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29 février 2024
Cour d’appel de Lyon
RG n°
21/01390
N° RG 21/01390 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NNPY
Décision du Tribunal de Commerce de
SAINT ETIENNE
du 12 février 2021
RG : 2015J00390
[M]
C/
S.A.S. LOCAM
S.A.S. GRENKE LOCATION
S.A.R.L. CVDS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
6ème Chambre
ARRET DU 29 Février 2024
APPELANT :
M. [K] [M]
né le 09 Avril 1944 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Laurent BERTIN de la SCP BERTIN & PETITJEAN-DOMEC ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 53
assisté de la SELARL LGB – BOBANT, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMEES :
LA SOCIETE LOCAM
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
LA SOCIETE GRENKE LOCATION
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Denis WERQUIN de la SAS TW & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 1813
assisté de Me Zohra AGBO-KHAFFANE de la Société d’Avocats PWC au barreau de STRASBOURG
LA SOCIETE CVDS
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Pierre-marie DURADE-REPLAT de la SELARL DELSOL AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 794
* * * * * *
Date de clôture de l’instruction : 12 Décembre 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Janvier 2024
Date de mise à disposition : 29 Février 2024
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Joëlle DOAT, présidente
– Evelyne ALLAIS, conseillère
– Stéphanie ROBIN, conseillère
assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES
Par contrat en date du 14 avril 2011, M. [K] [M], entrepreneur individuel exerçant sous l’enseigne C.Bochard chocolatier à [Localité 6], a souscrit auprès de la société Grenke Location la location d’un matériel d’alarme et de vidéosurveillance fourni par la société CVDS pour une durée de 63 mois, moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels d’un montant de 3 100 euros toutes taxes comprises chacun.
M. [M] a signé le procès-verbal de réception de matériels le 15 avril 2011.
La société CVDS expose que, dans le cadre d’une amélioration des prestations offertes par elle, elle a proposé à M. [M] un matériel de protection sécurité et incendie plus perfectionné, nécessitant la mise en place d’un nouveau contrat de location devant se substituer au premier et qu’elle faisait son affaire des loyers à échoir dûs à la société Grenke Location au titre du premier contrat.
Par contrat en date du 13 novembre 2012, M. [M] a souscrit auprès de la société Locam la location de matériel vidéo et alarme fourni par la société CVDS, moyennant le versement de 62 loyers mensuels d’un montant de 2 870,40 euros toutes taxes comprises, étant stipulé que ‘ces échéances s’entendent hors assurance bris machine’.
Un procès-verbal de livraison et de conformité a été dressé le 23 novembre 2012.
La société Grenke Location a continué à prélever les loyers au titre du premier contrat, tandis que la société Locam prélevait concomitamment les loyers au titre du second contrat.
M. [M] a cessé d’honorer le paiement des loyers mensuels auprès de la société Locam à compter de septembre 2014.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 janvier 2015, la société Grenke Location a notifié à M. [M] la résiliation du contrat de location pour non-paiement de trois échéances mensuelles.
Le 13 février 2015, la société Locam a adressé à M. [M] une mise en demeure de régulariser les loyers impayés, sous peine de résiliation du contrat.
Par acte d’huissier en date du 16 avril 2015, la société Locam a fait assigner M. [M] devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne pour s’entendre condamner celui-ci à lui payer la somme de 138 155, 56 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2015.
Par acte d’huissier en date du 30 avril 2015, la société Grenke Location a fait assigner M. [M] devant le tribunal de grande instance de Strasbourg pour s’entendre condamner celui-ci à lui payer la somme de 22 947,47 euros correspondant à l’indemnité de résiliation et aux frais de recouvrement, ainsi qu’à lui restituer le matériel.
Le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Strasbourg a renvoyé l’affaire au tribunal de commerce de Saint-Etienne, par ordonnance en date du 20 mars 2018.
Par jugement en date du 12 février 2021, le tribunal de commerce a :
– débouté M. [M] de sa demande de vérification des écritures
– rejeté les demandes de nullité des contrats de location pour non-respect des dispositions des articles L 121-21 et suivants du code de la consommation, indétermination de l’objet, dol et réticence dolosive
– condamné la société CVSD à relever et garantir M. [M] de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Grenke Location
– débouté M. [M] du surplus de ses demandes à l’encontre des sociétés CVDS, Grenkelocation et Locam
– débouté la société CVDS de toutes ses demandes
– condamné M. [M] à payer à la société Grenke Location la somme de 22 947,45 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 janvier 2015
– condamné M. [M] à restituer à la société Grenke Location l’ensemble du matériel de vidéosurveillance objet du contrat de location
– débouté la société Grenke Location de sa demande d’astreinte
– condamné la société CVDS à payer à M. [M] la somme de 24 146,16 euros en remboursement des loyers payés à la société Grenke Location à compter de janvier 2013
– condamné M. [M] à payer à la société Locam la somme de 138 155,55 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2015
– condamné M. [M] à payer aux sociétés Grenke Location et Locam chacune la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– mis les dépens à la charge de M. [M]
– rejeté la demande d’exécution provisoire du jugement
– débouté les sociétés Grenke Location et Locam du surplus de leurs demandes.
M. [M] a interjeté appel de ce jugement à l’égard des sociétés Locam, Grenke Location et CVDS, le 23 février 2021.
L’affaire a été enregistrée sous le numéro 21/01390.
M. [M] a interjeté un second appel du jugement, à l’égard de la société Locam, le 25 novembre 2021.
L’affaire a été enregistrée sous le numéro 21/08468.
Par ordonnance en date du 13 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la jonction des deux appels, sous le numéro 21/01390.
M. [M] demande à la cour :
– d’infirmer le jugement, sauf en ce qu’il a :
* condamné la société CVSD à le relever et garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Grenke Location
* débouté la société CVDS de toutes ses demandes
* débouté la société Grenke Location de sa demande d’astreinte
* condamné la société CVDS à lui payer la somme de 24 146,16 euros en remboursement des loyers payés à la société Grenke Location à compter de janvier 2013
* débouté les sociétés Grenke Location et Locam du surplus de leurs demandes
– d’ordonner avant dire droit une vérification d’écriture sauf à considérer que la falsification d’écritures est évidente
– à titre principal, de prononcer la nullité des deux contrats de location et à titre subsidiaire, de prononcer la résolution judiciaire desdits contrats
– de débouter les sociétés Locam et Grenke Location de toutes leurs demandes à son encontre
– de débouter la société CVDS de ses demandes dirigées contre lui et de son appel incident
– de condamner la société CVDS à lui payer la somme de 12 000 euros au titre des préjudices matériel et moral qu’il a subis
– subsidiairement, de condamner solidairement les sociétés Locam et Grenke Location en leur qualité de mandataire des sociétés Grenke Location et Locam ‘au paiement des mêmes sommes auxquelles la société CVDS a été condamnée’, à titre de dommages et intérêts
– à titre infiniment subsidiaire, de condamner la société CVDS d’avoir à le garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre
– en tout état de cause, de condamner solidairement les trois sociétés à lui payer la somme de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de la SCP Bertin Petit Jean-Domec sur son affirmation de droit, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Il fait valoir que :
– les deux contrats sont nuls au motif
1) que les dispositions des articles L121-1 et suivants et L 121-23 du code de la consommation n’ont pas été respectées
2) que la chose objet des contrats de location et prestation de services n’était ni déterminée, ni déterminable
3) que le mandataire, la société CVDS a commis un dol et une réticence dolosive lors de la conclusion des contrats
– il n’a jamais eu connaissance, jusqu’à sa découverte dans le cadre de la présente procédure, du faux procès-verbal de livraison qu’il n’a jamais signé et il ne pouvait dès lors se rendre compte de ce que le matériel qui lui avait été fourni et installé ne correspondait pas aux termes du contrat et était incomplet
– il verse aux débats un rapport privé rédigé par un expert en écritures inscrit auprès de la cour d’appel de Grenoble, lequel conclut que la signature apposée sur le procès-verbal de livraison et de conformité prétendûment daté du 23 novembre 2012 est une imitation de la sienne.
Il soutient que la société CDVS a commis des manquements contractuels à son égard, qu’elle doit réparer l’intégralité des préjudices qu’il a subis, que sa demande de compensation doit être rejetée et qu’elle doit être condamnée à lui payer la somme de 24 146,16 euros et celle de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts.
A défaut de condamnation de la société CVDS, il demande que la société Locam soit condamnée, seule ou solidairement avec la société Grenke Location, à lui payer la somme de 24 146,16 euros TTC au titre des prélèvements indûs que la société Grenke Location a perçus alors que le contrat de location devait être résilié et celle de 12 000 euros à titre de dommages et inétrêts en réparation de ses préjudices moraux et matériels.
A titre subsidiaire, il sollicite la résiliation judiciaire des deux contrats au motif que la société CVDS a établi un faux procès-verbal de livraison et de conformité et que, par la faute de cette société, il a subi 18 mois de doubles prélèvements bancaires.
La société Locam demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner M. [M] à lui régler une nouvelle indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’instance et d’appel.
Elle fait valoir que :
– le code de la consommation n’est pas applicable puisque le contrat de location a été souscrit pour les besoins de l’activité professionnelle de fabrication et vente de produits chocolatiers de M. [M], les matériels pris à bail étaient destinés à surveiller les locaux d’activité de celui-ci
– M. [M] a payé vingt et une échéances mensuelles avant de s’aviser subitement que les matériels ne lui auraient pas été livrés
– la signature et le tampon apposés sur le procès-verbal de livraison sont très semblables à ceux apposés quelques jours auparavant sur le contrat de location lui-même, contrat que ne conteste pas l’appelant
– il n’est pas démontré l’existence d’un dol.
La société Grenke Location demande à la cour :
– de dire l’appel de M. [M] infondé
en conséquence,
– de le débouter de l’ensemble de ses demandes
– de le condamner aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement de la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel
subsidiairement,en cas de nullité ou de résolution du contrat de location,
– de condamner la société CDVS à lui rembourser la somme de 52 721,63 euros TTC correspondant au prix du matériel
– de condamner M. [M] à restituer à la société CDVS le matériel objet du contrat
– de condamner la société CDVS à lui payer la somme de 14 996,80 euros hors taxes au titre de la perte de marge escomptée au titre du contrat de location
– de condamner la société CDVS à lui payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile avec intérêts au taux légal, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel, ces derniers distraits au profit de la société Tudela Werquin et associés, avocats, sur leur affirmation de droit.
Elle fait valoir que :
– la société CVDS n’est pas son mandataire, en effet, c’est le locataire qui choisit sous son entière responsabilité le matériel et le fournisseur avant de lui adresser une demande de location, de sorte que la nullité du contrat de location ne peut être prononcée sur la base des relations existant entre la société CVDS et M. [M]
– les engagements pris par le fournisseur ne la lient pas
– en application de l’article 2 des conditions générales de location, l’engagement du bailleur consiste exclusivement, à l’issue de la conclusion du contrat de location et à réception par elle de la confirmation de livraison signée par le locataire, à se porter acquéreur des produits en versant le prix au fournisseur et à les donner en location au locataire
– les sommes qui lui sont dûes doivent être payées par son locataire, à charge pour ce dernier de se retourner contre la société CVDS
– aucune responsabilité ne peut être retenue à son encontre et la demande de condamnation solidaire avec la société Locam doit être rejetée
– sa créance s’établit ainsi qu’il suit : loyers échus impayés (7 355,45 euros) + indemnité de résiliation (15 552 euros) + frais de recouvrement (40 euros)
– M. [M] ne rapporte pas la preuve d’un démarchage par la société CVDS, il a agi dans le cadre de son activité professionnelle, les équipements loués étant à destination professionnelle, en lien direct avec son activité, le code de la consommation n’est pas applicable
– les moyens de nullité du contrat du 14 avril 2011 doivent être rejetés
– à titre subsidiaire, si la nullité ou la résolution du contrat de fourniture du matériel et du contrat de location devaient être prononcées, la société CVDS devra être condamnée à lui rembourser le prix qu’elle a payé pour le matériel (52 721,63 euros TTC) outre la somme de 14 996,80 euros hors taxes représentant la différence entre la somme des loyers échus et à échoir (67 718,43 euros) et le prix du matériel (52 721,63 euros), soit le bénéfice qu’elle aurait retiré du contrat de location s’il n’avait pas été annulé.
La société CVDS demande à la cour :
– d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à relever et garantir M. [M] de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Grenke Location, l’a déboutée de toutes ses demandes et l’a condamnée à payer à M. [M] la somme de 24 146,16 euros en remboursement des loyers payés à la société Grenke Location à compter de janvier 2013
statuant à nouveau,
à titre principal,
– de débouter M. [M] de l’intégralité de ses demandes
à titre incident,
– de condamner M. [M] à lui rembourser la somme de 17 942,28 euros TTC au titre des pénalités de retard qu’elle a été contrainte de payer à la société Locam
– de constater qu’elle est fondée à solliciter la compensation des sommes qu’elle reconnaît devoir à M. [M] au titre des mensualités doublement versées à compter du mois de novembre 2012 avec celles qu’elle a payées à la société Locam au titre de la pénalité contractuelle
– de condamner M. [M] à lui payer la somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier et moral
en tout état de cause,
– de condamner M. [M] à lui payer la somme de 8 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Elle fait valoir que :
– le contrat a été conclu dans le cadre de l’activité commerciale de M. [M] et il n’est pas soumis aux dispositions du code de la consommation
– les autres moyens de nullité soulevés par M. [M] ne sont pas fondés
– M. [M] ne s’est jamais plaint de ne pas avoir reçu le nouveau matériel pour la location duquel il était prélevé de la somme mensuelle de 2 870,40 euros TTC depuis plus de 17 mois avant de cesser ses paiements, il n’a jamais émis de réserve quant au matériel livré dans le cadre du second contrat et ne s’est jamais plaint de sa défectuosité
– le matériel visé dans son propre courriel du 4 mars 2015 concerne du matériel supplémentaire, plus perfectionné
– M. [T] n’est pas fondé à soutenir que sa signature sur le second procès-verbal de livraison ne serait pas la sienne et que le tampon à encre humide serait un faux
– des discussions ont eu lieu entre les parties en ce qui concerne son engagement de prendre en charge les sommes trop versées à la société Grenke Location, lors desquelles M. [M] n’a jamais fait état de ce que le nouveau matériel ne lui aurait pas été livré
– or, il a subitement cessé de verser les loyers à la société Locam dès le mois de juillet 2014 et il ressort de la correspondance qu’elle lui a adressée le 14 septembre 2015 que l’arrêt des paiements a été causé par les doubles prélèvements plutôt que par une défaillance de sa part dans son obligation de livraison et d’installation
– la demande en résolution judiciaire du contrat à ses torts exclusifs doit être rejetée puisque le contrat a d’ores et déjà été résilié par la société Locam du fait du non paiement des loyers par M. [M]
– elle estime qu’elle n’a pas à assumer le paiement de la pénalité contractuelle qu’elle a dû régler à la société Locam en suite de l’arrêt délibéré des règlements par M. [M] sans raison valable
– elle ne saurait être tenue à garantir M. [M] des condamnations mises à la charge de ce dernier puisqu’il est seul responsable de son inexécution contractuelle tant à l’égard de la société Grenke Location que de la société Locam
– l’attitude de M. [M] a eu des conséquences significatives notamment sur son image qui a été ternie par les allégations de celui-ci vis à vis de ses partenaires financiers réguliers.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 décembre 2023.
SUR CE :
Toute personne physique ou morale qui agit à des fins n’entrant pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole peut être qualifiée de non-professionnelle.
En l’espèce, les deux contrats litigieux portent sur la livraison et l’installation d’un système d’alarme et de vidéo-surveillance et le financement desdits matériels au moyen d’une location, de sorte qu’ils sont sans rapport direct avec l’activité professionnelle d’artisan chocolatier exercée par M. [M].
M. [M] est ainsi fondé à invoquer l’application des dispositions de l’article L121-21 ancien du code la consommation relatives au démarchage au domicile d’une personne physique, à sa résidence ou à son lieu de travail, applicables aux contrats litigieux conclus antérieurement au 13 juin 2014, la preuve du démarchage résultant de ce que les contrats ont été signés à [Localité 6] tandis que la société CVDS est domiciliée à [Localité 5].
L’article L121-23 ancien du code de la consommation énonce que les opérations visées à l’article L121-21 doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de sa conclusion et comporte à peine de nullité les mentions suivantes :
4° désignation précise de la nature et des caractéristiques des biens offerts ou des services proposés.
L’article L121-25 ancien du code de la consommation dispose que dans les sept jours, jours fériés compris, de la commande ou de l’engagement d’achat, le client a la faculté d’y renoncer par lettre recommandée avec accusé de réception.
Le contrat souscrit le 14 avril 2011 entre la société Grenke Location et le locataire, M. [M], pour la location d’un matériel fourni par la société CVDS comporte la description du ‘matériel/logiciel’ loué suivante : PACK ALARME x 4 PACF VIDEO.
Cette description sommaire ne permet pas de connaître les caractéristiques précises du matériel et de l’installation loués et ne met pas le locataire en mesure de vérifier que le matériel livré et installé tel que décrit au procès-verbal de réception de matériels signé le 15 avril 2011 par M. [M] mentionnant une date de livraison, de fin d’installation et de mise en service du 15 avril 2011 correspond bien au matériel commandé.
Il est stipulé à l’article 2 du contrat de location que le montant toutes taxes comprises de la redevance au titre du contrat de prestation de services s’élève à la somme de 344,48 euros par trimestre, que le montant du loyer trimestriel s’élève à 3 100,03 euros toutes taxes comprises et que Grenke Location prélèvera au locataire la somme totale, loyer + redevance de 3 449,48 euros par trimestre.
Or, le contrat de prestations spécifiques visé au contrat de location ‘auquel Gl est étranger’ n’est pas versé aux débats par la société CVDS, si bien que la preuve de ce que la nature de la prestation de services a été portée à la connaissance du locataire n’est pas rapportée.
Enfin, la livraison et l’installation du matériel ont été effectuées le lendemain de la signature du contrat, sans respecter le délai de réflexion de sept jours.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le contrat de fourniture du 14 avril 2011 entre la société CVDS et M. [M] est nul.
Alors que le premier contrat n’avait pas été résilié, M. [M] a signé le 13 novembre 2012 un second contrat de location auprès d’une autre société bailleresse, la société Locam, portant sur le financement du matériel suivant ‘VIDEOSURVEILLANCE + ALARME’, fourni également par la société CVDS, stipulant le versement de 63 loyers mensuels de 2 870,40 euros chacun toutes taxes comprises (soit 8 611,20 euros au lieu de 3 100 euros pour le premier contrat).
La désignation du matériel loué ne répond pas aux conditions prescrites par l’article L121-23 ancien du code de la consommation, puisqu’il n’est donné aucune précision au contrat quant à ses caractéristiques, alors qu’il résulte d’une correspondance de la société CVDS en date du 4 mars 2015 qu’il s’agissait de ‘matériel supplémentaire justifiant la hausse tarifaire (hormis le matériel, il faut aussi bien prendre en considération le nombre de jours d’installation, installations effectuées par nos technciens quaifiés, ainsi que les fournitures utilisées, goulottes, gaines, tube iro, câblage électrique)’ et que ‘pour ce qui est du contrat Grenke Location, ce dernier aurait dû disparaître lors de la mise en place du dossier Locam. Après vérification, il s’avère que CVDS avait bien envoyé à Grenke Location la valeur de solde du contrat accompagnée du règlement’ et que la liste du matériel livré le 23 novembre 2013 reprise dans ce courriel n’est pas la même que celle figurant au procès-verbal de livraison.
M. [M] affirme qu’il n’a jamais signé de procès-verbal de livraison concernant le matériel faisant l’objet du second contrat. Il conteste être l’auteur de la signature apposée sur le procès-verbal de livraison et de conformité du 23 novembre 2012 et déclare que le tampon commercial figurant sur ledit procès-verbal est différent de celui qu’il utilise habituellement.
La société CVDS ne produisant pas l’original du procès-verbal de livraison, il est impossible de déterminer si ce procès-verbal a bien été signé par M. [M]. Le nombre de jours d’installation auquel se réfère la société CVDS dans son courriel ci-dessus n’est pas mentionné sur le procès-verbal.
En tout état de cause, la demande aux fins de vérification d’écriture est sans intérêt pour la solution du litige dans la mesure où, compte-tenu de l’imprécision du contrat de fourniture et de location, il est impossible de déterminer si le matériel livré correspond à celui qui a été commandé
Enfin, le contrat du 13 novembre 2012 ne comporte aucune information relative au délai de rétractation de sept jours dont dispose le locataire et ne contient pas de bordereau de rétractation.
Le contrat de location et de fourniture du 13 novembre 2012 doit en conséquence être déclaré nul.
Les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération incluant une location financière sont interdépendants. Les clauses des contrats inconciliables avec cette interdépendance sont réputées non écrites et l’anéantissement de l’un quelconque des contrats interdépendants entraîne la caducité des autres.
En l’espèce, il n’existe que deux contrats conclus entre la société CVDS, M. [M] et la société Grenke Location, d’une part, la société CVDS, M. [M] la société Locam d’autre part. Il convient de prononcer la nullité de ces deux contrats, le jugement étant infirmé en ce qu’il a rejeté ces chefs de demande.
Il y a lieu par voie de conséquence de rejeter les demandes des sociétés Locam et Grenke Location tendant à voir condamner M. [M] à leur payer respectivement les sommes de 138 155,56 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2015 et de 22 947,45 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 janvier 2015, le jugement étant infirmé en ce qu’il les a accueillies.
La nullité des contrats de fourniture emporte obligation pour M. [M] de restituer à la société CVDS le matériel loué.
Il ya lieu dès lors d’ordonner à la société CVDS de reprendre le matériel fourni par ses soins dans les locaux de M. [M].
Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné la société CVDS à payer à M. [M] la somme de 24 146,16 euros en remboursement des loyers payés à la société Grenke Location à compter de janvier 2013 au titre d’un contrat nul.
Le jugement doit également être confirmé en ce qu’il a rejeté la demande en remboursement de la somme de 17 942,28 euros et la demande en paiement de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier et moral formées par la société CVDS à l’encontre de M. [M], qui n’est tenu d’aucune obligation vis à vis de cette société, puisque le contrat est annulé.
M. [M] sollicite la condamnation de la société CVDS, in solidum le cas échéant avec les sociétés Locam et Grenke Location, à lui payer des dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis du fait de cette situation et des procédures engagées à son encontre.
Toutefois, M. [M] ne justifie pas avoir subi un préjudice distinct de celui qui se trouve réparé par le prononcé de la nullité des contrats, de sorte que cette demande sera rejetée.
La société Grenke Location sollicite la condamnation de la société CVDS d’avoir à lui rembourser le prix du matériel qu’elle a versé entre ses mains, outre une somme au titre de la perte de marge escomptée.
Mais l’annulation du contrat de fourniture et de location conclu entre M. [M], la société CVDS et la société Grenke Location n’entraîne pas par voie de conséquence la nullité du contrat souscrit entre la société Grenke Location et la société CVDS, lequel n’est en tout état de cause pas produit aux débats.
La demande en remboursement fondée sur la seule copie d’une facture en date du 14 avril 2011 d’un montant de 52 721,63 euros à en-tête de la société CVDS ‘pour Grenke’ doit être rejetée, de même que la demande au titre de la perte de marge escomptée.
M. [M] obtenant gain de cause pour l’essentiel en ses demandes, le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’indemnité de procédure.
Il convient de condamner in solidum les sociétés CVDS, Grenke Location et Locam aux dépens de première instance et d’appel.
L’équité commande de condamner in solidum les trois sociétés à payer à M. [M] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés par lui en première instance et en appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :
INFIRME le jugement, sauf en ce qu’il a condamné la société CVDS à payer à M. [M] la somme de 24 146,16 euros en remboursement des loyers payés à la société Grenke Location à compter de janvier 2013, et rejeté les demandes de paiement d’une somme de 17 942,28 euros et de dommages et intérêts formées par la société CVDS contre M. [M]
STATUANT à nouveau sur les chefs infirmés,
PRONONCE la nullité des contrats de fourniture et de location en date des 14 avril 2011 et 13 novembre 2012 conclus entre la société CVDS, la société Grenke Location, la société Locam et M. [M]
REJETTE les demandes des sociétés Locam et Grenke Location tendant à voir condamner M. [M] à leur payer respectivement les sommes de 138 155, 56 euros, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 13 février 2015 et de 22 947,45 euros outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 21 janvier 2015
ORDONNE à la société CVDS de reprendre le matériel fourni par ses soins dans les locaux de M. [M]
Y AJOUTANT,
REJETTE la demande en paiement d’une somme de 12 000 euros à titre de dommages et intérêts formée par M. [M] à l’encontre des sociétés CVDS, Locam et Grenke Location
REJETTE les demandes en paiement formées par la société Grenke Location à l’encontre de la société CVDS
CONDAMNE in solidum les sociétés CVDS, Locam et Grenke Location aux dépens de première instance et d’appel
DIT que les dépens d’appel pourront être recouvrés par la SCP Bertin Petit Jean-Domec, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile
REJETTE les demandes formées par les sociétés Grenke Location et Locam sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en première instance
CONDAMNE in solidum les sociétés CVDS, Locam et Grenke Location à payer à M. [M] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE