Conflits entre associés : décision du 16 février 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 19-21.504

Conflits entre associés : décision du 16 février 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 19-21.504

NL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 février 2022

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 147 FS-B

Pourvoi n° S 19-21.504

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 FÉVRIER 2022

M. [B] [N], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° S 19-21.504 contre l’arrêt rendu le 13 juin 2019 par la cour d’appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige l’opposant :

1°/ à Mme [G] [J], épouse [I], domiciliée [Adresse 1],

2°/ à M. [Y] [Z], domicilié [Adresse 2],

3°/ à [S] [O], ayant été domicilié [Adresse 6], décédé, aux droits duquel vient sa fille Mme [A] [O], représentée par Mme [P] [O],représentante légale,

4°/ à Mme [C] [F], domiciliée [Adresse 5],

5°/ à la société [J] – [Z] – [O] – [N] – [F], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 8],

6°/ à M. [V] [L], domicilié [Adresse 7], pris en qualité de mandataire ad litem de [J]-[Z]-[O]-[N]-[F] désigné à cette fonction par ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance de Montpellier du 18 mai 2018,

7°/ à Mme [P] [O], domiciliée [Adresse 3], prise en qualité de représentante légale de Mme [A] [O], héritière de [S] [O],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [N], et l’avis de M. Lavigne , avocat général, après débats en l’audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen,M. Mornet, Mme Kerner-Menay, Mme Bacache-Gibeili, conseillers, Mme Gargoullaud, Mme Dazzan, Mme Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Nîmes, 13 juin 2019), le 4 mai 2017, M. [Z] et [S] [O], huissiers de justice associés au sein de la société civile professionnelle [J]-[Z]-[O]-[N]-[F] (la SCP), ont saisi le tribunal de grande instance de demandes visant à voir constater la mésentente des associés de nature à compromettre le fonctionnement de la SCP, sur le fondement de l’article 89-2 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l’application à la profession d’huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les société civiles professionnelles.

2. M. [N], huissier de justice associé au sein de la SCP, a demandé qu’il soit au préalable statué sur sa demande de retrait par le rachat de la totalité de ses parts sociales par la SCP, formulée le 4 novembre 2016 en application de l’article 34 des statuts de la SCP, et que, en l’absence de réponse de la SCP, l’évaluation de ses parts soit renvoyée, au visa de l’article 1843-4 du code civil, devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés aux fins de désignation d’un expert.

3. A la suite du décès de [S] [O], l’instance a été reprise à l’encontre de Mme [A] [O], son héritière.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [N] fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes relatives à l’exercice de son droit de retrait, alors « qu’un associé de société civile professionnelle d’huissiers de justice peut se retirer de la société, soit qu’il cède ses parts sociales, soit que la société lui rembourse la valeur de ses parts, et l’exercice par l’associé de son droit de retrait dans ce dernier cas n’est pas subordonné à la présentation par le retrayant d’un tiers cessionnaire ; qu’en retenant le contraire, pour refuser de faire droit à l’action en réalisation forcée de l’obligation de rachat des parts de M. [N] par la SCP, la cour d’appel a violé, par refus d’application, l’article 18 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles et, par fausse interprétation, l’article 31 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l’application à la profession d’huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, dans sa rédaction applicable à l’espèce, antérieure à celle issue du décret n° 2016-1508 du 9 novembre 2016. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 18 et 21 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 et 28 et 31 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 :

5. Selon le premier de ces textes, un associé peut se retirer de la société, soit qu’il cède ses parts sociales, soit que la société lui rembourse la valeur de ses parts. En vertu du deuxième, lorsqu’un associé le demande, la société est tenue, soit de faire acquérir ses parts par d’autres associés ou des tiers, soit de les acquérir elle-même, dans les conditions déterminées par le décret particulier à chaque profession.

6. Aux termes du troisième, dans le cas où la société refuse de consentir à la cession, elle dispose d’un délai de six mois à compter de la notification de son refus par lettre recommandée avec demande d’avis de réception pour
notifier, dans la même forme, à l’associé qui persiste dans son intention de céder ses parts sociales et conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 19 de la loi du 29 novembre 1966 précitée, un projet de cession ou de rachat de celles-ci.

7. Aux termes du quatrième, lorsqu’un associé demande son retrait de la société en cédant la totalité de ses parts sociales, il est procédé conformément aux dispositions des articles 27 et 28.

8. Il en résulte qu’en application des dispositions susvisées de la loi, l’associé a le choix de présenter un tiers cessionnaire ou d’obtenir le remboursement de ses parts sociales par la société et que ce choix n’a pu être remis en cause par des textes réglementaires d’application.

9. Pour rejeter les demandes de M. [N] relatives à l’exercice de son droit de retrait, l’arrêt retient que le retrait d’un associé fondé sur l’article 34 des statuts, qui renvoie aux dispositions des articles 27 et 28 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969, est subordonné à la cession des parts à un tiers cessionnaire qui est agréé ou pas par la société, laquelle, en cas de refus d’agrément, doit à son tour présenter un projet de cession ou de rachat de ces parts et que la possibilité prévue à l’article 21 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 n’a été mise en oeuvre que dans le décret n° 2016-1508 du 9 novembre 2016.

10. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

 


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