COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-1
ARRÊT AU FOND
DU 24 MARS 2023
N° 2023/106
Rôle N° RG 19/16600 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BFCQA
[T] [W]
C/
SARL DESTOCK PLOMBIERES
Copie exécutoire délivrée
le :
24 MARS 2023
à :
Me Cédric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARSEILLE en date du 30 Septembre 2019 enregistré au répertoire général sous le n° F18/02331.
APPELANT
Monsieur [T] [W], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Cédric PORIN, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sophie SEMERIVA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
SARL DESTOCK PLOMBIERES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Fabien BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Damien NOTO, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Stéphanie BOUZIGE, Conseiller
Madame Emmanuelle CASINI, Conseiller
Greffier lors des débats : Monsieur Kamel BENKHIRA
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Mars 2023
Signé par Madame Ghislaine POIRINE, Conseiller faisant fonction de Président, et Monsieur Kamel BENKHIRA, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [T] [W] a été engagé le 27 novembre 2017 par la SARL DESTOCK PLOMBIERES dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée à temps complet dont le terme était fixé au 27 décembre 2017, en qualité de caissier polyvalent, au motif d’un ‘accroissement temporaire du volume de l’activité de l’entreprise’. Par avenant du 25 décembre 2017, le terme du contrat de travail a été prorogé au 27 juin 2018.
Le 7 mai 2018, Monsieur [W] a été victime d’un accident du travail et a bénéficié d’arrêts de travail au titre dudit accident du travail jusqu’au 27 août 2018.
Le 9 novembre 2018, Monsieur [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Marseille pour demander la requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, de dire que la rupture s’analyse en un licenciement nul et le paiement d’une indemnité spéciale de requalification, de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement nul et de dommages-intérêts pour exécution lourdement fautive du contrat de travail et violation par l’employeur de son obligation de sécurité, notamment.
Par jugement du 30 septembre 2019, le conseil de prud’hommes a débouté Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions, a débouté la SARL DESTOCK PLOMBIERES de sa demande reconventionnelle et a condamné Monsieur [W] aux dépens.
Monsieur [W] a interjeté appel de ce jugement.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 29 janvier 2021, il demande à la cour de :
– dire Monsieur [W] bien-fondé en son appel.
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Monsieur [W] des demandes suivantes :
– requalifier le contrat de travail à durée déterminée daté du 27 novembre 2017 en contrat de travail à durée indéterminée.
– dire que la rupture du contrat de travail à durée déterminée s’analyse en un licenciement nul car intervenu alors que Monsieur [W] était en suspension de contrat de travail pour accident du travail.
– dire que la société intimée a violé l’obligation de sécurité et de prévention contre les risques professionnels à laquelle elle était tenue en violation de l’article L.4121-1 du code du travail.
– condamner société intimée au paiement des sommes suivantes :
* 1.780,25 € à titre d’indemnité spéciale de requalification relative au contrat de travail à durée déterminée daté du 27 novembre 2017, en application de l’article L.1242-2 du code du travail.
* 1.780,25 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement en application des dispositions des articles L.1232-2 et L.1232-4 du code du travail.
* 10. 682 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul en application des dispositions des articles L.1235-3-1, L.1226-13, L.1226-9 et L.1226-18 du code du travail.
* 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution lourdement fautive du contrat de travail et violation par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat en application des dispositions des articles L.1222-1 et L.4121-1 du code du travail et 1240 du code civil.
Au surplus :
– condamner la SARL DESTOCK PLOMBIERES au paiement de la somme de 3.000 € à titre d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner la société intimée aux dépens.
– la débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.
Suivant conclusions notifiées par voie électronique le 30 mars 2020, la SARL DESTOCK PLOMBIERES demande à la cour de confirmer la décision rendue en première instance et, ainsi, de débouter Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée
Monsieur [W] conteste le motif de recours au contrat de travail à durée déterminée mentionné dans le contrat de travail en ce qu’il considère que l’entreprise n’a pas connu un accroissement temporaire d’activité et qu’il a occupé un emploi permanent au sein de l’entreprise. Il conclut que les pièces produites par l’employeur (attestation de l’expert comptable et les bilans) ne démontrent pas un accroissement temporaire d’activité entre 2017 et 2018 en ce qu’elles ne permettent pas d’apprécier si l’augmentation du chiffre d’affaires était bien temporaire, et le simple fait que l’augmentation du chiffre d’affaires ait fait suite à une baisse de celui-ci (pour l’année 2017) ne démontre pas qu’il s’agit d’un accroissement temporaire d’activité. Au contraire, les pièces comptables produites démontrent plutôt que chiffre d’affaires de l’année 2018 semble constituer un retour à une année normale. Il relève qu’un indice permet de considérer que l’activité ne s’est pas accrue temporairement puisque l’employeur prétend lui avoir proposé un contrat à durée indéterminée à l’issue du contrat de travail à durée déterminée. Il soutient qu’en réalité, il a remplacé une caissière qui avait quitté ses fonctions à la suite d’un braquage et que le poste sur lequel il a été embauché était un poste qui existait avant son embauche alors que, pour justifier d’un accroissement temporaire d’activité, l’entreprise doit démontrer qu’elle a embauché un caissier de plus que le nombre de caissiers précédemment employés. Il remarque que le livre des entrées et des sorties du personnel indique, qu’entre février 2017 et avril 2018, la société a procédé à 28 embauches, dont 25 en contrats de travail à durée déterminée, que le recours aux contrats à durée déterminée était donc la règle au sein de cette entreprise et que six caissiers étaient embauchés en permanence entre les mois d’avril et septembre 2017 alors qu’entre septembre 2017 et décembre 2017 il n’y en avait que cinq.
La SARL DESTOCK PLOMBIERES conclut que, alors que la liasse fiscale 2017 démontre une baisse sur l’année, le chiffre d’affaires a bondi à compter de fin 2017. La liasse fiscale 2018 atteste d’une forte hausse d’activité. Ainsi en 2018, par rapport à 2017, l’employeur a vu son chiffre progresser de près de 700.000 €. Elle soutient que la société a ainsi bien connu un accroissement d’activité, ce qui est attesté par l’expert-comptable puisque, sur deux périodes de sept mois comparables, le chiffre d’affaires a progressé de 235.538 €. Il ne s’agissait pas à l’époque de la conclusion du contrat de travail à durée déterminée, d’un accroissement définitif mais d’un accroissement qu’il convenait de qualifier de temporaire, puisque cette hausse (fin 2017) faisait suite à une baisse importante (2017 sur 2016) et l’argumentation de Monsieur [W] ne correspond pas à la réalité économique que vivent les entreprises, la progression du chiffre d’affaires et le surcroît d’activité se confirmant petit à petit au quotidien jusqu’à ce qu’il soit besoin d’embaucher pour ce motif, dans l’attente de la pérennité de la situation. Ainsi, elle considère que les exigences de Monsieur [W] ‘ qui a au surplus refusé de signer un CDI ‘ sont aberrantes. Elle conclut, par ailleurs, que Monsieur [W] se livre à une étude du registre du personnel qui n’est pas efficiente car ce n’est pas spécifiquement le nombre de caissiers supplémentaires qui est significatif mais le nombre de salariés au total qui démontre l’accroissement temporaire d’activité et Monsieur [W] ne peut reprocher en même temps à l’employer de mettre en place des contrats de travail à durée déterminée pour accroissement temporaire d’activité et de faire signer des contrats de travail à durée indéterminée lorsque justement l’accroissement temporaire se confirme.
*
Selon l’article L.1242-1 du code du travail, « un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise ».
Selon l’article L.1242-2 du code du travail, « sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants:
(…) 2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ».
En cas de contestation, il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif invoqué de surcroît temporaire d’activité, énoncé dans le contrat de travail à durée déterminée.
L’accroissement temporaire d’activité de l’entreprise est caractérisé lorsque l’activité habituelle de l’entreprise connaît ponctuellement des pics d’activité auxquels elle ne peut faire face avec son effectif permanent, de sorte qu’elle a besoin, de façon inhabituelle et limitée dans le temps, d’un renfort.
En l’espèce, le contrat de travail à durée déterminée du 27 novembre 2017 mentionne le motif suivant : ‘accroissement temporaire du volume de l’activité de l’entreprise’.
La SARL DESTOCK PLOMBIERES produit des documents comptables qui indiquent des chiffres d’affaires de :
– 5.407 786 € au 31 décembre 2016
– 4.987.730 € au 31 décembre 2017
– 5.708.963 au 31 décembre 2018.
Elle produit également une attestation de son expert-comptable qui atteste que ‘pour les sept mois suivants, soit du 01.12.2017 au 30.06.18 le chiffre d’affaires s’est élevé à la somme de 3.302.227€ HT soit une progression de 235.538 €’.
Si ces éléments permettent d’établir un accroissement d’activité de l’entreprise entre 2017 et 2018 (le contrat de travail à durée déterminée ayant été conclu le 27 novembre 2017), ils ne permettent pas de caractériser le caractère temporaire de cet accroissement, condition essentielle à la justification du motif de recours mentionné dans le contrat de travail à durée déterminée de Monsieur [W]. Au contraire, il apparaît que l’accroissement de l’activité de l’entreprise s’est révélé pérenne et est lié à l’activité normale de l’entreprise qui, en 2018, a retrouvé un niveau d’activité équivalent à celui de 2016.
Dans ces conditions, l’employeur ne rapportant pas la preuve d’un accroissement temporaire d’activité, le contrat de travail à durée déterminée doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée.
Il convient d’accorder à Monsieur [W] la somme de 1.780,25 € au titre de l’indemnité de requalification, somme contestée en son principe par l’employeur mais non en son montant et qui correspond aux droits du salarié.
La requalification conduisant à appliquer les règles relatives à la rupture du contrat à durée indéterminée, la rupture intervenue en raison de la seule survenance du terme, sans invocation d’autres motifs, sans l’engagement d’une procédure de licenciement et sans la notification d’une lettre motivée de licenciement, est nécessairement nulle, en application des articles L.1226-13 et L.1226-18 du code du travail, Monsieur [W] ayant été, au moment de la rupture du contrat de travail, en arrêt de travail pour cause d’accident du travail, selon les certificats médicaux d’accident du travail produits au débat.
Contrairement à ce que prétend la SARL DESTOCK PLOMBIERES, le régime protecteur des salariés victimes d’accidents du travail a vocation à s’appliquer à la présente espèce alors même que l’employeur n’aurait pas commis ‘un fait volontaire’ de licenciement.
En application des dispositions de l’article L.1235-3-1 du code du travail, issues de l’ordonnance du 22 septembre 2017, et compte tenu de l’âge de Monsieur [W] au moment de la rupture du contrat de travail (vingt ans), de son ancienneté (sept mois ), de sa qualification, de sa rémunération (1.780,25 €), des circonstances de la rupture et de l’absence de justification de sa situation professionnelle postérieurement à la rupture du contrat de travail, il convient de lui allouer une indemnité pour licenciement nul d’un montant de 10.682 €.
Par contre, Monsieur [W] ne démontre pas l’existence et l’étendue du préjudice qu’il prétend avoir subi du fait de l’irrégularité de la procédure de licenciement. La demande d’indemnité formulée à ce titre sera donc rejetée.
Sur la demande dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et violation par l’employeur de son obligation de sécurité
Monsieur [W] fait valoir qu’il a été victime d’une agression sur son lieu de travail, le 7 mai 2018, de la part d’un collègue de travail, Monsieur [R], qui est le fils du gérant de la société L’employeur a tenté de minimiser le grave accident dont il a été victime et n’a pas sanctionné Monsieur [R]. Monsieur [W] invoque ses séquelles physiques et psychologiques durables, attestées par les pièces produites, et soutient que l’employeur a violé son obligation de sécurité dès lors qu’il a subi des violences physiques exercées sur le lieu de travail par l’un de ses collègues. Les éléments produits par l’employeur, pour contester les faits tels qu’ils se sont produits, sont des attestations émanant de la famille de Monsieur [R] ou de prétendues clientes, établies pour les besoins de la cause et dont les
versions se contredisent, ainsi qu’une main courante qui a été déposée le 16 novembre 2018 par Monsieur [R], gérant de la société, soit trois jours après le dépôt de sa requête devant le conseil de prud’hommes.
La SARL DESTOCK PLOMBIERES conclut que les faits reprochés par Monsieur [W] sont dirigés à l’encontre de Monsieur [K] [R], qui n’est pas le gérant de la société, quand bien même il serait le fils du gérant ; qu’il est donc juridiquement tiers à la SARL DESTOCK PLOMBIERES, laquelle n’est pas responsable des agissements inopinés et soudain perpétrés le cas échéant par ses salariés ; que les faits décriés sont faux et Monsieur [W] ne justifie pas des suites qui ont été conférées à sa plainte ; que le gérant de la SARL DESTOCK PLOMBIERES a déposé une main courante auprès des services de police le 16 novembre 2018 et la SARL DESTOCK PLOMBIERES produit des attestations qui contredisent la version de Monsieur [W] ; que Monsieur [W] n’apporte aucun élément pouvant mettre en cause une responsabilité de l’employeur sur la non- prise en compte d’un risque possible de l’apparition de conflit entre les deux caissiers concernés par l’affaire, alors qu’ils avaient l’habitude de travailler ensemble depuis plus de six mois et que rien ne laissait présager l’événement qui s’est produit le 7 mai 2018 ; que Monsieur [W] se trompe de juridiction, car s’il estime avoir été réellement victime de coups et blessures, il lui appartient de poursuivre l’auteur des faits devant d’autres juridictions, ce qu’il se garde bien de faire, préférant tenter d’en imputer la responsabilité à son employeur, lequel n’est pas impliqué dans les agissements qu’il évoque ; que Monsieur [W] ne verse aux débats qu’un certificat du 7 mai 2018 prescrivant du paracétamol et les attestations fournies par le salarié reflètent que « l’accident » survenu le 7 mai 2018 se limitait à une simple joute verbale et à des gestes peu virulents, comme l’ont rapporté plusieurs témoins présents sur les lieux à ce moment-là.
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En droit, aux termes des articles L.4121-1 et suivants du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail.
En l’espèce, Monsieur [W] produit la plainte qu’il a déposée devant les services de police le 7 mai 2018 dans laquelle il indique : « Ce jour vers 17h30 je travaillais au magasin DESTOCKAGE Plombières [‘], je me trouvais plus précisément à la caisse.
Un autre employé se nommant [R] [K] sans plus de précisions, est venu me voir et m’a insulté car j’ai eu une altercation verbale avec son cousin qui travaille également dans le magasin, quelques minutes plus tôt.
Il s’est mis à m’insulter et ensuite il m’a demandé de sortir du magasin pour qu’on se batte en dehors du magasin.
J’ai refusé alors de sortir et je l’ai bousculé pour qu’il me lâche le tee-shirt car il me tirait vers la sortie.
Quand j’ai refusé il m’a alors mis un coup de tête au niveau du nez.
Son cousin [P] avec qui j’ai eu une altercation verbale est venu nous séparer.
Je me suis alors réfugié derrière un frigo, il est alors venu vers moi en courant et en m’insultant et m’a de nouveau mis un coup de tête au niveau de la gorge sur le côté droit.
A ce moment-là je suis parti en courant et je suis sorti du magasin en direction du parking.
Il m’a alors suivi et m’a rattrapé sur le parking, Monsieur [R] [K] m’a alors aspergé de gaz lacrymogène.
Je ne voyais plus rien, mais après m’avoir aspergé il est parti en courant dans le magasin.
Je me suis alors réfugié au bar qui se situe juste en face et j’ai fait appel aux services de Police.
Le patron du magasin Monsieur [R] m’a rejoint au bar, il m’a demandé de ne pas appeler la Police et m’a enlevé le téléphone des mains en me disant qu’on allait arranger ça au magasin. [‘]
Je précise que l’auteur des coups Monsieur [R] [K] est le fils du patron du magasin.
Les services de police se sont ainsi déplacés mais Monsieur [R] [K] avait quitté les lieux avant leur arrivée.
Les pompiers qui étaient également sur place m’ont transporté à l’Hôpital [4].
Je me suis fait remettre un certificat médical avec une durée d’incapacité totale de travail de 1 jour. [‘] Je précise qu’à aucun moment j’ai porté des coups à l’encontre de Monsieur [R] et que je n’ai fait qu’esquiver et le fuir autant que possible.
J’ajoute également que des caméras de vidéo surveillance sont présentes dans le magasin et que toute l’agression a été filmée ».
Monsieur [W] produit également le certificat médical initial d’accident du travail du 7 mai 2018, les avis de prolongation et le certificat médical initial du 7 mai 2018, établi à 18h30 par un médecin du services des urgences de l’hôpital [4] de [Localité 3], qui indique que Monsieur [W] ‘présente : discret oedème du nez pouvant correspondre à une fracture des os propres du nez, à confronter avec une radiographie. Cervicalgie, pas de limitation à la mobilisation. La durée de l’incapacité totale de travail au sens pénal sera de 1 jour’.
La SARL DESTOCK PLOMBIERES produit une main courante du 16 novembre 2018, donc déposée par son gérant bien après les faits du 7 mai 2018 et qui est sans rapport direct avec les faits, une attestation de Madame [N], qui est la compagne de l’auteur désigné des faits, Monsieur [R] [K], et belle-fille du gérant de la SARL DESTOCK PLOMBIERES, une attestation de Monsieur [P] [J], cousin de Monsieur [R] [K] et également concerné par l’altercation et les attestations de deux clientes qui ne désignent pas nommément Monsieur [W] mais parlent des ‘caissiers’ et ‘du responsable’. Ces attestations, qui par ailleurs ne portent pas la mention écrite de la main de leur auteur de leur connaissance des conséquences pénales d’une fausse déclaration, ne présentent aucune garantie de sincérité ni aucune garantie probatoire.
Les faits ont d’abord consisté en une première altercation, entre Monsieur [P] [J] et Monsieur [W], de sorte que l’employeur ne peut prétendre que rien ne laisser présager d’une nouvelle altercation. La SARL DESTOCK PLOMBIERES ne justifie pas des mesures qu’elle a prises à ce moment précis pour éviter une nouvelle altercation et protéger la sécurité de ses salarié dès lors qu’une autre altercation a bien eu lieu postérieurement du fait de l’intervention de Monsieur [K] [R]. De plus, dès lors que le gérant de la SARL DESTOCK PLOMBIERES a demandé à Monsieur [W] de ne pas appeler la Police et lui a enlevé le téléphone des mains, il doit être considéré que la SARL DESTOCK PLOMBIERES a bien manqué à son obligation de sécurité.
Compte tenu du préjudice corporel et moral subi par Monsieur [W], tel qu’il ressort des certificats médicaux produits, il convient de lui accorder la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et sur les dépens
Les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront infirmées.
Il est équitable de condamner la SARL DESTOCK PLOMBIERES à payer à Monsieur [W] la somme de 2.500 € au titre des frais non compris dans les dépens qu’il a engagés en première instance et en cause d’appel.
Les dépens de première instance et d’appel seront à la charge de la SARL DESTOCK PLOMBIERES, partie succombante par application de l’article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile et en matière prud’homale,
Infirme le jugement déféré sauf en sa disposition ayant rejeté la demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement,
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,
Requalifie le contrat de travail à durée déterminée du 27 novembre 2017 en contrat de travail à durée indéterminée,
Condamne la SARL DESTOCK PLOMBIERES à payer à Monsieur [T] [W] les sommes suivantes :
– 1.780,25 € au titre de l’indemnité de requalification,
– 10.682 € au titre de l’indemnité pour licenciement nul,
– 3.000 € au titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et manquement à l’obligation de sécurité,
– 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL DESTOCK PLOMBIERES aux dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Ghislaine POIRINE faisant fonction