COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 16 JUIN 2022
N° 2022/
MA
Rôle N° RG 21/11019 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BH3BQ
S.A.S. CENTRALE D’ACHAT UBALDI
C/
[U] [W]
S.A. BOULANGER
Copie exécutoire délivrée
le : 16/06/22
à :
Me Patrick LEROUX de la SELARL LEROUX PATRICK, avocat au barreau de GRASSE
Me Florence MASSA de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE
Me Luc ALEMANY, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRASSE en date du 28 Juin 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 19/00002.
APPELANTE
S.A.S. CENTRALE D’ACHAT UBALDI, demeurant 5770 – 5ème Avenue 17ème Rue – ZI CARROS LE BROC – CS 25501 – 06516 CARROS CEDEX / FRANCE
représentée par Me Patrick LEROUX de la SELARL LEROUX PATRICK, avocat au barreau de GRASSE
INTIMES
Monsieur [U] [W], demeurant 620, 1ère avenue – 06600 CANNES
représenté par Me Florence MASSA de la SELARL GHM AVOCATS, avocat au barreau de GRASSE
S.A. BOULANGER, demeurant Le Hub – Avenue de la Motte – 59810 LESQUIN
représentée par Me Luc ALEMANY, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Mariane ALVARADE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Michelle SALVAN, Présidente de chambre
Madame Mariane ALVARADE, Conseiller
Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Nadège LAVIGNASSE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022.
Signé par Madame Michelle SALVAN, Présidente de chambre et Mme Karen VANNUCCI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
M. [U] [W] a été engagé par la SAS CENTRALE D’ACHAT UBALDI, en qualité de vendeur niveau 1, à compter du 7 décembre 2015, suivant contrat à durée déterminée en raison d’un accroissement d’activité, renouvelé suivant avenant du 11 mars 2016 jusqu’au 18 juin 2016.
La relation s’est poursuivie dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée à compter du 18 juin 2016, moyennant un salaire brut moyen mensuel qui était de 1295,82 euros, outre une rémunération variable. Son contrat de travail comportait une clause de non-concurrence.
Par lettre du 18 juin 2018, M. [W] a donné sa démission avec effet au 31 juillet 2018.
Le 13 août 2018, il a intégré la SA BOULANGER en qualité de vendeur niveau 1 échelon 2.
La SAS Centrale d’achat UBALDI expose qu’en raison des fonctions qu’exerçait M. [W], elle a fait appliquer la clause de non-concurrence et adressé à l’intéressé le règlement de l’indemnité correspondante par lettre du 13 septembre 2018, puis par voie d’huissier le 23 novembre 2018, le pli étant revenu portant la mention ‘non réclamé’,
qu’ayant appris que M. [W] avait été embauché par son concurrent direct, la SA BOULANGER, elle a fait signifier une sommation à son ancien salarié d’avoir à cesser toute violation de ses obligations de non-concurrence et à la SA BOULANGER d’avoir à cesser toute relation contractuelle de quelque nature que ce soit avec ce dernier, sommation réitérée par acte du 30 novembre 2018,
que M. [W] ayant renvoyé le chèque qui lui avait été adressé au titre de la contrepartie financière, invoquant la nullité de la clause de non-concurrence, elle a saisi la juridiction prud’homale, suivant requête du 4 janvier 2019, afin de voir ordonner la cessation, sous astreinte de toute relation contractuelle entre la SA BOULANGER et M. [W], condamner in solidum M. [W] et la SA BOULANGER au paiement de la somme de 10.000 € au titre de la clause pénale, outre au paiement d’une somme de 3.000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par jugement en date du 28 juin 2021, le Conseil de Prud’hommes de Grasse a :
débouté la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de toutes ses demandes,
– dit et jugé que la clause de non-concurrence est nulle,
– condamné la CENTRALE D’ACHAT UBALDI à payer à M. [W] [U] les sommes suivantes :
o 2.500 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
o 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la CENTRALE D’ACHAT UBALDI à payer à la SA BOULANGER la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la CENTRALE D’ACHAT UBALDI aux dépens de l’instance,
– débouté et rejeté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.
La SAS Centrale d’achat UBALDI a interjeté appel de cette décision dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas critiquées.
MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 22 octobre 2021, la SAS Centrale d’achat UBALDI, appelant, demande à la cour de voir :
‘- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du Conseil des Prud’hommes de Grasse en date du 28 juin 2021,
Et statuant à nouveau,
– dire et juger licite la clause de non-concurrence prévue à l’avenant au contrat de travail en date du 18 juin 2016,
– condamner in solidum M. [W] et la SA BOULANGER au paiement de la somme de 10.000 Euros au titre de la clause pénale,
– débouter M. [W] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamner in solidum M. [W] et la SA BOULANGER au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum M. [W] et la SA BOULANGER aux entiers dépens de première instance et d’appel.’
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 8 novembre 2021, M. [W], intimé, demande à la cour de :
‘- confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de GRASSE du 28 juin 2021 en ce qu’il a :
– débouté la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de toutes ses demandes,
– dit et jugé que la clause de non-concurrence est nulle et jugé la nullité de celle-ci ;
– infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de GRASSE du 28 juin 2021 en ce qu’il a condamné la centrale d’ACHAT UBALDI à payer à M. [W] les sommes suivantes :
– 2.500,00 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– 1.200,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Et rejugeant à nouveau :
– condamner la société SAS CENTRALE D’ACHAT UBALDI au paiement de la somme de 5.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamner la société SAS CENTRALE D’ACHAT UBALDI au paiement de la somme de 4.000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens.’
Aux termes de ses dernières écritures transmises par la voie électronique le 16 novembre 2021, la SA BOULANGER, demande à la cour de :
‘- constater que la clause de non-concurrence figurant au contrat de M. [W] ne prévoit pas de contrepartie financière en cas de démission et une contrepartie dérisoire dans les autres cas de rupture du contrat de travail,
– tenir compte dans son appréciation de la demande formulée par la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI, de la man’uvre qu’elle a opérée pour tenter d’expurger le vice d’une clause qu’elle savait nulle, ce qui est démontré par le versement qu’elle a effectué alors que la clause l’excluait en cas de démission,
– dire et juger en conséquence, que la clause de non concurrence liant M. [W] à la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI est nulle,
En conséquence :
– confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Grasse du 28 juin 2021 sur ce point,
– débouter la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de sa demande de rupture du contrat de travail liant M. [W] à la société BOULANGER sous astreinte de 500 € par jour de retard,
– débouter la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de sa demande de condamnation à hauteur de 10.000 € au titre de la clause pénale,
– débouter la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
A titre reconventionnel :
– condamner la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI à la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure civile,
– condamner la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI au paiement des frais et entiers dépens d’appel.’
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 10 février 2012.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la mise en cause de la SA BOULANGER
La SAS Centrale d’achat UBALDI fait valoir que la mise en cause de la SA BOULANGER est parfaitement justifiée dès lors que quand bien même les demandes n’ont pas les mêmes causes juridiques, elles sont intimement liées juridiquement et donc indivisibles, la SA BOULANGER s’étant rendue complice de la violation de la clause de non-concurrence en ne procédant pas à la rupture du contrat de travail le liant à M. [W].
Les demandes dirigées contre le salarié et contre le nouvel employeur n’ont pas les mêmes causes et ne peuvent être qualifiées d’indivisibles. Le contentieux de la complicité d’un employeur dans la violation d’une clause de non-concurrence suppose en effet que soit tranchée la question préalable de la violation de la clause par le salarié.
En cas de condamnation du salarié à cesser ses fonctions auprès du nouvel employeur, celui-ci peut être mis en cause devant la juridiction prud’homale qu’à seule fin de lui voir déclarer la décision commune.
Sur la licéité de la clause de non-concurrence :
La clause de non-concurrence insérée à l’article 5 de l’avenant au contrat de travail du 18 juin 2016, est libellée en ces termes :
« Compte tenu de la nature de ses fonctions et des informations dont il dispose, M. [U] [W] s’interdit, en cas de cessation du présent contrat de travail, pour quelque motif que ce soit, y compris pendant la période d’essai, d’exercer des activités similaires soit pour le compte d’une société concurrente ou d’un client soit en exploitant une entreprise personnelle, de s’intéresser directement ou indirectement à toute fabrication, distribution, ou toute autre activité pouvant concurrencer l’activité et les produits de la Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI.
Cet engagement s’entend pour une durée de deux ans à compter du jour du départ effectif de M. [U] [W] et est limité aux départements du Var, des Alpes Maritimes, ainsi qu’à la principauté de Monaco.
En contrepartie de cette obligation de non concurrence, M. [U] [W] percevra, pendant la durée de l’interdiction, chaque mois une somme égale à 6 % du salaire brut moyen mensuel perçu par lui au cours des 6 derniers mois de présence dans la Société.
Cette indemnité ne sera pas due en cas de démission ou de licenciement pour faute grave.
Le non-respect de la clause par M. [U] [W] libérera la Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI de son engagement à lui verser une contrepartie financière.
La violation de la clause ouvre le droit de la Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI à poursuivre M. [U] [W] en vue de lui demander réparation du préjudice effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle.
En outre, M. [U] [W] sera automatiquement redevable d’une somme fixée forfaitairement à 10.000 Euros.
Cette somme sera versée à la Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI pour chaque infraction constatée.
La Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI se réserve la possibilité de libérer M. [U] [W] du respect de la clause. Dans ce cas, la Société CENTRALE D’ACHAT UBALDI s’engage à prévenir M. [U] [W] par écrit dans les 15 Jours suivant la notification de la rupture de son contrat de travail.
La renonciation de la société CENTRALE D’ACHAT UBALDI au bénéfice de la présente clause la libère de son engagement à verser à M. [U] [W] la contrepartie financière susvisée.’
M. [W] fait valoir que la clause de non-concurrence encourt la nullité dès lors :
qu’elle n’a pas été édictée dans le but de protéger les intérêts légitimes de la société, l’ancien employeur n’apportant aucune justification valable liée à la nature de ses fonctions et des informations dont il pouvait disposer,
qu’elle porte atteinte à la liberté de travail, le salarié devant être en mesure de retrouver un emploi conforme à sa formation et à son expérience professionnelle, la clause lui interdisant d’exercer une activité similaire dans une société concurrente ou chez un client ou encore en exploitant une entreprise personnelle, étant totalement disproportionnée au regard de l’activité exercée par la SAS Centrale d’achat UBALDI qui concerne plusieurs secteurs (électroménager, multimédia, ameublement, bricolage…),
qu’elle est dépourvue de contrepartie financière au cas de démission ou de licenciement pour faute grave, ainsi que lorsque son montant est dérisoire,
que subsidiairement la clause pénale est disproportionnée,
qu’il est fondé à solliciter la condamnation de son ancien employeur au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.
La SAS Centrale d’achat UBALDI fait valoir, en réplique,
que la clause de non-concurrence doit être respectée par le salarié au même titre que les autres obligations de son contrat de travail,
que le nouvel employeur qui en connaissance de cause recrute un salarié tenu par une clause de non-concurrence valable engage sa responsabilité quasi délictuelle sur le fondement de l’article 1240 du code civil,
qu’elle est parfaitement licite, dès lors qu’elle est justifiée par la protection des intérêts légitimes de la société, les « vendeurs UBALDI » disposant d’un profil particulier résultant de leur expertise leur permettant de fidéliser durablement la clientèle, et ne porte nullement atteinte à la liberté de travailler du salarié,
que quand bien même la clause prévoyait que la contrepartie financière n’était pas due en cas de démission et en cas de licenciement pour faute grave, le conseil de prud’hommes ne pouvait pour autant retenir qu’elle était nulle et qu’en versant la contrepartie financière, elle a tenté de régulariser une clause nulle,
que le conseil de prud’hommes ne pouvait non plus considérer que l’indemnité était dérisoire alors qu’elle était égale à 6% du salaire mensuel brut moyen perçu par le salarié au cours des six derniers mois, incluant en conséquence sa rémunération variable, et par conséquent calculé sur une base favorable au salarié,
que la violation de la clause de non-concurrence est caractérisée au vu des sommations signifiées à M. [W] et à la SA BOULANGER qui n’ont émis aucune contestation,
que M. [W] ne peut se prévaloir du fait que la clause prévoyait que la contrepartie n’était pas due en cas de démission pour s’exonérer de ses obligations, ni s’y soustraire en refusant le paiement de la contrepartie financière,
que la SA BOULANGER a commis une faute en poursuivant sa relation contractuelle avec M. [W] alors qu’elle le savait tenu par une clause de non-concurrence,
qu’elle est donc bien fondée à solliciter le paiement de la somme de 10 000 € en application de la clause pénale prévue au contrat de travail, ladite clause n’étant pas manifestement excessive et ayant été acceptée par M. [W],
qu’elle ne sollicite plus la cessation de la relation contractuelle sous astreinte, le délai de deux ans suivant le départ effectif du salarié étant expiré.
La SA BOULANGER observe pour sa part, que la liberté de travailler est une liberté fondamentale, la clause de non-concurrence devant être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise,
que la contrepartie financière est une condition de validité de la clause de non-concurrence,
que son montant ne peut pas être différencié en fonction des circonstances ou de la nature de la rupture du contrat de travail,
que dès lors que l’obligation de non-concurrence est identique, la contrepartie de l’entrave à la liberté d’exercer une activité professionnelle doit être la même, que le salarié ait été licencié, ait démissionné ou qu’il ait signé une rupture conventionnelle,
qu’en l’absence de contrepartie pécuniaire, la clause de non-concurrence est nulle et ne peut produire effet et l’employeur ne saurait obtenir des dommages et intérêts pour violation de cette clause par un de ses anciens salariés même engagé immédiatement après son licenciement par une entreprise concurrente,
que le périmètre des activités interdites mais également du contenu et de la dimension du poste suffisent à rendre nulle ladite clause,
que la contrepartie financière est dérisoire voire inexistante,
qu’elle n’était toutefois pas prévue au cas de démission et en versant une contrepartie, l’entreprise a tenté d’expurger un vice affectant la clause de non-concurrence pour l’actionner en dépit de sa nullité,
qu’en ce qu’elle ne respecte pas l’équilibre entre les activités interdites et la liberté de travail et ne prévoit pas de contrepartie financière effective, ladite clause est nulle.
Une clause de non-concurrence a pour objet d’interdire au salarié d’exercer une activité professionnelle concurrente après la rupture de son contrat de travail.
En application de l’article L. 1221-1 du code du travail et du principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle, une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives.
Toute clause illicite est entachée d’une nullité relative, destinée à assurer la protection du travailleur.
La clause de non-concurrence doit en conséquence satisfaire aux dispositions et principe précités, étant constant qu’est réputée non écrite la clause qui prévoit l’absence de contrepartie financière pour certains types de rupture ou la minoration de cette contrepartie, de sorte que le salarié ne saurait s’en prévaloir pour en obtenir la nullité.
Au cas d’espèce, la clause est limitée tant dans le temps, l’engagement portant sur une durée de deux ans à compter du jour du départ effectif du salarié, que dans l’espace, puisque s’étendant sur les seuls départements des Alpes-Maritimes, du Var et le territoire de Monaco, de sorte que M. [W] ne peut prétendre qu’il a été porté atteinte à sa liberté de travailler, peu important donc que lui soient interdites les activités concurrentes de celle de la SAS Centrale d’achat UBALDI, puisque cette interdiction ne s’étend pas au-delà de la limite géographique définie à la clause.
Elle n’apparaît cependant pas justifiée par la protection des intérêts légitimes de la société, alors que M. [W] a été embauché au plus bas niveau de la grille de classification, qu’il occupait un emploi nécessitant des tâches simples, élémentaires et comparables à celles de la vie courante et ne requérant pas normalement de formation au-delà de la scolarité obligatoire, la SAS Centrale d’achat UBALDI n’explicitant, ni ne caractérisant l’expertise qui aurait été acquise par ce dernier faisant de lui un vendeur confirmé au profil recherché, provoquant la fuite des clients en cas de départ.
M. [W] est par ailleurs fondé à se prévaloir du caractère dérisoire de la contrepartie financière fixée à hauteur de 6 % du salaire brut mensuel perçu au cours des six derniers mois de présence (1285,82 euros), soit la somme de 154,04 euros par mois, l’indemnité totale qui représente près trois mois de salaire, étant manifestement insuffisante en proportion des contraintes qui lui sont imposées.
Le jugement du conseil de prud’hommes sera en conséquence confirmé en ce qu’il a prononcé la nullité de la clause de non-concurrence et qu’il a débouté la SAS Centrale d’achat UBALDI de sa demande de dommages et intérêts pour violation de ladite clause.
Sur la demande reconventionnelle formulée par M. [W] :
M. [W] a sollicité la condamnation de la SAS Centrale d’achat UBALDI au paiement d’une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile.
La SAS Centrale d’achat UBALDI fait grief au conseil de prud’hommes d’avoir partiellement fait droit à cette demande, sans avoir démontré le caractère abusif de la saisine de la juridiction prud’homale aux fins de voir appliquer la clause de non-concurrence.
Il n’est caractérisé à l’encontre de l’ancien employeur aucune faute de nature à faire dégénérer en abus le droit d’agir en justice, alors que ce dernier a pu légitimement croire préserver ses intérêts, l’exclusion de la contrepartie financière en cas de démission ou de faute grave ne rendant pas la clause nulle ab initio, peu important donc que l’employeur ait procédé au versement ce cette contrepartie non prévue, alors qu’en tout état de cause, il n’est pas rapporté la preuve d’aucune manoeuvre qui aurait été exercé par l’ancien employeur, de sorte que M. [W] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et le jugement infirmé.
Sur les dépens et les frais non-répétibles :
La SAS Centrale d’achat UBALDI qui succombe pour l’essentiel de ses prétentions, doit supporter les dépens et il y a lieu de la condamner à payer à chacun des intimés, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 1500 euros.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,
Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a condamné la SAS Centrale d’achat UBALDI à payer à M. [U] [W] une somme de 2500 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Statuant à nouveau du chef infirmé,
Déboute M. [U] [W] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,
Y ajoutant,
Condamne la SAS Centrale d’achat UBALDI à payer à M. [U] [W] et à la SA BOULANGER, chacun, une somme de 1500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Centrale d’achat UBALDI aux dépens,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
LE GREFFIERLE PRESIDENT