N° RG 21/02594 – N° Portalis DBV2-V-B7F-IZ66
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 08 JUIN 2023
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 03 Juin 2021
APPELANTE :
Société SUEZ RV FM anciennement dénommée SUEZ RV OSIS FM
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Me Arnaud LEBIGRE de la SALARL LEBIGRE, avocat au barreau de ROUEN
INTIMES :
Monsieur [R] [P]
[Adresse 2]
[Localité 5]
représenté par Me Elise LAURENT, avocat au barreau de ROUEN
S.A.S. CRIT
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Florence DROUIN, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 13 Avril 2023 sans opposition des parties devant Madame POUGET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame ALVARADE, Présidente
Madame POUGET, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 13 Avril 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 08 Juin 2023
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 08 Juin 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [R] [P] a été mis à la disposition de la société Suez RV Osis FM (la société utilisatrice), devenue la société Suez RV FM, par la société CRIT dans le cadre de divers contrats de travail temporaire conclus du 24 octobre 2017 au 30 avril 2019.
Le 26 décembre 2019, il a saisi le conseil de prud’hommes de Rouen qui, par jugement du 3 juin 2021, a :
– dit que la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 24 octobre 2017 à l’égard de la société Suez RV Osis FM était fondée,
– dit que la rupture au terme du dernier contrat de mission s’analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– condamné la société Suez RV Osis FM à payer à M. [P] les sommes suivantes :
2 606,60 euros au titre de l’indemnité de préavis,
2 606,61 euros à titre d’indemnité de requalification,
260,66 euros au titre des congés payés afférents,
1 194,70 euros au titre de l’indemnité de licenciement,
2 606,61 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif,
– condamné la société CRIT à payer à M. [P] la somme de 2 606,61 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif,
– condamné solidairement les sociétés Suez RV FM et CRIT au paiement des sommes suivantes :
4 476,25 euros à titre de de rappel de salaire pour la période du 10 juin au 31 juillet 2019,
447,63 euros d’indemnité de fin de mission,
492,39 euros à titre d’indemnité de congés payés,
1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– débouté M. [P] de sa demande de requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 15 décembre 2017 à l’égard de la société CRIT,
– dit que les condamnations prononcées porteront automatiquement intérêts au taux légal à compter de la décision,
– débouté les sociétés de leurs demandes,
– condamné les sociétés aux dépens.
Le 24 juin 2021, la société Suez RV FM a interjeté appel de cette décision et par conclusions remises le 11 novembre 2021, demande à la cour de :
à titre principal,
– constater que les contrats de mission de M. [P] s’étaient succédés de manière discontinue, avec des périodes d’inactivité cumulées atteignant plusieurs mois (8 mois au cumul) et, par ces seules constatations, juger que les contrats de mission ainsi conclus n’avaient eu ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.
– constater que les contrats de mission sont irréguliers et réputés non écrits.
– réformer le jugement en toutes ses dispositions,
en conséquence et statuant à nouveau :
– la mettre hors de cause,
– débouter M. [P] de toutes ses demandes et le condamner au paiement d’une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
à titre subsidiaire,
– dire que M. [P] ne peut cumuler les dommages et intérêts pour licenciement abusif, l’indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents ainsi que l’indemnité de licenciement auprès de chacune des sociétés CRIT et SUEZ RV FM,
en conséquence :
– l’en débouter ainsi que du surplus de ses demandes,
à titre infiniment subsidiaire,
– constater la prescription de l’action en requalification pour la période antérieure au 25 décembre 2018,
en conséquence :
– fixer le périmètre de l’action en requalification à la période du 30 janvier 2019 au 10 juin 2019,
– fixer le quantum de l’indemnité de requalification à la somme de 588,98 euros,
– fixer le quantum de dommages intérêts pour licenciement abusif à la somme de 1 768,75 euros,
– débouter M. [P] du surplus de ses demandes,
– condamner la société CRIT à la garantir dans la limite de 50 % des condamnations mises à sa charge,
en cas de requalification sur la période sollicitée par M. [P] :
– fixer le quantum de l’indemnité de requalification à la somme de 588,98 euros,
– fixer le quantum de l’indemnité de licenciement à la somme de 809,21 euros,
– fixer le quantum de l’indemnité compensatrice de préavis à la somme de 1 768,75 euros, congé payés inclus,
– fixer le quantum de dommages intérêts pour licenciement abusif à la somme de 1 768,75 euros (celui-ci ne pouvant en tout état de cause excéder la somme de 3 537,50 euros, soit 2 mois de salaire),
– débouter M. [P] du surplus de ses demandes,
– condamner la société CRIT à garantir la société SUEZ RV FM dans la limite de 50 % des condamnations mises à sa charge.
Par conclusions remises le 8 novembre 2021, M. [P] demande à la cour de :
à l’égard de la société Suez RV FM,
– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a limité le montant des dommages-intérêts pour licenciementabusif à la somme de 2 606,61 euros,
– condamner la société Suez RV FM à lui payer la somme de 5 213,22 euros à ce titre,
à l’égard de la société CRIT,
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande de requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 15 décembre 2017 et de ses demandes subséquentes à l’exception de sa demande d’indemnité pour licenciement abusif indûment limitée à un mois de salaire,
statuant à nouveau :
– requalifier la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à compter du 15 décembre 2017
par conséquent,
– dire et juger que la rupture au terme du dernier contrat de mission s’analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner, en conséquence, la société CRIT au paiement des sommes suivantes :
2.606,61 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis (1 mois de salaire)
260,66 euros euros au titre des congés payés sur préavis
1 086,09 euros à titre d’indemnité de licenciement
5 213,22 euros à titre d’indemnité pour licenciement abusif (2 mois de salaire),
– confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions, sauf en ce qu’il a limité les frais irrépétibles à la somme de 1 500 euros,
statuant à nouveau :
– condamner solidairement les entreprises Suez RV FM et CRIT au paiement de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Par conclusions remises le 8 novembre 2021, la société CRIT demande à la cour de :
à titre principal,
– infirmer le jugement en ce qu’il a constaté la présence d’un emploi durable lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice,
en conséquence,
– infirmer le jugement en ce qu’il a requalifié les contrats de mission conclus en contrat à durée indéterminée,
à titre subsidiaire,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté l’intérimaire de sa demande de requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée liant le salarié à CRIT ;
en tout état de cause,
– infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à M. [P] la somme de 2 606,61 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– au regard du contrat de mission en date du 16 mars 2019, réduire les sommes dues à titre de salaire à leur plus juste valeur, soit :
3 217,70 euros à titre de rappel de salaire ;
321,77 euros à titre de rappel d’indemnité de fin de mission ;
353,95 euros à titre de rappel d’indemnité de congés payés ;
– débouter M. [P] de sa demande reconventionnelle en ce qu’il réclame la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée et le versement des indemnités afférentes au prétendu licenciement.
L’ordonnance de clôture a été fixée au 23 mars 2023.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé détaillé de leurs moyens et arguments.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur la prescription de l’action en requalification
Selon l’article L. 1471-1 du code du travail toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.
Il est constant que le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat de mission à l’égard de l’entreprise utilisatrice en contrat à durée indéterminée (CDI) est d’une part, d’une durée de deux ans, et non de 12 mois comme soutenu à tort par la société Suez , et d’autre part, a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats de mission, le terme du dernier contrat lorsque la prétention est fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat ou sur le fait de pourvoir à l’activité normale et permanente de ladite entreprise.
Il est indifférent, pour l’examen de la recevabilité de la demande de requalification, que des périodes plus ou moins longues aient séparé les différents contrats de mission.
Or, le dernier contrat de mission de M. [P] s’est terminé le 10 juin 2019 et il a introduit son action en requalification fondée sur le motif du recours au contrat de mission énoncé au contrat ou sur le fait de pourvoir à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice, le 26 décembre 2019, de sorte que celle-ci n’est pas prescrite.
Par conséquent, la décision déférée est confirmée sur ce chef.
2) Sur la demande de requalification formée à l’égard de la société Suez RV FM
Sans contester la réalité de la mise à sa disposition de M. [P], l’appelante, invoquant les dispositions de l’article L. 1251-16 du code du travail, fait valoir que « l’irrégularité de forme » soutenue par ce dernier équivaut à une absence de contrat, si bien qu’elle doit être mise hors de cause.
Toutefois, l’absence de respect du délai de carence entre les contrats de mission ne peut avoir de conséquences éventuelles que dans les rapports entre le salarié et l’entreprise de travail temporaire à laquelle il est lié par ladite convention, de sorte que l’entreprise utilisatrice n’est pas fondée à s’en prévaloir pour solliciter sa mise hors de cause.
Elle ne peut pas plus arguer de l’absence de mention de la qualification du salarié remplacé, laquelle éventuelle irrégularité ne peut être utilement invoquée que par M. [P] pour soutenir sa demande en requalification et non par l’appelante pour y échapper.
Par conséquent, la société Suez RV FM n’a pas lieu à être mise hors de cause, la décision déférée est confirmée sur ce chef.
Par ailleurs, M. [P] soutient la requalification de sa relation de travail avec la société appelante en faisant valoir d’une part, l’absence de la réalité des motifs de recours mentionnés dans les contrats de mission et d’autre part, l’occupation durable d’un emploi lié à l’activité normale et permanente de la dite société.
Sur le premier moyen, l’article L. 1251-6 dans sa rédaction applicable au litige, dispose qu’il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire dans des cas limitatifs et, notamment, en cas d’accroissement temporaire d’activité ou de remplacement d’un salarié absent.
Suivant l’article L. 1251-40 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire, en méconnaissance des dispositions des articles L.1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L.1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.
Il convient de rappeler qu’il incombe à la seule entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé au contrat, peu important dans ces conditions et à ce stade, que des interruptions soient intervenues entre les contrats considérés durant lesquelles M. [P] a été pris en charge par Pôle emploi.
En l’espèce, sur la période de requalification sollicitée, le salarié a signé plusieurs contrats de travail temporaire avec la société Suez RV FM dont le premier daté du 24 octobre 2017 est motivé par un accroissement d’activité « lié au tri palettes».
Or, la cour ne peut que constater que si l’entreprise utilisatrice développe une argumentation concernant le second moyen développé par M. [P] au soutien de sa demande de requalification, elle n’explique, et encore moins ne justifie, dudit accroissement mentionné sur le contrat considéré.
Par conséquent, en l’absence de la moindre preuve concernant la réalité du motif de recours, la décision déférée est confirmée en ce qu’elle a requalifié la relation entre la société Suez RV FM et M. [P] en un contrat à durée indéterminée ayant débuté le 24 octobre 2017.
En application de l’article L. 1251-41 du code du travail, le salarié est fondée à obtenir une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure au dernier salaire perçu avant la saisine de la juridiction, ce qui ne correspond pas aux modalités de calcul de l’indemnité légale de licenciement de l’article R. 1234-4 telles qu’invoquées par la société appelante.
Aussi, le jugement entrepris est également confirmé en sa disposition relative à l’indemnité de requalification.
Par l’effet rétroactif de la requalification opérée, le salarié est considéré comme ayant été embauché en contrat à durée indéterminée dès l’origine de la relation contractuelle et jusqu’au terme du dernier contrat de mission, si la relation de travail a cessé à cette date, comme en l’espèce, et ce, sans que les dispositions relatives au licenciement du salarié aient été respectées.
Par conséquent, eu égard au salaire brut de référence, à l’ancienneté du salarié et à l’article 4.7 de la convention collective applicable relative à la durée de préavis (un mois), il convient d’allouer à M. [P] la somme de 2 132,67 euros au titre de l’indemnité de préavis, les congés payés y afférents et celle 888,62 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement.
La décision déférée est infirmée sur ces chefs. Elle est toutefois confirmée en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts alloués pour licenciement abusif compte tenu des dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail et en l’absence d’éléments de nature à justifier de son caractère insuffisant eu égard au préjudice subi par M. [P].
3) Sur la demande de requalification formée à l’égard de la société CRIT
Il est admis que le salarié puisse exercer deux actions concomitantes reposant sur des fondements juridiques distincts en raison des manquements propres à chaque société.
Ainsi, après avoir obtenu la requalification de ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée à l’égard de la société Suez, M. [P] peut former une demande en requalification de son contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée à l’égard de la société CRIT en invoquant, notamment, le non-respect du délai de carence.
Or, cette irrégularité n’est pas discutée par l’entreprise de travail temporaire, de sorte que le salarié est fondé à obtenir la requalification de ses contrats de travail temporaire à compter du 26 décembre 2017, date du nouveau contrat ne respectant pas le délai prévu par l’article L. 1251-36 du code du travail.
Toutefois, si en raison de fautes distinctes, la cour a fait droit aux demandes de requalification en contrat à durée indéterminée, tant à l’égard de l’entreprise utilisatrice qu’à l’égard de la société de travail temporaire, le salarié ne peut valablement solliciter que les condamnations de ces dernières soient distinctes et cumulatives puisqu’il s’agit de la même prestation de travail, si bien qu’aucun cumul d’indemnités ne peut exister, de sorte que par l’effet des requalifications opérées, les deux employeurs seront tenus in solidum de répondre des conséquences de la rupture de ce contrat, à l’exception de l’indemnité de requalification, dont l’entreprise utilisatrice est seule débitrice.
La décision déférée est infirmée sur ce chef.
4) Sur l’appel en garantie
Si l’entreprise utilisatrice ne peut invoquer, pour faire valoir auprès de l’entreprise de travail temporaire des droits afférents à la responsabilité contractuelle, la méconnaissance par cette dernière des obligations mises à sa charge à l’égard du salarié par les articles L.1251-8, L. 1251-16 et L. 1251-17 du code du travail, il appartient aux juges du fond d’apprécier souverainement si un manquement peut être imputé à l’entreprise de travail temporaire dans l’établissement des contrats de mise à disposition.
Or, il a été précédemment constaté que la société CRIT n’avait pas respecté les obligations de l’article L. 1251-36 du code du travail relatives au respect du délai de carence, qui lui étaient propres, et partant elle a ainsi engagé sa responsabilité contractuelle dans ses rapports avec l’entreprise utilisatrice, ce qui justifie de la condamner à garantir la société Suez RV FM dans la limite de 50 % des condamnations prononcées contre elle au profit de M. [P], à l’exception de l’indemnité de requalification.
La décision déférée est également infirmée de ce chef.
5) Sur la demande de rappel de salaire
L’article L. 1251-16 du code du travail dispose que l’entreprise de travail temporaire qui rompt le contrat de mission du salarié avant le terme prévu au contrat lui propose, sauf faute grave de ce dernier ou cas de force majeure, un nouveau contrat de mission prenant effet dans un délai maximum de trois jours ouvrables.
Le nouveau contrat de mission ne peut comporter de modifications d’un élément essentiel en matière de qualification professionnelle, de rémunération, d’horaire de travail et de temps de transport.
A défaut, ou si le nouveau contrat de mission est d’une durée inférieure à celle restant à courir du contrat précédent, l’entrepreneur de travail temporaire assure au salarié une rémunération équivalente à celle qu’il aurait perçue jusqu’au terme du contrat, y compris l’indemnité de fin de mission.
Lorsque la durée restant à courir du contrat de mission rompu est supérieure à quatre semaines, les obligations du présent article peuvent être satisfaites au moyen de trois contrats successifs au plus.
Il n’est pas discuté que le salarié a cessé de travailler pour la société appelante le 10 juin 2019 alors que l’avenant n°3 du 1er juin 2019 prévoyait que le contrat de mission temporaire avait pour terme le 31 juillet 2019 et ce, sans qu’il stipule la possibilité, en application de l’article L. 1251-30, d’avancer ou de reporter le terme de la mission.
Dans ces conditions et quand bien même les précédents avenants mentionnaient une possibilité de réduction, la société CRIT ne peut valablement les invoquer pour soutenir une diminution du rappel de salaire dont elle ne discute pas le bien fondé.
Par conséquent, il convient de condamner la société CRIT, seule tenue à l’obligation légale précédemment rappelée, à payer à M. [P] les sommes suivantes :
4 476,25 euros à titre de rappel de salaire du 10 juin au 31 juillet 2019,
447,63 euros à titre d’indemnité de fin de mission,
492,39 euros au titre des congés payés afférents.
La décision déférée est aussi infirmée sur ce chef.
6) Sur les dépens et les frais irrépétibles
En qualité de partie succombante, les sociétés Suez RV FM et CRIT sont condamnées in solidum aux dépens d’appel et la société Suez RV FM est déboutée de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.
Pour la même raison, les sociétés sont condamnées in solidum à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la décision déférée étant infirmée à ce titre, eu égard à la demande formée par le salarié.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré sauf en ses dispositions relatives aux montants de l’indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents et de l’indemnité légale de licenciement, ainsi qu’aux rappels de salaire, de congés payés afférents et d’indemnité de fin de mission, au point de départ des intérêts au taux légal, aux frais irrépétibles et en ce qu’il a rejeté la demande de requalification formée à l’encontre de la société CRIT,
Statuant dans cette limite et y ajoutant,
Requalifie les contrats de travail temporaire de M. [P] à l’égard de la société CRIT à compter du 26 décembre 2017,
Condamne in solidum les sociétés SUEZ RV FM et CRIT à payer à M. [R] [P] les sommes suivantes :
2 132,67 euros au titre de l’indemnité de préavis,
213,27 euros au titre des congés payés y afférents sur l’indemnité de préavis,
888,62 euros au titre de l’indemnité légale de licenciement,
3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que les sociétés SUEZ RV FM et CRIT supporteront in solidum la somme allouée à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif à M. [P] ;
Condamne la société CRIT à garantir la société Suez RV FM dans la limite de 50 % des condamnations prononcées contre elle au profit de M. [P] à l’exception de l’indemnité de requalification ;
Condamne la société CRIT à payer à M. [P] les sommes suivantes :
4 476,25 euros à titre de rappel de salaire du 10 juin au 31 juillet 2019,
447,63 euros à titre d’indemnité de fin de mission,
492,39 euros au titre des congés payés afférents ;
Rappelle que les sommes à caractère salarial produiront intérêt au taux légal à compter de la convocation de l’employeur devant le bureau de conciliation et les sommes à caractère indemnitaire à compter du présent arrêt ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;
Condamne in solidum les sociétés SUEZ RV FM et CRIT aux dépens d’appel.
La greffière La présidente