Saisie-attribution : décision du 9 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Bordeaux RG n° 23/04238

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Saisie-attribution : décision du 9 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Bordeaux RG n° 23/04238

9 janvier 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
23/04238

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L’EXECUTION

JUGEMENT DU 09 Janvier 2024

DOSSIER N° RG 23/04238 – N° Portalis DBX6-W-B7H-X3SJ
Minute n° 24/ 01

DEMANDEURS

Monsieur [P] [V]
né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 3]
Madame [S] [M] [X] épouse [V]
née le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 5]
demeurant [Adresse 3]

représentés par Maître Frédéric BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

S.A. SOCIETE GENERALE, inscrite au RCS de Paris sous le n° 552 120 222, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 4]

représentée par Maître Elsa TOMASELLA, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat postulant, Maître Dominique FONTANA de la SELARL DREYFUS-FONTANA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 21 Novembre 2023 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 09 Janvier 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 09 janvier 2024
Formules exécutoires aux avocats + dossiers
Copies Certifiées Conformes
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Par un arrêt du 12 octobre 2021, la Cour d’appel de Pau a condamné Monsieur [P] [V] et Madame [S] [M]-[X] épouse [V] à payer à la SA SOCIETE GENERALE la somme de 90.834,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2019. Les époux [V] se sont pourvus en cassation de cette décision.

Par actes du 16 mai 2022, la SA SOCIETE GENERALE a saisi les droits d’associés détenus par les époux [V] au sein de la SARL [V]&CO et de la SARL [V]’S propriétaires chacune d’un appartement sis à [Localité 5] (33). 

Suivant procès-verbal du 2 novembre 2022, la SA SOCIETE GENERALE a également fait diligenter une saisie-attribution sur le compte bancaire des époux [V], fructueuse à hauteur de 41.847,74 euros.

Par acte du 22 mars 2023, la SA SOCIETE GENERALE a fait signifier un commandement de payer aux époux [V] à hauteur de 57.751,53 euros.

Par acte du 27 mars 2023, la SA SOCIETE GENERALE a fait dresser un procès-verbal de saisie vente des meubles des époux [V] et fait sommation à ceux-ci d’assister à la vente aux enchères de leurs bien par acte du 5 mai 2023.

Par acte de commissaire de justice du 16 mai 2023, les époux [V] ont fait assigner d’heure à heure la SA SOCIETE GENERALE afin de solliciter l’octroi d’un délai de grâce.

A l’audience du 21 novembre 2023 et dans leurs dernières écritures, les époux [V] sollicitent au visa des articles R121-1 du Code des procédure civiles d’exécution et 1343-5 du Code civil que leur soit accordé un échelonnement des paiements à raison de 400 euros par mois pendant 23 mois et une 24ème mensualité du solde. Ils sollicitent par ailleurs le rejet des demandes de la SA SOCIETE GENERALE, sa condamnation aux dépens et à leur verser la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de leur demande, les époux [V] font valoir qu’ils ont spontanément mis en place des virements de 400 euros afin d’apurer leur dette mais que leur situation financière actuelle ne leur permet pas de solder celle-ci ou de proposer des paiements d’un montant supérieur. Ils indiquent ne percevoir que des revenus de 3.000 euros mensuels à eux deux et font valoir que les deux appartements qu’ils possèdent sont en vente mais ne trouvent pas acquéreurs en lien avec la crise du marché immobilier. Ils ajoutent que la somme prélevée lors de la saisie-attribution résultait d’un héritage et du versement d’une assurance -vie débloquée pour faire face aux charges quotidiennes dans la mesure où leur activité au sein de la société de travaux qu’ils exploitent ne leur apportait plus de revenus.

A l’audience du 21 novembre 2023, la SA SOCIETE GENERALE conclut au rejet de la demande et à la condamnation des époux [V] aux dépens outre le paiement d’une somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
La défenderesse soutient que la situation financière des époux [V] leur aurait permis de proposer des règlements plus conséquents et n’est pas compromise. Elle relève des versements de liquidité réguliers sur leur compte et souligne qu’ils n’ont rien fait pour diminuer leur charge d’imposition amoindrissant d’autant leurs revenus. Elle fait valoir que les deux appartements sont en vente depuis près de deux ans et que les demandeurs ne justifient pas avoir accepté une baisse de leur prix de vente conformément aux demandes des agents immobiliers en charge de leur commercialisation. Ils soulignent que ces biens auraient pu être mis en location et que le défaut de paiement des charges de copropriété est un frein supplémentaire à leur vente.

L’affaire a été mise en délibéré au 9 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

L’article R121-1 du Code des procédures civiles d’exécution dispose :
« En matière de compétence d’attribution, tout juge autre que le juge de l’exécution doit relever d’office son incompétence.
Le juge de l’exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l’exécution. Toutefois, après signification du commandement ou de l’acte de saisie ou à compter de l’audience prévue par l’ article R. 3252-17 du code du travail, selon le cas, il a compétence pour accorder un délai de grâce.
Le juge de l’exécution peut relever d’office son incompétence. »

L’article 1343-5 du Code civil prévoit :
« Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.
Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital.
Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette.
La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.
Toute stipulation contraire est réputée non écrite.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment. »

Les époux [V] justifient de relevés bancaires établissant des revenus d’environ 3.015 euros par mois pour le couple, tous deux rémunérés par la SARL SCAS à compter du mois de novembre 2022. Ils justifient également d’une attestation du 1er septembre 2023 établie par le comptable de la société évoquant des rémunérations versées à Monsieur [V] en sa qualité de gérant à hauteur de 28.880 euros au titre de l’année 2022 soit la somme de 2.400 euros mensuelle.

Le couple justifie par ailleurs de ses charges avoisinant les 2.400 euros.

Le paiement d’impôt sur le revenu à proportion égale à ceux antérieurement réglés ne saurait s’analyser en un appauvrissement volontaire infondé et se justifie par la nécessité d’un calcul avantageux des droits à la retraite que Monsieur [V] fera prochainement valoir. Il fournit enfin les justificatifs des versements en lien avec un héritage, un paiement de la MGEN et le déblocage d’une assurance-vie dont une partie a été saisie dans le cadre de la saisie-attribution pratiquée le 2 novembre 2022.

Il ressort de ces éléments que si les époux [V], au vu de ces apports financiers conséquents, auraient pu apurer de façon plus importante leur dette, ils ont du faire face à leurs charges alors que les revenus tirés de leur activité se réduisaient au regard de la baisse d’activité de la SARL SCAS.

S’agissant des deux appartements détenus par le couple via des sociétés, leur mise en vente est effectivement ancienne. Néanmoins, les relevés des visites effectuées en 2022 et le mail de l’agent immobilier versé en pièce 28 datant de juillet 2023 démontrent une réelle mise en vente de ces biens. Les demandeurs justifient en outre de l’accord d’une baisse de prix par mail du 9 octobre 2023. Le choix de ne pas avoir mis en location se justifie au regard du dégât des eaux ayant affecté l’un de ces appartements et de la volonté de les vendre au meilleur prix, une diminution étant nécessairement encourue du fait de la présence de locataires.

Il ressort donc des pièces versées aux débats que les époux [V] ont eu à subir une baisse de leur rémunération en lien avec une dégradation d’activité de la société seule génératrice de leurs revenus. Ils justifient avoir proposé des versements certes modestes, spontanés et de diligences réelles pour vendre leurs biens immobiliers.

La SA SOCIETE GENERALE a, grâce à la saisie-attribution pratiquée, pu recouvrir une partie conséquente de sa créance.

Il y a donc lieu d’allouer aux demandeurs des délais de paiement définis au dispositif pour terminer d’apurer leur dette à charge pour eux de tout mettre en œuvre pour pouvoir régler une 24ème mensualité soldant leur dette.

Sur les autres demandes

Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens. L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision contradictoire et en premier ressort,
DIT que Monsieur [P] [V] et Madame [S] [M]-[X] épouse [V] pourront se libérer de leur dette envers leur créancier la SA SOCIETE GENERALE après déduction d’éventuels versements opérés jusqu’à la date de l’audience, en 23 mensualités de 400 euros, la 24ème soldant la dette en principal, frais et accessoires ;
DIT que le premier versement interviendra avant le 5 de chaque mois à compter du mois suivant la notification de la présente décision ;
DIT qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité à son échéance exacte, la totalité des sommes dues deviendra immédiatement exigible et les mesures d’exécution pourront être reprises ;
RAPPELLE qu’en application des dispositions de l’article 1343-5 du Code Civil, les majorations d’intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d’être dues pendant le délai fixé par le juge ;
RAPPELLE que cette décision suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier ;
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.
La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,

 


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