Chauffeur Poids-Lourd : décision du 17 février 2021 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/02945

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 17 février 2021 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/02945
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AFFAIRE PRUD’HOMALE

DOUBLE RAPPORTEUR

N° RG 18/02945 – N° Portalis DBVX-V-B7C-LVAJ

Société SECANIM SUD-EST

C/

[C]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 19 Mars 2018

RG : 16/03730

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRET DU 17 Février 2021

APPELANTE :

SAS SECANIM SUD-EST (anciennement dénommée SAS SARVAL SUD EST)

Siret : 403 264 641 00032

[Adresse 5]

[Localité 1]

représentée par Me Florian DA SILVA de la SELAS INTER BARREAUX BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIME :

[V] [C]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, ayant pour avocat plaidant Me Murielle MAHUSSIER de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON,

DEBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 01 Décembre 2020

Présidée par Natacha LAVILLE, Conseiller et Nathalie ROCCI, Conseiller, magistrats rapporteurs (sans opposition des parties dûment avisées) qui en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistés pendant les débats de Sophie PENEAUD, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Nathalie PALLE, présidente

– Natacha LAVILLE, conseiller

– Nathalie ROCCI, conseiller

ARRET : CONTRADICTOIRE

rendu publiquement le 17 Février 2021 par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Nathalie PALLE, présidente, et par Christophe GARNAUD, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Sarval Sud-Est, aujourd’hui dénommée la société Secanim Sud-Est, faisait partie du groupe international Saria spécialisé dans les produits destinés à l’alimentation humaine et animale, à l’agriculture, à l’aquaculture et l’industrie. Cette société assurait l’activité équarrissage au sein du groupe consistant en la destruction des matières présentant un risque pour la sécurité sanitaire et environnementale.

Elle disposait de 2 sites de production et de plusieurs centres de collecte.

Le 1er juillet 2015, la société Sarval Sud-Est a acquis un nouveau site situé à [Localité 6] comprenant deux centres de collecte ([Localité 6] et [Localité 6] 44).

Ce site de [Localité 6] était initialement exploité par la société Soleval.

A ce titre, la société Soleval avait, suivant contrat à durée indéterminée soumis à la convention collective nationale des industries et commerces de la récupération non versé aux débats, engagé M. [C] (le salarié) en qualité de chauffeur poids-lourd à compter du 08 octobre 2002.

Le salarié a été désigné délégué syndical par le syndicat CGT le 20 janvier 2014.

Le contrat de travail a donc été transféré à la société Sarval sud-est à compter du 1er juillet 2015.

En dernier lieu, le salarié a perçu un salaire d’un montant de 2 353.58 euros.

A compter du 4 avril 2016, invoquant les difficultés économiques du centre de collecte de [Localité 6] qui enregistrait sur les six premiers mois d’exploitation suivant sa reprise un résultat d’exploitation négatif, la société Sarval Sud-est a informé et consulté les instances représentatives du personnel sur un projet de réorganisation de la collecte au sein de ce centre, impliquant d’une part la suppression de neuf postes ( huit postes d’agents de collecte et un poste de laveur), et d’autre part la création de cinq postes d’ouvriers pour le développement d’une nouvelle activité de déconditionnement de bio-déchets permise par les économies induites par le rapprochement des deux sites sur la même zone d’activité.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 1er juin 2016, la société Sarval sud-est a convoqué le salarié le 13 juin 2016 en vue d’un entretien préalable à son licenciement pour motif économique.

Par décision du 12 août 2016, l’inspecteur du travail a autorisé le licenciement du salarié.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 26 août 2016, la société Sarval sud-est a notifié au salarié son licenciement pour motif économique dans les termes suivants :

‘Monsieur,

Dans le cadre d’une mesure de licenciement collectif, nous sommes au regret de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour motif économique.

La date de première présentation de cette lettre fixera donc le point de départ du préavis de deux mois au terme duquel votre contrat de travail sera définitivement rompu. Nous vous précisons cependant que nous vous dispensons de l’exécution de ce préavis et que vous percevrez donc au mois le mois, l’indemnité compensatrice correspondante.

Les motifs de licenciement sont constitués par le fait que, le site de [Localité 6], sur les 6 premiers mois d’exploitation au sein de Sarval Sud Est, a enregistré un résultat d’exploitation négatif à hauteur de 1 007 178 euros. Les charges liées à la logistique et aux frais de personnel sont très lourdes. Le chiffre d’affaires net du centre ne couvre pas la masse salariale seule malgré une augmentation significative et maximale du niveau de prestations facturées. Pour faire face à ces difficultés économiques rencontrées, et pour permettre la sauvegarde de la compétitivité de l’établissement et du secteur d’activité, ainsi que sa pérennité, il est impératif de procéder d’une part à une restructuration de l’activité du site de [Localité 6] et d’autre part de réorganiser les tournées de collecte afin de procéder à une réduction des coûts, particulièrement en matière logistique.

Ainsi, pour des raisons évidentes de rationalisation et de simplification de l’organisation, ainsi que pour diminuer les charges de fonctionnement qui découlent de l’organisation actuelle, il est prévu de n’utiliser qu’un seul centre de collecte sur la zone d’activité de [Localité 6], celui de l’ancien centre Akiolis. A court terme, ces opérations génèreront des économies d’échelles de par la répartition des charges de fonctionnement sur 3 entreprises au lieu d’une seule aujourd’hui : SARVAL Sud-Est (collecte C3 multi espèces), BIONERVAL (matières organiques) et OLEO Recycling (HAU).

Séparément, l’adaptation de la zone de collecte de [Localité 6] à une taille optimale et l’ajustement du nombre de tournées par jour permettront de collecter à moindre coût, de réduire les charges de logistique et de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et du secteur d’activité. Cette réorganisation aura également pour effet de réduire le nombre de kilomètres réalisés de 19 686 à 15 200, soit une baisse de 23% sur la globalité du périmètre des centres concernés.

La mise en place de cette réorganisation a pour conséquence la suppression de 8 postes d’agents de collecte et d’un poste de laveur.

Par courrier en date du 9 mai 2016, nous avons souhaité dans ce cadre, et conformément à l’article L 1233-4-1 du code du travail. savoir si vous acceptiez, le cas échéant, de recevoir des offres dereclassement à l’étranger, dans chacune des implantations du Groupe. Vous disposiez d’un délai de 7 ,jours ouvrables pour nous faire part de votre intérêt pour un ou plusieurs pays. L’absence de réponse devait être considérée comme un refus de votre part. Vous n’avez pas répondu à ce courrier.

Par courrier adressé le 9 mai 2016, nous vous avons proposé 30 postes de travail à titre de reclassement. Vous disposiez d’un délai de 15 jours pour nous faire part de votre intérêt pour Fun des postes. Vous n’avez pas donné de suite favorable à nos propositions.

Nous vous avons donc convié à un entretien préalable à licenciement fixé au 13 juin 2016. Durant cet entretien, Monsieur [Y] vous a indiqué les raisons pour lesquelles une mesure de licenciement était envisagée à votre égard. Il vous a également présenté les conditions et modalités du congé de reclassement.

Par courrier en date du 13 juin 2016, nous vous avons invité à une réunion de C.E.extraordinaire qui s’est déroulée le 21 juin 2016, concernant le projet de votre licenciement économique en tant que salarié protégé.

Puis par courrier daté du 29 juin 2016, nous avons sollicité l’Inspection du Travail afin d’obtenir l’autorisation de procéder à votre licenciement pour motif économique. Le 16 août 2016, nous avons reçu la réponse de l’Inspection du Travail, nous autorisant à procéder à votre licenciement économique.

Conformément aux dispositions de l’article L.1233-71 du Code du travail, nous vous proposons le bénéfice d’un congé de reclassement dont les conditions de mise en oeuvre vous ont été communiquées par écrit au cours de l’entretien du 13 juin 2016. Nous vous rappelons que vous disposez d’un délai de 8 jours à compter de la date de première présentation de la présente pour nous faire part de votre décision. Pour ce faire, vous avez la possibilité d’utiliser le coupon réponse joint en annexe.

L’absence de réponse expresse de votre part dans ce délai sera assimilée à un refus de cette proposition.

Nous vous informons que, conformément à l’article L.1233-45 du Code du travail, vous pourrez bénéficier d’une priorité de réembauchage durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de votre contrat de travail. Pour ce faire, vous devrez nous faire part de votre désir d’user de cette priorité au cours de cette année. Cette priorité concerne les emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendrez à acquérir, sous réserve que vous nous ayez informés de celles-ci.

Au terme de votre contrat, nous vous remettrons votre solde de tout compte, ainsi que votre certificat de travail et votre attestation Pôle emploi.

(…)’.

Le 09 décembre 2016, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon pour voir juger que le licenciement est nul à titre principal, qu’il est sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire, à tout le moins pour voir constater le non-respect des critères d’ordre, et pour obtenir le paiement de dommages et intérêts.

Par jugement du 19 mars 2018, le conseil de prud’hommes :

– a dit que les demandes au titre de la nullité du licenciement et des critères d’ordre ne sont pas fondées,

– a déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement,

– a condamné la société Sarval Sud-Est à payer au salarié les sommes suivantes:

* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,

– a condamné la société Sarval Sud-Est à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois d’indemnisation,

– a débouté le salarié du surplus de ses demandes,

– a débouté la société Sarval Sud-Est de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– a condamné la société Sarval Sud-Est aux dépens.

La société Sarval Sud-Est a formé appel du jugement le 16 avril 2018.

Par ses conclusions notifiées le 13 juillet 2018, auxquelles il est renvoyé pour plus amples exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il a fait droit à une partie des demandes, de débouter le salarié de l’intégralité de ses demandes et de le condamner au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions notifiées le 6 juin 2020, auxquelles il est renvoyé pour plus amples exposé de ses moyens et prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile, le salarié demande à la cour d’infirmer partiellement le jugement entrepris et:

– de juger que le licenciement est nul à titre principal et qu’il est sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,

– de constater que les critères d’ordre n’ont pas été respectés,

– de condamner la société Sarval Sud-Est au paiement des dépens et des sommes suivantes:

* 38 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre du licenciement et du non-respect des critères d’ordre,

* 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 octobre 2020.

MOTIFS

1 – Sur la nullité du licenciement

L’article L.1233-61 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2012-387 du 22 mars 2012 applicable à la date de la notification du licenciement, dispose :

‘Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l’employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile.’

En l’espèce, le salarié fait valoir à l’appui de sa demande en licenciement nul que la société Sarval Sud-Est s’est abstenue de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l’emploi à l’occasion du licenciement économique collectif alors que son effectif était supérieur à 50 salariés puisqu’il convenait de retenir les personnels du siège social, des sites de production et des centres de collecte qui totalisent 309 salariés; que parallèlement au licenciement collectif dans lequel le salarié était inclus, d’autres ruptures de contrat de travail sont intervenues; que deux salariés ont quitté le site de [Localité 6] en juin et août 2016.

La société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est, qui ne discute pas l’effectif supérieur à 50 salariés, conteste la demande en soutenant que les ruptures de contrat de travail dont fait état le salarié sont sans lien avec un motif économique.

La cour relève après analyse des écritures des parties et des pièces du dossier que le salarié a fait l’objet d’un licenciement pour motif économique collectif qui lui a été notifié par courrier du 06 juillet 2016 et qui a, en définitive, visé huit salariés au total après que neuf licenciements ont été envisagés.

Il apparaît en outre que les ruptures de contrat de travail dont se prévaut le salarié pour parvenir à un total de dix licenciements pour motif économique sont intervenues entre avril et août 2016 et qu’elles concernent respectivement une démission, une fin de contrat d’apprentissage, deux licenciements pour cause réelle et sérieuse, deux départs en retraite, une rupture conventionnelle et un licenciement pour inaptitude.

Force est de constater que le salarié ne produit aux débats aucun élément laissant présumer que ces ruptures reposaient sur le motif économique qui a justifié le licenciement en litige.

S’agissant ensuite des quatre licenciements pour motif économique qu’invoque le salarié à la toute fin de son moyen, la cour relève qu’ils sont intervenus au mois de mai 2015, soit plus d’une année avant le licenciement économique collectif en cause et que le salarié ne justifie pas plus d’élément permettant de rattacher la cause de ces quatre licenciements à celle du licenciement ici discuté.

Dans ces conditions, il y a lieu de dire qu’il n’est pas établi que le licenciement collectif incluant le salarié a concerné au moins dix salariés de sorte que la société Sarval Sud-Est n’était pas tenue d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi lorsqu’elle a élaboré son projet de licenciement collectif.

Le salarié est donc mal fondé à invoquer une fraude de la société Sarval Sud-Est par l’absence de plan de sauvegarde de l’emploi. Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande en nullité du licenciement.

2 – Sur le bien-fondé du licenciement

La réorganisation de l’entreprise à l’origine de la suppression ou transformation d’emploi, ou de la modification refusée par le salarié du contrat de travail, constitue un motif économique de licenciement lorsqu’elle vise à sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient.

Si la lettre de licenciement doit énoncer la cause économique du licenciement telle que prévue par l’article L.1233-3 du code du travail et l’incidence matérielle de cette cause économique sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié, l’appréciation de l’existence du motif invoqué relève de la discussion devant le juge en cas de litige.

Il en résulte que la lettre de licenciement qui mentionne que le licenciement a pour motifs économiques la suppression de l’emploi du salarié consécutive à la réorganisation de l’entreprise justifiée par des difficultés économiques et/ou la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales, n’a pas à préciser le niveau d’appréciation de la cause économique quand l’entreprise appartient à un groupe.

C’est seulement en cas de litige qu’il appartient à l’employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Le juge, qui ne peut pas se substituer à l’employeur quant aux choix qu’il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation, doit rechercher si la réorganisation est décidée pour sauvegarder la compétitivité. Il lui appartient ainsi de dégager les éléments de nature à caractériser la menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise ou du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient.

Le licenciement pour motif économique est dépourvu de toute cause réelle et sérieuse si la réorganisation de l’entreprise à l’origine de la suppression d’emploi n’est pas justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise et du secteur d’activité du groupe auquel elle appartient.

En l’espèce, le salarié demande à la cour à titre subsidiaire de juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse pour défaut de motif économique et pour manquement de l’employeur à son obligation de reclassement.

Le salarié fait valoir au soutien de son moyen tiré de l’absence de motif économique que le courrier de licenciement est insuffisamment motivé en ce que la conséquence du motif économique alléguée sur l’emploi et le contrat de travail n’est pas abordée ; que le motif économique du licenciement doit être apprécié au niveau du seul secteur d’activité de l’équarrissage du groupe Saria auquel appartient la société, et non pas uniquement au seul niveau de l’activité de traitement des déchets de catégorie C3 qui est assurée sur le site de [Localité 6]; que la société Sarval Sud-Est ne démontre pas les difficultés économiques ou les menaces pesant sur le secteur d’activité de l’équarrissage.

La société Secanim Sud-Est anciennement dénommée Sarval Sud-Est a notifié au conseil du salarié des conclusions le 13 juillet 2018 qui ne comportent aucun développement sur le moyen tiré de l’absence de motif économique, aucun autre jeu de conclusions n’ayant ensuite été notifié au salarié.

Il ressort de la lettre de licenciement dont les termes ont été rappelés ci-dessus que la société Sarval Sud-Est a invoqué les difficultés économiques du site de [Localité 6] et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’établissement et du secteur d’activité en restructurant l’activité du site de [Localité 6] et en n’utilisant qu’un seul centre de collecte d’une part et en ajustant les tournées de collecte d’autre part.

S’agissant du secteur d’activité à retenir pour l’appréciation du motif économique, il résulte des écritures des parties et des pièces du dossier que :

– s’agissant de la valorisation des déchets, il existe trois catégories, soit la catégorie C1 qui concerne les déchets entraînant des risques pour la santé et qui sont donc détruits, la catégorie C2 qui concerne les déchets susceptibles d’être valorisés dans d’autres produits que l’alimentation, comme les engrais par exemple, et la catégorie C3 qui concerne les déchets valorisés en alimentation animale ;

– le groupe international Saria a ainsi créé en vertu de ces règlements quatre pôles d’expertise dont le pôle équarrissage qui concerne la valorisation des sous-produits d’origine animale et qui se trouve répartie entre les catégories C1, C2 et C3 ;

– la société Sarval Sud-Est intervient au sein du groupe Saria dans le domaine de l’équarrissage de sorte que son activité repose sur les catégories C1, C2 et C3 ;

– elle exploite la catégorie C3 sur le site de [Localité 6] depuis le 1er juillet 2015.

Or, aucun élément du dossier ne permet de dire que l’activité relevant de la catégorie C3 est spécifique et qu’elle se trouverait sans lien avec l’activité d’équarrissage exercée au sein de la société Sarval Sud-Est.

Il convient de relever que la note d’information au comité central d’entreprise et aux comités d’établissements de la société Sarval Sud-Est relative au projet de réorganisation de la société Sarval Sud-Est en date du 30 mai 2016 n’indique à aucun moment que le site de [Localité 6] n’intervient pas dans le domaine de l’équarrissage ; que d’ailleurs, le fait que le projet vise à scinder la société Sarval Sud-Est en deux sociétés respectivement spécialisée dans l’activité C1-C2 et dans l’activité C3 indique bien qu’aucune répartition de spécialités n’était en cours au sein des établissements de la société Sarval Sud-Est au moment des licenciements collectifs qui avaient donc pour seule et unique activité l’équarrissage.

Ensuite, il convient de relever que l’employeur produit aux débats un rapport établi par l’expert-comptable du comité de groupe sur la situation du groupe au 31 décembre 2016 qui fait état de résultats de l’exercice 2015 marqués par un net redressement des performances économiques après une mauvaise année 2014, permettant donc un retour à une situation bénéficiaire, étant précisé que le résultat d’exploitation de la société Sarval Sud-Est est passé de 0,7 millions d’euros en 2015 à 7,7 millions d’euros en 2016.

Enfin, l’attestation de l’expert-comptable invoquée par la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est est inopérante dès lors qu’elle ne vise que la seule filière C3.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le secteur d’activité pertinent n’est pas la seule filière C3 comme le soutient l’employeur mais l’activité équarrissage recouvrant les catégories C1, C2 et C3.

Or, la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est ne verse aux débats aucune pièce de nature à établir la réalité d’une menace pesant sur la compétitivité de ce secteur d’activité qui doit s’apprécier au sein du secteur équarrissage de groupe Saria.

La réorganisation de l’entreprise à l’origine de la suppression d’emploi n’est en conséquence pas justifiée.

Dès lors, la cour, sans avoir à examiner le moyen tiré du non respect de l’obligation de reclassement, confirme le jugement déféré en ce qu’il a dit que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.

3 – Sur les dommages-intérêts

Le salarié a droit en vertu des dispositions de l’article L.1235-3 du code du travail dans leur rédaction applicable à la cause à une indemnité mise à la charge de la société Secanim Sud-Est qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

L’effectif de l’entreprise, les circonstances de la rupture, le montant de la rémunération versée au salarié (un salaire mensuel brut de 2 353.58 euros), son âge au jour de son licenciement, son ancienneté à cette même date, sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, les conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies, ainsi que les pièces produites à hauteur d’appel par le salarié s’agissant de contrats d’interim, ne sont pas de nature à modifier la juste appréciation par les premiers juges du préjudice résultant pour le salarié de la rupture du contrat de travail, ceux-ci lui ayant alloué la somme de 20 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré est donc confirmé de ce chef, sauf à dire que la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-est se substitue à la société Sarval Sud-Est.

4 – Sur le remboursement des indemnités de chômage

En application de l’article L.1235-4 du code du travail dans sa rédaction applicable, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d’indemnisation de sorte que le jugement déféré est confirmé de ce chef, sauf à dire que la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est se substitue à la société Sarval Sud-Est.

5 – Sur les critères d’ordre de licenciement

L’article L.1233-5 du code du travail dispose dans sa rédaction applicable :

‘Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.’

Ces critères prennent notamment en compte :

1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;

3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;

4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

L’employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l’ensemble des autres critères prévus au présent article.

Pour les entreprises soumises à l’obligation d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63, le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements peut être fixé par l’accord collectif mentionné à l’article L. 1233-24-1 ou par le document unilatéral mentionné à l’article L. 1233-24-4.’

L’inobservation des règles relatives à l’ordre des licenciements n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse mais constitue une illégalité qui entraîne un préjudice réparable selon son étendue.

Lorsque le licenciement d’un salarié prononcé pour un motif économique est dépourvu de cause économique, il ne peut être alloué au salarié, en plus de l’indemnité fixée à ce titre pour réparer l’intégralité du préjudice subi par suite de la perte injustifiée de son emploi, des dommages-intérêts pour inobservation de l’ordre des licenciements.

En l’espèce, le salarié demande à la cour de constater le non-respect des critères d’ordre et de lui allouer des dommages et intérêts en réparation. Il fait valoir :

– à titre principal qu’en vertu de l’article L.1233-24-1 du code du travail, l’accord collectif négocié le 25 avril 2016 par la société Sarval Sud-Est et deux organisations syndicales, qui définit le périmètre des critères d’ordre au niveau du centre de collecte de [Localité 6], n’est pas valable et ne lui est donc pas opposable en ce que le périmètre retenu n’a pas été défini dans l’accord organisant le plan de sauvegarde de l’emploi ;

– à titre subsidiaire que cinq critères d’ordre avec attribution de points ont été retenus : ancienneté dans l’entreprise, situation de famille, qualités professionnelles, âge et handicap ; que le critère des qualités professionnelles est subdivisé en deux parties dont celle de l’expérience dans l’emploi dans l’entreprise ; qu’en cas de départage il est prévu la mise en oeuvre du critère d’accidentologie pour la catégorie professionnelle ouvrier chauffeur agent de collecte (enregistrements d’accidents routiers et/ou manipulation lors du travail du 1er juillet 2015 au 25 avril 2016 au prorata du nombre d’heures effectuées); qu’ainsi, l’employeur a d’une part doublé le critère de l’ancienneté et d’autre part n’a pas retenu l’accidentologie comme un des critères objectifs.

La société Sarval Sud-Est fait valoir que les dispositions de l’article L.1233-24-1 du code du travail ne sont pas applicables au licenciement en cause ; que les critères d’ordre ont été appliqués objectivement au salarié qui faisait partie des salariés les moins bien notés.

La cour a jugé précédemment que le licenciement du salarié prononcé pour un motif économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse et lui a alloué une indemnité pour réparer l’intégralité du préjudice subi par la perte injustifiée de son emploi.

En conséquence, le salarié n’est pas fondé à solliciter en plus des dommages-intérêts au titre de l’inobservation de l’ordre des licenciements.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande d’indemnisation au titre des critères d’ordre.

6 – Sur les demandes accessoires

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens, sauf à dire que la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est se substitue à la société Sarval Sud-Est.

La société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est est condamnée aux dépens d’appel.

L’équité et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf à dire que la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est se substitue à la société Sarval Sud-Est,

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est à payer à M. [C] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel,

CONDAMNE la société Secanim Sud-Est anciennement dénommée la société Sarval Sud-Est aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

 


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