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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 8
ARRET DU 10 MARS 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/12038 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGBKX
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Juin 2022 -Président du TC de Paris – RG n° 2022023643
APPELANTES
S.C. EUROINVEST agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,
[Adresse 5]
[Localité 9]
S.A.S. IMMOFI agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,
[Adresse 5]
[Localité 9]
Représentées par Me Delphine MENGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878
Assistées à l’audience par Me Isabelle IBRAHIM, substituant Me Paul ZEITOUN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1878
INTIMEE
S.C. LEDUCQ prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège,
[Adresse 2]
[Localité 8]
Défaillante, PV 659 établi le 06.10.2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Février 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président et Rachel LE COTTY, Conseiller chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:
Florence LAGEMI, Président,
Rachel LE COTTY, Conseiller,
Patrick BIROLLEAU, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL
ARRÊT :
– PAR DÉFAUT
– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Florence LAGEMI, Président et par Marie GOIN, Greffier présent lors de la mise à disposition.
La société Immofi est une société par actions simplifiée (SAS) au capital de 1.000 euros, immatriculée le 1er mars 2022, dont le siège social est situé [Adresse 5].
Elle a pour objet toutes activités de marchand de biens et de promotion immobilière.
Son capital est détenu à 50% par la société civile Euroinvest, dont le gérant et actionnaire est M. [W], et à 50% par la société civile Leducq, dont le gérant et actionnaire est M. [B].
La société Euroinvest est la présidente de la société Immofi et la société Leducq sa directrice générale.
La société Immofi a acquis, le 8 mars 2022, un appartement situé à [Adresse 7], au prix de 109.900 euros et, le 8 avril 2022, une chambre et une cuisine sur cour situées à [Adresse 3], au prix de 103.500 euros.
Par acte du 16 mai 2022, les sociétés Euroinvest et Immofi ont assigné la société Leducq devant le président du tribunal de commerce de Paris, en référé à heure indiquée, aux fins de désignation d’un administrateur provisoire pour la société Immofi.
Par ordonnance réputée contradictoire du 10 juin 2022, le président du tribunal de commerce a :
dit n’y avoir lieu à référé, ni à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné la société Euroinvest aux entiers dépens.
Par déclaration du 27 juin 2022, les sociétés Euroinvest et Immofi ont interjeté appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif.
Par jugement du 24 août 2022, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde au bénéfice de la société Immofi et a désigné la SCP [E] en qualité d’administrateur judiciaire avec une mission d’assistance et la Selarl Athena en qualité de mandataire judiciaire.
Dans leurs conclusions remises et notifiées le 20 octobre 2022, les sociétés Euroinvest et Immofi demandent à la cour de :
les déclarer recevables et bien fondées en leur appel ;
y faisant droit,
Infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
statuant à nouveau,
ordonner la désignation d’un administrateur provisoire au bénéfice de la société Immofi ;
nommer la SCP [E], membre de Solve, prise en la personne de Maître [E], administrateur judiciaire en qualité d’administrateur provisoire de la société Immofi pour une durée de six mois qui pourra, en cas de besoin justifié, être prorogé par ordonnance rendue sur simple requête de l’administrateur, avec la mission suivante :
gérer et administrer la société Immofi avec les pouvoirs les plus étendus conformément aux statuts et aux dispositions légales et réglementaires en vigueur ;
disposer des pouvoirs que la loi, les décrets en vigueur et les statuts confèrent au président et directeur général et « qu’il assumera » la gestion de la société sous sa responsabilité ;
réaliser les stocks composés des deux appartements ci-dessous désignés :
‘ un ensemble immobilier situé à [Adresse 7], un lot de copropriété n°11 dans un bâtiment sur rue, deuxième étage, escalier A, à droite, un appartement comprenant trois pièces et une cuisine sur rue, droit au WC situés au fond de la cour portant le n°2, communs avec les lots n°7,8,9,10,11,12 et 13 ; droit à la jouissance de la cour avec tous les autres lots et les cinquante millièmes des parties communes générales ; ainsi qu’un lot 25, dans le bâtiment, au fond de cour, une buanderie portant le n°10 et les un millième des parties communes générales ;
un ensemble immobilier situé [Adresse 3], un lot de copropriété n°200, dans un bâtiment C, au rez-de-chaussée, une chambre et une cuisine sur cour et 33/1000ème des parties communes générales ;
rendre compte, dans le mois de sa nomination, de l’état de la société et des perspectives d’évolution de sa situation et en tout état de cause établir un compte rendu à la fin de sa mission ;
autoriser la SCP [E], membre de Solve, prise en la personne de Maître [E] à se faire assister de toute personne compétente de son choix ;
débouter la société Leducq de toutes ses demandes ;
condamner la société Leducq à leur payer la somme de 5.000 euros chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner la société Leducq aux entiers dépens.
La société Leducq, à qui la déclaration d’appel et les conclusions des appelantes ont été signifiées les 6 et 26 octobre 2922 selon les dispositions de l’article 659 du code de procédure civile, n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 25 janvier 2023.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.
SUR CE, LA COUR,
Aux termes de l’article 872 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Aux termes de l’article 873 du même code, le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
En application de ces textes, le président du tribunal de commerce peut, en référé, désigner un administrateur provisoire pour une société sous réserve que soit rapportée la preuve de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent (Com., 29 septembre 2009, pourvoi n° 08-19.937, Bull. 2009, IV, n° 118).
En l’espèce, il résulte des statuts de la société et des pièces produites que les deux associées égalitaires ne sont plus en mesure de gérer la société en raison de leur position antagoniste, ce qui conduit à un blocage total du processus décisionnel.
La société dispose en effet d’une direction duale constituée d’une présidente et d’une directrice générale détenant chacune 50% des actions et disposant de pouvoirs concurrents vis-à-vis des tiers. En présence d’un conflit entre ces dernières et leurs dirigeants, le processus décisionnel est paralysé.
Ainsi, la société Leducq, en qualité de directrice générale, a convoqué une assemblée générale de la société Immofi le 16 mai 2022 afin d’adopter deux résolutions de « refus de vente » de ses biens immobiliers, alors que la société Euroinvest, présidente, souhaite la revente des biens immobiliers acquis, conformément à son objet de social de marchand de biens.
De même, la gestion de la société Immofi est paralysée dès lors que la présidente et la directrice générale ont chacune désigné un expert-comptable différent et donnent des instructions différentes à la banque.
En outre, le 2 mai 2022, M. [B], gérant de la société Leducq, a effectué un virement de 16.100 euros depuis le compte de la société Immofi vers son compte personnel, sans justifier de sa cause et de sa conformité à l’intérêt social.
Enfin, celui-ci a installé des personnes dans au moins l’un des appartements acquis par la société Immofi en vue de leur revente (le bien situé [Adresse 3]), sans que celles-ci ne s’acquittent d’un loyer, ainsi que cela résulte de la sommation interpellative de Maître [S] du 18 mai 2022 et de sa lettre du même jour explicitant les circonstances particulièrement désagréables de sa rencontre avec les occupants, M. [I] et Mme [Z] (tous deux, très agressifs, ayant refusé de recevoir l’acte et, finalement, arraché l’enveloppe des mains de l’huissier et « tout déchiré »).
Ces agissements, contraires à l’intérêt social, de même que le blocage du processus décisionnel, caractérisent des circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et menaçant celle-ci d’un péril imminent, son activité étant inexistante en raison de l’opposition de la directrice générale et associée égalitaire à la vente des biens.
En outre, cette dernière a disparu sans laisser d’adresse, ainsi que l’a constaté l’huissier de justice qui a tenté de signifier en vain la déclaration d’appel et les conclusions des appelantes. La société Leducq, défaillante en première instance, est ainsi à nouveau défaillante en appel.
Le 19 juillet 2022, la société Immofi, la société Euroinvest et M. [W] ont déposé plainte pour abus de biens sociaux, abus de confiance et escroquerie entre les mains du procureur République près le tribunal judiciaire de Paris.
La procédure de sauvegarde qui a été ouverte par le tribunal de commerce le 24 août 2022 est insuffisante pour permettre une administration de la société, l’administrateur ne disposant que d’une mission d’assistance, sans pouvoir se substituer au débiteur.
La demande de désignation d’un administrateur provisoire est donc fondée et sera accueillie, l’ordonnance entreprise étant infirmée en toutes ses dispositions. Maître [E] ne peut toutefois être désigné en qualité d’administrateur provisoire dès lors qu’il exerce les fonctions d’administrateur judiciaire dans le cadre de la procédure de sauvegarde.
L’objet social de la société Immofi étant la vente de biens immobiliers et toute activité étant actuellement paralysée, l’administrateur provisoire sera autorisé, le cas échéant, à vendre les biens immobiliers de la société.
La société Leducq, partie perdante, sera tenue aux dépens de première instance et d’appel et condamnée à indemniser les appelantes des frais qu’elles ont été contraintes d’exposer, à hauteur de la somme de 5.000 euros, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Infirme en toutes ses dispositions l’ordonnance entreprise ;
Statuant à nouveau,
Désigne la Sarl [N] et associés, représentée par Maître [D] [N], administrateur judiciaire, [Adresse 4], tel : [XXXXXXXX01], en qualité d’administrateur provisoire de la société Immofi pour une durée de six mois, avec la mission suivante :
gérer et administrer la société Immofi avec les pouvoirs les plus étendus ;
prendre toutes les mesures qu’impose la situation de la société Immofi ;
le cas échéant, si cette mesure s’avère nécessaire à la préservation de l’intérêt social, vendre les deux biens immobiliers ci-dessous désignés :
dans un ensemble immobilier situé à [Adresse 7], figurant ainsi au cadastre : section Z, numéro [Cadastre 6], lieudit [Adresse 7], pour une contenance de trois ares soixante-douze centiares, le lot de copropriété n°11 dans le bâtiment sur rue, deuxième étage, escalier A, à droite, un appartement comprenant trois pièces et une cuisine sur rue, droit au water closet situé au fond de la cour portant le n°2, communs avec les lots n°7,8,9,10,11,12 et 13, droit à la jouissance de la cour avec tous les autres lots et les cinquante millièmes des parties communes générales, ainsi que le lot n° 25, dans le bâtiment, au fond de cour, une buanderie portant le n°10 et les un millième des parties communes générales ;
dans un ensemble immobilier situé à [Adresse 3], figurant ainsi au cadastre : section B, numéro [Cadastre 10], lieudit [Adresse 3], pour une contenance de trois ares trente-quatre centiares, le lot de copropriété n°200, dans le bâtiment C, au rez-de-chaussée, une chambre et une cuisine sur cour, le droit à la jouissance de la cour privée située devant et les trente-trois millièmes des parties communes générales ;
Dit que l’administrateur provisoire rendra compte de sa mission au président du tribunal de commerce de Paris et lui soumettra pour examen les frais exposés ainsi que sa demande d’honoraires’;
Dit que la rémunération de l’administrateur provisoire sera mise à la charge de la société Immofi ;
Fixe à 5.000 euros la provision que les appelantes devront verser à l’administrateur provisoire à valoir sur ses frais et honoraires, directement entre ses mains, et dit qu’à défaut de versement de cette provision dans le délai d’un mois à compter du présent arrêt, la nomination de l’administrateur judiciaire en qualité d’administrateur provisoire sera caduque et privée de tout effet’;
Dit que la mission de l’administrateur provisoire pourra être prorogée à sa demande ou à celle d’une partie sur simple requête auprès du président du tribunal de commerce de Paris ;
Dit que l’administrateur provisoire désigné en référera au tribunal de commerce de Paris en cas de difficulté dans l’exercice de sa mission ;
Dit qu’en cas d’empêchement de la Sarl [N] et associés, représentée par Maître [D] [N], il sera pourvu à son remplacement par ordonnance du président du tribunal de commerce de Paris rendue sur requête ;
Dit que l’administrateur provisoire pourra se faire assister, pour l’accomplissement de sa mission, par toute personne de son choix ;
Condamne la société Leducq aux dépens de première instance et d’appel ;
La condamne à payer aux sociétés Euroinvest et Immofi la somme globale de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,