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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRÊT DU 01 FÉVRIER 2023
(n° / 2023, 1 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/01269 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJZY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Novembre 2019 -Tribunal de Grande Instance d’EVRY – RG n° 17/05534
APPELANTE
SARL OPTIMUM, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PONTOISE sous le numéro 421 626 490,
Ayant son siège social [Adresse 5]
[Localité 7]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,
INTIMÉS
Monsieur [N] [E]
De nationalité française
Demeurant [Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Etienne REGENT, avocat au barreau de l’ESSONNE,
SASU SPORT ENTERTAINMENT , prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 822 028 064,
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Gérard EWANGO, avocat au barreau de PARIS, toque : C1749,
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 Novembre 2022, en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Gilles BALAY, président,
Monsieur Douglas BERTHE, conseiller,
Madame Marie GIROUSSE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Douglas BERTHE dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Sonia JHALLI
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Douglas BERTHE, conseiller pour le Président empêché, et par Liselotte FENOUIL , greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte du 13 juillet 2016, la société Optimum a consenti un bail commercial à la société Sport Entertainment, exerçant sous le nom Millenium Sport, portant sur des locaux situés [Adresse 1] (91), à compter du 1er septembre 2016, moyennant un loyer mensuel HT et HC de 5 600 €.
La bailleresse lui a consenti une remise mensuelle de 2 500 € pendant 36 mois, réduisant le loyer à 3 100 € net « compte tenu des travaux importants que doit réaliser le preneur afin d’adapter les locaux à son activité ». Il stipulait également que le bail était consenti « sous réserve du financement total des travaux à engager par le preneur à hauteur de 45 000 € HT».
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 février 2017, le conseil de la locataire a réclamé auprès de la bailleresse qu’elle réalise des travaux nécessaires à la prise de possession des locaux loués, qui n’avait pas encore eu lieu.
Par procès-verbal d’huissier du 23 mars 2017, la locataire a fait constater que les lieux étaient en travaux et non aménagés.
Par exploit du 27 juillet 2017, la société Optimum a fait délivrer à la société Sport Entertainment un commandement de payer les loyers et charges non réglés d’octobre 2016 à juillet 2017, visant la clause résolutoire du bail.
Par exploit des 25 et 27 juillet 2017, la société Sport Entertainment a fait assigner à comparaître la société Optimum et M. [N] [E] devant le tribunal de grande instance d’Évry aux fins notamment de voir prononcer la résolution du bail, restitution des sommes versées au titre des avances pour les travaux et indemnisation pour perte de chance de réaliser un chiffre d’affaire. M. [N] [E] n’a pas comparu.
Par jugement du 28 novembre 2019, le tribunal de grande instance d’Évry a :
– PRONONCÉ la résolution du bail conclu le 13 juillet 2016 entre la société Optimum et la société Sport Entertainment portant sur des locaux situés [Adresse 1] (91) ;
– CONDAMNÉ la société Optimum à payer à la société Sport Entertainment une somme de 3 100 € au titre du loyer de septembre 2016 indûment perçu ;
– CONDAMNÉ la société Optimum à payer à la société Sport Entertainment une indemnité de 13 240 € ;
– CONDAMNÉ in solidum la société Optimum et M. [N] [E] à payer à la société Sport Entertainment une somme de 32 609,80 € ;
– DÉBOUTÉ la société Sport Entertainment du surplus de ses demandes ;
– REJETÉ toutes les demandes de la société Optimum ;
– ORDONNÉ l’exécution provisoire de la décision ;
– CONDAMNÉ la société Optimum et M. [N] [E] aux dépens de l’instance, ainsi qu’à verser une somme de 2 000 € à la société Sport Entertainment en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 09 janvier 2020, la société Optimum a interjeté appel total du jugement.
Par déclaration du 20 janvier 2020, M. [N] [E] a interjeté appel partiel du jugement.
Par conclusions déposées le 08 juillet 2020, la société Sport Entertainment a interjeté appel incident partiel du jugement.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 29 juin 2022.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Vu les dernières conclusions déposées le 08 octobre 2020, par lesquelles la société optimum, appelante à titre principal et intimée à titre incident, demande à la cour de:
– RÉFORMER le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
sur la résiliation du bail signé le 13 juillet 2016,
– CONSTATER l’acquisition de la clause résolutoire par l’effet du commandement signifié le 27 juillet 2017 ;
– ORDONNER, en conséquence, l’expulsion de la société Sport Entertainment et de tout occupant de son chef des locaux situés [Adresse 1] sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir jusqu’à parfait délaissement ;
– ORDONNER l’expulsion de la société Sport Entertainment et de tout occupant introduit de son chef avec au besoin l’assistance de la force publique et d’un serrurier ;
– ORDONNER l’enlèvement des biens et la faculté mobilière se trouvant les lieux en un lieu approprié aux frais risques et périls de la société Sport Entertainment qui disposera d’un délai d’un mois pour les retirer à compter de la sommation qui lui sera délivrée par l’huissier chargé de l’exécution ;
– CONDAMNER la société Sport Entertainment à régler la somme de 102 300 € arrêtée au 31 mai 2020 ;
– CONDAMNER la société Sport Entertainment à payer à la société Optimum une indemnité d’occupation égale à la somme mensuelle de 3 100 € H.T. du jour de la résiliation à celui de la libération des locaux et de la restitution des clefs ;
– JUGER que cette indemnité d’occupation sera indexée selon les dispositions du contrat ayant lié les parties ;
– CONDAMNER la société Sport Entertainment au paiement des deux commandements de payer visant la clause résolutoire délivrés le 27 juillet 2017 ;
sur le remboursement des travaux payés par la société Sport Entertainment à M. [E]:
À titre principal,
– JUGER qu’il n’existe pas de contrat de mandat entre la société Optimum et M. [E] pour la réalisation des travaux objet du devis signé et accepté en date du 16 juillet 2016 ;
en conséquence,
– DÉBOUTER la société Sport Entertainment de toute demande financière à l’encontre de la société Optimum dans la mesure où cette dernière n’a aucun lien contractuel avec la société Sport Entertainment pour la réalisation des travaux d’aménagement du local ;
à titre subsidiaire, vu notamment les dispositions de l’article 32 du code de procédure civile,
– JUGER que la société Sport Entertainment n’a pas qualité à agir en paiement des sommes réglées par M. [G] [U] pour un montant de 26 304,90 € ;
– DÉBOUTER la société Sport Entertainment de sa demande en paiement de la somme de 620 €, à défaut de rapporter la preuve de son paiement ;
– JUGER que seule la somme de 13 587,41 € pourrait être mise à la charge de la société Optimum in solidum avec M. [E], la société Sport Entertainment ayant déduit la TVA de ses précédentes déclarations ;
sur le loyer de 3 100 € du mois de septembre 2016 :
à titre principal,
– DIRE que le bail du 13 juillet 2016 étant résilié, le paiement du loyer de septembre 2016 reste acquis à la société Optimum ;
à titre subsidiaire, si bail était résolu,
– Dire que c’est une somme de 2 583 € qui serait restituée compte tenu de la déduction de la TVA faite précédemment par la société Sport Entertainment ;
sur la demande de réparation de la perte d’une chance de réaliser un chiffre d’affaire :
– JUGER que la société Optimum n’a commis aucune faute contractuelle ;
en conséquence,
– DÉBOUTER la société Sport Entertainment de toute demande d’indemnisation au titre d’une perte de chance de réaliser un chiffre d’affaires ;
sur la demande d’indemnité au titre des frais de stockage,
– DÉBOUTER la société Sport Entertainment de toute prétention sur ce fondement ;
– CONDAMNER sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile la société Sport Entertainment au paiement d’une somme de 10 000 €, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles.
Sur la résiliation du bail et ses prétentions accessoires, la société Optimum expose que les travaux litigieux incombaient au preneur par application du bail, qu’il est, en effet, possible de déroger aux dispositions de l’article 1719 du code civil en stipulant que le preneur prendra à sa charge les travaux indispensables à l’exercice de l’activité commerciale (Civ. 3ème , 10 mai 2001, n° 96-22.442, D. 2001. 3523), qu’en l’espèce, cette clause était bien stipulée au contrat de bail, qu’en contrepartie le locataire a bénéficié d’une baisse substantielle de loyer durant 36 mois ainsi que le versement différé du dépôt de garantie, que la preneuse n’a pas payé le loyer minoré, que les travaux n’incombaient donc par au bailleur mais à la SASU SPORT ENTERTAINMENT, que le montant des travaux à réaliser, initialement chiffré par le bail à hauteur de 45.000 € HT, s’est en réalité élevé à la somme TTC de 54.349,68 €, soit 45.291,40 € HT alors que le preneur a bénéficié d’une réduction de loyer de plus de 90.000 €, qu’elle a consenti une remise sur le montant du loyer de plus de 50 % durant 36 mois pour permettre à son locataire de financer ses travaux, que le bailleur s’est trouvé étranger à toute relation contractuelle correspondant à la réalisation des travaux, qu’il résulte du procès-verbal de constat établi en date du 23 mars 2017, que le preneur était en possession des locaux et avait initié les travaux qu’il avait commandé, que le loyer minoré n’a pas été réglé, que le commandement du 27 juillet 2017 étant resté infructueux passé le délai d’un mois de sa délivrance, que la clause résolutoire était donc acquise au 28 août 2017.
Sur les loyers et l’indemnité d’occupation, elle expose que les loyers et provisions pour charges des mois d’octobre 2016 à août 2017 sont restés impayés, soit 42.900 € arrêtée au 28 août 2017, que depuis le 28 août 2017, la SASU SPORT ENTERTAINMENT est occupante sans droit ni titre, que l’indemnité d’occupation mensuelle doit être fixée à 3.100 € HT, ce qui représente au terme du mois de mai 2020, une somme de 102 300 €.
Sur la réformation du jugement ayant statué sur la condamnation in solidum au paiement de la somme de 32 609,80 € au titre des travaux, elle expose que le tribunal n’a pas analysé les différents liens contractuels ni leurs conséquences, soit un bail entre elle et la preneuse, un mandat spécial entre elle et Monsieur [E] uniquement pour faire visiter les locaux objet du contrat de bail et percevoir les loyers, un autre mandat entre la SASU SPORT ENTERTAINMENT et Monsieur [N] [E] cette fois destiné à assurer la supervisation des travaux d’aménagement des locaux en salle de sport, que la SARL OPTIMUM a pour objet social celui de marchand de biens et nullement la réalisation de travaux de rénovation et/ou de construction, qu’elle n’a jamais perçu aucune somme du locataire au titre de la réalisation des travaux, qu’à titre subsidiaire et si le mandat était caractérisé, le quantum des sommes réclamées ne pourrait s’élever qu’à la somme de 13.587,41 € (TVA déduite de la somme de 16.304,90 €) seule somme que la SASU SPORT ENTERTAINMENT a réglée par virement du 06 octobre 2016 à Monsieur [E], tous les autres paiements ayant été réalisé par [G] [U] à partir de son compte personnel, qu’ainsi la société Sport Entertainment n’a pas qualité à agir par application de l’article 32 du code de procédure civile pour recouvrer les sommes réglées par M. [G] [U] à titre personnel, soit la somme totale de 26 304,90 €, qu’en outre, la SASU SPORT ENTERTAINMENT ne rapporte pas la preuve que son chèque de 620 € ait été débité de son compte bancaire ouvert auprès du CIC.
Sur la réformation du jugement ayant statué sur la restitution du seul loyer de 3 100€ versé au mois de septembre 2016 par le preneur, elle expose que ce loyer reste acquis dès lors que le bail doit être résilié compte tenu de l’absence de règlement des loyers par le preneur sans effet rétroactif, qu’à titre subsidiaire, la TVA serait déduite, ramenant la somme à 2 583 €.
Sur la réformation du jugement ayant statué sur les dommages et intérêts au titre de la perte d’une chance de réaliser un chiffre d’affaire, elle expose qu’elle n’a commis aucune faute contractuelle dès lors que le bail a été résilié en raison du non-paiement des loyers.
Sur la réformation du jugement ayant statué sur les frais de stockage, elle expose qu’aucun justificatif n’a été versé aux débats.
Vu les dernières conclusions déposées le 08 janvier 2021, par lesquelles la société Sport Entertainment, intimée à titre principal et appelante à titre incident, demande à la Cour de :
– CONFIRMER le jugement du 28 novembre 2019 rendu par le Tribunal de Grande Instance d’Evry en ce qu’il a prononcé la résolution du bail conclu le 13 juillet 2016 entre la société Optimum et la société Sport Entertainment ; condamné la société Optimum à payer la somme de 3 100 € au titre de remboursement du loyer indûment perçu de septembre 2016 ; prononcé la condamnation in solidum de la société Optimum et de M. [E] à restituer la somme avancée pour les travaux non réalisés relatives à l’adaptation des locaux en salle de sport ; les a condamné aux dépens de la première instance, ainsi à la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
l’infirmer pour le surplus ; statuant à nouveau,
– CONDAMNER solidairement la société Optimum et à M. [E] à verser la somme de 42 609,80 € à titre de restitution des avances perçues pour les travaux d’adaptation des locaux en salle de sport ;
– CONDAMNER la société Optimum à payer les sommes de 130 106,48 € à titre d’indemnisation pour perte de chance de réaliser de chiffres d’affaires ; 7 560 € à titre des frais de stockage du matériel sportif ;
– CONDAMNER solidairement la société Optimum et à M. [E] à payer la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– les CONDAMNER aux entiers dépens.
Sur la résolution du bail, la société Sport Entertainment expose qu’elle devait entrer en jouissance des locaux donnés à bail à la date reportée du 1er septembre 2016 pour permettre au bailleur d’achever les travaux de gros oeuvres à sa charge et prévus par le bail, qu’en effet, il est expressément mentionné à l’article 6 du contrat que le bailleur doit entreprendre « les grosses réparations telles que prévues à l’article 606 du Code civil, ainsi que les travaux de mise en conformité de l’immeuble », que lesdits gros ‘uvres n’ont jamais été achevés ; qu’en effet, les locaux restent dépourvus de mur de façade, qu’en tout état de cause les dispositions de l’article R145-35 du code de commerce aux termes desquelles : « ne peuvent être imputés au locataire les dépenses relatives aux grosses réparations mentionnées à l’article 606 du code civil » sont d’ordre public et qu’il ne peut y être dérogé par les parties, que le bien donné à bail n’a pas été remis conformément à sa destination, que les conditions particulières du bail ne retiennent à la charge du preneur que les aménagements liés à son activité, soit des travaux d’embellissements, que l’inventaire de la répartition n’a pas été annexé au contrat, que la bailleresse a reçu de sa part la somme de 42.609,80 € pour réaliser lesdits travaux d’embellissement.
Sur la restitution des sommes remises à la bailleresse au titre des travaux, elle soutient que M. [E] agissait en qualité de mandataire de la société Optimum et se réclamait comme tel, lequel avait le pouvoir de traiter des travaux d’aménagement commandés, qu’elle n’avait donc aucune relation contractuelle avec M. [E] qu’elle considère comme le mandataire du bailleur,
qu’elle avait – aux termes du bail – l’obligation de « financer » les travaux d’aménagement en en versant le prix à la bailleresse et en aucun cas de les réaliser ou faire exécuter. Elle indique produire à hauteur d’appel des extraits de relevés qui justifieraient de l’encaissement par le bailleur de trois chèques supplémentaires pour un total de 10 000 € et qui n’avaient pas été retenus par le tribunal.
Sur la restitution du loyer du mois de septembre 2016, elle expose que ce règlement n’a pas lieu d’être dès lors qu’elle n’a pu prendre possession des locaux donnés à bail en raison des travaux inachevés.
Sur la réparation d’une perte de chance, elle expose un manque à gagner en ce qu’elle avait acquis des équipements pour une valeur de 50 000 € et financé les aménagements spécifiques pour le montant précité de 42 609 €, lancé une campagne d’information sur les réseaux sociaux ; qu’elle escomptait 241 abonnements potentiels, soit 144.562,75 € de chiffre d’affaire pour une année, estimant qu’elle avait au moins 90 % de chance de mener à bien son projet et d’atteindre ses objectifs.
Sur la réparation des frais supplémentaires liés à l’espace de stockage, elle expose avoir loué un espace de stockage des équipements à raison de 180 € par mois soit engagé une somme totale de 7 560 €.
Sur les demandes de paiement des loyers, elle fait valoir que les locaux donnés à bail n’ont jamais été exploitables et qu’elle n’a jamais pu prendre possession de ces locaux.
Vu les dernières conclusions déposées le 6 octobre 2020, par lesquelles M. [N] [E], appelant à titre principal et intimée à titre incident, demande à la cour de:
– RÉFORMER le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamné et la SARL OPTIMUM à payer à la SAS SPORT ENTERTAINMENT à la somme de 32.609,80€ ainsi qu’à la somme de 2000 €
au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– REJETER les demandes de l’intimé,
– CONDAMNER la SAS SPORT ENTERTAINMENT à lui payer la somme de 3000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civil.
Il expose :
– que s’agissant de l’aménagement d’un plateau impliquant des travaux d’adaptation à la charge du preneur, aucun travaux n’étaient à réaliser par le bailleur ;
– qu’en revanche, seul lui-même a pris un engagement avec la SAS SPORT ENTERTAINMENT pour superviser les travaux importants qu’elles devaient engager et que c’est dans ces conditions que les parties établissent à cet effet un devis le 16/7/2016 pour la somme de 45.291,40€ HT, que ce devis ne prévoyait aucun délai pour la fin des travaux,
– qu’il est contraire à la vérité de prétendre qu’il n’est pas intervenu en qualité de mandataire de la SARL OPTIMUM dans le cadre de la réalisation des travaux ;
– qu’un mandat lui a été donné par la SARL OPTIMUM seulement pour la visite des lieux et la perception des loyers ;
– que la SARL OPTIMUM a pour objet social l’activité de marchand de biens, tandis qu’il a pour activité, l’achat, la restructuration des biens immobiliers.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Sur la demande de résiliation du bail formée par la SAS SPORT ENTERTAINMENT:
Il résulte des articles 1134 (dans sa rédaction applicable au présent contrat), 1719 et 1741 du code civil, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée, que le contrat de bail se résout par le défaut des parties de remplir leur engagement. L’article 1227 du Code civil indique que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. Le manquement contractuel doit présenter toutefois une gravité suffisante pour justifier de la résiliation du bail. En outre, selon l’article 606 du code civil les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières.
Le contrat de bail du 13 juillet 2016 stipule dans ses conditions générales que les travaux de gros oeuvres restent à la charge du locataire et dans ses conditions particulières, que le preneur est tenu d’engager des travaux dans le local pour adapter le local à son activité, qu’en contrepartie le bailleur accepte que le dépôt de garantie lui soit versé dans le délai de 36 mois ainsi qu’une remise sur loyer mensuelle de 2500 € pendant 36 mois, soit un financement de 90 000 €.
Le 16 juillet 2016, le gérant de la SAS SPORT ENTERTAINMENT, M. [G] [U] a signé avec M. [N] [E] un devis portant sur une première tranche de travaux à hauteur de 54 349,68 €.
Ces travaux portaient sur la création de puits de lumières, de la pose d’escaliers, rampes, rambardes, de pose de vitrages en lieu et place des cloisons extérieures et d’un portail coulissant.
Il résulte du procès-verbal de constat établi à la demande du preneur le 23 mars 2017 que le local est un bâtiment industriel dont les structures métalliques porteuses et le couvert étaient présents, les structures porteuses ayant étant dégarnies de leurs bardages. Il était constaté que les travaux étaient en cours.
Il résulte de ces éléments que l’exécution des travaux incombaient contractuellement au seul preneur et que le bailleur a consenti à participer à leur financement à hauteur de 90 000 €. Si les travaux consistent indubitablement en de gros oeuvres tendant notamment à la pose de vitrages et de puits de lumières pour transformer le local en salle de sport, il ne relèvent cependant pas des grosses réparations prévus par l’article 606 du code civil, les structures porteuses et le couvert étant en place.
Le défaut de délivrance de la chose louée par le bailleur n’étant pas démontré, la résolution du bail ne sera pas prononcée et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur le remboursement du coût des travaux :
Il résulte de l’article 1353 du code civil que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
La SAS SPORT ENTERTAINMENT admet qu’il lui incombait contractuellement de financer les travaux litigieux. Alors qu’elle a bénéficié d’une remise de loyer de 90 000 €, elle ne justifie avoir financé ces travaux qu’à hauteur de 16 304,90 € TTC.
Le procès-verbal de constat établi à sa demande le 23 mars 2017 mentionne que deux ouvriers réalisaient des travaux de maçonnerie, le gérant de la SAS SPORT ENTERTAINMENT étant présent sur place.
En outre, le devis signé le 16 juillet 2016 entre le gérant de la SAS SPORT ENTERTAINMENT et M. [N] [E] démontre clairement l’existence d’une convention confiant à ce dernier la maîtrise d’oeuvre d’une partie des travaux incombant au preneur. La cour observe également que la SAS SPORT ENTERTAINMENT produit elle-même un courriel du 15 mars 2017 au terme duquel M. [N] [E] fait état des travaux que la SAS SPORT ENTERTAINMENT a elle-même commandé. Enfin, le fait que M. [N] [E] représente la SARL OPTIMUM pour la recherche des locataires et la perception des loyers ne peut conférer ipso facto à cette dernière la qualité de maître d’ouvrage des travaux. Il résulte de ces éléments que sous réserve du report du paiement du dépôt de garantie et de la remise de loyer consentie, l’exécution et le financement des travaux incombait à la seule SAS SPORT ENTERTAINMENT.
Il n’y a donc pas lieu de condamner la société OPTIMUM ni Monsieur [E] à rembourser un quelconque somme à la SAS SPORT ENTERTAINMENT au titre du remboursement des travaux et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur l’acquisition de la clause résolutoire :
Selon les articles 1134 du code civil dans sa rédaction applicable au présent contrat et 1719 et 1728 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et le preneur est tenu de payer le prix du bail aux termes convenus. L’article L 145-41 du code de commerce dispose quant à lui que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux et que le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Par ailleurs, il résulte de l’article 1353 du code civil que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Le contrat de bail du 13 juillet 2016 stipule dans ses conditions particulières que le loyer mensuel est fixé à 5600 € assorti d’une remise sur loyer mensuelle de 2500 € pendant 36 mois, outre les charges.
Il n’est pas contesté que le preneur ne s’est acquitté que d’un loyer de 3 100 € correspondant au mois de septembre 2016.
L’exploit du 27 juillet 2017 vise la clause résolutoire du bail et fait état du décompte précis de loyers et de charges dû par la société Sport Entertainment d’octobre 2016 à juillet 2017, pour un montant total de 39 000 € TTC.
Il n’est pas contesté que les causes du commandement de payer n’ont pas été réglées.
Il convient donc de constater que la clause résolutoire insérée au bail du 13 juillet 2016 a été acquise à la date du 27 août 2017 et le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point.
En conséquence, il conviendra d’ordonner, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois de la signification du présent arrêt, l’expulsion de la SAS SPORT ENTERTAINMENT et de tout occupant de son chef des locaux situés [Adresse 1] avec au besoin l’assistance de la force publique et d’un serrurier et il sera dit, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu designé par elle et qu’a défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de 1’exécution, ce conformément aux dispositions légales.
Sur l’indemnité d’occupation :
Le bail ayant pris fin le 27 août 2017, la société locataire ne dispose pas d’un droit au maintien dans les lieux et depuis cette date se trouve occupante sans droit ni titre. Elle est par conséquent débitrice d’une indemnité d’occupation de droit commun qu’il conviendra d’arrêter au montant du loyer, soit 3 100 € HT par mois, du jour de la résiliation, soit le 27 août 2017 jusqu’à la restitution des clefs. En revanche et en ce qui concerne la demande d’indexation de l’indemnité d’occupation, elle ne sera pas accordée à raison du fait que celle-ci a une nature mixte, compensatoire et indemnitaire et qu’aucune disposition légale ou contractuelle ne prévoit une telle indexation. La cour constate que le bailleur s’abstient de demander en sus le paiement des taxes, charges et accessoires prévus au bail.
Sur l’arriéré locatif :
Il est constant qu’à la date à laquelle le bail avait pris fin, le preneur se trouvait redevable d’un arriéré de loyers et de charges de 42 900 € TTC.
En outre, le bail prévoit en son l’article 10 que le preneur est notamment tenu au paiement des taxes foncières relatives aux locaux loués. Le bailleur justifie de taxes foncières des années 2017 et 2018 pour un montant respectif de 58 378 € et 59 590 € pour l’immeuble entier mais la cour constate que le bailleur s’abstient de demander le paiement des taxes prévues au bail.
En revanche et dans la mesure où la SAS SPORT ENTERTAINMENT sera condamnée à verser au bailleur un indemnité d’occupation à compter du 27 août 2017, il n’y a pas lieu de condamner en sus le preneur au paiement du cumul des indemnités d’occupation mensuelles arrêté au mois de mai 2020 inclus.
La SAS SPORT ENTERTAINMENT sera donc condamnée au paiement de la somme de 42 900 € TTC au titre de son arriéré locatif.
En ce qui concerne le remboursement du loyer de septembre 2016 qui est sollicité par la SAS SPORT ENTERTAINMENT, il n’y a pas lieu de condamner la SARL OPTIMUM à rembourser cette somme qui était due au titre du contrat de bail et le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur les autres demandes d’indemnisation de la SAS SPORT ENTERTAINMENT :
La SAS SPORT ENTERTAINMENT échouant à démontrer un préjudice qui serait imputable au bailleur, elle sera déboutée de ses demandes d’une part au titre de la perte de chance et d’autre part au titre du remboursement de l’espace de stockage de ses équipements.
Sur les demandes de « juger » :
Par application de l’article 954 du code de procédure civile , la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. Il n’y a donc pas lieu de statuer sur les demandes tendant à voir « juger » qui ne constituent pas des prétentions mais ne sont en réalité que le rappel de moyens invoqués.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Le jugement étant infirmé , il le sera également en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance.
La SAS SPORT ENTERTAINMENT, partie succombante, supportera les dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.
Il convient d’y ajouter, en application de l’article 700 du code de procédure civile, la condamnation de la SAS SPORT ENTERTAINMENT à payer à la SARL OPTIMUM et à M. [N] [E] chacun une indemnité de 2 000 € pour leurs frais irrépétibles exposés à l’occasion de la première instance et de l’appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME en toutes ses dispositions le jugement du 28 novembre 2019 du tribunal de grande instance d’Evry,
et statuant à nouveau,
REJETTE la demande de résolution du bail formée par la SAS SPORT ENTERTAINMENT,
REJETTE la demande de condamnation de la SARL OPTIMUM et de Monsieur [N] [E] à rembourser à la SAS SPORT ENTERTAINMENT les sommes payées au titre des travaux,
CONSTATE l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail du 13 juillet 2016 portant sur les locaux situés au [Adresse 1], à la date du 27 août 2017,
ORDONNE, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois suivant la signification du présent arrêt, l’expulsion de la SAS SPORT ENTERTAINMENT et de tout occupant de son chef des locaux situés [Adresse 1] avec au besoin l’assistance de la force publique et d’un serrurier,
DIT, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu’a défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation a la personne expulsée d’avoir à les retirer dans un délai de quatre semaines à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de 1’exécution, ce conformément aux dispositions légales,
CONDAMNE la SAS SPORT ENTERTAINMENT à payer à la SARL OPTIMUM une indemnité d’occupation d’un montant mensuel de 3 100 € HT non indexé, à compter de la résiliation du bail, soit le 27 août 2017, jusqu’à la restitution des clefs,
CONDAMNE la SAS SPORT ENTERTAINMENT à payer à la SARL OPTIMUM la somme de 42 900 € TTC au titre de sa dette locative comprenant les loyers et charges arrêtés au mois d’août 2017 inclus,
REJETTE la demande de remboursement du loyer de septembre 2016 formée par la SAS SPORT ENTERTAINMENT,
REJETTE la demande d’indemnisation pour perte de chance formée par la SAS SPORT ENTERTAINMENT,
REJETTE la demande de remboursement de frais de stockage formée par la SAS SPORT ENTERTAINMENT,
CONDAMNE la SAS SPORT ENTERTAINMENT à payer à la SARL OPTIMUM et à M. [N] [E] chacun la somme de 2 000 € en indemnisation de leurs frais irrépétibles de première instance et d’appel,
CONDAMNE la SAS SPORT ENTERTAINMENT aux dépens de la première instance et de l’appel et autorise la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES à recouvrer directement ceux dont elle a fait l’avance sans recevoir de provision en application de l’article 699 du code de procédure civile.
REJETTE toutes autres demandes.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
Pour le président empêché,
Douglas BERTHE, conseiller,