CDD pour accroissement d’activité : décision du 23 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/08900
CDD pour accroissement d’activité : décision du 23 juin 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 19/08900

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 23 JUIN 2022

(n° , 1 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/08900 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CAPWU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Avril 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOBIGNY – RG n° 18/00437

APPELANT

Monsieur [U] [X]

[Adresse 7]

[Localité 10]

Représenté par Me Marine DE BREM, avocat au barreau de PARIS, toque : C1015

INTIMES

Me [O] [V] (SELARL [O] M.J.) en qualité de Liquidateur judiciaire de la Société CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 5]

[Localité 9]/FRANCE

Représenté par Me Stéphanie ZAKS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0277

Me [B] [N] (SELAFA MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES ‘MJA’) en qualité de Liquidateur judiciaire de la Société CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représenté par Me Stéphanie ZAKS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0277

Me [Z] [H] (SARL [Z] CARBONI MARTINEZ & ASSOCIES) en qualité d’Administrateur judiciaire de la Société CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Stéphanie ZAKS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0277

Me [I] [E] en qualité d’Administrateur judiciaire de la Société CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représenté par Me Stéphanie ZAKS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0277

PARTIE INTERVENANTE :

Association AGS CGEA IDF EST

[Adresse 2]

[Localité 8]

N’ayant constitué ni avocat ni défenseur syndical

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 Avril 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat, entendu en son rapport, a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de chambre,

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de Chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller.

Greffière, lors des débats : Madame Lucile MOEGLIN

ARRET :

– R »PUT » CONTRADICTOIRE,

– mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Madame Marie-Hélène DELTORT, Présidente de Chambre, et par Madame Lucile MOEGLIN, Greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC »DURE ET PR »TENTIONS DES PARTIES

M. [U] [X] a été engagé à plusieurs reprises et dans le cadre de contrats de mission successifs par la société Connecting Bag Services (ci-après désignée la société CBS), le salarié soutenant avoir été mis à disposition de la société CBS à compter du 23 mai 2002.

Sollicitant notamment la requalification de ces contrats de mission en contrat à durée indéterminée, M. [X] a saisi le conseil de prud’hommes de Bobigny le 19 février 2018 aux fins d’obtenir la condamnation de la société CBS au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 1er avril 2019, le conseil de prud’hommes a:

– requalifié les contrats d’interim en contrat à durée indéterminée à compter du 16 novembre 2010,

– fixé le salaire mensuel de M. [X] à la somme de 1.930,23 euros,

– condamné la société CBS à verser à M. [X] les sommes suivantes :

– 1.930,23 euros à titre d’indemnité de requalification,

– 3.860,46 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 386,04 euros de congés payés afférents,

– 2.347,16 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 6.000 euros à titre d’indemnité sans cause réelle et sérieuse,

– 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rappelé que les créances de nature salariale porteront intérêts de droit à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de jugement, soit le 6 mars 2018, et les créances à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement,

– débouté M. [X] du surplus de ses demandes,

– débouté la société CBS de sa demande reconventionnelle,

– condamné la société CBS aux dépens.

Le 8 août 2019, M. [X] a interjeté appel du jugement.

Par jugement du 12 octobre 2021, le tribunal de commerce de Bobigny a, d’une part, prononcé la conversion de la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire sans maintien de l’activité de la société CBS et, d’autre part, nommé la société Bailly MJ et la société MJA en qualité de liquidateurs.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 22 février 2022, M. [X] demande à la cour d’infirmer le jugement et de :

– requalifier sa relation de travail avec la société CBS en un contrat à durée indéterminée à compter du 7 juin 2004 à titre principal et à compter du 3 janvier 2008 à titre subsidiaire,

– requalifier la rupture de sa relation de travail avec la société CBS en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– débouter les défenderesses de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

A titre principal :

– fixer son salaire de référence à la somme de 2.246,48 euros bruts,

– fixer au passif de la liquidation de la société CBS les créances suivantes :

– 5.616,20 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 4.492,96 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 449,29 euros à titre de congés payés afférents,

A titre subsidiaire :

– fixer au passif de la liquidation de la société CBS les créances suivantes :

– 4.007 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– 20.218,32 euros (9 mois de salaire) à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En tout état de cause :

– fixer au passif de la liquidation de la société CBS les créances suivantes :

– 2.246,48 euros à titre d’indemnité de requalification,

– 2.246,48 euros à titre d’indemnité pour procédure de licenciement irrégulière.

– 29.204 euros (13 mois de salaire) à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 5.493 euros à titre de rappel de prime du 13ème mois sur les années 2013, 2014 et 2015 et 2016, outre 549,30 euros à titre de congés payés afférents,

– 6.968,52 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté au titre des années 2014, 2015 et 2016 et de 696,85 Euros de congés payés afférents,

– 3.500,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens,

– ordonner la remise des documents de fin de contrats sous astreinte journalière de 100 euros par document,

– déclarer l’arrêt à intervenir opposable à l’AGS,

– déclarer opposable à l’AGS toute somme qui serait fixée au passif du redressement judiciaire de la société CBS,

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 22 février 2022, les liquidateurs de la société CBS demandent à la cour de :

A titre liminaire,

Juger recevable et bien fondée l’intervention volontaire des sociétés Bailly MJ et MJA,

Dire qu’une procédure de redressement judiciaire a été ouverte par jugement rendu le 10 décembre 2020 par le tribunal de commerce de Bobigny à l’égard de la société CBS,

Dire que par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 12 octobre 2021, la procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation sans maintien de l’activité de la société CBS,

En conséquence,

Juger irrecevables les demandes de condamnation en paiement formées par M. [X] à l’encontre de la société CBS,

Mettre hors de cause la société [Z] Carboni Martinez & Associés et Maître [E] [I] qui ont achevé leur mission d’administrateur judiciaire,

A titre principal,

Juger que la société CBS a conclu des contrats de mission avec des entreprises de travail temporaire prévoyant la mise à disposition de M. [X] pour des motifs réels et valables,

Juger que M. [X] est mal-fondé en sa demande de requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée le liant à la société CBS,

En conséquence,

Infirmerle jugement entrepris en ce qu’il a requalifié les contrats d’intérim de M. [X] en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 16 novembre 2010,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société CBS à verser à M. [X] la somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

Débouter M. [X] de l’ensemble de ses demandes,

Condamner M. [X] à verser aux sociétés CBS, Bailly MJ et MJAla somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamner M. [X] aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

Si par extraordinaire la cour confirmait le jugement entrepris en ce qu’il a requalifié les contrats de mission conclus avec les entreprises de travail temporaire en contrat à durée indéterminée liant M. [X] et la société CBS,

Juger que le montant des demandes formées au titre de l’indemnité légale de licenciement et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est excessif,

Juger que M. [X] ne démontre pas avoir subi un préjudice,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé le salaire de référence de M. [X] à la somme de 1 930,23 euros,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a réduit le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée à M. [X] à la somme de 6.000 euros,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a réduit le montant de l’indemnité légale de licenciement allouée à M. [X] à la somme de 2 347,16 euros,

En tout état de cause,

Juger que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ne se cumulent pas,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [X] de sa demande formée à titre d’indemnité pour irrégularité de procédure,

Juger que les demandes de M. [X] de rappel de prime du 13 ème mois pour les années 2013 à 2015 et de rappel de prime d’ancienneté pour les années 2014 à 2016 sont mal fondées,

En conséquence,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [X] de ses demandes formées à titre de rappels de prime d’ancienneté et de prime du 13 ème mois,

En tout état de cause,

Déclarer l’arrêt à intervenir opposable à l’AGS,

Déclarer opposable à l’AGS toute somme qui serait fixée au passif du redressement judiciaire de la société CBS.

L’association Unedic AGS CGEA IDF Est (ci-après désignée l’AGS), à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées le 11 février 2021, n’a pas constitué avocat.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L’instruction a été déclarée close le 23 février 2022.

MOTIFS

En application de l’article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs. L’AGS n’ayant pas conclu, elle est réputée s’être appropriée les motifs du jugement entrepris en application de ces dispositions.

Sur la fin de non-recevoir :

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions du 22 février 2022, M. [X] a demandé à la cour la fixation de créances de nature salariale et indemnitaire au passif de la liquidation judiciaire de la société CBS. Par suite, la fin de non-recevoir des liquidateurs tirée de l’irrecevabilité des demandes de M. [X] pour méconnaissance de l’article L. 622-21 du code de commerce ne peut qu’être écartée.

Sur la mise hors de cause des administrateurs judiciaires Maîtres [H] [Z] et [E] [I]

Ayant achevé leurs missions, il y a lieu de prononcer la mise hors de cause de Maîtres [H] [Z] et [E] [I] en qualité d’administrateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services.

Sur la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée:

M. [X] expose qu’il a travaillé au sein de la société CBS en qualité d’agent de service sans interruption entre le 23 mai 2002 et le 30 novembre 2016 dans le cadre de nombreux contrats de mission sucessifs. Il soutient qu’il a ainsi occupé un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise et sollicite ainsi la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée.

A l’appui de ses allégations, il produit :

– un certificat de travail récapitulatif établi le 7 janvier 2007 par l’agence de travail temporaire Onepi mentionnant que M. [X] a bénéficié de contrats de mission successifs entre le 7 juin 2004 et le 7 janvier 2007 comme agent position accueil, agent d’exploitation ou agent de chargement pour une entreprise utilisatrice dont la dénomination sociale n’est pas précisée,

– un relevé de situation individuelle mentionnant qu’il a été principalement employé entre 2001 et 2018 par des agences de travail temporaire et n’indiquant pas d’affectation au cours de cette période au sein de la société CBS,

– de nombreux contrats de mission successifs conclus sur la période du 4 décembre 2010 au 24 décembre 2013 entre M. [X] et l’agence de travail temporaire Randstad, aux termes desquels l’appelant était essentiellement affecté au sein de la société CBS en qualité d’agent position accueil soit pour le remplacement d’un salarié absent soit au titre d’un accroissement temporaire d’activité de la société CBS,

– de nombreux contrats de mission successifs conclus sur la période du 24 décembre 2013 au 1er décembre 2016 entre M. [X] et l’agence de travail temporaire Manpower, aux termes desquels l’appelant était essentiellement affecté au sein de la société CBS en qualité d’agent des services avion soit pour le remplacement d’un salarié absent soit au titre d’un accroissement temporaire d’activité de la société CBS,

– des bulletins de paye émis par des agences de travail temporaire au profit de M. [X] entre mai 2002 et novembre 2016 ne précisant pas la dénomination sociale de l’entreprise au sein de laquelle l’appelant était affecté.

En défense, les liquidateurs de la société CBS soutiennent que M. [X] n’a pas occupé un emploi permanent au sein de l’entreprise, que les motifs des recours aux contrats de mission (accroissement temporaire de l’activité et remplacement d’un salarié absent) étaient réels, que le salarié a occupé des postes différents au sein de la société CBS dans le cadre de ces contrats de mission, que ceux-ci comportent des période d’interruption et que l’appelant a également été mis à disposition de la société Bag Ground Services.

L’article L. 1251-5 du code du travail dispose que le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet, de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.

L’article L. 1251-6 du même code précise qu’il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dénommée ‘mission’ et seulement dans certains cas précis, comme le remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat est suspendu ou l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise, qui s’entend d’une augmentation temporaire de l’activité habituelle de l’entreprise.

Il résulte de l’application de ces textes que la possibilité donnée à l’entreprise utilisatrice de recourir à des contrats de missions successifs avec le même salarié intérimaire pour remplacer un ou des salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu ou pour répondre à un accroissement temporaire d’activité, ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à son activité normale et permanente.

Enfin, en application de l’article L. 1251-40 du même code, lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en violation des dispositions légales, ce salarié peut faire valoir auprès d’elle, les droits afférents à un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.

En premier lieu, comme il a été dit précédemment, les seuls pièces versées aux débats qui mentionnent la société CBS comme entreprise utilisatrice sont les contrats de mission produits.

En second lieu, il ressort de l’examen de ces contrats que l’appelant a été affecté, entre le 4 décembre 2010 et le 1er décembre 2016, au sein de la société CBS, en exécution d’une centaine de contrats de mission, d’une durée de plusieurs jours, pour remplacer des salariés absents et également au motif de l’accroissement temporaire de l’activité.

Il est rappelé qu’en cas de litige sur le motif de recours au travail temporaire, c’est à l’entreprise utilisatrice qu’il incombe de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat.

Or, en l’espèce, si les contrats de mission versés aux débats mentionnent l’identité du salarié remplacé, les liquidateurs de la société CBS ne versent en revanche aux débats aucun élément permettant de justifier l’accroissement d’activité invoqué dans la majorité des contrats de mission produits.

Il s’en déduit que l’employeur ne rapporte pas la preuve des motifs de recours d’une partie des contrats de mission de M. [X] relatifs à l’accroissement d’activité.

Par conséquent, il convient de prononcer la requalification des contrats de mission de M. [X] en contrat à durée indéterminée à compter du 4 décembre 2010, date du premier contrat versé aux débats mentionnant la société CBS comme entreprise utilisatrice et irrégulier puisque stipulant l’accroissement d’activité comme motif de recours à l’appelant.

Le jugement sera donc infirmé sur la date de prise d’effet de la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée.

Sur la rupture :

Lorsque des contrats de mission sont requalifiés en contrat à durée indéterminée, en cas de rupture des relations contractuelles à l’initiative de l’employeur, les règles applicables au licenciement doivent être respectées.

La rupture est intervenue à l’initiative de l’employeur qui a rompu la collaboration, en ne fournissant plus de travail à M. [X] après le 1er décembre 2016, sans qu’une procédure de rupture n’ait été engagée et notamment sans qu’une lettre de licenciement ne lui ait été adressée.

En conséquence, la rupture du contrat de travail à durée indéterminée s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvre droit au salarié aux indemnités de rupture, outre une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La date de rupture du contrat de travail sera fixée au 2 décembre 2016, le salarié ne soutenant pas avoir travaillé ou être resté à la disposition de son employeur postérieurement au 1er décembre 2016, date de fin du dernier contrat de mission.

Sur les rappels de salaire au titre des primes de fin d’année et d’ancienneté :

M. [X] soutient que la convention collective national du personnel au sol des entreprises de transport aérien s’applique à lui et sollicite ainsi un rappel de salaire au titre de la prime de fin d’année et au titre de la prime d’ancienneté, respectivement prévues aux articles 20 et 13 de l’annexe II de cette convention collective.

Plus précisément, il sollicite le versement des sommes suivantes :

– 5.493 euros à titre de rappel de prime de fin d’année pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016, outre la somme de 549,30 euros à titre de congés payés,

– 6.968,52 euros à titre de rappel de prime d’ancienneté pour les années 2014, 2015 et 2016, outre la somme de 696,85 euros de congés payés.

En défense, les liquidateurs de la société CBS se bornent à soutenir qu’eu égard au statut de salarié interimaire de M. [X], la convention collective national du personnel au sol des entreprises de transport aérien ne lui est pas applicable et qu’il n’est soumis, comme le mentionnent ses bulletins de paye, qu’aux accords nationaux des entreprises de travail temporaires relatifs aux salariés temporaires.

Il ressort des développements précédents que la cour a prononcé la requalification des contrats de mission de M. [X] en contrat à durée indéterminée à compter du 4 décembre 2010. Il n’est pas contesté que la convention collective national du personnel au sol des entreprises de transport aérien s’applique aux salariés de la société CBS. Il s’en déduit que M. [X] peut se prévaloir des stipulations des articles 13 et 20 de l’annexe II de cette convention collective pour les années au titre desquelles il sollicite un rappel de prime.

Les liquidateurs de la société CBS ne contestant pas dans leurs écritures les montants sollicités par le salarié, il sera donc fait droit aux demandes de celui-ci et ces sommes seront fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société CBS

Sur les demandes pécuniaires :

A titre liminaire, il convient de rappeler que le salarié, dont les contrats de mission ont été requalifiés en contrat à durée indéterminée, est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour du premier contrat irrégulier et son ancienneté doit, dès lors, se calculer à compter de cette même date, peu important que la relation de travail ne soit pas constituée d’une succession ininterrompue de contrats mais ait connu des périodes non travaillées.

Ainsi, au moment de la rupture du contrat de travail, M. [X] disposait d’une ancienneté d’un peu moins de 6 ans. Compte tenu des fiches de paye des mois de septembre à novembre 2016 versés aux débats, le salaire brut mensuel de l’appelant doit être fixé à la somme de 2.246,48 euros.

Il est constant que la société CBS employait au moins onze salariés au moment de la rupture.

* Sur l’indemnité de requalification :

L’article L. 1251-41 du code du travail dispose que s’il est fait droit à la demande du salarié, il doit lui être accordé à la charge de l’utilisateur, une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

En conséquence, il sera fait droit à la demande indemnitaire de M. [X] qui sollicite la somme de 2.246,48 euros à ce titre. Le jugement sera infirmé sur le quantum en ce qu’il n’a alloué au salarié que la somme de 1.930,23 euros.

* Sur l’indemnité de licenciement :

Si le conseil de prud’hommes a alloué au salarié la somme de 2.347,16 euros à titre d’indemnité de licenciement, M. [X] sollicite l’augmentation du quantum de cette indemnité à hauteur de 5.616,20 euros.

Selon l’article 20 de la convention collective, plus favorable que les dispositions de l’article R. 1234-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige, l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à deux cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté pour des salariés ayant entre 5 et 10 ans d’ancienneté.

Compte tenu de l’ancienneté et du salaire de M. [X], il lui sera alloué une indemnité de licenciement d’un montant de 5.100 euros qui sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société CBS. Le jugement sera infirmé en conséquence sur le quantum.

* Sur l’indemnité compensatrice de préavis :

Il sera alloué à M. [X] la somme de 4.492,96 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice du préavis de deux mois, outre 449,29 euros bruts de congés payés afférents, ces sommes étant fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société CBS. Le jugement sera infirmé en conséquence sur le quantum.

* Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Conformément à l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire. Cette indemnité répare l’ensemble du préjudice résultant de l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et donc tant le préjudice moral que le préjudice économique.

Au vu des éléments d’appréciation dont dispose la cour, et notamment de l’âge du salarié au moment de la rupture, de son ancienneté dans l’entreprise, de sa rémunération mensuelle brute et en l’absence d’éléments produits sur sa situation postérieure, il sera alloué au salarié la somme de 15.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société CBS. Le jugement sera infirmé en conséquence sur le quantum.

* Sur l’indemnité pour non-respect de la procédure :

La rupture du contrat de travail s’analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il ne sera pas fait droit à la demande indemnitaire de M. [X] au titre du non-respect de la procédure. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de cette demande.

Sur la remise des documents de fin de contrat :

M. [X] apparaît bien fondé à solliciter la remise par les liquidateurs de la société CBS de documents de fin de contrat conformes au présent arrêt, sans qu’il y ait lieu de prononcer une astreinte.

Sur les demandes accessoires :

Les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ne seront pas appliquées.

La société Bailly MJ et la société MJA, es qualités de liquidateurs de la société CBS, sont condamnées aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe :

MET HORS DE CAUSE Maître [H] [Z] et Maître [E] [I] en qualité d’administrateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services ;

INFIRME le jugement :

– sur la date de prise d’effet de la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée,

– en ce qu’il a débouté M. [U] [X] de ses demandes de rappel de salaire au titre des primes d’ancienneté et des primes de fin d’année,

– sur le quantum de l’indemnité de requalification, de l’indemnité de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

REJETTE la fin de non-recevoir soulevée par les liquidateurs de la société Connecting Bag Services ;

REQUALIFIE les contrats de mission en contrat à durée indéterminée à compter du 4 décembre 2010 ;

DIT que le licenciement de M. [U] [X] survenu le 2 décembre 2016 est sans cause réelle et sérieuse ;

FIXE les créances de M. [U] [X] au passif de la liquidation judiciaire de la société Connecting Bag Services représentée par la société Bailly MJ et la société MJA en qualité de liquidateurs aux sommes suivantes :

– 2.246,48 euros à titre d’indemnité de requalification,

– 5.493 euros bruts à titre de rappel de prime de 13ème mois pour les années 2013, 2014, 2015 et 2016, outre la somme de 549,30 euros bruts à titre de congés payés,

– 6.968,52 euros bruts à titre de rappel de prime d’ancienneté pour les années 2014, 2015 et 2016, outre la somme de 696,85 euros bruts de congés payés,

– 5.100 euros à titre d’indemnité de licenciement,

– 4.492,96 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 449,29 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 15.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ORDONNE à la société Bailly MJ et à la société MJA, es qualité de liquidateur de la société Connecting Bag Services, de remettre à M. [U] [X] des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt ;

DIT n’y avoir lieu à astreinte ;

RAPPELLE que le jugement d’ouverture de la procédure collective emporte arrêt du cours des intérêts ;

DECLARE le présent arrêt opposable à l’association Unedic AGS CGEA IDF Est dans les limites de sa garantie légale ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Bailly MJ et la société MJA, es qualités de liquidateur de la société Connecting Bag Services aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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