Saisie-attribution : décision du 2 février 2024 Tribunal judiciaire de Lille RG n° 23/00177

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Saisie-attribution : décision du 2 février 2024 Tribunal judiciaire de Lille RG n° 23/00177

2 février 2024
Tribunal judiciaire de Lille
RG n°
23/00177

COUR D’APPEL DE DOUAI
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
_______________________
JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT rendu le 02 Février 2024

N° RG 23/00177 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XEPI

DEMANDEUR :

Monsieur [O] [K]
[Adresse 2]
[Localité 4]

représenté par Me Guillaume BELIART, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS :

Monsieur [P] [X]
[Adresse 3]
[Localité 5]

Madame [E] [G] épouse [X]
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentés par la SCP LAYDEKER SAMMARCELLI MOUSSEAU, avocats au barreau de BORDEAUX , avocats plaidants, et Me Ophélie MARTIAUX, avocat au barreau de LILLE, avocat postulant

MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne DE MARICOURT, Juge du tribunal judiciaire de LILLE

Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE

GREFFIER : Sophie ARES

DÉBATS : A l’audience publique du 15 Décembre 2023, l’affaire a été mise en délibéré au 02 Février 2024

JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe

Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/00177 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XEPI

EXPOSE DU LITIGE

Par acte d’huissier de justice du 13 décembre 2022, Monsieur et Madame [X] ont fait dénoncer à Monsieur [K] une saisie-attribution exécutée sur ses comptes bancaires ouverts au sein de la banque Scalbert Dupont le 6 décembre 2022, ce en exécution d’une ordonnance de référé rendue par le juge des référés du tribunal de proximité de Tourcoing le 3 janvier 2022 et d’un jugement interprétatif du tribunal de proximité de Tourcoing du 27 avril 2022.

Par acte d’huissier de justice du 13 janvier 2023, Monsieur [K] a fait assigner Monsieur et Madame [X] devant ce tribunal à l’audience du 15 mai 2023 afin de contester cet acte d’exécution.

Après plusieurs renvois à l’initiative des parties, l’affaire a été entendue à l’audience du 15 décembre 2023 au cours de laquelle les parties étaient représentées par leurs conseils, lesquels ont déposé leurs dossiers de plaidoirie en invitant le tribunal à se référer à leurs conclusions écrites.

L’affaire a été mise en délibéré à la date du 2 février 2024.

Dans ses conclusions, Monsieur [K] présente les demandes suivantes :
-ordonner la mainlevée de la saisie-attribution du 6 décembre 2022,
-ordonner son cantonnement à hauteur de 6.655 euros, (le tribunal devant requalifier la demande tendant à voir “fixer” la dette)
-subsidiairement, lui octroyer des délais de paiement sur 24 mois à hauteur de 500 euros mensuels.

Dans leurs conclusions, les époux [X] présentent les demandes suivantes :
-Rejeter les demandes de Monsieur [K],
-Le condamner à leur payer une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens.

Pour un exposé de l’argumentation des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, à ces conclusions et aux éléments repris dans la motivation du présent jugement.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande principale en mainlevée et la demande subsidiaire en cantonnement.

Aux termes de l’article L211-1 du code des procédures civiles d’exécution, «tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail».

En l’espèce, l’ordonnance de référé mise à exécution dans le cadre de la saisie-attribution litigieuse a :
– constaté la résiliation à compter du 27 janvier 2021 d’un bail conclu entre les époux [X], en qualité de bailleurs, et Monsieur [K], sur un logement situé [Adresse 1] ;
-ordonné son expulsion ;
-l’a condamné à payer aux époux [X] la somme de 4.400 euros au titre des loyers arrêtés au 27 janvier 2021 (échéance de janvier 2021 comprise) avec intérêts au taux légal à compter du 29 mars 2021 ;
-a mis à sa charge une indemnité d’occupation mensuelle de 780,07 euros à compter de la résiliation du bail (soit à compter de l’échéance de février 2021) et jusqu’à libération effective des lieux ;
-l’a condamné à payer aux époux [X] une somme de 600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens, à l’exception des frais éventuels et à venir. Le jugement du 27 avril 2022 a interprété cette dernière disposition en prévoyant qu’elle ne pouvait exclure les frais d’exécution de la décision.

La saisie-attribution litigieuse a mis en recouvrement ces condamnations, notamment une somme de 15.493,01 euros au titre de l’indemnité d’occupation calculée entre février 2021 et septembre 2022.

Dans le cadre de la présente instance, Monsieur [K] expose avoir régularisé le bail pour vivre avec Madame [I] [Y] mais avoir quitté le logement suite à la rupture de leur couple en juillet 2021, envoyant alors une lettre de résiliation à l’agence en charge de la location du bien. Monsieur [K] poursuit en affirmant que cette agence n’a pas tenu compte de sa lettre de résiliation, que Madame [Y] s’était maintenue dans les lieux sans régler le loyer en insistant néanmoins auprès de l’agence à compter de mai 2021 pour figurer sur le bail en lieu et place de Monsieur [K].

S’agissant des arguments développés à l’encontre de la saisie, Monsieur [K] dit s’étonner de n’avoir jamais reçu communication de la décision mise à exécution.

L’acte de signification de cette décision est versé par les défendeurs et laisse apparaître une signification à l’adresse du bien loué.

Si Monsieur [K] se prévaut d’une autre adresse figurant selon lui dans les pages blanches, il ne formule aucune demande de nullité de la signification du jugement.

En l’absence de demande de nullité, il faut retenir que l’ordonnance mise à exécution a été valablement signifiée et se trouvait bien exécutoire au regard de l’article 503 du code de procédure civile (“Les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés, à moins que l’exécution n’en soit volontaire”).

Monsieur [K] ne fait état d’aucun autre argument susceptible d’aboutir à la mainlevée totale de la saisie-attribution. Cette demande sera par conséquent rejetée.

S’agissant de la demande de cantonnement de la saisie, Monsieur [K] affirme qu’il faudrait tenir compte de la lettre de résiliation qu’il a fait parvenir à l’agence en charge de la location le 6 juillet 2021 pour limiter le nombre de mensualités d’indemnité d’occupation à sa charge, ainsi que soustraire du montant de la saisie le montant du dépôt de garantie qu’il aurait versé aux bailleurs et qui ne lui aurait pas été remboursé.

Sur le premier point, Monsieur [K] justifie en effet de l’envoi d’un courrier de résiliation le 6 juillet 2021 à l’agence PICHET, tout comme il justifie des démarches de Madame [Y] qu’il évoque.

Néanmoins, le juge de l’exécution n’a pas le pouvoir de remettre en cause les titres exécutoires, ici l’ordonnance du 3 janvier 2022, laquelle a constaté la résiliation du bail au 27 janvier 2021 -soit antérieurement à la résiliation dont se prévaut Monsieur [K]- pour non paiement des loyers suite à la délivrance d’un commandement de payer les loyers du 26 novembre 2020 resté infructueux.

Le juge de l’exécution ne peut pas plus remettre en cause la condamnation de Monsieur [K] à une indemnité d’occupation mensuelle de 780,07 euros à compter de la résiliation de bail et jusqu’à libération effective des lieux. Or cette indemnité d’occupation était due jusqu’à libération effective des lieux, que cela soit par Monsieur [K] ou par toute autre personne ayant pu occuper le bien grâce au bail qu’il avait lui-même souscrit, ce qui est le cas pour Madame [Y].

Or il n’est pas soutenu que Madame [Y] aurait quitté les lieux avant le mois de septembre 2022, période jusqu’à laquelle les bailleurs revendiquent l’indemnité d’occupation dans le cadre de la saisie-attribution litigieuse.

Compte tenu de ce raisonnement, Monsieur [K] ne peut se prévaloir du courrier de résiliation du 6 juillet 2021.

S’agissant du dépôt de garantie, les époux [X] ne contestent pas le versement d’un dépôt de garantie de 660 euros. Ils indiquent que les clés du bien ont été restituées en décembre 2022 et ne font part d’aucune circonstance justifiant qu’ils conservent ce dépôt de garantie.

Dans ces conditions, Monsieur [K] peut se prévaloir d’une compensation entre sa dette et le dépôt de garantie si bien que le montant de la saisie sera cantonné à hauteur d’une somme de 660 euros.

Sur la demande de délais de paiement

L’article R.121-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit que le juge de l’exécution, après signification du commandement ou de l’acte de saisie, a compétence pour accorder un délai de grâce.

Aux termes de l’article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Ces dispositions ne sont pas applicables aux dettes d’aliment.

En l’espèce, la saisie-attribution a été dénoncée pour une créance de 21.986,50 euros et se trouve cantonnée à hauteur de 660 euros. Cette saisie a été fructueuse à hauteur de 688,83 euros. Compte tenu de l’effet attributif immédiat de la saisie, les délais de paiement ne pourront être accordés que sur la partie de la créance qui dépasse cette somme.

Monsieur [K] perçoit des revenus mensuels entre 1800 et 2000 euros. Compte tenu de ses charges courantes, il justifie ne pas être en mesure de régler en une seule fois sa dette.

Dans ces conditions, il lui sera octroyé un délai de 24 mois pour acquitter sa dette comme précisé au dispositif du présent jugement.

Sur les dépens.

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, Monsieur [K] qui succombe pour l’essentiel de ses demandes sera condamné aux dépens.

Sur l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
 
Condamné aux dépens, Monsieur [K] versera aux époux [X] une somme qu’il est équitable de fixer à 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’exécution, statuant par jugement prononcé par mise à disposition au greffe, contradictoire et susceptible d’appel,

REJETTE la demande de mainlevée de la saisie-attribution du 6 décembre 2022 ;

ORDONNE le cantonnement de son montant à hauteur d’une somme de 660 euros ;

AUTORISE Monsieur [O] [K] à se libérer de sa dette en 23 mensualités de 500 euros suivies d’une dernière mensualité soldant la dette en principal, intérêts et frais ;

DIT que la première mensualité sera due le 15 du mois suivant la signification du présent jugement puis chaque 15 du mois ;

DIT qu’à défaut de paiement d’une seule de ces mensualités et quinze jours après la délivrance d’une mise en demeure par LRAR restée infructueuse l’intégralité de la dette redeviendra exigible ;

RAPPELLE que l’octroi de ces délais suspend les procédures d’exécution et que les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant ces délais ;

CONDAMNE Monsieur [O] [K] à payer à Madame [E] [X] et Monsieur [P] [X] une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [O] [K] aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est immédiatement exécutoire, le délai d’appel et l’appel lui-même des décisions du juge de l’exécution n’ayant pas d’effet suspensif en application de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution ;

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier,

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION
Sophie ARESEtienne DE MARICOURT

 


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