Saisie-attribution : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/04217

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Saisie-attribution : décision du 23 mars 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 22/04217

23 mars 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
22/04217

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 3

ARRÊT DU 23/03/2023

N° de MINUTE : 23/292

N° RG 22/04217 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UPDM

Jugement (N° 21/01215) rendu le 11 Août 2022 par le Juge de l’exécution d’Arras

APPELANT

Monsieur [B] [G]

né le [Date naissance 5] 1975 à [Localité 10] – de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Frédéric Brazier, avocat au barreau de Lille, avocat constitué

INTIMÉE

SA Caisse d’Epargne et de Prévoyance de Midi Pyrénées agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Francis Deffrennes, avocat au barreau de Lille avocat plaidant et Me Anne-Sophie Gabriel, avocat au barreau d’Arras avocat plaidant

DÉBATS à l’audience publique du 16 février 2023 tenue par Sylvie Collière magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :Ismérie Capiez

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Catherine Convain, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Catherine Ménegaire, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Ismérie Capiez, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 31 janvier 2023

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement réputé contradictoire du 28 avril 2017, le tribunal de commerce d’Albi a :

– condamné solidairement l’EURL Lab dentaire 81 et M. [B] [G] à payer à la Caisse d’épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées (la Caisse d’épargne) les sommes de :

* 15 138,86 euros provisoirement arrêtée au 16 mars 2017 au titre du prêt n° 4463724, augmentée des intérêts conventionnels de 7,46 % sur cette somme jusqu’à parfait paiement ;

* 37 835,88 euros au titre du prêt n° 81-71344 provisoirement arrêtée au 16 mars 2017 augmentée de l’intérêt au taux conventionnel majoré de 8,95 % jusqu’à parfait paiement ;

– ordonné la capitalisation annuelle des intérêts ;

– ordonné l’exécution provisoire ;

– condamné l’EURL Lab dentaire 81 et M. [B] [G] au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné l’EURL Lab dentaire 81 et M. [B] [G] aux dépens de l’instance.

Ce jugement a été signifié à M. [G] par acte du 5 octobre 2017, selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile.

Selon procès-verbal du 6 septembre 2021, la Caisse d’épargne a, en vertu du jugement du 28 avril 2017, fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes ouverts par M. [G] dans les livres de la banque Financière des paiements électroniques pour un montant de 75 734,95 euros.

La mesure d’exécution a été dénoncée à M. [G] par acte du 7 septembre 2021.

Par acte du 6 octobre 2021, M. [G] a fait assigner la Caisse d’épargne devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Arras aux fins de contester cette saisie-attribution.

Par jugement contradictoire du 11 août 2022, le juge de l’exécution a :

– débouté M. [G] de sa demande aux fins d’annulation de la saisie-attribution pratiquée à son encontre le 6 septembre 2021 par la Caisse d’épargne ;

– déclaré irrecevable la demande M. [G] aux fins de sursis à statuer ;

– accordé à M. [G] l’exonération totale, jusqu’au 6 novembre 2021, de la majoration du taux d’intérêt légal produit par les sommes dues en vertu du jugement du tribunal de commerce d’Albi en date du 28 avril 2017 ;

– déclaré irrecevable la demande de M. [G] aux fins de réduction des taux contractuels d’intérêt produit par les sommes dues en vertu du jugement du 28 avril 2017 ;

– condamné M. [G] à verser à la Caisse d’épargne la somme de 800 euros en indemnisation des frais exposés et non compris dans les dépens :

– condamné M. [G] à supporter la charge des entiers dépens de l’instance.

Par déclaration adressée par la voie électronique le 2 septembre 2022, M. [G] a relevé appel de ce jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande aux fins d’annulation de la saisie-attribution pratiquée à son encontre le 6 septembre 2021 par la Caisse d’épargne ; a déclaré irrecevable sa demande de sursis à statuer ; a déclaré irrecevable sa demande aux fins de réduction des taux contractuels d’intérêt produit par les sommes dues en vertu du jugement du 28 avril 2017 et en ce qu’elle l’a condamné à verser à la Caisse d’épargne la somme de 800 euros en indemnisation des frais exposés et non compris dans les dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions du 20 octobre 2022, il demande à la cour, au visa de l’article 74 du code de procédure civile, d’infirmer le jugement déféré dans les termes de son acte d’appel et en conséquence de :

A titre principal et in limine litis,

– sursoir à statuer dans l’attente de la décision de la cour d’appel de Toulouse sur l’appel interjeté contre le jugement du tribunal de commerce d’Albi en date du 28 avril 2017 ;

A titre subsidiaire, et au fond,

– annuler la saisie-attribution pratiquée par la Caisse d’épargne à son encontre le 6 septembre ;

– en conséquence, déclarer nulle et sans effet cette saisie-attribution ;

A titre infiniment subsidiaire,

– dire y avoir lieu à application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier et dire y avoir lieu à exonération de la majoration du taux légal ;

Et encore plus subsidiairement,

– réduire le taux contractuel de 7,46 % et le taux contractuel de 8,95 % s’agissant d’une clause pénale ;

En tout état de cause,

– condamner la Caisse d’épargne à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions du 10 novembre 2022, la Caisse d’épargne demande à la cour de :

– débouter M. [G] de ses fins, demandes et prétentions d’appel ;

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 11 août 2022 ;

Y ajoutant,

– condamner M. [G] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux dépens d’appel.

MOTIFS

Sur la demande de sursis à statuer :

La demande de sursis à statuer constitue une exception de procédure qui, aux termes de l’article 74 du code de procédure civile, doit à peine d’irrecevabilité être soulevée simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir;

Ces dispositions sont applicables quelle que soit la partie qui soulève l’exception de sursis à statuer.

A supposer même qu’il ne puisse être reproché à M. [G] de ne pas avoir présenté sa demande de sursis à statuer dans son assignation du 6 octobre 2021, puisqu’il n’avait pas encore à cette date eu connaissance du jugement du 28 avril 2017 fondant la mesure d’exécution, qui lui a été communiqué par la Caisse d’épargne au cours de l’instance suivie devant le juge de l’exécution, il devait en revanche, après avoir, le 26 avril 2022, relevé appel de ce jugement, présenter cette demande in limine litis. Or, force est de constater que dans les conclusions déposées le 28 avril 2022 qu’il a soutenues à l’audience du même jour, il ne l’a formée qu’à titre subsidiaire. C’est donc à juste titre que le jugement déféré a déclaré cette demande irrecevable. C’est également à juste titre qu’il a rappelé, par un motif surabondant, qu’en application des dispositions de l’article R. 121-1 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution ne pouvait suspendre l’exécution de la décision servant de fondement aux poursuites.

Le jugement déféré qui a déclaré la demande de sursis à statuer irrecevable sera donc confirmé, étant précisé que la demande de sursis à statuer n’ayant pas été soulevée in limine litis devant le premier juge, il importe peu qu’elle le soit devant la cour.

Sur la demande d’annulation de la saisie-attribution :

Selon l’article L. 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent.

L’article 659 du code de procédure civile dispose que ‘lorsque la personne à qui l’acte doit être signifié n’a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l’huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu’il a accomplies pour rechercher le destinataire de l’acte.

Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l’huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l’acte objet de la signification.

Le jour même, l’huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l’accomplissement de cette formalité.’

Il résulte de ce texte que la signification d’un acte selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile en un lieu autre que la dernière adresse connue ne vaut pas notification.

M. [G] soutient que le titre exécutoire n’a pas été valablement signifié. Il fait valoir que la signification du jugement du 28 avril 2017 a été délivrée chez son ex-épouse, Mme [R] [Adresse 3] et qu’il ne peut s’agir de sa dernière adresse connue au sens de l’article 659 dès lors qu’il n’a jamais résidé à cette adresse. Il ajoute qu”on recherchera en vain dans quel document la banque aurait trouvé cette adresse’.

Il résulte effectivement des pièces produites par la Caisse d’épargne que l’adresse susvisée mentionnée sur l’acte de signification du 5 octobre 2017 ne correspond à aucune des adresses figurant au dossier :

– les deux engagements signés par M. [G] en vue de se rendre caution des engagements de la société Lab dentaire 81 au titre des deux prêts consentis à cette société par la Caisse d’épargne mentionnent, s’agissant de l’engagement du 21 mai 2012 qu’il est domicilié [Adresse 9] chez M. [G] [Y] à [Localité 11]) et s’agissant de l’engagement du 28 mai 2015 qu’il est domicilié [Adresse 2]) ;

– le tribunal de commerce dont l’huissier s’est rapproché dans le cadre des diligences qu’il a effectuées pour rechercher l’adresse de M. [G] lors de la délivrance de l’assignation devant le tribunal de commerce d’Albi (laquelle a été délivrée le 11avril 2017 selon les modalités de l’article 659 du code de procédure civile, au dernier domicile connu de M. [G] chez Mme [R] [Adresse 3]) a communiqué à l’huissier l’adresse [Adresse 9] et le père de M. [G], contacté par téléphone après obtention du numéro par la mairie de [Localité 11], a indiqué à l’huissier que son fils n’était pas domicilié chez lui, qu’il n’avait plus de contact avec lui depuis quelque temps et ne connaissait pas sa nouvelle adresse ;

– les mêmes renseignements ont été communiqués à l’huissier tant par le tribunal de commerce d’Albi que par le père de M. [G] lors des diligences effectuées par ce dernier pour signifier le jugement du 28 avril 2017.

L’adresse résidence Clos Marinier à [Localité 8] n’apparaît sur aucun document bancaire, ne ressort pas des diligences effectuées par l’huissier tant avant qu’après le jugement du 28 avril 2017 et est déniée par l’appelant. La Caisse d’épargne n’explique pas plus dans ses conclusions ce qui établirait qu’il s’agit de la dernière adresse connue de M. [G].

En l’état de l’ensemble de ces éléments, et même si le père de M. [G] a indiqué que ce dernier n’était pas domicilié chez lui quand il a été contacté par l’huissier, il demeure que c’est son adresse qui apparaît comme étant la dernière adresse connue de M. [B] [G].

En conséquence, en se présentant à l’adresse résidence Clos Marinier à [Localité 8] et non à l’adresse [Adresse 9] pour signifier le jugement du 28 avril 2017, l’huissier ne s’est pas présenté à la dernière adresse connue de M. [G] de sorte que la signification ne vaut pas notification.

C’est donc à juste titre que M. [G] demande que la saisie-attribution, qui n’est pas fondée sur un titre exécutoire, soit annulée.

Il convient donc d’infirmer le jugement déféré et d’annuler la saisie-attribution pratiquée par procès-verbal du 6 septembre 2021 et dénoncée à M. [G] le 7 septembre suivant.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Le sens de la présente décision conduit à infirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné M. [G] aux dépens ainsi qu’à régler à la Caisse d’épargne la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. La Caisse d’épargne sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et déboutée de ses demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l’appel.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge de M. [G] les frais non compris dans les dépens qu’il a exposés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer de M. [B] [G] ;

L’infirme sur le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare nulle la saisie-attribution pratiquée par procès-verbal du 6 septembre 2021 et dénoncée à M. [B] [G] le 7 septembre 2021 ;

Déboute la Caisse d’épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées de ses demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance et de l’appel ;

Déboute M. [B] [G] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Condamne la Caisse d’épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier

Ismérie CAPIEZ

Le président

Sylvie COLLIERE

 


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