Marchand de Biens : décision du 20 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/01184

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Marchand de Biens : décision du 20 septembre 2022 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/01184
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1

ARRÊT AU FOND

DU 20 SEPTEMBRE 2022

N° 2022/

Rôle N° RG 22/01184 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BIYBJ

[M] [Z] EPOUSE [D]

[X] [D]

C/

[U] [N]

[H] [G] épouse [N]

[J] [E]

SAS CAPI

S.C.P. DE POULPIQUET ET ASSOCIES

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Hadrien LARRIBEAU

Me Laure ATIAS

Me Paul GUEDJ

Me Sébastien BADIE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal judiciaire de GRASSE en date du 10 Janvier 2022 enregistré au répertoire général sous le n° 20/02158.

APPELANTS :

Madame [M] [Z] épouse [D]

née le 27 Octobre 1982 à [Localité 11], de nationalité Française, demeurant [Adresse 8]

assistée de Me Hadrien LARRIBEAU de la SCP DELAGE – DAN – LARRIBEAU – RENAUDOT, avocat plaidant du barreau de GRASSE

Monsieur [X] [D]

né le 09 Juillet 1990 à [Localité 11], de nationalité Française, demeurant [Adresse 8]

assisté de Me Hadrien LARRIBEAU de la SCP DELAGE – DAN – LARRIBEAU – RENAUDOT, avocat plaidant du barreau de GRASSE

INTIMES :

Monsieur [U] [N]

né le 21 Mars 1974 à [Localité 13], demeurant [Adresse 2]

assisté de Me Laure ATIAS, avocat plaidant du barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Valérie GINET, avocat au barreau de GRASSE,

Madame [H] [G] épouse [N]

née le 20 Janvier 1978 à [Localité 7], demeurant [Adresse 2]

assistée de Me Laure ATIAS, avocat plaidant du barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Valérie GINET, avocat au barreau de GRASSE

Maître Daphné DE BOYSSON-FERRE

né le 02 Août 1956 à [Localité 10], demeurant [Adresse 12]

représenté par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me CARNAZZA, avocat plaidant du barreau de NICE;

S.C.P. DE POULPIQUET ET ASSOCIES poursuites et diligences de son représentant légal en exercice domicilié ès qualité au siège social sis [Adresse 12]

représentée par Me Paul GUEDJ de la SCP COHEN GUEDJ MONTERO DAVAL GUEDJ, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

assistée de Me CARNAZZA, avocat plaidant du barreau de NICE;

SAS CAPI, dont le siège social est SAS API DIVER-CITY [Adresse 3], pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège,

représentée par Me Sébastien BADIE de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat postuant du barreau d’AIX-EN-PROVENCE,

assisté de Me Hervé POQUILLON, avocat plaidant du barreau de MONTPELLIER

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 20 Juin 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Olivier BRUE, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne DAMPFHOFFER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Colette SONNERY.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2022.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2022,

Signé par Monsieur Olivier BRUE, Président et Mme Colette SONNERY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Vu l’assignation du 28 avril 2020, par laquelle M. [X] [D] et Mme [M] [Z], son épouse ont fait citer M. [U] [N] et Mme [H] [G], son épouse, devant le tribunal judiciaire de Grasse.

Vu l’assignation du 10 juillet 2020, par laquelle M. [U] [N] et Mme [H] [G] ont fait citer Me [J] [E] et la SCP Pannetier Michel [E] Conynck Fioroni Shalom Vaillon Avousten Sirvent Sobra, notaires, ainsi que la SAS Capi, agent immobilier, devant la même juridiction.

Vu le jugement rendu le 10 janvier 2022, par cette juridiction ayant statué ainsi qu’il suit :

Déboute M.[U] [N] et Mme [H] [G] de leur demande de sursis à statuer en l’attente des conclusions du rapport d’expertise de M. [K] ;

Déboute M . [U] [N] et Mme [H] [G] de leur demande de sursis à statuer en l’attente du dépôt du rapport d’expertise ;

Déboute M. [X] [D] et Mme [M] [Z] de leur demande de nullité de la vente pour dol ;

Déclare recevable la demande de M. [X] [D] et Mme [M] [Z] en nullité de vente pour erreur sur les qualités essentielles du bien acquis ;

Déboute M. [X] [D] et Mme [M] [Z] de leur demande de nullité de la vente pour erreur sur les qualités essentielles du bien acquis ;

Déclare irrecevable car prescrite, la demande de résolution de la vente sur le fondement des vices cachés ;

Dit que les époux [N] ne sont redevables à l’égard des époux [D] d’aucune garantie

décennale sur le fondement des articles 1792 et suivants du code civil ;

Dit que les époux [N] étaient redevables à l’égard des époux [D] d’une

garantie biennale sur le fondement de l’article 1792-3 du même code ;

Déclare prescrite l’action M. [X] [D] et Mme [M] [Z] aux fins de mise en oeuvre garantie biennale de M. [U] [N] et Mme [H] [G]

Déclare sans objet l’ensemble des demandes formées à l’encontre de Me De [J] [E] et la SCP Pannetier Michel De Boysson Ferre Conynck Fioroni Shalom Vaillon Avousten Sirvent Sobra et de la SAS Capi eu égard au rejet l’ensemble des demandes de Monsieur [X] [D] et Mme [M] [Z]

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire ;

Condamne M. [X] [D] et Mme [M] [Z] à payer la somme de

– 2.000 euros à M. [U] [N] et Mme [H] [G] 2 000euros à Me Daphné [E] et la SCP Pannetier Michel De Boysson Ferre Conynck Fioroni Shalom Vaillon Avousten Sirvent Sobra et 2000 euros à la SAS Capi, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [X] [D] et Mme [M] [Z] aux entiers dépens, distraits conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de droit de la présente décision, eu égard au rejet de l’ensemble des demandes.

Vu la déclaration d’appel du 26 janvier 2022, par M. [X] [D] et Mme [M] [Z].

Vu les conclusions transmises le 13 juin 2022, par les appelants.

Ils exposent que l’expertise judiciaire révèle que les travaux réalisés en sous-‘uvre pour la création de pièces semi enterrées ont entraîné des écoulements d’eau par un défaut de conception et que le logement n’est plus habitable, leur ayant causé des troubles de santé.

M. [X] [D] et Mme [M] [Z] soulignent que les vendeurs leur ont sciemment dissimulé l’existence de la transformation du rez-de-chaussée en logement par leurs soins, ayant affirmé dans l’acte qu’ils n’avaient réalisé aucuns travaux nécessitant l’obtention d’un permis de construire, modifiant la destination du bien.Ils ajoutent qu’ils n’auraient pas acquis le bien s’ils avaient su que des travaux de cette ampleur avaient été réalisés, sans architecte, ni garantie dommages ouvrage et qui constituent un élément essentiel sur la structure de l’immeuble.

Ils affirment n’avoir eu eu connaissance de la situation qu’en 2019, par communication de l’acte d’acquisition du voisin et contestent avoir pu en constater l’existence à l’occasion d’une demande de déclaration de travaux pour la création d’une cuisine d’été déposée avant l’acquisition, le plan lié au permis de construire antérieur ne leur ayant jamais été remis par le service d’urbanisme.

Les acquéreurs estiment que le notaire qui avait rédigé le précédent acte de vente quelques mois auparavant a commis une faute, en ne modifiant pas le descriptif prenant en compte les travaux de transformation. Ils précisent ne pas avoir signé l’acte complémentaire qui aurait rectifié cette erreur et observent que l’acte authentique de vente du 10 juin 2016, relatif au lot voisin mentionne le permis de construire litigieux. Ils reprochent au notaire de ne pas avoir attendu la réponse du service de l’urbanisme, laquelle faisait état du permis de construire relatif à la modification des lieux.

Les époux [D] invoquent subsidiairement l’existence d’une erreur sur les qualités substantielles du bien vendu et très subsidiairement l’existence de vices cachés; ils font valoir que la découverte du vice n’étant intervenue qu’en 2019, la prescription n’est pas acquise.

Estimant que les vendeurs, exerçant l’activité de marchand de biens, se sont comportés comme des maîtres d”uvre professionnels de l’immobilier, ils engagent leur responsabilité de ce chef, pour défaut d’étanchéité en application des dispositions des articles 1792 et suivants du Code civil.

Vu les conclusions transmises le 18 juin 2022, par M. [U] [N] et Mme [H] [G].

Ils soutiennent que l’absence de mention du permis de construire délivré le 16 septembre 2015 relève d’une erreur matérielle, celui-ci apparaissant dans l’acte de vente de l’appartement du premier étage rédigé quelques semaines plus tard. Ils affirment que les acquéreurs avaient eu connaissance avant la vente des travaux réalisés, pour avoir consulté les services de l’urbanisme qui leur a remis un plan mentionnant l’aménagement d’un garage, rencontré l’architecte les ayant supervisés et sollicité la délivrance d’une attestation d’assurance dommages ouvrage dans le cadre de l’obtention de leur crédit. Ils précisent que celle-ci n’était pas nécessaire pour des travaux réalisés par des particuliers sans modification des structures de l’immeuble.

M. [U] [N] et Mme [H] [G] estiment que l’action fondée sur l’erreur est irrecevable, dès lors qu’est également exercée une action fondée sur les vices cachés et mal fondée, compte tenu de la connaissance de la situation de l’immeuble par les acquéreurs et du fait qu’elle ne concerne pas une qualité substantielle du bien. Ils ajoutent que les acquéreurs n’ont pas réagi à la réception de l’acte modificatif établi par le notaire sur ce point.

Les intimés considèrent que l’action fondée sur les vices cachés est prescrite, dès lors que les époux [D] ont eu connaissance des travaux litigieux dès le mois de juin 2016. Ils invoquent la clause de non garantie incluse dans le contrat sur ce point, rappelant qu’ils ne sont pas des professionnels de l’immobilier. M. [U] [N] expose n’avoir créé une SCI qu’en 2017. Ils affirment ne pas avoir eu connaissance de l’existence d’infiltrations au rez-de-chaussée de l’immeuble.

Les époux [N] contestent la mise en jeu de leur responsabilité en qualité de constructeur dans le cadre de la garantie décennale, dès lors que les travaux litigieux n’ont pas affecté les fondations, ni les murs maîtres de la maison et estiment que l’expert se trompe sur ce point. Ils ajoutent que le délai de la garantie biennale pour les travaux d’embellissement est écoulé.

Selon eux, le notaire qui a rédigé l’acte initial d’achat, puis l’état descriptif de division et enfin les deux ventes consécutives à cette création de lots et de copropriété, doit les garantir de toute condamnation, dans le cadre de son devoir de conseil et de son obligation de s’assurer de la validité et de l’efficacité de ses actes.

Ils considèrent que l’agent immobilier qui avait eu connaissance de l’acte d’acquisition des vendeurs mentionnant un garage non aménagé au rez-de-chaussée de la villa aurait dû vérifier le caractère habitable du bien vendu et que celui-ci n’est fondé à réclamer aucune somme à titre de dommages et intérêts.

Vu les conclusions transmises le 6 avril 2022, par Me [J] [E] et la SCP De Poulpiquet et associés.

Ils insistent sur le fait que les époux [D] ont joint à leur déclaration préalable de travaux déposée le 6 mars 2016, le plan annexé au permis de construire accordé aux époux [N], portant la mention : ‘garage existant à transformer en surface de plancher’, ont prévu de prendre contact avec l’architecte ayant réalisé les travaux et réclamé une attestation d’assurance dommages ouvrage, révélant ainsi qu’ils avaient connaissance des opérations de transformation intervenues.

Les notaires excluent l’existence de man’uvres frauduleuses avec l’intention de tromper, alors que la villa était initialement à usage d’habitation et que des modifications internes, pour étendre la surface habitable ne rendaient pas nécessaire des autorisations particulières. Ils rappellent

qu’a été vendu un logement conforme à l’usage d’habitation qui n’est pas impropre à sa destination, sauf à réaliser les travaux d’étanchéité nécessaires.

Me [J] [E] et la SCP De Poulpiquet et associés soulèvent l’irrecevabilité de l’action fondée sur l’existence de vices cachés lié à la transformation du bien, dont les acquéreurs ont eu connaissance dès le mois de juin 2016.

La notaire exclut toute possibilité de faute de sa part, ayant reporté dans l’acte les informations transmises sur la consistance du bien par les vendeurs qui ne l’avaient pas informée de la nature des travaux réalisés par leurs soins, ni de l’existence d’un permis de construire. Elle ajoute que la réponse de la mairie n’est pas obligatoire pour l’établissement de l’acte de vente et que les parties souhaitaient la conclure rapidement.

Me [J] [E] et la SCP De Poulpiquet et associés estiment que le préjudice ne provient pas de la modification en elle-même, mais de sa mauvaise réalisation et que le notaire n’avait aucune raison de douter de la qualité d’étanchéité ainsi aucun lien de causalité certain direct n’est établi, avec la faute alléguée. Il appartient, selon eux, aux vendeurs d’assumer seuls les conséquences de la mauvaise qualité des travaux réalisés et de leur défaut d’information.

Ils rappellent qu’en cas d’annulation de la vente pour dol, le vendeur ne peut exercer un recours en garantie contre le notaire, même s’il a commis une faute et que les restitutions réciproques consécutives à l’annulation de la vente ne constituent pas elles-mêmes un préjudice indemnisable que le rédacteur d’acte peut être tenu de réparer.

Vu les conclusions transmises le 7 avril 2022, par la SAS Capi.

Elle expose que si un mandat de vente exclusif lui avait été délivré par les époux [N], la transaction avec M.et Mme [D] n’est pas intervenue par son intermédiaire, comme le mentionne l’acte notarié et le confirment les vendeurs et les acquéreurs dans leurs écritures, précisant que l’offre d’achat initiale a été refusée.

La SAS Capi affirme que les époux [N] ont vendu leur bien en fraude des termes du mandat exclusif à des personnes qui leur ont été présentées par ses soins, la privant de sa commission.

Elle fait valoir que la responsabilité de l’agent immobilier ne peut être engagée que lorsqu’il a reçu une rémunération et qu’il ne peut lui être reproché un manquement à son devoir de conseil qui est une obligation de moyens, alors qu’il n’avait pas été informé par le vendeur de la nature des travaux réalisés et de l’existence d’un vice caché.

SUR CE

Par acte authentique du 27 mars 2015 établi par Me [J] [E], notaire, M. [U] [N] et Mme [H] [G] ont acquis une villa sise à [Localité 9]), composée d’un rez de chaussée à usage de cave et garage et d’un étage comprenant, dégagement, deux chambres, cuisine, séjour, salle de bains, WC et terrasse, outre un terrain en nature de jardin.

Les acquéreurs ont déposé un permis de construire en vue de transformer le rez-de-chaussée en surface habitable.

Par acte authentique du 22 avril 2016, dressé par Me [J] [E], M. [U] [N] et Mme [H] [G] ont vendu le rez de chaussée de ce bien à M. [X] [D] et Mme [M] [Z] qui avaient visité les lieux par l’intermédiaire de la SAS Capi, agence immobilière.

Le premier étage a été vendu le 16 juin 2016 aux consorts [R]-[L], par acte de Me [E].

Se plaignant d’importantes infiltrations dans le logement, M. [X] [D] et Mme [M] [Z] réclament à titre principal l’annulation de la vente pour dol.

L’acte de vente ayant été signé avant le 1er septembre 2016, le contrat est régi par les dispositions du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016.

La vente intervenue le 27 mars 2015 vise notamment:

une maison à usage d’habitation sise à [Adresse 8], élevée d’un étage sur rez de chaussée, composée de :

– au rez de chaussée : cave, garage, chaufferie

– à l’étage : dégagement, deux chambres, salle de bains, cuisine, séjour, WC, terrasse.

L’acte de vente du 22 avril 2016 vise le lot numéro deux (2) : Un appartement situé au rez-de-chaussée de l’immeuble comprenant un séjour-cuisine avec placard, deux chambres chacune avec placard, dégagement, salle de bains, water-closet, une cave, avec terrasse attenante d’une superficie d’environ 68,8 m².

Le vendeur a déclaré en sa page 8 :

– que le bien n’a fait l’objet d’aucun travaux modifiant l’aspect extérieur de l’immeuble ou les parties communes.

– qu’il n’a pas modifié la destination du bien, en contravention, tant des dispositions du règlement de copropriété que des dispositions légales.

Le notaire avait établi le même jour un acte contenant règlement de copropriété, état descriptif de division et création de servitudes, concernant le même immeuble.

Il avait sollicité le 1er mars 2016 des renseignements d’urbanisme qui lui sont parvenus par courrier de la mairie en date du 9 mai 2016, faisant apparaître la réalisation de modifications par les époux [N] et notamment l’arrêté de permis de construire accordé le 10 septembre 2015 à leur profit, pour la transformation d’un garage en habitation, des modifications de façade et la suppression de la cuisine d’été ouverte.

Me Daphné [E] a reçu le 10 juin 2016 un acte complémentaire à l’état descriptif de division du 22 avril 2016 faisant mention des transformations opérées par les vendeurs.

Aux termes de l’article 1116 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man’uvres pratiqués par l’une des parties sont telles qu’il est évident que sans ces man’uvres, l’autre partie n’aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé.

L’acte d’acquisition par M. [X] [D] et Mme [M] [Z] du 22 avril 2016 précise en sa page 15 que le vendeur déclare qu’il n’a réalisé depuis qu’il est propriétaire du bien objet des présentes aucun travaux qui auraient nécessité l’obtention préalable d’un permis de construire, le dépôt d’une déclaration de travaux, ou d’une déclaration préalable, la souscription d’une assurance dommages ouvrage ou la constitution d’un dossier d’intervention ultérieure sur l’ouvrage.

L’acte authentique de vente du 10 juin 2016, relatif au premier étage de la villa mentionne en sa page 16, dans la rubrique ‘déclaration d’achèvement des travaux-certificat de conformité’qu’il résulte d’un courrier de la mairie de la [Localité 9] en date du 9 mai 2016 et demeuré ci annexé, transmettant copie de l’arrêté de permis de construire accordé le 10 septembre 2015 au profit de M. et Mme [N], pour la transformation d’un garage en habitation, des modifications de façade, la suppression de la cuisine d’été ouverte.

Il est ainsi établi que le rez-de-chaussée de la villa acquise par M. [U] [N] et Mme [H] [G] a fait l’objet de l’obtention d’un permis de construire pour la réalisation de travaux de réaménagement d’un garage et d’une cave en appartement habitable, modifiant ainsi sa destination.

Par acte rectificatif établi le 10 juin 2016 en la seule présence des vendeurs, par Me [J] [E], a été ajouté à la rubrique ‘permis-déclaration d’achèvement travaux-certificat de conformité’de l’acte du 22 avril 2016, portant état descriptif de division, la mention selon laquelle le vendeur déclare avoir obtenu un arrêté de permis de construire accordé le 10 septembre 2015, pour la transformation d’un garage en habitation, des modifications de façade et la suppression de la cuisine d’été ouverte.

La notification par courrier électronique du 18 juillet 2016 à Mme [M] [Z] de l’acte modificatif de l’état descriptif de division est tardive au regard de la date de signature de l’acte d’acquisition du bien immobilier concerné. Il ne peut être reproché aux acquéreurs ne pas avoir formulé des observations sur le dépôt d’un permis de construire pour modification de la destination du rez-de-chaussée.

Si la déclaration préalable de travaux déposée le 6 mars 2016, par M. [D] et Mme [Z] pour la création d’une cuisine d’été au même emplacement que l’ancienne récemment supprimée joint en annexe un plan établi pour le compte de M. [U] [N] et Mme [H] [G] mentionnant en très petits caractères un garage existant à transformer en surface de plancher, ainsi que les références d’un permis de construire antérieur, cette légende n’apparaît pas assez apparente et mise en évidence , pour constituer une information suffisante sur la réalité et l’ampleur des travaux.

Dans son attestation du 7 février 2022, Mme [F], agent du service de l’urbanisme de la commune expose que Mme [Z] a dessiné sur place, le schéma de sa future cuisine d’été sur le plan joint à la demande de permis de construire des vendeurs détenu par le service, sans que celui-ci lui ait été remis et donc sans avoir pu en predre connaissance dans le détail.

Il n’est établi par aucun document fiable et probant que ce permis était encore affiché sur les lieux au moment de sa visite par les acquéreurs.

Le fait que pour répondre à une demande de complément d’information de leur banque dans le cadre de l’octroi du crédit, Mme [Z] a interrogé les vendeurs sur l’existence d’une attestation de l’assurance dommages ouvrage, ne suffit pas à justifier leur connaissance de la réalisation de travaux, alors qu’en l’espèce il leur a été indiqué qu’aucune assurance dommages ouvrage n’a été souscrite, compte tenu du caractère peu important des travaux qualifiés de simple de rafraîchissement.

Il n’est pas démontré que M. [X] [D] et Mme [M] [Z] ont rencontré l’architecte ayant réalisé les travaux, ni que cette dernière les a informés de leur nature et de leur ampleur. Par attestation du 6 février 2022, Mme [Y] indique n’avoir jamais avoir été en contact avec eux.

Les vendeurs ne peuvent donc prétendre que les acquéreurs ont été duement informés de la transformation de la destination des lieux antérieurement à l’acquisition par cate notarié du 22 avril 2016.

Le dol n’est établi que si l’intention de tromper l’autre contractant est démontrée.

Si l’acte a été préparé par le notaire, il n’est pas contesté qu’il en a été donné lecture aux parties et que la clause relative à l’absence de modification des lieux par des travaux réalisés sur un permis de construire est claire et sans équivoque.

Il apparaît ainsi que M.et Mme [N] qui ont sollicité un permis de construire pour transformer le rez de chaussée à usage de cave et de garage en habitation et fait réaliser des travaux importants quelques mois auparavant ont sciemment dissimulé cette situation aux acquéreurs.

Les plans réalisés à leur demande par l’architecte mentionnent clairement une augmentation des volumes en sous oeuvre par décaissement, pouvant entraîner des risques d’infiltrations, en l’absence de reprise du système de drainage des eaux. Ce fait est confirmé par le voisin, M. [I] [A], dans son attestation du 24 novembre 2021 et par le prérapport de l’expertise dans le cadre d’une procédure concernant les aquéreurs du premier étage.

L’existence de ces travaux constitue un élément substantiel du bien immobilier acquis

déterminant de la décision de l’acheter.

Ainsi les clauses de l’acte de vente selon lesquelles l’immeuble n’avait subi aucun changement de destination, ni travaux importants ne peuvent être qualifiées d’erreur matérielle.

Le dol est donc constitué.

M. [X] [D] et Mme [M] [Z] sont donc fondés à réclamer l’annulation de la vente et le remboursement du prix par M. [U] [N] et Mme [H] [G], à concurrence de la somme de 283 000 €.

Les acquéreurs victimes d’un dol peuvent également réclamer l’indemnisation du préjudice qu’ils ont subi sur le fondement de la responsabilité délictuelle, la faute étant constituée par le dol lui même.

Les frais d’acquisition doivent être indemnisés à concurrence de la somme de 4696 €, après déduction des droits de mutation remboursables par l’administration fiscale, en application de l’article 1961 du code général des impôts.

Doivent être pris en compte les sommes de :

-1204€, au vu des décomptes de l’étude notariale, pour la quote part du règlement de copropriété.

-7755,36 €, au vu des avis d’imposition, pour les taxes foncières et d’habitation.

-4384,98€, au vu des appels de fonds, pour les cotisations d’assurance habitation de la Maif.

-4230,81 €, au titre des frais de copropriété justifiés par des appels de fonds.

-4319,03€, au titre des frais de sinistre, au vu des factures produites.

-1125,12 €, pour les travaux d’embellissement intérieur, au vu des factures et tickets d’achat versés aux débats.

-35873,80 €, pour les travaux d’embellissement extérieurs, au vu des factures produites.

Les procès verbaux de constat d’huissier de justice, ainsi que le cabinet Saretec, mandaté par l’assureur des acquéreurs confrment l’existence d’inondations par les eaux pluviales dans l’appartement dans le quel règne une humidité ambiante qui n’est donc pas conforme à sa destination.

Au vu des pièces médicales produites, le préjudice de jouissance pendant au moins 26 mois peut être indemnisé par la somme de 10 400 €.

Dès lors que l’annulation de la vente immobilière entraîne de plein droit, celle du crédit immobilier, ainsi que celle du contrat d’assurance subséquent, il appartient à M. [X] [D] et Mme [M] [Z] de traiter cette question avec la banque et la compagnie d’assurances, en vue des remboursements réciproques du capital versé et des échéances payées, étant observé qu’elles n’ont pas été appelées dans la cause.

La demande formée de ce chef ne peut donc prospérer.

Il en est de même pour les frais de déménagement, alors que seul un devis et non une facture n’est produit.

Au regard de la situation familiale des acquéreurs et des nombreux tracas engendrés par les désordres affectant l’appartement, ainsi que les procédures ayant dues être engagées, le préjudice moral des époux [D] doit être indemnisé par la somme de 5000 €, à titre de dommages-intérêts.

L’ensemble de ces préjudices sont en lien direct avec le dol par réticence commis par les vendeurs.

M. [U] [N] et Mme [H] [G] sont donc condamnés à payer à M.[X] [D] et Mme [M] [Z] la somme de 78 989,10 €, à titre de dommages et intérêts.

Le notaire doit s’assurer de l’efficacité de l’acte qu’il rédige.

Il lui appartient, notamment, d’éclairer les parties sur la validité, la portée des engagements qu’elles contractent et de veiller à ce que ses actes ne soient entachés d’aucun vice susceptible d’entraîner la nullité ou de causer un préjudice à l’une d’elles.

Le notaire est tenu d’informer et d’éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques, de l’acte auquel il prête son concours.

En l’espèce, alors qu’elle avait établi l’acte d’acquisition par les époux [N] de la villa, comprenant un étage aménagé, ainsi qu’un rez-de-chaussée à usage de garage et de cave et qu’elle s’apprêtait à établir un an plus tard l’acte de vente du rez-de-chaussée réaménagé, il incombait à la notaire qui avait interrogé le service de l’urbanisme de la commune au mois de mars 2016, d’attendre sa réponse, transmise le 9 mai 2016, afin que puissent figurer le permis de construire obtenu par ces derniers, ainsi que les travaux réalisés, modifiant la destination du premier niveau de la maison.

Au regard de cette situation elle devait en effet vérifier les déclarations des vendeurs, sur l’absence de transformation du bien.

En acceptant de régulariser l’acte avant la réception de la réponse des services de la mairie, elle a commis une faute professionnelle, dont elle ne peut nier avoir eu conscience, alors que les informations d’urbanisme ont été reportées dans l’acte de vente de l’appartement du premier étage établi par ses soins quelques semaines plus tard et qu’elle a dressé ultérieurement un acte rectificatif de l’état descriptif et de division sur ce point.

Cette faute, distincte du dol commis par les vendeurs engage sa responsabilité civile délictuelle à l’égard des acquéreurs.

Il apparaît que si les époux [D] avaient été informés de la nature et de l’ampleur des travaux réalisés sans assurance dommage ouvrage, ils n’auraient pas contracté, ce, indépendamment des désordres qui se sont manifestés ultérieurement.

Les manquements du notaire sont donc en lien direct avec le préjudice allégué par les acquéreurs.

En raison du concours de fautes, ayant entraîné un même préjudice, M. [X] [D] et Mme [M] [Z] sont fondés à réclamer la condamnation in solidum de Me [J] [E] et de La SCP Poulpiquet et associés, avec M. [U] [N] et Mme [H] [G] à lui payer la somme de 78 989,10 €, à titre de dommages et intérêts.

En revanche, il y a lieu d’écarter le recours en garantie exercé contre le notaire, en dépit de la faute professionnelle commise par celui-ci, par les vendeurs coresponsables qui se sont rendus coupables d’un dol et ne peuvent sauf à se prévaloir de leur mauvaise foi délibérée, faire grief au notaire de ne pas avoir pallié les effets de leur propre rétention d’information.

La demande tendant à être relevés et garantis par le notaire des condamnations prononcées à leur encontre formée par M. [U] [N] et Mme [H] [G] est , en conséquence, rejetée.

Les époux [N] reprochent à l’agent immobilier de ne pas avoir vérifié, dans le cadre de ses obligations de mandataire le caractère habitable du logemen vendu.

Cependant le vendeur qui a commis une réticence dolosive n’est pas fondé à demander la garantie du professionnel auquel il ne justifie pas avoir communiqué toutes les informations utiles. Tel est le cas de l’agent immobilier en ce qui concerne la modification des lieux.

Il apparaît en outre que l’acte de vente litigieux précise en sa page 24 dans la rubrique ‘négociation’ que les parties déclarent que les présentes conventions ont été négociées directement entre elles sans concours, ni participation d’un intermédiaire et qu’aucune des parties ne justifie avoir réglé une commission à la SAS Capi.

La demande d’appel en garantie formé à son encontre par les époux [N] est, en conséquence, rejetée.

Il en est de même pour leur demande en de dommages et intérêts, pour préjudice moral, formée à l’encontre du notaire et de l’agent immobilier.

Le jugement est infirmé.

Il y a lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les parties perdantes sont condamnées aux dépens de première instance et d’appel, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile étant précisé qu’ils ne peuvent inclure les frais de constat d’huissier non directement liés à la procédure judiciaire.

 


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