Saisie-attribution : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18927

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Saisie-attribution : décision du 1 février 2024 Cour d’appel de Paris RG n° 22/18927

1 février 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/18927

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

PÔLE 1 – CHAMBRE 10

ARRÊT DU 01 FÉVRIER 2024

(n° 45, 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général

N° RG 22/18927 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVLC

Décision déférée à la cour

Jugement du 11 octobre 2022-Juge de l’exécution d’Evry-RG n° 22/00297

APPELANTE

Madame [L] [N]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Nathalie ORPHELIN-BARBERON, avocat au barreau de PARIS, toque : B0361

Ayant pour avocat plaidant Me Marie-Pierre SAGET-JOLIVIÈRE, du barreau de GUADELOUPE, SAINT-MARTIN ET SAINT-BARTHÉLEMY

INTIMÉ

Monsieur [K] [H]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Ayant pour avocat plaidant Me Laurence GUEGAN-GELINET, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 21 décembre 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Catherine LEFORT, conseiller, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

Déclarant agir en vertu d’un jugement rendu par le Tribunal d’instance de Pointe-à-Pitre le 18 décembre 2019, signifié le 14 février 2020, M. [H] a, le 6 août 2021, dressé un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la société BNP Paribas et à l’encontre de Mme [N], pour avoir paiement de la somme de 18 786,13 euros. Cette saisie-attribution a été dénoncée le 11 août 2021 à la débitrice.

Saisi par Mme [N] selon assignation datée du 13 septembre 2021, le juge de l’exécution d’Evry a par jugement en date du 11 octobre 2022 :

– déclaré irrecevable la contestation de la saisie-attribution ;

– débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

– condamné Mme [N] aux dépens.

Pour statuer ainsi, il a relevé que la dénonciation de la contestation de la saisie-attribution avait été envoyée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à la SAS Id Facto Monthléry, huissier de justice en Essonne, alors que ce n’était pas elle qui était l’huissier de justice instrumentaire, mais la SAS Id Facto Le [Localité 9], huissier de justice en Seine-saint-Denis.

Selon déclaration en date du 7 novembre 2022, Mme [N] a relevé appel de ce jugement. La déclaration d’appel a été signifiée à la partie adverse le 13 janvier 2023.

En ses conclusions notifiées le 30 novembre 2023, Mme [N] expose :

– que son appel est recevable, le jugement ayant été notifié en lettre recommandée avec demande d’avis de réception par le greffe au cabinet de son conseil et non pas à elle-même, si bien que le délai d’appel n’a pas couru ;

– que la déclaration d’appel n’est pas caduque ;

– que la contestation de la saisie-attribution est recevable, car la SAS Id Facto constitue une seule et même étude d’huissier de justice, avec un seul n° RCS, même s’il existe plusieurs numéros SIRET ; que ladite étude d’huissier a attribué à son dossier un seul et même numéro ;

– que l’acte de saisie-attribution mentionnait qu’il était dressé par la SAS Id Facto, titulaire d’un office d’huissier de justice au [Localité 9] ;

– que depuis le 1er janvier 2017, les huissiers de justice sont dotés d’une compétence nationale ;

– que de plus, la jurisprudence de la Cour de cassation considère que lorsque l’huissier de justice a appris qu’une contestation de la saisie-attribution est formée, il n’y a pas lieu de lui dénoncer ladite contestation ;

– que celle-ci est donc recevable, contrairement à ce qu’a estimé le premier juge ;

– que l’acte de signification du jugement fondant les poursuites, dressé dans les formes de l’article 659 du code de procédure civile, est irrégulier ;

– qu’en effet l’huissier de justice instrumentaire lui a notifié cet acte à l’adresse des lieux loués par M. [H], à [Localité 4] (Guadeloupe), alors qu’il savait pertinemment qu’elle avait déménagé au [Localité 7] (97), puis à [Localité 8] (94), puis à [Localité 6] (91) ; qu’en effet cet huissier de justice était chargé de recouvrer le solde d’un prêt à elle consenti par la Poste ; que de plus, il lui avait adressé un courrier et connaissait donc sa nouvelle adresse ;

– qu’elle lui avait adressé un mail le 12 juin 2019 et était donc en contact avec lui ;

– que d’autre part, l’acte de saisie-attribution n’est pas conforme aux dispositions de l’article R 211-1 du code des procédures civiles d’exécution, faute de décompte de créance.

Mme [N] demande en conséquence à la Cour de :

– déclarer son appel recevable ;

– annuler l’acte de signification du jugement en date du 14 février 2020 ;

– déclarer en conséquence le jugement du 18 décembre 2019 non avenu ;

– constater que la prescription édictée à l’article 7-1 alinéa 1er de la loi du 6 juillet 1989 est acquise ;

– subsidiairement, annuler la saisie-attribution ;

– condamner M. [H] au paiement de la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées le 13 février 2023, M. [H] réplique :

– que l’appel est irrecevable pour avoir été formé le 7 novembre 2022, soit plus de quinze jours après la notification du jugement survenue le 19 octobre 2022 ;

– que la déclaration d’appel est caduque, pour lui avoir été signifiée le 13 janvier 2023, soit plus de dix jours après l’avis de fixation du greffe daté du 3 janvier 2023 ;

– que c’est Maître [O], membre de la SAS Id Facto Le [Localité 9], huissier de justice au [Localité 9], qui a mis en place la saisie-attribution contestée, et non pas la SAS Id Facto Monthléry ; que la dénonciation de la contestation à l’huissier de justice instrumentaire est obligatoire, la Cour de cassation n’ayant admis que le débiteur pouvait s’en dispenser seulement lorsque l’assignation avait été délivrée à domicile élu, ce qui n’était pas le cas en l’espèce ;

– que le jugement a donc déclaré la contestation de la saisie-attribution irrecevable à juste titre ;

– que s’agissant de l’acte de signification du jugement, il est régulier, étant rappelé que Mme [N] avait changé d’adresse à quatre reprises en moins de cinq ans ;

– que le décompte de créance visé dans l’acte de saisie-attribution est détaillé, alors qu’il n’avait pas à ventiler le nombre des acomptes et chacun de leurs montants.

M. [H] demande en conséquence à la Cour de :

– déclarer l’appel irrecevable ;

– confirmer le jugement ;

– subsidiairement, ‘confirmer’ la saisie-attribution ;

– débouter Mme [N] de ses prétentions ;

– la condamner au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens.

Par ordonnance en date du 30 mars 2023, le conseiller délégué s’est déclaré incompétent pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel, a dit que la déclaration d’appel n’était pas caduque, a rejeté les demandes en application de l’article 700 du code de procédure civile, et a condamné M. [H] aux dépens de l’incident.

Par message RPVA en date du 22 décembre 2023, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen soulevé d’office, tiré de l’absence de demande d’infirmation du jugement dont appel dans les conclusions de l’appelante.

Par note en délibéré du 29 décembre 2023, l’intimé s’associe au moyen relevé d’office par la cour et indique qu’à supposer que l’appel soit recevable, en l’absence de demande d’infirmation du jugement dans le dispositif des conclusions de l’appelante, la cour ne peut que confirmer le jugement.

Par note en délibéré du 9 janvier 2024, l’appelante demande à la cour de la déclarer recevable en son appel et ses conclusions. Elle fait valoir qu’il résulte expressément de sa déclaration d’appel que son appel porte sur le chef du jugement qui la déclare irrecevable en sa contestation de la saisie-attribution, de sorte que ni l’intimé ni la cour ne pouvaient se méprendre sur la portée de son appel, et ce d’autant qu’elle a réitéré ses demandes sur lesquelles le premier juge n’avait pas statué. Elle ajoute qu’elle a indiqué dans le rappel des faits et de la procédure qu’elle demandait la réformation du jugement ; que l’acte d’appel consiste à obtenir soit l’annulation soit la réformation d’un jugement ; que retenir que la cour serait tenue de confirmer le jugement reviendrait à considérer que l’appelant a renoncé à son appel, ce qui contreviendrait à l’article 558 du code de procédure civile, alors qu’elle a précisément demandé à la cour de déclarer sa contestation recevable, ce qui confirme sa volonté de faire appel du jugement ; qu’à l’évidence, seule l’infirmation, et non l’annulation, était concernée. Elle soutient en outre qu’il n’est pas certain que l’annulation ou la réformation soit une prétention devant figurer au dispositif des conclusions en application de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile. Enfin, elle souligne que la demande d’observations de la cour, qui vise l’absence de demande d’infirmation et non pas l’absence de demande d’infirmation ou d’annulation, montre que la cour a, comme l’intimé, parfaitement intégré que son appel tendait à l’infirmation du jugement.

La cour a sollicité du greffe du juge de l’exécution la communication de l’accusé de réception de la notification du jugement à Mme [N].

MOTIFS

Il résulte de l’article R 121-20 du code des procédures civiles d’exécution que le délai d’appel contre les jugements du juge de l’exécution est de quinze jours à compter de la notification de la décision.

En l’espèce, le jugement a été notifié à Mme [N] par le greffe par lettre recommandée avec accusé de réception, mais la lettre a été retournée au greffe le 26 octobre 2022 avec la mention ‘destinataire inconnu à l’adresse’. L’appel, formé le 7 novembre 2022, est donc recevable, à défaut pour l’intimé de justifier d’une signification par commissaire de justice faisant courir le délai d’appel.

Selon les dispositions de l’article 905-1 alinéa 1er du code de procédure civile, lorsque l’affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l’appelant signifie la déclaration d’appel dans les dix jours de la réception de l’avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d’appel relevée d’office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l’intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d’appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

Par ordonnance en date du 30 mars 2023, qui n’a pas été frappée d’un déféré, le conseiller délégué a jugé que la déclaration d’appel n’était pas caduque. Les contestations de M. [H] à ce sujet sont irrecevables.

En vertu de l’article 542 du code de procédure civile, l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.

Ainsi, dans la procédure d’appel avec représentation obligatoire, les prétentions des parties sont déterminées par leurs écritures régulièrement déposées et signifiées, qui définissent l’objet du litige (article 910-1 du code de procédure civile ). En outre, conformément à l’alinéa 3 de l’article 954 du même code, la juridiction n’est saisie que des prétentions reprises dans le dispositif et n’est tenue de répondre qu’aux moyens expressément présentés dans la partie discussion des dernières conclusions et non à des moyens implicitement réitérés ou figurant par erreur dans les autres parties des conclusions. Ces exigences ont été fortement accentuées par le nouvel article 910-4 du code de procédure civile issu du décret du 6 mai 2017, qui impose la concentration des prétentions dès les premières conclusions.

Au cas présent, il n’est pas demandé au dispositif des dernières conclusions de l’appelante d’infirmer ou d’annuler en tout ou partie le jugement en date du 11 octobre 2022.

Dans ces conditions, la cour n’est pas saisie de demandes tendant à remettre en cause la décision dont appel, qui ne peut donc qu’être confirmée.

Mme [N], qui succombe en son appel, sera condamnée au paiement de la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

– DECLARE l’appel recevable ;

– DECLARE M. [K] [H] irrecevable en sa demande de prononcé de caducité de la déclaration d’appel ;

– CONFIRME le jugement en date du 11 octobre 2022 ;

– CONDAMNE Mme [L] [N] à payer à M. [K] [H] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNE Mme [L] [N] aux dépens d’appel.

Le greffier, Le président,

 


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