Saisie-attribution : décision du 12 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lille RG n° 22/00450

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Saisie-attribution : décision du 12 janvier 2024 Tribunal judiciaire de Lille RG n° 22/00450

12 janvier 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG n°
22/00450

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 12 Janvier 2024

N° RG 22/00450 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WWAD

DEMANDEUR :

Monsieur [C] [X]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représenté par Me Myriam LATRECHE, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDERESSE :

S.A.S. EOS FRANCE
[Adresse 3]
[Localité 4]

représentée par Me Claire BOUSCATEL, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, et Me Gwendoline MUSELET, avocat au barreau de LILLE, avocat postulant

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Damien CUVILLIER, Premier Vice-Président Adjoint du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 10 Novembre 2023, l’affaire a été mise en délibéré au 22 Décembre 2023, prorogé au 12 Janvier 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 22/00450 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WWAD

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

Par décision en date du 26 septembre 2002, le tribunal de commerce de LILLE a condamné Monsieur [C] [X] à payer à la société DIAC la somme de 9 780,07 € avec intérêts au taux conventionnel de 6,39 % à compter du 26 juillet 2002 ainsi que la somme de 375 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Cette décision a été signifiée à Monsieur [X] le 18 novembre 2002 et n’a pas été frappée d’appel.

Le 7 mars 2014, la société DIAC a cédé sa créance à la société EOS CREDIREC, aujourd’hui dénommée EOS FRANCE.

Le 12 octobre 2022, la société EOS FRANCE a fait dresser procès-verbal d’indisponibilité du certificat d’immatriculation des véhicules de Monsieur [X].
Ce procès-verbal d’indisponibilité de ces véhicules a été signifié à Monsieur [X] le 19 octobre 2022.

Toujours le 19 octobre 2022, le commissaire de justice en charge du recouvrement a fait procéder à l’immobilisation et à l’enlèvement du véhicule CITROEN C4 PICASSO immatriculé [Immatriculation 6] appartenant à Monsieur [X].
Cet immobilisation avec enlèvement a été dénoncée à Monsieur [X] par acte du 24 octobre 2022.

Par exploit en date du 21 novembre 2022, Monsieur [X] a fait assigner la société EOS FRANCE devant le juge de l’exécution aux fins d’annulation du procès-verbal d’indisponibilité du 12 octobre 2022 et de sa dénonciation en date du 19 octobre 2022 et d’annulation de l’immobilisation et de l’enlèvement du véhicule en date du 19 octobre 2022 ainsi que de sa dénonciation en date du 24 octobre 2022 ; aux fins également de condamnation de la société EOS FRANCE à lui verser des dommages et intérêts.

Les parties ont été convoquées pour la première fois à l’audience du 9 janvier 2023.

Après renvois à leur demande, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries à l’audience du 10 novembre 2023.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

A cette audience, Monsieur [X] a soutenu oralement ses écritures et formulé les demandes suivantes :
dire Monsieur [X] recevable en ses contestations,annuler par conséquent le procès-verbal d’indisponibilité du 12 octobre 2022 et sa dénonciation en date du 19 octobre 2022,annuler la saisie immobilisation du 19 octobre 2022 et sa dénonciation en date du 24 octobre 2022,ordonner en conséquence la main levée de l’indisponibilité des certificats d’immatriculation pratiquée par EOS FRANCE le 12 octobre 2022,ordonner en conséquence la main levée de la saisie immobilisation pratiquée par EOS FRANCE le 19 octobre 2022,condamner EOS FRANCE au remboursement de l’intégralité des frais inhérents aux deux saisies, à leurs actes préparatoires et aux actes subséquents,condamner EOS FRANCE à payer à Monsieur [X] la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts au titre des deux saisies pratiquées abusivement,condamner EOS FRANCE, au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,condamner EOS FRANCE aux entiers frais et dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître LATRECHE Myriam sur le fondement des articles 696 et 699 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, Monsieur [X] fait d’abord valoir qu’il ne conteste plus la qualité à agir de la société EOS FRANCE mais maintient l’ensemble de ses autres moyens.

S’agissant de la saisie immobilisation avec enlèvement de son véhicule réalisée le 19 octobre 2022 et dénoncée le 24 octobre 2022, Monsieur [X] fait d’abord valoir que le procès-verbal de saisie comme sa dénonciation font référence à deux titres exécutoires, en l’occurrence un jugement du tribunal de commerce de LILLE en date du 26 septembre 2002 et un jugement du juge de l’exécution de LILLE en date du 17 septembre 2018.
Or, et d’une part, le procès-verbal et sa dénonciation ne comportent pas de décomptes distincts permettant de connaître quelles sommes sont réclamées au titre de quelle décision, ce qui ne permet pas d’informer correctement le débiteur.
D’autre part, le jugement du juge de l’exécution en date du 17 septembre 2018 ne peut justifier la saisie car il s’agissait uniquement d’un jugement ordonnant la main levée d’une précédente saisie attribution.
Les mentions du procès-verbal de saisie et sa dénonciation ne respectent donc pas, selon Monsieur [X], les exigences de l’article R 223-8 du code des procédures civiles d’exécution.

Monsieur [X] prétend ensuite que la saisie immobilisation avec enlèvement en date du 19 octobre 2022 et son acte de dénonciation sont fondées sur des titres exécutoires prescrits depuis le 19 juin 2018.

Enfin, Monsieur [X] prétend que la saisie avec enlèvement du 19 octobre 2022 a porté sur un bien commun qui ne pouvait être saisi en paiement d’une somme due uniquement par Monsieur [X], bien commun par ailleurs insaisissable par application de l’article L 112-2 du code des procédures civiles d’exécution comme nécessaire à la vie et au travail du saisi et de sa famille, le véhicule appréhendé servant notamment à l’épouse de Monsieur [X] dans l’exercice de son travail d’assistante maternelle.

S’agissant de l’indisponibilité du certificat d’immatriculation des véhicules de Monsieur [X], celui-ci fait d’abord valoir que le procès-verbal d’indisponibilité dressé le 12 octobre 2022 mentionne un jugement rendu par le tribunal de commerce de TOURCOING qui n’existe pas alors que l’acte de dénonciation mentionne un acte du tribunal de commerce de LILLE mais portant un numéro RG erroné. Les actes de saisie ne mentionnent donc pas correctement le titre exécutoire fondant la poursuite et ne respectent pas les préconisations de l’article R 223-2 du code des procédures civiles d’exécution.

Monsieur [X] ajoute que cette saisie par indisponibilité du certificat d’immatriculation repose également sur un titre exécutoire prescrit depuis le 19 juin 2018 et porte sur des véhicules communs du couple ne pouvant donc pas être saisis pour répondre d’une dette personnelle de Monsieur [X] ou sur des véhicules qui n’existent plus.

Monsieur [X] conteste par ailleurs les sommes qui lui sont réclamées puisque, d’une part, l’assurance du prêt a remboursé le principal à la société DIAC en 2004, que nombre des intérêts réclamés par la société EOS FRANCE sont aujourd’hui prescrits et que les actes d’exécution dont le prix est réclamé ne sont pas justifiés en procédure et étaient par ailleurs inutiles.

Monsieur [X] prétend enfin avoir subi un préjudice important du fait de ces saisies et en demande réparation.

En défense, la société EOS FRANCE a pour sa part également soutenu oralement ses écritures et formulé les demandes suivantes :
constater que le titre exécutoire du 26 septembre 2002 n’est pas prescrit,débouter Monsieur [X] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,condamner Monsieur [X] à payer à la société EOS FRANCE la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la procédure en ce compris les frais d’enlèvement et de gardiennage du véhicule.
Au soutien de ses demandes, la société EOS FRANCE fait d’abord valoir que si la loi n° 208-561 du 17 juin 2008 a réduit la durée de prescription des décisions de justice de 30 à 10 ans, le nouveau délai de prescription courait jusqu’au 19 juin 2018 et a été valablement interrompu par le commandement de payer aux fins de saisie-vente en date du 30 mai 2018. La décision exécutée peut donc désormais être exécutée jusqu’au 30 mai 2028 et n’est en rien prescrite.

La société EOS FRANCE soutient ensuite que le véhicule saisi n’entre pas dans une catégorie de bien insaisissable au sens de l’article L 112-2 du code des procédures civiles d’exécution et qu’il n’est pas démontré qu’il s’agit d’un bien mobilier nécessaire à la vie et au travail du saisi et de sa famille.
Par ailleurs, la société EOS FRANCE prétend que Monsieur [X] ne démontre pas que le bien saisi soit réellement un bien commun.

S’agissant ensuite de la régularité du procès-verbal d’immobilisation et de sa dénonciation et de la régularité du procès-verbal d’enlèvement et de sa dénonciation, la société EOS FRANCE soutient en premier lieu que les montants réclamés dans les décomptes figurant sur ces différents actes sont justifiés et correspondent au jugement du 26 septembre 2002.
Par ailleurs, à supposer même que ces décomptes comportent quelques erreurs purement matérielles, cela n’est pas de nature à affecter la validité de la saisie mais uniquement sa portée.
La société EOS FRANCE soutient que les décomptes figurant sur les actes de saisie sont réguliers et conformes aux exigences du code des procédures civiles d’exécution et de la jurisprudence.

La société EOS FRANCE souligne ensuite que le paiement effectué par l’assurance en 2004 a bien été pris en compte mais qu’il n’a pas suffi à solder les sommes auxquelles Monsieur [X] a été condamné.
Si Monsieur [X] prétend que sa dette est soldée, c’est à lui qu’il incombe d’en rapporter la preuve, ce qu’il ne fait pas.

La société EOS FRANCE ajoute encore que les décomptes ont tenu compte de la prescription de certains intérêts puisqu’ils indiquent que 1 851,72 € sont décomptés pour « intérêts prescrits ».

Si le procès-verbal d’indisponibilité du certificat d’immatriculation du 12 octobre 2022 comporte une petite erreur matérielle en ce qu’il vise un jugement du tribunal de commerce de TOURCOING en date du 26 septembre 2002 et non de LILLE, et si la dénonciation de ce procès-verbal d’indisponibilité comporte également une autre petite erreur matérielle en ce que le numéro de RG du jugement est erroné, il s’agit de simples erreurs matérielles qui n’ont porté aucun préjudice à Monsieur [X].

Le procès-verbal d’enlèvement en date du 19 octobre 2022 est quant à lui conforme aux exigences de l’article R 223-8 du code des procédures civiles d’exécution et comporte la mention du titre exécutoire en vertu duquel le véhicule est immobilisé ainsi qu’un décompte des sommes dues.

La société EOS FRANCE fait encore valoir que Monsieur [X] ne peut se plaindre des mesures d’exécution régulières prises à son encontre alors qu’il n’a toujours pas réglé une dette constatée par jugement définitif en 2002 et qu’il a fait échec à toutes les tentatives amiables de résolution du litige.
La société EOS FRANCE ajoute que Monsieur [X] ne démontre aucunement le préjudice qu’il prétend avoir subi du fait de la saisie.

A l’issue des débats les parties ont été informées que la décision serait rendue, après plus ample délibéré, par jugement mis à disposition au greffe le 22 décembre 2023.

Ce délibéré a dû être prorogé au 12 janvier 2024 en raison d’une surcharge conjoncturelle de travail du magistrat rédacteur.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LA REGULARITE FORMELLE DU PROCES-VERBAL DE SAISIE IMMOBILISATION ET DE SA DENONCIATION

Aux termes de l’article R 223-8 du code des procédures civiles d’exécution, l’huissier de justice dresse un procès-verbal d’immobilisation. Cet acte contient à peine de nullité :
1° La mention du titre exécutoire en vertu duquel le véhicule a été immobilisé ;
2° La date et l’heure de l’immobilisation du véhicule ;
3° L’indication du lieu où il a été immobilisé et, le cas échéant, de celui où il a été transporté pour être mis en dépôt ;
4° La description sommaire du véhicule avec notamment l’indication de son numéro minéralogique, de sa marque, de sa couleur et, éventuellement, de son contenu apparent et de ses détériorations visibles ;
5° La mention de l’absence ou de la présence du débiteur.
L’immobilisation vaut saisie sous la garde du propriétaire du véhicule ou, après son enlèvement, sous la garde de celui qui l’a reçu en dépôt.

L’article R 223-10 du même code précise que lorsque le véhicule a été immobilisé pour obtenir le paiement d’une somme d’argent et que le créancier ne met pas en œuvre la procédure de réalisation simplifiée prévue par le second alinéa de l’article 2346 du code civil, l’huissier de justice signifie au débiteur, huit jours au plus tard après l’immobilisation, un commandement de payer qui contient à peine de nullité :
1° La copie du procès-verbal d’immobilisation ;
2° Un décompte distinct des sommes réclamées, en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
3° L’avertissement qu’à défaut de paiement et passé le délai d’un mois pour vendre le véhicule à l’amiable conformément aux dispositions des articles R. 221-30 à R. 221-32, celui-ci est vendu aux enchères publiques ;
4° L’indication que les contestations sont portées, au choix du débiteur, devant le juge de l’exécution du lieu où il demeure ou du lieu d’immobilisation du véhicule ;
5° La reproduction des articles R. 221-30 à R. 221-32.

En l’espèce, le procès-verbal d’immobilisation en date du 19 octobre 2022 et la dénonciation du-dit procès-verbal d’immobilisation font tous deux référence à la décision du tribunal de commerce de LILLE en date du 26 septembre 2002, soit la décision exécutée.
La référence ajoutée à une décision ultérieure du juge de l’exécution est indifférente. Les deux actes font bien mention de la décision en vertu de laquelle le véhicule a fait l’objet d’une immobilisation.

Par ailleurs, la dénonciation du procès-verbal d’immobilisation en date du 24 octobre 2022 comporte un décompte qui distingue clairement les sommes dues en principal de celles réclamées au titre des frais de procédure ou des intérêts. Ce décompte mentionne également le taux d’intérêt retenu pour le calcul des intérêts.

Dans ces conditions, le procès verbal d’immobilisation et sa dénonciation sont réguliers.

En conséquence, il convient de débouter Monsieur [C] [X] de sa demande en nullité du procès-verbal d’immobilisation en date du 19 octobre 2022 et de la dénonciation de ce procès-verbal en date du 24 octobre 2022.

SUR LA REGULARITE FORMELLE DU PROCES-VERBAL D’INDISPONIBILITE DU CERTIFICAT D’IMMATRICULATION ET DE SA DENONCIATION

Aux termes de l’article R 223-2 du la déclaration valant saisie prévue à l’article L. 223-1 contient à peine de nullité :
1° Les nom et adresse du débiteur ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
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2° Le numéro d’immatriculation et la marque du véhicule saisi ;
3° La mention du titre exécutoire dont se prévaut le créancier.
Cette déclaration est signifiée à l’autorité administrative mentionnée à l’article L. 223-1.

L’article 114 du code de procédure civile dispose qu’aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.

En l’espèce, si le procès verbal d’immobilisation en date du 12 octobre 2022 mentionne qu’il est effectué en exécution d’un jugement du tribunal de commerce de TOURCOING en date du 26 septembre 2002 alors que la décision exécutée émane du tribunal de commerce de LILLE, cette erreur est corrigée par la dénonciation du procès-verbal qui indique quant à elle que la mesure est prise en exécution d’un jugement du tribunal de commerce de LILLE en date du 26 septembre 2002. L’erreur alors commise sur le n° de RG est, pour le justiciable, indifférente.

Dans ces conditions, il n’est résulté aucun grief pour Monsieur [X] des deux erreurs purement matérielles commises dans la rédaction de ces actes et le demandeur n’a pu réellement ignorer que la mesure était prise en exécution de la décision du tribunal de commerce de LILLE en date du 26 septembre 2002.

En conséquence, il convient de débouter Monsieur [C] [X] de sa demande en nullité du procès-verbal d’indisponibilité en date du 12 octobre 2022 et de la dénonciation de ce procès-verbal en date du 19 octobre 2022.

SUR LA PRESCRIPTION DU TITRE EXECUTOIRE

Aux termes de l’article L 111-4 du code des procédures civiles d’exécution, l’exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l’article L. 111-3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long.
Le délai mentionné à l’article 2232 du code civil n’est pas applicable dans le cas prévu au premier alinéa.

L’article 2222 alinéa 2 du code civil dispose par ailleurs qu’en cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

L’article 2244 du code civil précise encore que le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par une mesure conservatoire prise en application du code des procédures civiles d’exécution ou un acte d’exécution forcée.

En l’espèce, le jugement exécuté, en date du 26 septembre 2002 se prescrivait initialement par 30 ans.
Cependant, la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, entrée en vigueur le 19 juin 2008, a ramené la prescription des décisions de justice à 10 ans.
Conformément aux dispositions de l’alinéa 2 de l’article 2222, le jugement du 26 septembre 2002 s’est vu appliquer le nouveau délai de prescription, lequel expirait, initialement le 19 juin 2018.

Toutefois, un commandement de payer aux fins de saisie vente, pris en exécution de la décision du 26 septembre 2002, a été délivré à Monsieur [X] le 30 mai 2018.
Ce commandement aux fins de saisie vente, qui, sans être un acte d’exécution forcée, engage la mesure d’exécution forcée, interrompt la prescription de la créance qu’il tend à recouvrer.
Du fait de cette interruption de la prescription, cette dernière ne sera désormais acquise que le 1er juin 2028.
Le titre exécuté n’est donc pas prescrit.

En conséquence, il convient de dire que le titre exécutoire fondant les mesures d’exécution contestées n’est pas prescrit.

SUR LA SAISISSABILITE DES VEHICULES

Aux termes de l’article 1415 du code civil, chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n’aient été contractés avec le consentement exprès de l’autre conjoint qui, dans ce cas, n’engage pas ses biens propres.

L’article L 313-1 du code monétaire et financier dispose que constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend, dans l’intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu’un aval, un cautionnement, ou une garantie.
Sont assimilés à des opérations de crédit le crédit-bail, et, de manière générale, toute opération de location assortie d’une option d’achat.

En l’espèce, il est constant que la dette poursuivie est une dette professionnelle de Monsieur [X], contractée dans le cadre d’une ancienne activité professionnelle, et issue d’un crédit-bail, assimilable à un emprunt.

Il résulte par ailleurs de la pièce n°1 produite aux débats par la société EOS FRANCE que le contrat de crédit bail à l’origine de la créance poursuivie a été établi au nom de l’enseigne qu’exploitait alors Monsieur [X] – « TRANSPORT [X] » – et que l’épouse de Monsieur [X] n’est pas intervenue à ce contrat.

Le jugement exécuté émane par ailleurs du tribunal de commerce, la dette étant née entre deux commerçants.

De ces éléments résulte que la dette est issue d’une opération assimilable à un emprunt contractée dans le cadre de l’activité professionnelle et commerciale de Monsieur [X] à qui elle est donc propre.

Par application de l’article 1415 sus-rappelé, les biens communs du couple ne peuvent pas répondre de cette dette.

Monsieur [X] démontre par sa pièce n°6 qu’il s’est marié avec Madame [U] le 22 mai 1999, sans contrat de mariage préalable.
Les époux [X] sont donc mariés sous le régime de la communauté légale et tout bien meuble acquis postérieurement à leur union est présumé commun.

Le véhicule CITROEN C4 [Immatriculation 6], acheté par les époux [X] en juin 2021 est donc un bien présumé commun.

Il en va de même pour les véhicules RENAULT CLIO [Immatriculation 7], qui a été acquis en mars 2016 – et qui a par ailleurs disparu depuis : voir le certificat de destruction produit en en pièce n°9 par Monsieur [X] – ainsi que pour le véhicule RENAULT CLIO [Immatriculation 8] acquis par les époux [X] en juin 2021.

En conséquence, et d’une part, il doit être ordonné la mainlevée de l’indisponibilité des certificats d’immatriculation en date du 12 octobre 2022 en ce qu’elle porte sur les véhicules CITROEN C4 [Immatriculation 6], RENAULT CLIO [Immatriculation 7] et RENAULT CLIO [Immatriculation 8] ; d’autre part, il doit également être ordonné la mainlevée de la saisie par immobilisation en date du 19 octobre 2022 en ce qu’elle porte sur le véhicule CITROEN C4 PICASSO [Immatriculation 6].

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Les saisies critiquées portent également sur un quatrième véhicule de marque MERCEDES immatriculé [Immatriculation 5].

La seule chose dont Monsieur [X] justifie pour ce véhicule est qu’il s’agit d’un véhicule très ancien.

Si le Commissaire de justice reprend ce véhicule dans ses saisies, c’est qu’il apparaît toujours enregistré au fichier SIV de la préfecture comme étant encore la propriété de Monsieur [X].
La date d’achat de ce véhicule est inconnue et il ne peut donc être présumé commun. Monsieur [X] ne justifie par aucune pièce ne plus être en possession de ce véhicule.

En conséquence, il convient de valider la saisie par indisponibilité du certificat d’immatriculation de ce véhicule MERCEDES [Immatriculation 5].

SUR LE MONTANT DE LA CREANCE

Il résulte de l’article 1353 du code civil que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

En l’espèce, Monsieur [X] prétend n’avoir plus rien à régler et conteste les sommes qui lui sont réclamées au motif que la dette aurait été apurée par l’assureur, que les intérêts réclamés seraient prescrits pour une grande partie et qu’il ne serait pas justifié des sommes réclamées au titre des frais d’exécution.

Le jugement du 26 septembre 2002 condamne Monsieur [X] à payer à la société DIAC la somme de 9 780,07 € avec intérêts conventionnels au taux de 6,39 % ainsi que 375 € d’article 700.

La société EOS FRANCE indique que l’assureur a réglé une somme de 7 646,12 € en 2004.

La société EOS FRANCE réclame des intérêts sur les sommes dues entre le 26 juillet 2002 et le 13 octobre 2022.
Cependant, et au vu des pièces produites aux débats par la société EOS FRANCE, après des premières mesures d’exécution en 2003, plus aucune démarche interruptive de prescription n’a été entreprise avant le 30 novembre 2015.
Depuis cette date, la prescription est régulièrement interrompue par différents actes d’exécution forcée.

La société EOS FRANCE ne peut donc réclamer des intérêts à Monsieur [X] que depuis le 30 novembre 2015 et uniquement sur la somme de 9 780,07 – 7 646,12 = 2 133,95 €.

Les éléments à la procédure ne permettent pas de liquider immédiatement cette dette d’intérêts.

S’agissant des frais de procédure et d’acte d’huissier, il n’est pas possible en l’état de l’imprécision des dossiers des parties d’identifier à quels actes se rapportent les frais réclamés et d’en vérifier la réalité et la pertinence.
Dans ces conditions, il doit être considéré que ces frais ne sont pas justifiés et la société EOS FRANCE ne peut donc en demander paiement à Monsieur [X].

Les saisies critiquées ne peuvent donc être pratiquées en garantie que des sommes suivantes :
2 133,95 € avec intérêts conventionnels au taux de 6,39 % depuis le 30 novembre 2015,375 € avec intérêts au taux légal depuis le 30 novembre 2015.
En conséquence, il convient de dire que Monsieur [X] reste redevable envers la société EOS FRANCE des sommes suivantes :
2 133,95 € avec intérêts conventionnels au taux de 6,39 % depuis le 30 novembre 2015 ,375 € avec intérêts au taux légal depuis le 30 novembre 2015.SUR LES DOMMAGES ET INTERETS

Aux termes de l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire, le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
Dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des contestations relatives à leur mise en œuvre.
Le juge de l’exécution connaît, sous la même réserve, de la procédure de saisie immobilière, des contestations qui s’élèvent à l’occasion de celle-ci et des demandes nées de cette procédure ou s’y rapportant directement, même si elles portent sur le fond du droit ainsi que de la procédure de distribution qui en découle.
Il connaît, sous la même réserve, des demandes en réparation fondées sur l’exécution ou l’inexécution dommageables des mesures d’exécution forcée ou des mesures conservatoires.
Il connaît de la saisie des rémunérations, à l’exception des demandes ou moyens de défense échappant à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire.
Le juge de l’exécution exerce également les compétences particulières qui lui sont dévolues par le code des procédures civiles d’exécution.

En l’espèce, si Monsieur [C] [X] a pu démontrer que certaines saisies étaient irrégulières, il ne démontre aucunement qu’elles ont été abusives et illégitimes.
Monsieur [X] sait devoir les sommes réclamées depuis de très nombreuses années. Ses créanciers ont tenté à de multiples reprises d’obtenir paiement mais Monsieur [X] ne s’est jamais exécuté et n’a jamais versé quelque somme que ce soit.
La résistance de Monsieur [X] à régler ses dettes a obligé ses créanciers à agir par voies d’exécution forcée, dont il n’est dès lors pas établi qu’elles soient illégitimes et abusives.

En conséquence, il convient de débouter Monsieur [C] [X] de sa demande de dommages et intérêts.

SUR LES DEPENS

Il résulte de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par une décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, les parties succombent chacune partiellement en leurs demandes.

En conséquence, il convient de dire que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

SUR LES FRAIS DE PROCEDURE

Il résulte de l’article 700 du code de procédure civile que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

En l’espèce, chacune des parties succombe partiellement en ses demandes et reste tenue de ses propres dépens.

Dans ces conditions, il convient de dire que chacune des parties conservera la charge de ses frais de procédure.

En conséquence, il convient de débouter les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe,

DEBOUTE Monsieur [C] [X] de sa demande en nullité du procès-verbal d’immobilisation en date du 19 octobre 2022 et de la dénonciation de ce procès-verbal en date du 24 octobre 2022 ;

DEBOUTE Monsieur [C] [X] de sa demande en nullité du procès-verbal d’indisponibilité en date du 12 octobre 2022 et de la dénonciation de ce procès-verbal en date du 19 octobre 2022 ;

DIT que le titre exécutoire fondant les mesures d’exécution contestées n’est pas prescrit ;

ORDONNE la mainlevée de l’indisponibilité des certificats d’immatriculation en date du 12 octobre 2022 en ce qu’elle porte que les véhicules CITROEN C4 [Immatriculation 6], RENAULT CLIO [Immatriculation 7] et RENAULT CLIO [Immatriculation 8] ;

VALIDE la saisie par indisponibilité du certificat d’immatriculation du véhicule MERCEDES [Immatriculation 5] ;

DEBOUTE en conséquence Monsieur [C] [X] de sa demande tendant à obtenir que les frais de la saisie par indisponibilité des certificats d’immatriculation soient laissés à la charge de la société EOS FRANCE ;

ORDONNE la mainlevée de la saisie par immobilisation en date du 19 octobre 2022 qui porte sur le véhicule CITROEN C4 PICASSO [Immatriculation 6] ;

DIT que la société EOS FRANCE conservera à sa charge les frais engendrés par la saisie immobilisation en date du 19 octobre 2022 ;

DIT que Monsieur [C] [X] reste redevable envers la société EOS FRANCE des sommes suivantes :
2 133,95 € avec intérêts conventionnels au taux de 6,39 % depuis le 30 novembre 2015,375 € avec intérêts au taux légal depuis le 30 novembre 2015 ;
DEBOUTE Monsieur [C] [X] de ses demandes de dommages et intérêts ;

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes présentées sur le fondement de l’article.

La greffièreLe Président

Sophie ARESDamien CUVILLIER

Expédié aux parties le :

 


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