COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 05 MAI 2023
N° 2023/162
Rôle N° RG 19/06732 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEFEB
[J] [X]
C/
SASU CEGELEC INDUSTRIE SUD EST
Copie exécutoire délivrée
le : 05 mai 2023
à :
Me Baya BOUSTELITANE, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Catherine BERTHOLET, avocat au barreau de MARSEILLE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AIX EN PROVENCE en date du 19 Février 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00839.
APPELANT
Monsieur [J] [X], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Baya BOUSTELITANE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Sabrina KHEMAICIA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEE
SASU CEGELEC INDUSTRIE SUD EST, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Catherine BERTHOLET, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 08 Mars 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Véronique SOULIER, Présidente suppléante a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 05 Mai 2023,
Signé par Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante et Mme Cyrielle GOUNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
La société de travail temporaire Sovitrat a mis à disposition de la société Cegelec Industrie Sud-Est dans le cadre de contrats de mission d’intérim Monsieur [J] [X] en qualité de peintre en bâtiment entre le 19 mai 2014 et le 23 novembre 2015 moyennant une rémunération de 9,80 euros de l’heure.
Durant la mission du 23 au 27 novembre 2015, Monsieur [X] a chuté d’un toit le 25 novembre 2015 et a été placé en arrêt de travail.
Sollicitant la requalification de ses contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée dont la rupture produisait les effets d’un licenciement nul et demandant la condamnation de la société Cegelec Industrie Sud-Est au paiement de diverses sommes à titre salarial et indemnitaire, Monsieur [X] a saisi le 2 novembre 2017 le conseil de prud’hommes d’Aix-en-Provence lequel par jugement du 19 février 2019 a :
– déclaré prescrit l’ensemble des demandes se rapportant à la période antérieure au 2 novembre 2015,
– rejeté la demande en requalification des contrats d’intérim en contrat de travail à durée indéterminée,
– débouté Monsieur [X] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société Cegelec Industrie Sud-Est de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Monsieur [X] aux entiers dépens.
Monsieur [X] a relevé appel de ce jugement le 19 avril 2019 par déclaration adressée au greffe par voie électronique.
Aux termes de ses conclusions d’appelant notifiées par voie électronique le 17 juillet 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, Monsieur [X] a demandé à la cour de:
Infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a :
– déclaré prescrit l’ensemble des demandes se rapportant à la période antérieure au 2 novembre 2015,
– rejeté la demande en requalification des contrats d’intérim en contrat de travail à durée indéterminée,
– débouté Monsieur [X] de l’ensemble de ses demandes,
Et statuant à nouveau:
A titre principal:
– fixer le salaire moyen de Monsieur [X] à la somme de 1.486,36 €,
– requalifier les contrats d’intérim en contrat à durée indéterminée,
– dire et juger que Monsieur [X] est salarié de la société Cegelec,
– condamner la société Cegelec Industries à verser à Monsieur [X] la somme de 18.579,50€ correspondant à l’indemnisation due au titre des rappels de salaire pour les périodes intercalaires outre 1.857,95 € de congés payés afférents,
– condamner la société Cegelec Industries au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l’indemnité de requalification,
– condamner la société Cegelec Industries à verser à Monsieur [X] un complément de salaire dus au titre de la maladie pour la période du 06 juin 2018 au 28 février 2019, à parfaire
– condamner la société Cegelec Industries à verser à Monsieur [X] les salaires depuis la date de mise en invalidité du 1er mars 2019 soit :
– de mars 2019 à juillet 2019 soit 5 mois : 7.431,80 € (1.486,36 x 5)
– congés payés sur cette période : 743,18 €
– pour les éventuels salaires depuis août 2019 : mémoire
– ordonner à la société Cegelec Industries de communiquer au salarié sous astreinte de 100 € par jour de retard la notice d’information relative au régimé de prévoyance mis en place au sein de la société afin que Monsieur [X] puisse en bénéficier,
A titre subsidiaire sur la fin de la relation de travail:
Requalifier les contrats d’intérim en contrat de travail à durée indéterminée.
Constater que le contrat de travail a été rompu alors que le salarié était en accident de travail.
En conséquence,
Dire et juger que la rupture s’analyse en un licenciement nul,
Condamner la société Cegelec Industries au paiement des sommes suivantes:
– 5.000 € au titre de l’indemnité de requalification
– 18.579 € correspondant à l’indemnisation due au titre des rappels de salaire pour les périodes dites intercalaires outre les CP outre 1.857,95 € de congés payés afférents,
– 2.229,54 € au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 1.486,36 € au titre de l’indemnité de préavis outre les congés payés sur préavis,
– 17.000 € au titre de l’indemnité pour licenciement nul
– ordonner à la société Cegelec Industries de communiquer au salarié sous astreinte de 100 € par jour de retard la notice d’information relative au régime de prévoyance mis en place au sein de la société afin que Monsieur [X] puisse en bénéficier.
Monsieur [X] soutient :
– que l’irrégularité des contrats de mission ayant persisté au-delà du 2 novembre 2015, la prescription devait s’apprécier au-delà du 2 novembre 2017, le conseil de prud’hommes n’ayant pas statué sur la demande de requalification précisant que même si le fait d’avoir travaillé sans contrat doit être allégué contre l’entreprise de travail temporaire, l’entreprise utilisatrice ne prouve pas le motif des recours aux contrats d’intérim,
– que la requalification doit être ordonnée en raison de l’absence de preuve rapportée par la société Cegelec Indistrie Sud-Est de la réalité des motifs du recours aux contrats d’intérim (accroissement temporaire d’activité et/ou remplacement d’un salarié) et du recours systématique à un emploi précaire, le salarié ayant occupé pendant plus d’un an un emploi sur un poste relevant de l’activité normale et permanente de l’entreprise,
– que s’étant tenu à la disposition de son emplyeur durant les périodes dites intercalaires, il est bien fondé à réclamer un rappel de salaire ainsi que les congés payés afférents,
– qu’étant demeuré salarié de la société Cegelec Industrie, il a droit à une indemnité de requalification, à un rappel de salaire au titre d’un complément de salaire dû au titre de la maladie pour la période du 06/06/2018 au 28/02/2019, ainsi que des salaires dûs à compter du 1er mars 2019, date de sa mise en invalidité,
– qu’à titre subsidiaire, la rupture du contrat de travail étant intervenue durant une période de suspension du contrat de travail, la rupture s’analyse en un licenciement nul et lui ouvre droit aux indemnités de licenciement, de préavis, et au titre d’un licenciement nul.
Par conclusions d’intimée notifiées par voie électronique le 23 juillet 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, la société Cegelec Industries Sud Est a demandé à la cour de :
A titre principal :
– déclarer irrecevable car prescrite l’action en requalification des contrats de mission conclus entre le 19 mai 2014 et le 2 novembre 2015
– constater que la société Sovitrat, entreprise de travail temporaire n’a pas été appelée en la cause,
– constater que des contrats de mise à disposition couvrant la période postérieure au 02 novembre 2015 ont été conclus entre la société Sovitrat et la société Cegelec Industrie Sud Est,
– dire et juger que pour la période postérieure au 2 novembre 2015 Monsieur [X] ne peut solliciter la requalification de son contrat de mission en un contrat de travail à durée indéterminée auprès de la société Cegelec Industrie Sud Est,
En conséquence:
– débouter Monsieur [X] de l’ensemble de ses demandes,
– condamner Monsieur [X] à verser à la société Cegelec Industrie Sud Est la somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire:
– constater que les contrats de mission conclus avec Monsieur [X] portent mention d’un motif de recours prévu par l’article L. 1251-6 du code du travail,
– dire et juger que la société Cegelec Industrie Sud Est n’a pas recouru aux services de Monsieur [X] pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise,
– dire qu’il n’y a pas lieu à ordonner la requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée,
En conséquence:
– débouter Monsieur [X] de l’ensemble de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire:
– dire et juger que la requalification d’un contrat de mission en un contrat à durée indéterminée est sanctionnée par le seul versement de l’indemnité spécifique de requalification prévue par l’article L.1251-41 alinéa 2 du code du travail,
– constater que la demande formulée par Monsieur [X] au titre de l’indemnité spécifique de requalification représente l’équivalent de plus de 3 mois de salaires bruts,
En conséquence:
– dire et juger qu’ordonner la poursuite des relations contractuelles avec la société Cegelec Industrie Sud Est excède ses pouvoirs,
– limiter le montant de la condamnation prononcée au titre de l’indemnité spécifique de requalification à un mois de salaire,
– débouter Monsieur [X] pour le surplus.
La société Cegelec Industrie Sud Est fait valoir en substance:
– que la demande de requalification des contrats conclus entre le 19 mai 2014 et le 2 novembre 2015 est prescrite, le point de départ de la prescription pour absence de mention obligatoire du contrat comme de motifs du recours à l’intérim étant la date de la conclusion du contrat ce qui entraîne également le rejet de la demande de rappel de salaire au titre des périodes intercalaires,
– que Monsieur [X] ne peut solliciter la requalification des contrats de mission conclus auprès de la société utilisatrice après le 2 novembre 2015 et qui ne lui ont pas été remis , l’action devant être dirigée à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire qui n’est pas dans la cause alors qu’elle démontre que des contrats de mission ont bien été établis pour la période allant du 13/10 au 27/11/2015,
– que les contrats de mission conclus sont parfaitement licites, les motifs de recours étant mentionnés et établis par la production des justificatifs des salariés absents et des pics d’activité correspondant à un accroissement temporaire de d’activité,
– qu’il ne s’agit pas de contrats de mission successifs, Monsieur [X] n’ayant travaillé que six mois sur une période d’un an et demi et ne démontrant pas qu’il s’est tenu à la disposition de l’entreprise,
– qu’un travailleur intérimaire, n’étant pas un salarié de la société utilisatrice, la requalification des contrats de missions en contrat à durée indéterminée n’ouvre droit qu’à une indemnité de requalification mais non à la poursuite des relations contractuelles,
– que dans l’hypothèse d’un licenciement nul, la cour de cassation ne s’est pas prononcée sur le cumul de dommages-intérêts avec l’indemnité de précarité et de l’indemnité spécifique de requalification.
Suivant ordonnance du 2 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a :
– rejeté la demande de la société Cegelec Industrie Sud Est de voir constater la péremption de l’instance,
– rejeté la demande de Monsieur [X] de fixation de la date d’audience au fond,
– dit que chacune des parties supportera la charge des dépens de l’incident par elle exposés,
– rejeté la demande de Monsieur [X] de condamnation de la société Cegelec Industrice au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 06 février 2023, l’audience de plaidoiries étant fixée au 8 mars 2023.
SUR CE :
Sur l’action en requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée:
Sur la prescription :
Par application de l’article L.1471-1 § 1 du code du travail, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
Lorsqu’une action en requalification d’un contrat de mission est fondée sur l’absence d’une mention obligatoire le délai de prescription court à compter de la conclusion du contrat .
En revanche, lorsqu’elle est fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat, elle a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat.
Or, en l’espèce, Monsieur [X] fonde sa demande de requalification des contrats de mission dirigée à l’encontre de la société Cegelec Industrie Sud Est, société utilisatrice non sur une irrégularité de forme de ceux-ci ou une absence de remise des contrats de mission couvrant la période du 13/10 au 27/11/2015, laquelle aurait dû être formée à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire, mais sur les motifs de recours des contrats ayant eu, selon lui pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanent de l’entreprise et dont il soutient que l’intimée ne justifie pas de la réalité.
Monsieur [X] ayant saisi le conseil de prud’hommes le 2 novembre 2015 d’une demande visant à obtenir la requalification d’une succession de contrats de mission conclus avec la société Cegelec Industrie Sud-Est entre le 19 mai 2014 et le 23 novembre 2015 et la prescription biennale n’ayant commencé à courir qu’à compter du 27 novembre 2015, terme du dernier contrat de mission, son action en requalification n’est pas prescrite.
Les dispositions du jugement entrepris ayant déclaré prescrites l’ensemble des demandes se rapportant à la période antérieure au 2 novembre 2015 sont en conséquence infirmées.
Sur l’action en requalification :
L’article L.1251-5 du code du travail dispose que le contrat de mission quel que soit son motif ne peut avoir pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.
L’article L. 1251-40 du même code dispose que lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L.1251-5 à L.1251-7, L.1251-10 à L.1251-12, L.1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.
L’article L.1251-6 du code du travail prévoit qu’il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dénommée ‘mission’ et seulement dans les cas suivants:
‘1° Remplacement d’un salarié en cas :
a) d’absence
(…)
2° Accroissement temporaire de l’activité dans l’entreprise
…..’
En cas de litige sur le motif du recours au travail temporaire, il incombe à l’entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat.
En l’espèce Monsieur [X] soutient que les 13 contrats d’intérim et les 5 contrats de mise à disposition ci-dessous énumérés ont été versés aux débats et qu’il appartient à l’employeur de prouver pour chacun d’eux la réalité de l’accroissement d’activité ou de l’absence du salarié remplacé.
La société Cegelec Industrie Sud Est lui oppose que du fait qu’il indique ne pas avoir été rendu destinataire des contrats de mission conclus après le 2 novembre 2015, il ne peut solliciter la requalification auprès de la société utilisatrice de ces contrats de mission mais auprès de l’entreprise de travail temporaire qui n’est pas dans la cause.
Cependant, contrairement aux affirmations de l’intimée, le salarié fonde son action en requalification dirigée à l’encontre de l’entreprise utilisatrice uniquement sur l’absence de preuve des motifs du recours.
Il résulte de l’examen des pièces contractuelles produites par Monsieur [X] que les contrats de mission ont été les suivants:
– contrat de mission du 19/05/2014 pour la période du 19/05/2014 au 23/05/2014 pour un accroissement temporaire d’activité lié aux travaux de peinture et d’aménagement de la marque Actemium,
– contrat de mission du 22/05/2014 pour la période du 24/05/2014 au 06/06/2014 pour un accroissement temporaire d’activité lié aux travaux de peinture et d’aménagement de la marque Actemium,
– contrat de mission du 10/06/2014 pour la période du 10/06/2014 au 13/06/2014 pour un accroissement temporaire d’activité lié aux travaux de peinture et d’aménagement de la marque Actemium,
– contrat de mission du 15/09/2014 pour la période du 15/09/2014 au 19/09/2014 pour le remplacement par glissement de tâches de Monsieur [N] en congés payés,- contrat de mission du 29/09/2014 pour la période du 29/09/2014 au 03/10/2014 pour un accroissement temporaire d’activité sur l’atelier pour rénovation de peinture,
– contrat de mission du 2/10/2014 pour la période du 04/10/2014 au 10/10/2014 pour un accroissement temporaire d’activité sur l’atelier pour rénovation de peinture,
– contrat de mission du 28/01/2015 pour la période du 28/01/2015 au 06/02/2015 pour un accroissement temporaire d’activité dû au réaménagement des locaux,
– contrat de mission du 30/03/2015 pour la période du 30/03/2015 au 10/04/2015 pour un accroissement temporaire d’activité dû au réaménagement des locaux,
– contrat de mission du 09/04/2015 pour la période du 11/04/2015 au 15/04/2015 pour un accroissement temporaire d’activité dû au réaménagement des locaux,
– contrat de mission du 07/09/2015 pour la période du 07/09/2015 au 11/09/2015 pour un accroissement temporaire d’activité dû aux travaux de nettoyage de l’atelier,
– contrat de mission du 10/09/2015 pour la période du 12/09/2015 au 25/09/2015 pour un accroissement temporaire d’activité dû aux travaux de nettoyage de l’atelier,
– contrat de mission du 28/09/2015 pour la période du 28/09/2015 au 09/10/2015 pour un accroissement temporaire d’activité travaux urgents de finition à réaliser dans les délais.
Il est constant que le salarié a également travaillé au profit de la société Cegelec Industrice Sud Est dans le cadre des contrats de mission suivants:
– contrat de mission du 08/10/2015 pour la période du 10/10/2015 au 16/10/2015 pour un accroissement temporaire d’activité travaux urgents de finition à réaliser dans les délais.
– contrat de mission du 19/10/2015 pour la période du 19/10/2015 au 23/10/2015 pour un accroissement temporaire d’activité travaux de nettoyage et rangement de chantier à réaliser dans les délais,
– contrat de mission du 22/10/2015 pour la période du 24/10/2015 au 30/10/2015 pour un accroissement temporaire d’activité travaux de nettoyage et rangement de chantier à réaliser dans les délais,
– contrat de mission du 02/11/2015 pour la période du 02/11/2015 au 13/11/2015 pour un accroissement temporaire d’activité travaux supplémentaires dans l’atelier due à une nouvelle commande client,
– contrat de mission du 23/11/2015 pour la période du 23/11/2015 au 27/11/2015 pour remplacement en cas d’absence d’un salarié par glissement de tâches de Monsieur [F] en maladie.
Il n’est pas non plus contesté que chaque contrat mentionne l’un des motifs légaux de recours à un contrat de mission.
Afin de justifier de la réalité du motif de recours, l’intimée verse uniquement aux débats les deux pièces suivantes:
– un bon d’absence établi au profit de [R] [N] du 15/09/2014 à 7h30 au 22/09/2014 à 7h30 pour congés payés (pièce n°5),
– un tableau relatif à la situation commerciale d’Actemium [Localité 3] Motor § Drive (nom commercial de l’intimée) sur la période de décembre 2014 à décembre 2015 (pièce n°6).
Aucun de ces éléments ne se rapportant à la justification du motif de recours des contrats de mission des 19/05/2014, 22/05/2014, 10/06/2014 conclus pour accroissement temporaire d’activités lié aux travaux de peinture et d’aménagement de la marque Actemium, il convient de constater, sans qu’il y ait lieu de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la société Cegelec Industrice Sud Est ne rapporte pas la preuve de la réalité du motif énoncé dans ces contrats et ce faisant ne démontre pas que Monsieur [X] n’a pas pourvu à compter du 19/05/2014 un emploi normal et permanent de l’entreprise.
En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris ayant débouté Monsieur [X] de sa demande de requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée et d’y faire droit, celle-ci produisant ses effets à compter du 19/05/2014, date du premier contrat irrégulier.
Sur les conséquences financières :
Par application de l’article L.1251-41 du code du travail, lorsqu’il ait fait droit à la demande de requalification du salarié, il est accordé au salarié une indemnité à la charge de l’entreprise utilisatrice ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
Les parties s’accordant pour fixer à la somme de 1.486,36 € le montant du salaire mensuel brut de M. [X], il y a lieu, par infirmation du jugement entrepris de condamner la société Cegelec Industries Sud Est à payer au salarié une somme de 1.486,36 €, ce dernier ne versant aux débats aucun élément justifiant de lui allouer à ce titre la somme réclamée de 5.000 €.
Le travailleur temporaire engagé par plusieurs contrats de mission dont le contrat de travail est requalifié en contrat à durée indéterminée le liant à l’entreprise utlisatrice ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées entre plusieurs missions que s’il démontre s’être tenu à la disposition de l’entreprise pendant ces périodes pour effectuer un travail.
En l’espèce, alors qu’il sollicite un rappel de salaire de 18.579 € outre les congés payés afférents au titre des périodes dites intercalaires, Monsieur [X] ne justifie pas être demeuré à la disposition de la société Cegelec Industrie Sud-Est durant celles-ci, aucun élément n’étant produit, alors même qu’il n’a pas eu d’activités au profit de l’intimée pendant trois mois entre le 16/06/2014 et le 15/09/2014, pendant près de trois mois du 24/10/2014 au 28/01/2015 et encore pendant près de cinq mois du 15/04/2015 au 07/09/2015 de sorte que c’est à juste titre, par des dispositions qui sont confirmées, que cette demande a été rejetée par la juridiction prud’homale.
Sur la poursuite de la relation de travail :
Monsieur [X] sollicite à titre principal la reconnaissance par la juridiction prud’homale de son statut de salarié de la société Cegelec Industrie Sud-Est.
Cependant, le contrat de travail est rompu par le seul effet du terme du dernier contrat de mission, en l’espèce à la date du 27 novembre 2015 avant que la requalification en contrat à durée indéterminée ne soit prononcée, sans survie du contrat dès lors que l’employeur a cessé de fournir du travail et de payer les salaires à compter de cette date.
Ainsi, les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande de Monsieur [X] de dire qu’il est un salarié de la société Cegelec Industrie Sud Est de même que ses demandes de rappel de salaire au titre d’un complément de salaires au titre de la maladie pour la période du 06/06/2018 au 28/02/2019 et depuis le 1er mars 2019, date de sa mise en invalidité et de communication sous astreinte de la notice relative au régime de prévoyance sont confirmées.
Sur la rupture de la relation de travail et ses conséquences financières :
Il résulte des articles L. 1226-9 et L. 1226-13 du code du travail, qu’au cours des périodes de suspension du contrat de travail du salarié consécutives à un accident du travail ou une maladie professionnelle, l’employeur ne peut rompre ce contrat que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie, toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance de ces dispositions étant nulle.
En l’espèce, il est constant que le terme du dernier contrat de mission à la date du 27 novembre 2015 est survenu alors que M. [X] était en arrêt maladie ensuite d’un accident du travail survenu le 25 novembre 2015 au sein de la Cegelec Industrie Sud Est de [Localité 3] (pièces n°6, 9), que ce faisant cette rupture par la survenance du terme du contrat de mission pendant une période de suspension du contrat de travail requalifié postérieurement en contrat à durée indéterminée produit les effets d’un licenciement nul.
M. [X], qui du fait de la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée obtenue à compter du 19/05/2014 bénéficie d’une ancienneté dans l’entreprise d’une année et demi auprès du même employeur peut prétendre à une indemnité de préavis correspondant à un mois de salaire outre les congés payés afférents et à une indemnité de licenciement.
Par infirmation des dispositions du jugement entrepris, il convient de condamner la société Cegelec Industrie Sud Est à payer à M. [X] les sommes suivantes:
– 1.486,36 € à titre d’indemnité de préavis et 148,63 € de congés payés afférents,
– 445,91 € d’indemnité légale de licenciement.
Au surplus, alors que toute réintégration dans l’entreprise est impossible, M. [X] a droit quelle que soit son ancienneté et la taille de l’entreprise à une indemnité à la charge de l’employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois et qui s’agissant d’un licenciement nul se cumule avec l’indemnités de précarité qui lui reste acquise de même qu’avec l’indemnité de requalification qui sanctionne le recours irrégulier à des contrats précaires.
M. [X] ne justifiant pas de l’existence d’un préjudice qui ne serait pas réparé par l’allocation d’une indemnité égale à six mois de salaire sera débouté de sa demande d’indemnité de 17.000 €.
Dès lors, par infirmation des dispositions du jugement entrepris, il convient de condamner la société Cegelec Industrie Sud Est à payer à M. [X] une indemnité de 8.918,16 € pour licenciement nul.
A titre subsidiaire, M. [X] sollicitait également la communication par l’intimée sous astreinte de la notice d’information relative au régime de prévoyance mis en place au sein de la société afin qu’il puisse en bénéficier.
Il y a lieu de confirmer le rejet de cette demande nullement motivée alors que M. [X] n’est pas salarié de la société Cegelec Industrie Sud Est .
Sur les dépens et les frais irrépétibles:
Les dispositions du jugement entrepris ayant condamné M. [X] aux dépens et l’ayant débouté de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sont infirmées.
La société Cegelec Industrie Sud Est est condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à payer à M. [X] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La cour:
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf celles ayant:
– rejeté la demande de M. [X] de rappel de salaire au titre des périodes intercalaires,
– rejeté la demande de Monsieur [X] de dire qu’il est un salarié de la société Cegelec Industrie Sud Est,
– rejeté les demandes de rappel de salaire au titre d’un complément de salaires au titre de la maladie pour la période du 06/06/2018 au 28/02/2019 et depuis le 1er mars 2019, date de sa mise en invalidité,
– rejeté la demande de M. [X] de communication par l’intimée sous astreinte de la notice d’information relative au régime de prévoyance mis en place au sein de la société,
qui sont confirmées.
Statuant à nouveau et y ajoutant:
Déclare recevable l’action de M. [X] en requalification des contrats de mission du 19/05/2014 au 23/11/2015 en contrat de travail à durée déterminée celle-ci n’étant pas prescrite.
Requalifie les contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 19/05/2014.
Fixe le salaire mensuel brut moyen de M. [X] à la somme de 1.486,36 €.
Condamne la société Cegelec Industrie Sud Est à payer à M. [X] une indemnité de requalification de 1.486,36 €.
Dit que la rupture de la relation contractuelle s’analyse en un licenciement nul.
Condamne la société Cegelec Industrie Sud Est à payer à M. [X] les sommes suivantes:
– 1.486,36 € à titre d’indemnité de préavis et 148,63 € de congés payés afférents,
– 445,91 € d’indemnité légale de licenciement,
– 8.918,16 € d’indemnité au titre d’un licenciement nul.
Condamne la société Cegelec Industrie Sud Est aux dépens de première instance et d’appel et à à payer à M. [X] une somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président