qui s’est trouvée ainsi empêchée d’organiser utilement sa défense.

Au cas d’espèce, Madame [C] soutient que les dispositions impératives de l’article 56 précité ont été méconnues, dès lors que l’assignation qui lui a été délivrée à comparaître devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bourges « se content[ait] de viser l’article 873 du code de procédure civile », sans préciser lequel des trois fondements contenus dans ce dernier texte ‘ mesures conservatoires ou de remise en état pour prévenir un dommage imminent, ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite, ou octroi d’une provision lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable ‘ était expressément invoqué à son encontre.

Toutefois, l’octroi d’une provision au créancier dont l’obligation n’est pas sérieusement contestable, figurant au second alinéa de l’article 873 du code de procédure civile, ne faisait pas, à l’évidence, partie des prétentions soumises à l’appréciation du juge des référés du tribunal de commerce.

D’autre part, la société INVESTABM a demandé au premier juge, après avoir considéré que Madame [C] avait abusé de sa minorité de blocage en s’opposant aux opérations de réduction/augmentation de capital social lors de l’assemblée générale prévue le 21 février 2023, de désigner un mandataire ad hoc pour exercer, en ses lieu et place, le droit de vote attaché aux 62 399 parts sociales qu’elle détient dans la société INVESTABM, dans le cadre d’une assignation ayant porté à sa connaissance l’ensemble des moyens soulevés à cette fin, ainsi que cela résulte, d’ailleurs, de la lecture des conclusions en défense déposées par Madame [C] devant le juge des référés du tribunal de commerce (pièce numéro 8 de la société intimée) dans laquelle celle-ci répond, point par point et en 13 pages, à l’argumentation qui lui était opposée.

Dans ces conditions, c’est en vain que l’appelante se prévaut d’une violation des dispositions de l’article 56 du code de procédure civile pour défaut d’exposé des moyens en fait et en droit dans l’assignation qui lui a été délivrée le 20 mars 2023.

Sa demande, formée in limine litis, tendant à l’annulation de ladite assignation ne pourra donc qu’être rejetée.

II) sur la demande formée par la société INVESTABM tendant à la désignation d’un mandataire ad hoc pour exercer, aux lieu et place de Madame [C], le droit de vote attaché aux 62 399 parts sociales qu’elle détient dans le capital de la société INVESTABM :

En application du premier alinéa de l’article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, « et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».

L’article L223 ‘ 42 du code de commerce dispose quant à lui que « si, du fait de pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres de la société deviennent inférieurs à la moitié du capital social, les associés décident, dans les quatre mois qui suivent l’approbation des comptes ayant fait apparaître cette perte s’il y a lieu à dissolution anticipée de la société.

Si la dissolution n’est pas prononcée à la majorité exigée pour la modification des statuts, la société est tenue, au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue, de reconstituer ses capitaux propres à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social ou de réduire son capital social du montant nécessaire pour que la valeur des capitaux propres soit au moins égale à la moitié de son montant.

Dans les deux cas, la résolution adoptée par les associés est publiée selon les modalités fixées par décret en Conseil d’Etat. (…) A défaut par le gérant ou le commissaire aux comptes de provoquer une décision ou si les associés n’ont pu délibérer valablement, tout intéressé peut demander en justice la dissolution de la société. Il en est de même si les dispositions dudit quatrième alinéa n’ont pas été appliquées. Dans tous les cas, le tribunal peut accorder à la société un délai maximal de six mois pour régulariser sa situation. Il ne peut prononcer la dissolution, si, au jour où il statue sur le fond, cette régularisation a eu lieu. (…) ».

Il est de principe qu’un abus de minorité peut être retenu lorsque l’attitude d’un associé minoritaire, disposant d’une information suffisante sur l’opération envisagée, apparaît, d’une part, contraire à l’intérêt général de la société en faisant notamment échec à la réalisation d’une opération essentielle pour celle-ci et, d’autre part, dictée par l’unique dessein de favoriser ses propres intérêts aux dépens de l’ensemble des autres associés (Cass. com., 9 mars 1993, n° 91-14.685).

Dans une telle hypothèse, il y a lieu à désignation d’un mandataire ad hoc se substituant à l’associé minoritaire fautif pour voter en son nom lors une nouvelle assemblée conformément à l’intérêt social, sans que le juge puisse fixer le sens du vote du mandataire qu’il désigne.

Au cas d’espèce, il est constant que Madame [C] détient 62 399 parts, soit 37,86 % du capital social de la société INVESTABM, société holding détenant le capital de trois filiales : la SARL AB [S], la SCEV [Adresse 3] et la SCEV LE CLAUX DELORME, à l’égard desquelles une procédure de sauvegarde a été ouverte selon jugement rendu le 18 mars 2013 par le tribunal de grande instance de Bourges, un plan de sauvegarde étant arrêté par ce même tribunal le 18 décembre 2014 (pièce numéro 13 du dossier de l’intimée) puis un moratoire sous forme de report des cinquième et sixième dividendes au 30 avril 2030 et 30 avril 2031 par jugement subséquent du 26 octobre 2020.

Il est par ailleurs constant qu’il résulte des comptes annuels de la société INVESTABM au titre de l’exercice clos le 31 juillet 2020, approuvés lors de l’assemblée générale ordinaire annuelle du 11 janvier 2021, que les capitaux propres de la société sont devenus inférieurs à la moitié du capital social et qu’en application des dispositions de l’article L223 ‘ 42 du code de commerce précité les associés, dont Madame [C], ont décidé, lors d’une consultation écrite du 10 mai 2021, de ne pas procéder à la dissolution de la société mais, au contraire, la poursuite de l’activité de celle-ci.

Dès lors, la société INVESTABM disposait d’un délai de deux ans, expirant à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes était intervenue, soit jusqu’au 31 juillet 2022, pour reconstituer ses capitaux propres à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social.

De telles diligences n’ayant pas été réalisées dans ce délai, le cabinet d’expertise comptable EXPERFI a adressé à la société intimée un courrier le 5 décembre 2022 lui demandant « de mettre tout en ‘uvre dans les semaines à venir afin de réunir les associés à l’assemblée générale extraordinaire, laquelle sera appelée à statuer sur la reconstitution des capitaux propres de la société à hauteur d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social et [se] conformer ainsi à la réglementation en vigueur », lui rappelant, en outre, les sanctions encourues en cas de non-respect des dispositions de l’article L223 ‘ 42 précité.

Le gérant de la société INVESTABM a alors convoqué une assemblée générale devant se tenir le 21 février 2023, au cours de laquelle les associés devaient être amenés à se prononcer sur une réduction du capital à 130 190 €, suivie immédiatement d’une augmentation de 273 600€, soit un capital social de 403 790 €.

Estimant que cette opération aboutirait à « une dilution extrêmement forte » de sa participation, Madame [C] a, par l’intermédiaire d’un courrier adressé par son conseil dès le 17 février 2023, fait part de son intention de voter contre cette proposition, ainsi que de céder sa participation au vu des « désaccords nombreux et persistants » avec « plusieurs des associés de la SARL » (pièce numéro 7).

Il doit être, en premier lieu, remarqué que la reconstitution des capitaux propres de la société INVESTABM à hauteur d’une valeur au moins égale à la moitié du capital social résulte de l’obligation édictée par l’article L223 ‘ 42 du code de commerce, de sorte qu’il était nécessaire d’y procéder, ainsi que le reconnaît d’ailleurs Madame [C] par l’intermédiaire de son conseil dans le courrier précité du 17 février 2023 dans lequel elle indique : « nous comprenons parfaitement que la situation comptable actuelle de la société INVESTABM entre en contravention avec l’article L223 ‘ 42 du code de commerce, et qu’il est donc impératif de procéder à une régularisation ».

L’appelante poursuit ce courrier en ces termes : « toutefois, il nous semble que d’autres options de recapitalisation auraient pu être étudiées et mises en ‘uvre, alors que la situation financière de la société INVESTABM ne paraît pas définitivement compromise. De telles options auraient le mérite de porter aux droits des associés une atteinte beaucoup plus proportionnée que le coup d’accordéon que vous proposez et dont il est légitimement possible de s’interroger sur ses motivations réelles ».

L’appelante ajoute dans ses écritures qu’une simple réduction du capital aurait suffi à mettre la société INVESTABM en conformité avec les dispositions de l’article L223 ‘ 42 du code de commerce.

Elle reproche à Monsieur [S], gérant de la société INVESTABM, d’avoir lié à ladite réduction une augmentation de capital par voie de compensation avec sa créance en compte courant d’associé, ce qui ne constituerait qu’un jeu de ligne comptable sans aucun apport de trésorerie.

Toutefois, force est de constater que l’intimée justifie que la SARL AB [S], la SCEV [Adresse 3] et la SCEV LE CLAUX DELORME, dont elle détient le capital en tant que holding, ont éprouvé des difficultés à respecter le plan de sauvegarde qui avait été arrêté à leur égard par jugement rendu le 18 décembre 2014 par le tribunal de grande instance de Bourges, ce qui a conduit cette juridiction à leur accorder un moratoire par jugement du 26 octobre 2020 (pièces numéros 14,15 et 16 de son dossier).

Dans ces conditions, l’opération de réduction/augmentation du capital, dite du coup d’accordéon, correspondant à une pratique comptable couramment utilisée pour permettre à une société de de reconstituer ses fonds propres et de se conformer, ainsi, aux exigences posées par l’article L223 ‘ 43 du code de commerce précité, présentait l’avantage de fournir aux trois filiales de la société intimée la trésorerie nécessaire au paiement des échéances prévues dans le plan de sauvegarde.

En outre, le reproche formé par Madame [C], selon lequel l’opération envisagée aurait eu pour conséquence de permettre à Monsieur [S] d’augmenter, sans aucun apport de trésorerie, sa participation au détriment des autres associés, apparaît infondé dès lors qu’il résulte des pièces du dossier qu’ensuite de l’assemblée générale extraordinaire tenue le 28 juillet 2023 en présence de Maître [N], désigné mandataire ad hoc par la décision dont appel revêtue de l’exécution provisoire, et ayant approuvé l’opération de réduction/augmentation du capital social, ladite augmentation a été réalisée par apport en numéraire à hauteur de 286 600 € ainsi que cela résulte de l’attestation de la banque CIC Ouest en date du 23 août 2023 (pièce numéro 19 du dossier de la société intimée).

Au vu de ces éléments, c’est à juste titre que le premier juge a considéré que le refus exprimé par Madame [C] de voter en faveur de la proposition devant être examinée lors de l’assemblée générale extraordinaire de la société INVESTABM le 21 février 2023 apparaissait contraire à l’intérêt général de celle-ci, en faisant échec à la réalisation d’une opération essentielle pour celle-ci.

En second lieu, il est constant que par courrier électronique adressé au cabinet d’expertise comptable EXPERFI en date du 16 mars 2022, ayant pour objet le terme « proposition », Madame [C] a proposé d’évaluer les parts qu’elle détient dans la société INVESTABM à concurrence de la somme de 25 000 € (pièce numéro 20 du dossier de l’intimée).

Moins d’un an plus tard, soit par le courrier précité de son conseil du 17 février 2023, celle-ci a confirmé qu’en raison de « désaccords nombreux et persistants avec plusieurs des associés de la SARL », elle « envisage[ait] de céder sa participation ».

Si aucune prétention chiffrée n’est émise dans ce dernier courrier, Madame [C] ne conteste pas formellement, dans ses dernières écritures, avoir demandé pour la cession de ses parts sociales la somme de 300 000 €, s’offusquant même d’un tel montant « encore plus de deux fois plus faible que le montant » qu’elle indique avoir investi dans la société.

Au vu d’une telle valorisation, multipliée par 12 en moins d’un an sans qu’aucun élément objectif sur la situation de la société INVESTABM ne puisse expliquer une telle réévaluation, c’est à juste titre que la société intimée soutient que le vote de Madame [C], associée minoritaire, apparaît manifestement lié au prix qu’elle entend obtenir pour la cession de ses parts, de sorte qu’il apparaît ainsi suffisamment établi que l’opposition au projet de réduction/augmentation du capital social présenté lors de l’assemblée générale de la société INVESTABM en date du 21 février 2023, est dictée par l’unique dessein de Madame [C] de favoriser ses propres intérêts aux dépens de l’ensemble des autres associés.

Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que le premier juge, constatant l’abus de minorité ainsi imputable à Madame [C], a désigné Maître [N] en qualité de mandataire ad hoc avec pour mission d’exercer en ses lieu et place le droit de vote attaché aux 62 399 parts qu’elle détient dans le capital de la société INVESTABM.

La décision de première instance devra donc être confirmée en l’intégralité de ses dispositions, la demande subséquente formée par Madame [C] tendant à l’annulation de l’assemblée générale de la société INVESTABM en date du 28 juillet 2023 apparaissant donc sans objet.

L’équité commandera, par ailleurs, d’octroyer à la société INVESTABM une indemnité d’un montant de 3000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles que celle-ci a dû exposer en cause d’appel.

Par ces motifs :

La cour,

‘ Rejette la demande formée par [Z] [C] tendant à l’annulation de l’assignation qui lui a été délivrée par la société INVESTABM le 20 mars 2023.

‘ Confirme, en toutes ses dispositions, l’ordonnance entreprise.

Y ajoutant

‘ Déclare sans objet la demande d'[Z] [C] tendant à l’annulation de l’assemblée générale de la société INVESTABM du 28 juillet 2023.

‘ Rejette toutes autres demandes, plus amples ou contraires.

‘ Condamne [Z] [C] à verser à la société INVESTABM une indemnité de 3000€ sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel, dont distraction au profit du conseil de la société intimée.

L’arrêt a été signé par M. TESSIER-FLOHIC, Président, et par Mme MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

S. MAGIS A. TESSIER-FLOHIC

 


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