CDD pour accroissement d’activité : décision du 30 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/01019
CDD pour accroissement d’activité : décision du 30 septembre 2022 Cour d’appel de Douai RG n° 20/01019

ARRÊT DU

30 Septembre 2022

N° 1649/22

N° RG 20/01019 – N° Portalis DBVT-V-B7E-S5TF

SHF/SST

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de ROUBAIX

en date du

23 Janvier 2020

(RG 18/00312 -section 2)

GROSSE :

aux avocats

le 30 Septembre 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANTE :

SAS LA MI DO RE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Natacha MAREELS-SIMONET, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. [B] [S]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Caroline ARNOUX, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l’audience publique du 31 Août 2022

Tenue par Soleine HUNTER-FALCK

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Annie LESIEUR

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 30 Septembre 2022,les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Cindy LEPERRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 10 août 2022

La SAS La Mi Do Ré qui a une activité de est soumise à la convention collective de la boulangerie-pâtisserie (entreprises artisanales) ; elle comprend moins de 11 salariés. 7

M. [B] [S], né en 1966, a été engagé le 22.07.2002 en contrat à durée déterminée à temps partiel (10h par semaine) pour accroissement d’activité en qualité de vendeur par la société Viennoiserie du Pile, représentée par Mme [D] [I] et située [Adresse 3].

Le 01.03.2003, un nouveau contrat à durée déterminée a été signé entre Mme [D] [I] et le salarié sur un emploi de préparateur à temps partiel (52h par mois), dans l’établissement situé à [Adresse 6]. Ce contrat est passé à temps plein temporairement à raison de 35 heures par semaine du 01.02 au 31.03.2005.

La société dénommée ‘Le fournil d’antan’ a le 30.01.2009 modifié le temps de travail du salarié qui a été fixé à 22h par semaine, ainsi que sa répartition, ce pour motif économique.

Le 01.06.2011 a été signé un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel avec la société ‘Fournil à l’ancienne’ représentée par M. [Z] [I] avec reprise d’ancienneté au 17.03.2003 en qualité de préparateur pour une durée de 22 heures par semaine.

Un nouveau contrat de travail a été conclu le 02.05.2013 entre la société ‘Fournil à l’ancienne’ située à [Adresse 6] et représentée par M. [Z] [I], et M. [B] [S] a été embauché à temps partiel (20h par semaine). Cette société a cessé son activité le 31.01.2014.

Puis par contrat à durée indéterminée du 01.02.2014, M. [B] [S] a été engagé par la SASU La Mi Do Ré, dirigée par M. [Z] [I], en qualité de préparateur avec reprise d’ancienneté au 17.03.2003 et maintien des avantages acquis dans le cadre d’un transfert, sur le site du [Adresse 2], à temps partiel (20h par semaine), les horaires étant fixés du lundi au vendredi à raison de 4h par jour . Le 16.03.2017, les horaires ont été regroupés du lundi au mercredi.

La moyenne mensuelle des salaires de M. [B] [S] s’établit à 844,25 €.

Un avertissement a été notifié à M. [B] [S] le 28.04.2017 et une fiche d’activité du poste de préparateur vendeur en boulangerie pâtisserie viennoiserie lui a été transmise. Un nouvel avertissement lui a été notifié le 09.05.2017.

M. [B] [S] a été placé en arrêt de travail à compter du 06.06.2017 et a été prolongé jusqu’au 09.12.2017.

Le 13.06.2017, M. [B] [S] a déposé une déclaration de main courant auprès du commissariat de police de [Localité 4] en déclarant que le 06.06.2017 son employeur l’avait agressé physiquement.

Le 26.062017, le Dr [X], ORL rattaché au Pôle santé travail, a diagnostiqué des acouphènes et a préconisé que le salarié se protège des ambiances sonores élevées quand c’était possible.

Les 08 et 18.08. 2017, M. [B] [S] a réclamé à son employeur le versement de compléments de salaire. La situation a été régularisée par la SASU La Mi Do Ré le 20.10.2017 pour la période allant du 06.06 au 28.07.2017.

Le 26.09.2017, le médecin du C.M.P Erasme a constaté notamment un syndrome dépressif avec caractéristique anxieuse en lien avec des difficultés en milieu professionnel.

Lors de la visite de reprise du 02.01.2018, le médecin du travail a conclu à une inaptitude ; cet avis a été confirmé lors de la visite du 15.01.2018, après étude de poste et des conditions de travail et après échange avec l’employeur le 5 janvier précédent, avec une précision : ‘L’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Pas de contre indication pour une formation le préparant pour occuper un emploi adapté.’

Le 25.01.2018, la SASU La Mi Do Ré a fait connaître au salarié l’impossibilité de le reclasser.

M. [B] [S] a été convoqué par lettre du 26.01.2018 à un entretien préalable fixé le 08.02.2018, puis licencié par son employeur le 12 février 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement

Le 11.12.2018 le conseil des prud’hommes de Roubaix a été saisi par M. [B] [S] en contestation de cette décision, indemnisation des préjudices subis et pour diverses demandes liées à l’exécution du contrat de travail.

Un appel a été interjeté régulièrement devant la cour d’appel de Douai le 26.02.2020 par la SAS La Mi Do Ré à l’encontre du jugement rendu le 23.01.2020 par le conseil de prud’hommes de Roubaix section Commerce, notifié le 28.012020, qui a :

CONDAMNE LA SAS LA MI DO RE à verser les sommes suivantes:

-1 688,50 euros (mille six cent quatre vingt huit euros et cinquante centimes) ainsi que 168,85 euros (cent soixante huit euros et quatre vingt cinq centimes) pour les indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents.

-2 612,31 euros (deux mille six cent douze euros et trente et un centimes) pour 1′ indemnité légale de licenciement.

-5 065,50 euros (cinq mille soixante cinq euros et cinquante centimes) pour licenciement abusif.

-78,34 euros (soixante dix huit euros et trente quatre centimes) ainsi que 7,83 euros (sept euros et quatre vingt trois) pour rappel de salaire et de congés payés y afférents.

-772,95 euros (sept cent soixante douze euros et quatre vingt quinze centimes) pour indemnité compensatrice des congés payés.

-3 000,00 euros (trois mille euros) de dommages et intérêts absence de congés payés.

-2 000,00 euros (deux mille euros) pour manquements à l’obligation de formation .

-5 000,00 euros (cinq mille euros) pour manquements à l’obligation de sécurité .

CONDAMNE LA SAS LA MI DO RE à remettre à Monsieur [B] [S] un bulletin de salaire rectificatif conformément au jugement à venir.

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

PRECISE que les condamnations prononcées emportent intérêt au taux légal :

– à compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale,

– à compter de la présente décision pour toute autre somme,

Rappelle qu’en vertu de l’article R.l454-28 du code du travail, la présente décision ordonnant le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées à 1’article R. 1454-14 dudit Code est exécutoire de plein droit dans la limite de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois.

DIT que chacune des parties supportera ses propres dépens

Vu les conclusions transmises par RPVA le 18.07.2022 par la SAS La Mi Do Ré qui demande de :

REFORMER LE JUGEMENT en ce qu’il condamne la société LA MI DO RE à verser à Monsieur [S] :

o La somme de 1.688,50€ à titre d’indemnité compensatrice de congés payés outre 168,85€ de congés payés afférents ;

o La somme de 2.612,31€ à titre d’indemnité légale de licenciement ;

o La somme de 5.065,50€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

o La somme de 78,34€ pour rappel de salaire outre 7,83€ de congés payés afférents ;

o La somme de 772,95€ à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;

o La somme de 3.000€ à titre de dommages et intérêts pour absence de congés payés ;

o La somme de 2.000€ pour manquement à l’obligation de formation ;

o La somme de 5.000€ pour manquement à l’obligation de sécurité ;

REFORMER LE JUGEMENT en ce qu’il ne condamne pas Monsieur [S] à verser à la Société LA MI DO RE la somme de 2.500€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

CONFIRMER LE JUGEMENT en ce qu’il :

o Déboute le salarié de sa demande de rappel de salaire en majoration pour jours fériés ;

o Déboute le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour absence de congés payés ;

DEBOUTER Monsieur [S] de l’ensemble de ses demandes et le condamner aux entiers dépens et à verser à la société LA MI DO RE la somme de 2500 au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile ;

Vu les conclusions transmises par RPVA le 12.10.2020 par M. [B] [S] qui demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu’il a :

Dit et jugé le licenciement pour inaptitude de Monsieur [S] sans cause réelle et sérieuse;

Condamné la société LA MI DO RE au paiement des sommes suivantes :

Indemnité compensatrice de préavis : ……………………………………………………. 1.688,50 euros

Congés payés y afférents :…………………………………………………………………….. 168,85 euros

Indemnité légale de licenciement : ………………………………………………………… 2.612,31 euros

Rappel de salaire : ……………………………………………………………………………….. 78,34 euros Congés payés y afférents :…………………………………………………………………….. 7,83 euros

Manquement à l’obligation de formation :……………………………………………… 2.000,00 euros

Manquement à l’obligation de sécurité : ………………………………………………… 5.000,00 euros

Condamné la société à remettre à Monsieur [S] un bulletin de salaire rectificatif conformément au jugement à venir ;

Le réformer pour le surplus, et condamner la société LA MI DO RE à verser à Monsieur [S] les sommes suivantes :

Licenciement abusif : ……………………………………………………………………………. 14.774,37 euros

Indemnité compensatrice de congés payés : ……………………………………………… 2.889,26 euros

Indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l’absence e de congés payés : 10 000 euros

Y ajoutant :

Condamner la société LA MI DO RE au paiement de 2500,00 euros au titre de l’article 700 du

CPC ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 10.08.2022 prise au visa de l’article 907 du code de procédure civile ;

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l’audience de plaidoirie.

A l’issue de cette audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur l’exécution du contrat de travail :

a) Sur le rappel de salaire :

M. [B] [S] expose ne pas avoir été rémunéré au taux horaire prévu par la convention collective, ce que son employeur a reconnu en lui adressant en cours de procédure un rappel de salaire au titre des années 2016 et 2017 ; il sollicité également une régularisation au titre de l’année 2015 en produisant un décompte à hauteur de 78,34 €.

La SASU La Mi Do Ré oppose la prescription triennale de l’article L3245-1 pour l’année 2015 alors que l’action a été introduite le 11.12.2018.

Dans un courrier officiel, le conseil de la société avait transmis le 21.03.2019 un chèque de 595,85 € correspondant à la prime de fin d’année 2015 et au rappel de salaire sur taux conventionnel pour les années 2016 et 2017 ; elle reconnaît devoir la somme de 102,10 € pour 2016 et de 53,72 € pour 2017.

Il est constant que la demande au titre de l’année 2015 est prescrite ; pour le surplus, M. [B] [S] ne forme plus de demande ; il convient d’infirmer la décision rendue.

b) Sur l’obligation de formation :

M. [B] [S] déclare ne jamais avoir fait l’objet de formation de la part de la SASU La Mi Do Ré, ce qui lui porte préjudice dans son évolution professionnelle notamment compte tenu de son inaptitude.

La SASU La Mi Do Ré estime avoir donné en interne au salarié une formation au fil de l’eau, ce qui était suffisant compte tenu des missions qui étaient les siennes.

Le premier juge s’est fondé à bon droit sur l’article L 6321 du code du travail qui prévoit que l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail et qu’il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations, pour constater que la SASU La Mi Do Ré n’avait pas rempli son obligation de formation.

En effet, M. [B] [S] avait été engagé le 01.03.2003 sur le poste de préparateur ; en dernier lieu il exerçait toujours la même fonction ; la fiche de poste qui lui a été transmise le 28.04.2017 récapitule les tâches basiques et polyvalentes qui lui auraient été confiées alors que dans ses écritures l’employeur se borne à mentionner qu’il s’agissait pour lui : d’ ‘allumer le four, introduire les denrées, attendre que le four fonctionne automatiquement et retirer les produits de ce dernier’ sans qu’aucune formation ne soit nécessaire. Il n’est donc pas démontré qu’une formation suffisamment complète lui ait été délivré pour assumer intégralement les missions qui étaient les siennes, ce qui aurait facilité sa réinsertion après inaptitude.

Le jugement sera confirmé.

c) Sur l’obligation de sécurité :

M. [B] [S] relève l’absence totale de l’employeur pour la santé de ses salariés, qui a causé des dommages irréversibles à son propre état de santé, notamment la baisse de ses capacités auditives.

La SASU La Mi Do Ré oppose qu’à la suite de la visite entreprise par le médecin du travail dans les locaux, ce dernier n’a pas mentionné de mesures nécessaires pour améliorer le niveau sonore dont le faible niveau est attesté par des collègues de travail.

Le premier juge s’est borné à viser les dispositions des articles L4121-1, R4432-1 et 3 du code du travail sans s’appuyer sur des constatations factuelles.

L’employeur prend, en application de l’article L4121-1 du code du travail, les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : des actions de prévention des risques professionnels ; des actions d’information et de formation ; la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés. L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement de circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

En conséquence la responsabilité de l’employeur est engagée sauf à prouver : la faute exclusive de la victime ou l’existence de circonstances relevant de la force majeure, imprévisibles, irrésistibles et extérieures. Il suffit que l’employeur manque à l’une de ses obligations en matière de sécurité pour qu’il engage sa responsabilité civile même s’il n’en est résulté ni accident du travail ni maladie professionnelle. Pour satisfaire à son obligation de résultat l’employeur doit vérifier : les risques présentés par l’environnement de travail, les contraintes et dangers liés aux postes de travail, les effets de l’organisation du travail, la santé des salariés, les relations du travail.

La simple constatation du manquement à l’obligation de sécurité suffit à engager la responsabilité de l’employeur. Mais encore faut-il que la victime apporte la preuve de l’existence de deux éléments: la conscience du danger qu’avait ou aurait dû avoir l’employeur (ou son préposé substitué) auquel il exposait ses salariés; l’absence de mesures de prévention et de protection.

Il ressort des éléments du débats que :

– la médecine du travail a conseillé au salarié de se rendre à une consultation ORL en raison des risques auxquels il était soumis en terme de bruit,

– M. [B] [S] a été examiné par le Dr [X] le 26.06.2017 qui lui a déclaré être gêné par le bruit d’un ventilateur, la présence d’acouphènes étant détectée ; il lui était simplement recommandé de se protéger des ambiances sonores élevées quand c’était possible,

– il a été déclaré inapte à son poste de préparateur lors des deux visites de reprises après étude du poste et des conditions de travail par le médecin du travail,

– ce dernier a rempli une fiche d’entreprise dans laquelle il constate en particulier un ‘bruit ponctuel de la ventilation, des congélateurs, du pétrin…’ ;

– les attestations de collègues (Mme [Y] et M. [C]) déclarent que les équipements étaient silencieux.

Dans ces conditions le manquement à l’obligation de sécurité en ce qui concerne la question auditive n’est pas démontré d’autant que le salarié ne justifie pas de ce que son employeur aurait eu conscience du danger puisqu’il n’est pas démontré qu’il lui ait fait part de ses soucis auditifs et que ses collègues ne s’en plaignent pas ; selon la fiche d’entreprise les locaux paraissaient en bon état de fonctionnement.

Par ailleurs, le salarié se fonde également sur :

– l’absence de congés payés pendant près de 15 ans : il fait état de ses fiches de paie qui ne mentionnent que 6 jours de congés de mars 2003 à mars 2014, de telle sorte qu’en septembre 2005 il cumulait 67 jours de congés payés en N-1 et 10 jours en année N, alors qu’au mois d’octobre il est indiqué qu’il aurait pris 37 jours de congés ce qui ramenait le solde à 12 jours ; de même en juin 2007 il avait alors accumulé 90 jours ce qui correspondait à trois années, alors qu’il en aurait pris 3 en juin 2010, qu’en mai 2011 il en avait cumulé 117 tout en ayant un solde de 30 jours le mois suivant etc…

M. [P] qui a travaillé avec lui depuis 2007 atteste que M. [B] [S] n’a pas pris ses congés qui n’étaient pas payés en indiquant : ‘par contre quand on réclame les congés on se fait harceler’ ; deux salariés indiquent que M. [B] [S] avait pu prendre ses congés payés sans aucune précision.

La SASU La Mi Do Ré ne présente pas d’explications.

A tout le moins, la société ne démontre pas que M. [B] [S] a été en mesure de prendre des congés payés ni que les congés non pris lui auraient été rémunérés.

La SASU La Mi Do Ré sera condamnée au paiement de la somme de 2.889,26 € réclamée par le salarié. La demande relative à des dommages intérêts pour réparer le préjudice résultant de cette absence de congés sera rejetée à défaut de préjudice avéré ou distinct des préjudices déjà réparés.

– deux avertissements injustifiés et portant atteinte à la dignité du salarié : M. [B] [S] fait valoir que son employeur n’apporte aucun élément démontrant qu’il aurait refusé de déplacer et ranger de la marchandise surgelée, motif de l’avertissement du 28.04.2017 alors qu’il venait de se voir notifier un nouvel horaire de travail en passant d’un horaire d’après midi à un horaire du matin de 6 à 13h sans qu’une fiche de poste vienne justifier de tâches supplémentaires alors qu’il s’occupait de la cuisson de pâtisseries, et qu’il n’y a pas eu de perte de marchandises.

La SASU La Mi Do Ré déclare que la fiche de poste lui avait été notifiée pour rappel le 28.04.2017 et qu’il connaissait les tâches à remplir.

Eu égard aux explications données dans ses écritures par l’employeur il n’est pas acquis que M. [B] [S] connaissait les tâches supplémentaires qui lui étaient attribuées ; en outre eu égard à son ancienneté importante sans passé disciplinaire, l’avertissement du 28.04.2017 constituait une sanction disproportionnée.

Un autre avertissement a été notifié au salarié le 09.05.2017, parce qu’il aurait fumé sur le site, alors que son collègue M. [F] atteste de ce que ‘tout les salariés y compris Mr [I] [Z] le gérant de la boulangerie fument à l’intérieur des locaux de travail’.

Là encore la sanction apparaît disproportionnée dès lors que au surplus les règles internes ne sont pas établies.

M. [B] [S] fait encore valoir des insultes de la part du gérant en produisant les attestations de MM. [F], et [P], ce qui est contredit par MM. [C], [R], ainsi qu’une déclaration de main courante qu’il a faite lui même le 13.06.2017 ; ce dernier fait n’est pas prouvé en l’état.

En dernier lieu c’est à bon droit que le salarié s’interroge sur la rédaction des attestations délivrées par les salariés de la SASU La Mi Do Ré qui présentent en effet de grandes similarités graphiques.

M. [B] [S] estime que dans ce contexte, les manquements renouvelés de son employeur sont à l’origine de son inaptitude. Il précise avoir été placé sous anxiolytique par son médecin traitant en septembre 2017 qui a constaté la présence d’un syndrome anxiodépressif avec caractéristique anxieuse en lien avec des difficultés en milieu professionnel, le praticien indiquant aussi des traits de personnalité pathologique avec de l’impulsivité, et un isolement social ancien. M. [B] [S] a été en arrêt de travail de longue durée à partir du 06.06.2017. Le médecin du travail a décidé d’une inaptitude définitive à son poste sans reclassement dans un emploi.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la SASU La Mi Do Ré a manqué à son obligation de sécurité en ne respectant pas les congés payés auxquels avaient droit M. [B] [S], ou encore en lui notifiant deux avertissements rapprochés et injustifiés ; il est par là même justifié de ce que la SASU La Mi Do Ré avait nécessairement conscience du danger auquel il l’exposait ses salariés’sans pour autant prendre les mesures de prévention et de protection adaptées.

La décision prise par le premier juge sera confirmée dans son principe, le préjudice étant ramené à la somme de 2.000 €.

Sur le bien fondé et les conséquences du licenciement :

Lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L. 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour s’opposer au licenciement notifié le 12.02.2018, M. [B] [S] se fonde sur le dispositions de l’article L 4121-1 relatif à l’obligation de sécurité à laquelle est tenu l’employeur.

Il a été démontré que la SASU La Mi Do Ré n’avait pas respecté son obligation, ce qui a été au moins partiellement à l’origine des trouble ses de santé et donc de l’inaptitude du salarié.

Par suite le licenciement de M. [B] [S] doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement en cause confirmé.

En conséquence, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée, de l’âge de M. [B] [S], de son ancienneté dans l’entreprise, de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces communiquées et des explications fournies à la cour, la SAS La Mi Do Ré sera condamnée à verser au salarié à titre de dommages intérêts la somme de 10.000 € ; cette somme à caractère indemnitaire est nette de tous prélèvements sociaux ; ce, outre les indemnités de rupture dont le montant n’a pas été contesté. Le jugement rendu sera infirmé sur le quantum accordé.

Dans les cas de nullité du licenciement prévus aux articles L. 1132-4 (discrimination), L. 1134-4 (action du salarié fondée sur les dispositions du principe de non discrimination), L. 1144-3 (égalité professionnelle hommes/femmes), L. 1152-3 (harcèlement moral), L. 1153-4 (harcèlement sexuel), et lorsque le licenciement illégitime est indemnisé en application L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Il est fait droit à la demande de remise des documents sociaux sans que l’astreinte soit nécessaire.

Il serait inéquitable que M. [B] [S] supporte l’intégralité des frais non compris dans les dépens tandis que la SAS La Mi Do Ré qui succombe doit en être déboutée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement :

Déclare l’appel recevable ;

Confirme le jugement rendu le 23.01.2020 par le conseil de prud’hommes de Roubaix section Commerce sauf en ce qui concerne l’indemnisation de l’absence de congés payés, du licenciement abusif et du manquement à l’obligation de sécurité et en ce qui concerne le rappel de salaire sur l’année 2015 ;

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne en conséquence la SAS La Mi Do Ré à payer à M. [B] [S] les sommes de:

– 10.000 € pour licenciement abusif

– 2 000 € pour manquement à l’obligation de sécurité ;

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l’employeur a eu connaissance de leur demande, et les sommes à caractère indemnitaire, à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées ;

Rejette les autres demandes ;

Ordonne, dans les limites de l’article L 1235-4 du code du travail, le remboursement par la SAS La Mi Do Ré à l’organisme social concerné des indemnités de chômage payées à M. [B] [S] à concurrence de un mois de salaire ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS La Mi Do Ré à payer à M. [B] [S] la somme de 2.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel;

Condamne la SAS La Mi Do Ré aux dépens d’appel.

LE GREFFIER

Cindy LEPERRE

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK

 


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