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COUR D’APPEL
d’ANGERS
Chambre Sociale
ARRÊT N°
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00349 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EWTY.
Jugement Au fond, origine Pole social du TJ de LAVAL, décision attaquée en date du 02 Septembre 2020, enregistrée sous le n° 20/00133
ARRÊT DU 25 Août 2022
APPELANTE :
S.N.C. [5]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Annaïc LAVOLE, avocat au barreau de RENNES
INTIMEE :
LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LOIRE-ATLANTIQUE
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Monsieur [X], muni d’un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Mai 2022 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame GENET, conseiller chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Estelle GENET
Conseiller : Madame Marie-Christine DELAUBIER
Conseiller : Mme Nathalie BUJACOUX
Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN
Greffier lors du prononcé : Madame Jacqueline COURADO
ARRÊT :
prononcé le 25 Août 2022, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Estelle GENET, conseiller faisant fonction de président, et par Madame COURADO, adjoint administratif faisant fonction de greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCEDURE
Le 4 février 2019, M. [K] [J], salarié de la société d’intérim [5] en qualité de chauffeur poids-lourd, a fait parvenir à la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique une déclaration de maladie professionnelle au titre d’une épicondylite latérale droite, sur la base d’un certificat médical initial du 15 février 2019.
Après instruction, la caisse, par courrier du 23 avril 2019 a notifié au salarié et à l’employeur la prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle.
Le 2 avril 2019, la société [5] a saisi la commission de recours amiable de la caisse d’une contestation de cette décision, puis le pôle social du tribunal de grande instance de Laval, par requête du 27 août 2019 sur décision implicite de rejet de son recours.
Par jugement en date du 2 septembre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Laval désormais compétent a :
– débouté la société [5] de son recours ;
– déclaré opposable à la société [5] l’ensemble des prestations, soins et arrêts prescrits à M. [K] [J] au titre de la maladie professionnelle déclarée le 5 novembre 2018 ;
– condamné la société [5] aux dépens.
La société [5] a interjeté appel de cette décision par lettre recommandée postée le 23 septembre 2020, la décision lui ayant été notifiée le 10 septembre précédent.
Ce dossier a été appelé à l’audience du conseiller rapporteur du 9 mai 2022.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions n°2 reçues au greffe le 5 mai 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, régulièrement soutenues à l’audience, la SNC [5] demande à la cour de :
– réformer le jugement ;
– lui déclarer inopposable la décision de la caisse du 5 novembre 2018 portant prise en charge au titre du risque professionnel de la maladie déclarée par M. [J] ;
– débouter la caisse de toutes ses demandes ;
– statuer ce que de droit faisant dépens.
Au soutien de ses intérêts, la société [5] fait valoir qu’elle n’a pas eu accès à l’ensemble des pièces du dossier et notamment au certificat médical initial. Elle prétend que le dossier qui lui a été offert à la consultation contenait uniquement un certificat médical de prolongation daté du 15 février 2019, sans mention de la date de première constatation de la maladie. Elle considère qu’il est impossible de se convaincre du bien-fondé de la date de première constatation de la pathologie au 5 novembre 2018, au vu de la fiche colloque du médecin-conseil, étant précisé que les arrêts de travail sont des arrêts pour maladie simple. Elle soutient que la preuve de la première constatation de la maladie dans le délai de prise en charge n’est pas rapportée. Enfin, elle prétend que les conditions
du tableau ne sont pas réunies, notamment s’agissant du délai de prise en charge après cessation de l’exposition au risque, alors que le dernier jour de travail de M. [J] est le 4 novembre 2018.
Par conclusions reçues au greffe le 5 avril 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé, régulièrement soutenues à l’audience, la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique conclut :
– à la confirmation du jugement ;
– qu’il lui soit décerné acte de ce qu’elle a fait une exacte application des textes en vigueur;
– à la confirmation de la décision de prise en charge et à son opposabilité à l’employeur;
– à la condamnation de la partie adverse aux entiers dépens.
À l’appui de ses intérêts, la caisse fait valoir que la date de première constatation médicale a été fixée par le médecin-conseil le 5 novembre 2018 sur la base d’un arrêt de travail, comme mentionné dans le colloque médico administratif. Elle ajoute, s’agissant du respect du principe du contradictoire, que la société a été associée à l’instruction et a pu prendre connaissance du certificat médical à l’appui de la déclaration de maladie professionnelle. Elle explique que M. [J] a été indemnisé au titre de la maladie simple à compter du 5 novembre 2018 jusqu’au 15 février 2019 et que le certificat médical de prolongation du 15 février 2019 est le premier certificat prescrit au titre de la législation professionnelle. Il est d’ailleurs établi le même jour que la déclaration de maladie professionnelle.
La caisse soutient qu’il ressort de l’instruction que le salarié a bien effectué les mouvements pathogènes prévus au tableau 57 des maladies professionnelles. Elle souligne que l’employeur n’apporte pas d’éléments susceptibles de détruire la présomption d’imputabilité dont bénéficie M. [J] et qui s’applique pendant toute la durée d’incapacité de travail précédant la consolidation du 24 septembre 2019.
MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes des dispositions de l’article R. 441-13 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 16 juin 2016 au 1er décembre 2019, ‘ Le dossier constitué par la caisse primaire doit comprendre […] les divers certificats médicaux détenus par la caisse’.
En l’espèce, la société [5] sans être contredite soutient qu’elle n’a pu consulter, au titre des certificats médicaux, que le seul certificat médical de prolongation du 15 février 2019 qui ne comporte aucune indication sur la date de première constatation médicale.
Or, pour justifier la mise à disposition de l’employeur de ce seul certificat médical de prolongation, la caisse prétend que l’article R. 441-13 du code de la sécurité social n’exige pas la communication d’un certificat médical portant la mention ‘initial’.
Le médecin-conseil a retenu comme date de première constatation médicale dans le colloque médico-administratif, le 5 novembre 2018, indiquant que cette date correspondait à un arrêt de travail.
En réalité et selon les pièces versées aux débats par la caisse, l’assuré a bénéficié de trois premiers arrêts de travail pour maladie du 5 novembre 2018 au 15 février 2019, sans indication de la nature de la pathologie. Ce n’est que par certificat médical de prolongation du 15 février 2019 qu’un lien est fait par le médecin traitant entre l’épicondylite et le travail.
Or, la caisse aurait dû mettre à la consultation par l’employeur l’intégralité des certificats médicaux qu’elle détenait, quelque soit leur nature, et sur lesquels elle s’est bien évidemment fondée pour prendre une décision de prise en charge de la pathologie au titre de la législation sur les risques professionnels. Elle aurait donc dû logiquement permettre à l’employeur de consulter les certificats médicaux qu’elle détenait pour maladie et ce d’autant que le médecin-conseil s’est fondé sur ces certificats médicaux établis avant le 15 février 2019 pour déterminer la date de première constatation médicale.
La société [5] en ayant accès au seul certificat médical de prolongation du 15 février 2019 n’a eu qu’une vision tronquée du dossier constitué par la caisse et a été placée dans l’incapacité de reconstituer de manière cohérente le parcours médical de l’assuré et le lien éventuel avec le travail depuis le premier arrêt du 5 novembre 2018.
En ne mettant pas à la disposition de l’employeur tous les certificats médicaux qu’elle détenait, la caisse a violé le principe du contradictoire. Dans ces conditions, elle n’est pas non plus fondée à opposer à l’employeur une date de première constatation médicale tirée de ces certificats médicaux pour maladie dont l’employeur n’a pas eu connaissance, ni même une présomption d’imputabilité des arrêts et soins au travail depuis le 5 novembre 2018, date de la première constatation médicale retenue par le médecin-conseil.
Sans qu’il soit besoin d’examiner le respect des conditions du tableau 57 des maladies personnelles, il convient d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions.
La décision de la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie déclarée par M. [K] [J] le 15 février 2019 est inopposable à la SNC [5].
La caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique est condamnée au paiement des dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La COUR,
Statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Laval du 2 septembre 2020 en toutes ses dispositions ;
STATUANT A NOUVEAU DES CHEFS INFIRMES ET Y AJOUTANT ;
DECLARE inopposable à la SNC [5] la décision de la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie déclarée par M. [K] [J] le 15 février 2019 ;
CONDAMNE la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique au paiement des dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,
J. COURADOEstelle GENET