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C1
N° RG 20/04218
N° Portalis DBVM-V-B7E-KVQ6
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Benjamin GERAY
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section A
ARRÊT DU MARDI 13 DECEMBRE 2022
Appel d’une décision (N° RG 20/00004)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de VIENNE
en date du 30 novembre 2020
suivant déclaration d’appel du 24 décembre 2020
APPELANT :
Monsieur [I] [C]
né le 19 Avril 1976 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Benjamin GERAY, avocat au barreau de GRENOBLE, substitué par Me Laëtitia FERNANDES, avocat au barreau de GRENOBLE,
INTIMEE :
Société CITAIX CHASSE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,
[Adresse 5]
[Localité 1]
représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,
et par Me Hélène AULIARD, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON,
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Pierre DELAVENAY, Président,
Madame Gaëlle BARDOSSE, Conseillère,
Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 octobre 2022,
Mme Gaëlle BARDOSSE, Conseillère chargée du rapport, assistée de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 13 décembre 2022, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 13 décembre 2022.
Exposé du litige :
La SAS CITAIX CHASSE a pour activité le transport routier de marchandises et plus principalement le transport routier de matières dangereuses, dont notamment les carburants et les bouteilles de gaz.
M. [C] a été engagé par la SAS CITAIX CHASSE le 11 janvier 2001 en qualité de conducteur livraison de carburant.
Il a été convoqué à un entretien préalable le 29 novembre 2016 et licencié pour faute, par courrier du 23 décembre 2016.
Il a saisi le conseil des prud’hommes de Vienne le 22 septembre 2017 aux fins de contester le bien-fondé de son licenciement, dire que son contrat de travail n’a pas été exécuté loyalement et obtenir les indemnités afférentes.
Par jugement du 30 novembre 2020, le conseil des prud’hommes de Vienne a :
– Jugé que la SAS CITAIX CHASSE n’a pas exécuté de façon déloyale le contrat de travail,
– Jugé que le licenciement de M. [C] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,
– Rejeté l’ensemble des demandes de M. [C] comprenant celle au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Rejeté la demande de la SAS CITAIX CHASSE au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– Condamné M. [C] aux entiers dépens de l’instance.
La décision a été notifiée aux parties et M. [C] en a interjeté appel.
Par conclusions du 09 septembre 2022, M. [C] demande à la cour d’appel de :
– Infirmer le jugement du Conseil des prud’hommes en ce qu’il a :
Jugé que la SAS CITAIX CHASSE n’a pas exécuté de façon déloyale le contrat de travail,
Jugé que le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,
Débouté M. [C] de l’ensemble de ses demandes, comprenant celle au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Débouté la SAS CITAIX CHASSE de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamné M. [C] aux entiers dépens de l’instance,
Statuant à nouveau,
Juger que la société CITAIX CHASSE n’a pas exécuté loyalement le contrat de travail en ne respectant pas son obligation de sécurité à l’égard de son salarié,
En conséquence,
Condamner la société CITAIX CHASSE à lui payer la somme de 16 200 euros net de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
Juger que le licenciement prononcé le 23 décembre 2016 ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
Condamner la société CITAIX CHASSE à lui payer la somme de 64 800 euros net de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
En tout état de cause :
Condamner la société CITAIX CHASSE à lui payer à M. la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Débouter la société CITAIX CHASSE de l’ensemble de ses demandes,
Condamner la société CITAIX CHASSE aux entiers.
Par conclusions du 09 septembre 2022, la SAS CITAIX CHASSE demande à la cour d’appel de :
Confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de VIENNE du 30 novembre 2020,
Condamner M. [C] à verser à la société CITAIX CHASSE la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamner M. [C] aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 13 septembre 2022.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.
SUR QUOI :
Sur l’exécution déloyale du contrat de travail :
Moyens des parties :
M. [C] dénonce une exécution déloyale du contrat de travail par l’employeur, lequel n’aurait pas respecté son obligation de sécurité en ne tenant pas compte des restrictions et préconisations de la médecine du travail et en lui imposant des conditions de travail anormales eu égard à la reconnaissance du statut de travailleur handicapé ayant pour incidence la dégradation importante de son état de santé et fait état des manquements suivants :
Le non-respect des préconisations médicales par l’employeur :
A compter de décembre 2014 en lui imposant des postes incompatibles avec les recommandations émises par le médecin du travail le 09 décembre 2014,
A compter de 2015, en lui imposant des horaires irréguliers avec une amplitude horaire très importante malgré les préconisations médicales du 16 mars qui prévoyaient un « poste du matin uniquement avec des horaires les plus réguliers possibles Eviter les découchés ‘ pas de manipulation lourde et/ou répétitive »,
En 2016, malgré l’avis médical rendu le 30 août 2016 et malgré sa situation de travailleur handicapé, l’employeur a persisté à l’affecter à des postes incompatibles et il a travaillé pendant plus de 10 heures pendant 6 mois durant le mois de septembre 2016,
Il alertait systématiquement son employeur par courrier puis par les feuilles de route des années 2015 et 2016 et la secrétaire du CHSCT a écrit le 16 septembre 2016 à la DIRECCTE notamment sur le non-respect des préconisations médicales le concernant.
Des conditions de travail dégradées en raison de l’attitude de sa hiérarchie :
Par diverses sanctions et rappels à l’ordre infondés depuis 2009, ne visant qu’à le déstabiliser. Dès 2010, le Dr [R] a noté son stress en lien avec un conflit important avec l’employeur et il a été placé en arrêt de travail d’octobre 2010 à janvier 2011,
L’arrivée de M. [E] en 2014, en qualité de Directeur de la Société CITAIX, a aggravé sa situation et les sanctions disciplinaires sans fondement se sont multipliées, il a été contraint de dénoncer les faits dont il était victime par courrier en date du 22 février 2015 ; L’employeur lui a adressé une mise en garde le 24 mars 2015 pour avoir prétendument commis une erreur de chargement, sans prendre en compte un « nouveau procédé ». Il a dénoncé l’accumulation de sanctions injustifiées l’a contraint à dénoncer le traitement qui lui était réservé par courrier adressé avril 2015 et l’employeur n’a pas démenti les faits énoncés,
Il a saisi l’Inspection du travail pour mettre fin à ces agissements, le 10 février 2015 et la secrétaire du CHSCT a écrit à l’employeur pour dénoncer la souffrance au travail et les risques psycho sociaux pour plusieurs personnes mais aucune disposition n’a été prise par la direction,
Il a fait l’objet d’une réunion de recadrage le 19 octobre 2016, l’accumulation des sanctions et courriers montrent une volonté de le déstabiliser et de dégrader ses conditions de travail. Son état de stress a été relevé à plusieurs reprises, dès 2014 par le médecin du travail auprès duquel il a évoqué un harcèlement moral en mars 2015,
M. [H], délégué du personnel, atteste de l’acharnement dont il était victime et n’étant pas le seul à subir cette situation à l’arrivée de M. [E] et pourtant, à l’occasion de la relation contractuelle, il a travaillé pour le compte de nombreux clients de la société et n’a jamais fait l’objet de la moindre fiche d’anomalie de la part de ces clients.
M. [C] expose enfin que le non-respect de l’obligation de sécurité de l’employeur ainsi que son comportement fautif ont eu des conséquences importantes sur son état de santé :
La médecine du travail a constaté la dégradation progressive de son état de santé,
Le Dr [D], spécialiste des maladies nerveuses, a constaté dans son certificat du 8 novembre 2016 un syndrome dépressif majeur nécessitant un traitement et un suivi psychologique,
Il a été licencié pour faute dans ce contexte par courrier en date du 23 décembre 2016 et il a dû changer son traitement médical pour pouvoir travailler à d’autres horaires.
La société CITAIX CHASSE conteste l’ensemble des griefs soulevés et fait valoir que le salarié n’apporte pas la preuve des manquements dénoncés :
Sur le respect des préconisations médicales :
Le salarié a été engagé en qualité de conducteur grand routier groupe 7 coefficient 150 et peut être affecté, sans exclusivité, selon les besoins, aux différents marchés de livraison, quelle que soit la nature des produits transportés, la nature du contrat de transport avec le client, et le type de camion affecté, le tout dans la limite des permis et habilitations du salarié et des préconisations du médecin du travail,
Pendant plusieurs années, il été affecté au marché TOTAL, marché pour lequel les rotations journalières étaient toujours les mêmes. Les préconisations médicales de 2011 et 2012 concernant le fait d’éviter les découchés ont été respectées et les temps détaillés démontrent que le salarié ne travaillait pas en travail posté,
Suite à la perte de ce marché, fin décembre 2014, les salariés concernés ont été réaffectés à d’autres clients, ce qui a déplu au salarié, et les restrictions médicales qui étaient les mêmes qu’en 2012, autorisaient le travail en journée (SPOT) soit pour les marchés « à la demande » ou poste du matin. Il a été proposé au salarié de travailler à compter de 2015, sur le seul contrat « permanent » soit un contrat de petit porteur sur la livraison de fuel ou de gaz mais suite à la visite médicale organisée le 22 décembre 2014 et l’avis négatif du médecin sur le poste, le projet a été abandonné,
La préconisation des horaires irréguliers n’est apparue pour le 1er fois que le 22 décembre 2014 et postérieurement à cette date le salarié n’a été affecté qu’au contrat TOTAL qui présente une parfaire régularité des horaires jusqu’à l’arrêt du marché. A compter de l’expiration du contrat TOTAL au 31 décembre 2014, il a été affecté à des contrats ponctuels dits « spots » qui se réalisent en journée,
Cet avis du 22 décembre 2014 a été confirmé en termes identiques le 16 mars 2015 et les listes des variables d’exploitation du salarié pour l’ensemble des douze mois des années 2015 et 2016 montrent qu’il n’a réalisé aucun découché sur l’année car il ne travaillait pas en travail posté,
Cette préconisation d’horaires le plus régulier possible (et non des horaires parfaitement fixes) a été également respectée, il n’y avait pas d’exclusivité du matin et le salarié pouvait donc travailler en journée,
L’avis du 30 août 2016 a lui aussi été respecté et la seule restriction nouvelle résidait dans l’amplitude horaire inférieure à dix heures et il n’y avait plus de référence au poste du matin. L’amplitude inférieure à 10 heures a été également respectée et si elle a pu être occasionnellement dépassée, il s’agit de la conséquence des départs prématurés du salarié qui faussait la réalité des heures accomplies, ainsi que cela lui était justement reproché dans le cadre de son licenciement,
Les lettres de voiture produites par le salarié par lesquelles il argue avoir alerté son employeur, appartenaient à l’entreprise et une copie en était remise au client et il les a donc illégalement conservées. Si une copie a été remise aux clients, cette copie comportait alors des commentaires négatifs et infondés contre l’entreprise.
Sur le grief des dégradations de travail inhérentes à la hiérarchie :
Le salarié ne verse que ses propres courriers, alors qu’il a régulièrement été rappelé à l’ordre ou sanctionné par l’ensemble de ses supérieurs, pas seulement M. [E] qui est arrivé fin 2013. Sur les sanctions passées, elles ne peuvent plus être contestées étant prescrites, et elles étaient fondées sur des faits fautifs,
La mise à pied disciplinaire du 06 janvier 2015 est fondée sur le refus du salarié de suivre une formation en double équipage et il n’apporte pas la preuve que cette formation portait sur un poste incompatible avec les recommandations médicales car ces nouvelles préconisations médicales ne sont intervenues que le 22 décembre 2014,
Sur le lien allégué entre l’état de santé et la dégradation des conditions de travail, l’arrêt de travail d’octobre 2010 à janvier 2020 et l’inaptitude temporaire ne font pas le lien entre la santé du salarié et ses conditions de travail.
Sur les alertes du salarié, il ne prouve pas avoir saisi l’inspection du travail et la DIRECCTE n’a jamais écrit à l’entreprise le concernant,
Sur le fait que l’entreprise pratiquerait de même avec d’autres salariés (sanction répétées), les attestations ne sont pas probantes, voire mensongères : un des salariés s’était désisté de la procédure devant le conseil de prud’hommes en contestation d’une mise à pied, un autre salarié a quitté l’entreprise en 2009.
Réponse de la Cour,
Aux termes des dispositions de l’article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L’employeur doit en respecter les dispositions et fournir au salarié le travail prévu et les moyens nécessaires à son exécution en le payant le salaire convenu. Le salarié doit s’abstenir de tout acte contraire à l’intérêt de l’entreprise et de commettre un acte moralement ou pénalement répréhensible à l’égard de l’entreprise. Il lui est notamment interdit d’abuser de ses fonctions pour s’octroyer un avantage particulier.
Selon l’article L. 4121-1 du code du travail l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1) des actions de prévention des risques professionnels,
2) des actions d’information et de formation,
3) la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
L’article L. 4121-2 du code du travail détermine les principes généraux de prévention sur le fondement desquels ces mesures doivent être mises en ‘uvre.
Il en résulte que constitue une faute contractuelle engageant la responsabilité de l’employeur le fait d’exposer un salarié à un danger sans avoir pris toutes les mesures prévues par les textes susvisés, alors que l’employeur doit assurer l’effectivité de l’obligation de sécurité qui lui incombe en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise.
En l’espèce, M. [C] dénonce tout d’abord le non-respect des préconisations médicales le concernant par son employeur et fixe, aux termes de ses écritures, le début de ce manquement au mois de décembre 2014.
Il est établi que le salarié, qui souffre d’une maladie (rectocolite hémorragique), a fait l’objet dès le 13 janvier 2011 puis le 22 mai 2012 de recommandations médicales par lesquelles le médecin du travail l’a déclaré apte à son poste de chauffeur poids lourd avec une contre-indication au « travail posté » (avec alternance d’une semaine de travail le matin et une autre l’après-midi) et d’éviter les découchés.
Durant plusieurs années, le salarié a été affecté sur le marché du client TOTAL, dit marché « permanent », et M. [C] n’émet aucun grief sur ses conditions de travail durant cette affectation, laquelle permettait, aux dires des parties, une régularité des rotations.
A compter du 31 décembre 2014, la société CITAIX CHASSE a perdu ce client et les salariés étant affectés à ce marché ont été réaffectés à d’autres marchés.
Le 09 décembre 2014, le médecin du travail rend un nouvel avis d’aptitude reprenant les termes de l’avis précédent du 22 mai 2012 et ajoute une nouvelle préconisation libellée en ces termes « peut travailler en spot (journée) ou poste du matin ».
Les parties s’accordent sur le fait que M. [C] était en repos du 10 au 13 décembre 2014 puis qu’il lui a été proposé d’être affecté à un contrat « petit porteur » de livraison de fuel ou de bouteilles de gaz.
Une nouvelle visite médicale est organisée le 22 décembre 2014, à la demande du salarié et le médecin du travail rend l’avis suivant: « apte au poste de chauffeur PL. Contre-indication au travail posté. Eviter les découchés. Peut travailler en spot (journée) ou poste du matin uniquement avec des horaires le plus réguliers possibles ‘ Pas de manutention lourde et/ou répétitive (type manipulation de tuyaux avec enrouleur comme en livraison petit porteur ou type bouteilles de gaz) ».
M. [C] adresse le 25 janvier 2015 un courrier à son employeur par lequel il lui fait grief d’avoir été contraint à travailler « sans concertation » sur un poste l’après-midi et de lui avoir imposé un poste de « petit porteur » avec distribution de fioul.
La cour observe qu’avant le 22 décembre 2014, il n’existait aucune préconisation médicale interdisant à l’employeur d’affecter le salarié à un poste l’après-midi. En effet, cette préconisation n’est faite qu’à compter du 09 décembre 2014.
De même, s’agissant du poste de « petit porteur », avant l’avis médical du 22 décembre 2014, aucune préconisation médicale n’interdisait à l’employeur de lui proposer une telle affectation.
Au surplus, M. [C] ne conteste pas qu’en raison de ce nouvel avis, le projet d’affectation a été abandonné par l’employeur. Ce manquement n’est pas établi.
S’agissant du respect des préconisations médicales entre l’avis du médecin du travail du 22 décembre 2014 et le nouvel avis rendu le 16 mars 2015 par la médecine du travail, l’employeur démontre, par la production des « listes des variables d’exploitation » conducteur, que durant les années 2015 et 2016, le salarié n’a réalisé aucun découché et a travaillé en container ou en spot. Ce manquement n’est pas établi.
Sur cette même période, M. [C] fait en outre grief à l’employeur d’avoir travaillé « selon des horaires très irréguliers avec une amplitude horaire particulièrement importante », de 4, 5 ou 6 heures à 14, 15, 16, 17, 18 ou 20 heures l’après-midi » au mépris de la préconisation du médecin du travail, d’horaires les plus réguliers possibles pour les postes du matin.
S’agissant de la question de la régularité des horaires de l’année 2015 et 2016, les préconisations médicales du 22 décembre 2014 et du 16 mars 2015 disposaient que le salarié était « apte au poste de chauffeur PL. Contre-indication au travail posté. Eviter les découchés. Peut travailler en spot (journée) ou poste du matin uniquement avec des horaires le plus réguliers possibles ».
La cour observe qu’il ne figure aucune interdiction de travailler en journée, ce qui signifie le matin et l’après-midi et que le médecin n’impose pas que les horaires soient obligatoirement réguliers.
En effet, ce n’est qu’à compter de l’avis du 30 août 2016 que le médecin du travail mentionne que le salarié est « apte au poste actuel de chauffeur PL blanc spot avec horaires réguliers et amplitude horaire
S’agissant de l’irrégularité des horaires alléguée à compter de ce nouvel avis, M. [C] n’argumente pas et les lettres de voitures produites concernant cette période (14 septembre 2016,17 novembre, 22 novembre, 23 novembre 2016) ne démontrent pas une irrégularité des horaires. Ce fait est au surplus démenti par les détails de l’activité journalière du salarié produits par l’employeur. Ce manquement n’est pas établi.
S’agissant du non-respect par l’employeur de l’amplitude horaire à compter de l’avis médical du 30 août 2016 qui préconise une amplitude inférieure à 10 heures, il ressort des pièces produites par M. [C] (relevé mensuel d’activité, feuilles de route) un dépassement de l’amplitude horaire à plusieurs reprises.
M. [C] verse en outre un mail du 16 septembre 2016 de la secrétaire du CHSCT à M. [G] (inspection du travail), par lequel elle indique notamment que les préconisations médicales concernant le salarié ne sont pas respectées, une attestation de M. [T] (chauffeur) qui relate qu’aucun salarié n’a jamais été sanctionné pour être parti avant 5 heures du matin et qu’il n’y avait pas d’horaire de départ sur les feuilles de route des chauffeurs, et enfin l’attestation de M. [O] qui indique qu’aucune heure de départ n’était mentionnée sur les feuilles de route.
L’employeur ne conteste pas les dépassements de l’amplitude de 10 heures. Cependant il doit être relevé que la société CITAIX CHASSE, dans le cadre de la procédure de licenciement pour faute, fait grief au salarié du non-respect des horaires de départ et de chargement au dépôt pétrolier fixés par le service exploitation, à 19 reprises entre le 4 octobre et le 29 novembre 2016, et donc argue du fait que le salarié a faussé la réalité de l’amplitude horaire.
Il ressort des feuilles de route produites par les parties, portant sur la période des faits reprochés au salarié, que M. [C] s’est effectivement présenté à 19 reprises sur son lieu de travail avant l’heure prévue du chargement mentionnée sur la feuille de route (entre 30 et 2 heures 30).
La société CITAIX CHASSE verse une « lettre de recadrage » du 19 octobre 2016 adressée au salarié par laquelle il lui est notamment reproché, outre le fait d’écrire des commentaires sur les lettres de mission, de ne pas respecter les programmes. M. [E] lui écrit en ces termes : « les programmes qui vous sont confiés comportent des informations essentielles telles que les conditions de chargement (heures, codes.) Nous avons constaté que vous ne teniez pas compte de ces informations et ne respectiez pas les horaires de chargement qui vous sont notifiés ».
L’entreprise, en réponse à l’argument de M. [C] selon lequel il employait notamment ce temps pour remplir la citerne de son véhicule, produit les itinéraires Mappy qui permettent de relever que les trois dépôts pétroliers de l’entreprise se trouvent entre 20 et 30 minutes de délai de route de la société et ne peuvent expliquer l’anticipation de l’heure d’arrivée.
La cour observe au surplus que le salarié, qui n’apporte aucune explication cohérente sur le fait qu’il débutait sa journée avant 5 heures, soit avant les horaires fixés sur les lettres de voiture, ne peut contester que cela entraînait des dépassements du temps de travail journalier, des majorations d’heures de nuit et parfois le versement d’indemnité de repas.
Il n’est ainsi justifié par le salarié d’aucune demande de l’employeur ou d’instruction pour une prise de fonction avant les heures indiquées sur les feuilles de route. De même, il n’apporte aucune contradiction à l’argument de l’employeur selon lequel la société n’avait aucun intérêt à supporter des coûts de travail supérieurs à la réalité du travail accomplie et notamment de payer un salarié en attente dans son véhicule.
En outre, le fait conclu par M. [C] selon lequel aucun autre salarié n’aurait été sanctionné à ce sujet, est démenti par les lettres de mise à pied adressées à M. [A] le 11 juin 2014 et le 21 octobre 2015. La société CITAIX CHASSE verse par ailleurs les feuilles de route d’un autre salarié sur lesquelles figurent des horaires d’arrivée de de chargement, à l’instar de celles de M. [C].
Enfin, l’argument de M. [C], selon lequel, ses arrivées anticipées étaient justifiées par son état de santé et la volonté d’avoir des horaires réguliers, n’est étayé par aucun élément probant étant observé qu’il appartient à l’employeur de fixer les horaires de travail du salarié qui ne faisait pas l’objet de préconisations médicales impératives en ce sens.
Aucun manquement ne peut être ainsi retenu à l’encontre de l’employeur s’agissant du dépassement de l’amplitude horaire journalière.
S’agissant des dégradations alléguées de ses conditions de travail liées au comportement de la direction, M. [E], il est établi que M. [C] a fait l’objet de plusieurs sanctions disciplinaires ou recadrages par lettre, qu’il a contestés par courriers en réponse :
Une mise à pied le 25 novembre 2009 établie par le directeur M, [S], pour mélange de carburant à laquelle M. [C] répond notamment que le « mode de fonctionnement et de gestion » à son égard est « souvent démesuré, non adapté aux situations et non justifiés et parfois ressenti comme « persécutant » »,
Les courriers de mise en garde du 25 février 2014 et le courrier en réponse de contestation,
La lettre de recadrage du 19 octobre 2016 le rappelant à l’ordre sur son comportement avec Mme [K] (exploitante et supérieure hiérarchique), l’utilisation du véhicule (clés conservées pendant ses absences), respect des programmes (horaires). La lettre en réponse du 29 octobre 2016 par laquelle il indique ne rencontrer qu’un seul problème : « toutes les lettre recommandées » que l’employeur lui envoie « sans raison valable » et le fait que M. [E] lui parle régulièrement des contre-indications médicales dont il fait l’objet. Il évoque en outre le fait de travailler sous pression
3 lettres de rappel des obligations (les 18, 23 et 24 novembre 2016) pour des omissions ou anomalies sur les bons de transport,
Sur le fait que ces sanctions ou rappels seraient infondés, le salarié produit :
L’attestation de M. [M], ancien salarié de 2001 à 2009 et délégué du personnel qui mentionne avoir eu « la présomption » que la société souhaitait de séparer du salarié en le déstabilisant par des changements de poste, de la manutention,
L’attestation de M. [F], ancien chauffeur, qui observe que le grief fait au salarié du mélange de carburant en novembre 2009 était injustifié s’agissant en réalité d’un déclassement de produit sans conséquence et que les salariés n’étaient jamais sanctionnés.
L’employeur, en réponse oppose tout d’abord que le salarié ne peut plus évoquer certaines sanctions pour cause de prescription. Il convient de rappeler que toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par 2 ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit conformément aux dispositions de l’article L.1471-1 du code du travail. En l’espèce, M. [C] qui a saisi le conseil de prud’hommes le 22 septembre 2017 n’est donc plus fondé à invoquer les sanctions prononcées avant le 22 septembre 2015.
La Cour observe au surplus que les sanctions antérieures à celle du 19 octobre 2016 ont été prononcées par d’autres supérieurs hiérarchiques que M. [E].
Sur le comportement de M. [E] à son encontre mais également envers d’autres salariés, M. [C] verse les pièces suivantes :
L’attestation de M. [H], chauffeur et délégué du personnel qui indique avoir assisté le salarié au cours de 3 entretiens avec l’employeur dans le cadre de la procédure de licenciement (courant 2014) et que le directeur aurait eu des propos déplacés concernant les contre-indications médicales et que la mise à pied du 22 décembre 2014 était injustifiée,
Le courrier de M. [C] du 26 janvier 2015 s’agissant de ses affectations depuis le 1er décembre 2014 : du 1 er au 15 décembre, affectation par téléphone à deux postes sans explications et son incapacité à les occuper. Il évoque enfin « l’obstination » de l’employeur à le sanctionner par des changements de poste, mise à pied injustifiées malgré ses explications (par 7 LRAR, 3 entretiens) et demande s’il existe un lien avec son état de santé,
L’attestation de M. [W], ancien chauffeur, qui indique avoir démissionné en octobre 2016 en raison de la dégradation de sa situation professionnelle suite à l’arrivée de M. [E]. Concernant M. [C] il évoque la destruction de son cadenas de casier lors d’une absence et que la direction n’a pas souhaiter appeler M. [C] pour l’avertir,
L’attestation de M. [A], ancien chauffeur, qui relate que ses conditions de travail se sont dégradées suite à l’arrivée de M. [E] avec de multiples LRAR, mises à pieds injustifiées jusqu’à son licenciement lequel a abouti à un arrangement,
L’attestation de M. [O] qui évoque son départ de l’entreprise suite aux conditions de travail après l’arrivée de M. [E].
La cour observe que trois des attestants évoquent leur propre situation et ne relatent pas de faits dont ils auraient été témoins permettant d’illustrer le comportement déloyal de M. [E] envers le salarié.
Sur les propos déplacés qui auraient été tenus par M. [E] envers M. [C], il ressort des pièces produites que le salarié a pu signaler à l’employeur des difficultés dans ses conditions de travail ou en lien avec M. [E] (lettre adressée à M. [G] (inspection du travail) le 10 février 2015 qui évoque des courriers joints sans qu’aucun ne soit produit ; Courrier adressé au DRH le 1er avril 2015 par lequel le salarié dénonce l’attitude et les propos de M. [E]). M. [C] produit en outre un mail de Mme [X], secrétaire CHSCT qui dénonce le 16 septembre 2016 une situation de souffrance au travail concernant les salariés de l’entreprise sans nommer les salariés concernés.
Cependant, aucun de ces éléments ne permet de démontrer la réalité des propos de M. [E] envers le salarié. Ainsi, l’attestation de M. [H] n’est pas suffisamment circonstanciée, aucun des propos attribués au directeur n’étant repris et les lettres du salarié ne font qu’énoncer ses propres dires sans témoignage objectif à l’appui.
Concernant l’alerte faite à l’inspection du travail, il n’est pas contesté que la DIRECCTE n’a formulé aucune remarque à l’encontre de la société CITAIX CHASSE suite au courrier du salarié du 10 février 2015.
Par ailleurs, contrairement au fait conclu par le salarié, l’employeur n’est pas resté sans réaction suite au courrier en question. Ainsi, par lettre du 25 mars 2015, il a invité le salarié à une réunion en présence du secrétaire du CHSCT, réunion reportée, en raison des congés du secrétaire, fixée au 24 avril 2015. M. [C] n’apporte aucun démenti sur l’organisation de cette réunion.
Ce manquement n’est pas établi.
Enfin s’agissant de l’état de son état de santé, M. [C] produit le certificat médical du Dr [R], médecin du travail en date du 18 octobre 2010, qui constate des troubles anxio-depressifs qui « semblent en lien avec l’organisation actuelle de son travail : polyvalence extrême, désorganisation des plannings, pression+++ de la hiérarchie” et la fiche établie le même jour (à adresser à la MDPH) et un certificat médical du Dr [Z] [N], médecin généraliste établi le 31 octobre 2016 à l’intention d’un confrère auquel elle adresse M. [C] car « il est de nouveau noyé par des problèmes professionnels qu’il considère comme un harcèlement ». Il ressort de ces éléments que les deux médecins rapportent les propos et constats du salarié, ne confirment pas le lien entre l’état de santé du salarié et la situation professionnelle et qu’aucune alerte n’a été adressée par la médecine du travail à l’employeur.
Au vu de ce qui précède, il convient de juger que le contrat de travail n’a pas été exécuté de manière déloyale par la société CITAIX CHASSE envers M. [C], laquelle n’a pas manqué à son obligation de sécurité et de rejeter toutes les demandes formulées de ce chef, par voie de confirmation de la décision déférée.
Sur le bien-fondé du licenciement :
La société CITAIX CHASSE soutient que le licenciement pour faute est fondé sur plusieurs griefs alors que ce dernier avait de l’expérience, était formé ou informé et avait fait l’objet de plusieurs sanctions disciplinaires ou de rappels à l’ordre. Elle énonce les griefs suivants :
Non-respect des horaires de départ et de chargement : Entre le 4 octobre et le 29 novembre 2016, le salarié n’a pas respecté, à 19 reprises, les horaires de départ et de chargement au dépôt pétrolier qui lui ont été fixés par le service exploitation. Il a ainsi augmenté, sans aucune justification, son amplitude horaire journalière, déclaré à l’entreprise du temps de travail supplémentaire injustifié et s’est vu octroyer une indemnité de repas de manière indue,
Déclaration de temps de contrôle incohérents : A plusieurs reprises courant octobre et novembre 2016, le salarié a déclaré à l’aide du chronotachygraphe des temps de contrôle du véhicule avant départ de l’ordre de 40 minutes, supérieurs aux standards de l’entreprise qui sont, pour ce type de matériel roulant, au plus de l’ordre de 15 minutes,
Tenue incorrecte des documents de transport : La tenue des documents de transport est essentielle car ce document fait office de contrat de transport et les informations vont notamment servir au service compétent pour réaliser la facturation au client. A plusieurs reprises le salarié a mal rempli la rubrique kilométrage, ou mal complété la rubrique sur le contrôle du véhicule,
Réalisation d’un nombre de kms injustifié : Le salarié n’est pas en mesure de justifier certains kilométrages réalisés avec le matériel roulant de l’entreprise et ce n’est qu’après la rupture de son contrat de travail qu’il a rejeté la faute sur Mme [K], exploitante, en prétextant une erreur dans la référence de livraison, le conduisant au mauvais client et entrainant un détour inutile. La caractérisation d’un préjudice par l’employeur n’est pas une condition de validité du manquement du salarié.
M. [C] soutient que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse :
Sur le grief d’avoir pris de l’avance sur son planning de livraison, il fait valoir qu’il s’est plaint pendant plusieurs années de la réalisation d’amplitudes de travail de plus de 12 heures par jour. Les salariés chauffeurs n’ont pas d’heure de départ imposée et la plupart prenait leur poste avant 5 heures du matin et avant septembre 2016 on ne leur a jamais imposé d’heures de départ. Le fait d’imposer des horaires de départ tardif n’avait que pour but de déstabiliser les salariés et cela n’était justifié par aucune contrainte organisationnelle. Les nouvelles indications inscrites par l’employeur sur ses feuilles avaient pour conséquences d’imposer des horaires de travail totalement irréguliers et imprévisibles.
Sur le grief de déclaration de temps de contrôles supérieurs aux standards : Il n’existe aucun standard et l’employeur n’en rapporte pas la preuve, la société ne produit aucun document qui lui aurait été communiqué, ni aucune donnée statistique d’autres conducteurs sur ce prétendu temps standard de contrôle. Ces durées-types ne prennent pas en considération les imprévus rencontrés lors des tournées des chauffeurs. Le temps de contrôle est variable et susceptible d’aléas.
Sur le grief de remplissage incorrect des documents de transport, ce grief est imprécis et non daté et l’employeur n’a pas expliqué pas en quoi ces documents n’auraient pas correctement rempli. Aucune remarque n’a été émise en ce sens alors qu’il remplissait la fiche de manière identique, depuis de très nombreuses années.
Sur le grief d’une déclaration injustifiée de kilométrage le 11 octobre 2016, le rallongement de l’itinéraire a été causé par une erreur de l’exploitante qui ne lui a pas donné la bonne référence de livraison, le conduisant au mauvais client, ce qui a entrainé un détour inutile. La société CITAIX CHASSE n’a jamais expliqué en quoi le grief reproché au salarié pouvait être qualifié de fautif et quel était le préjudice.
Réponse de la cour,
Aux termes de l’article L. 1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.
Aux termes de l’article L. 1235-1 du code du travail, le juge, pour apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles, et, si un doute persiste, il profite au salarié.
L’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Par ailleurs, l’employeur doit énoncer, dans la lettre de licenciement, les véritables motifs à l’origine du licenciement. A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
S’agissant d’un licenciement pour motif disciplinaire, il est de principe que la gravité d’une faute doit être appréciée en considération de l’ancienneté du salarié et de son comportement antérieur et que la sanction notifiée doit être proportionnée à la faute commise.
En l’espèce, la lettre de licenciement du 23 décembre 2016, qui fixe les limites du litige reproche au salarié 4 manquements.
S’agissant du respect des horaires de départ et de chargement, ainsi que relevé précédemment, les pièces versées par l’employeur permettent de relever qu’à 19 reprises courant 2016, le salarié a pris son poste de manière anticipée et sans respecter les horaires inscrits sur la feuille de route.
Il a été constaté que M. [C] n’était pas le seul salarié auquel des horaires étaient imposés, ni le seul à avoir été sanctionné pour ne pas avoir respecté le programme. Il a également été relevé que M. [C] échouait à démontrer que l’employeur lui aurait imposé de commencer son temps de travail plus tôt que l’heure inscrite, et à justifier par des raisons objectives ces arrivées anticipées alors même qu’il avait fait l’objet d’un recadrage à ce sujet en octobre 2016.
Enfin, il a été jugé que le fait d’arriver plus tôt que les horaires fixés, faussait la durée du temps de travail ainsi que l’amplitude des heures accomplies au détriment de l’employeur.
Ce grief est établi.
S’agissant du grief d’une déclaration de temps de contrôle incohérents via le chronotachygraphe, la société CITAIX CHASSE verse le relevé des détails de l’activité journalière du salarié des 6-12-21 et 25 octobre 2016 ainsi que du 2 et 16 novembre 2016 qui relèvent un délai entre la prise de service et du départ du camion de 20 à 30 minutes. Elle produit en outre une note listant les points de contrôle à opérer par le chauffeur avant le départ.
Sans avoir à se prononcer sur les arguments du salarié, qui expose qu’il faisait le plein ou prenait le temps pour dégivrer le véhicule, il convient de constater ainsi que conclu par M. [C], que l’employeur ne verse aucune pièce permettant à la cour de s’assurer du temps « standard » en matière de contrôle. Ainsi, il n’est produit aucun relevé pour un autre chauffeur confirmant que ce contrôle s’opère dans un délai moyen de 15 minutes ni aucune consigne écrite adressée à M. [C] lui imposant un temps pour procéder au contrôle du véhicule portant sur 19 items mentionnés au bulletin de sécurité produit. Ce manquement n’est pas établi.
Concernant la tenue des documents de transport, La société CITAIX CHASSE produit 5 feuilles de route (entre le 16 et le 24 novembre 2016), sur lesquelles ne sont pas complétées les kilométrages ou encore la quantité de carburant transportée ou bien encore la rubrique sur le contrôle du véhicule. M. [C] ne conteste pas la matérialité du grief mais argue du fait qu’il ne lui aurait pas été expliqué « en quoi ces rubriques auraient dû être complétées ». Il verse pourtant 3 rappels à l’ordre de l’employeur à ce propos intervenus courant novembre 2016. Dès lors, le salarié ne peut prétendre ne pas avoir reçu de consignes de son employeur à ce sujet. Ce grief est établi.
Sur la réalisation de 56 kms le 11 octobre 2016, soit le double du kilométrage qui aurait dû être réalisé pour se rendre chez un client, M. [C] n’en conteste pas la matérialité mais argue, sans pièce probante à l’appui, que ce fait résulterait d’une erreur de référence de livraison commise par l’exploitante Mme [K] et qu’il serait d’abord allé chez un mauvais client. En l’absence de pièce probante, il convient de constater que le grief est établi, le salarié échouant à justifier les kilomètres supplémentaires et de fait, le temps de travail utilisé en délai de route inutile.
S’agissant enfin des antécédents du salarié, M. [C] avait, par le passé été sanctionné de manière répétée et notamment en juin 2013 pour le non-respect des horaires mais également en janvier 2015 pour un refus de formation.
Il doit être aussi relevé que le salarié a fait l’objet d’un recadrage par lettre du 19 octobre 2016 sur la tenue des lettres de mission, ses relations avec sa supérieur hiérarchique, l’utilisation du véhicule ou encore le non-respect des programmes.
S’agissant des sanctions anciennes, s’il est de jurisprudence constante qu’un même fait ne saurait justifier successivement deux mesures disciplinaires, la référence de l’employeur aux sanctions prononcées antérieurement à l’égard de M. [C] en ce qu’elle se borne simplement à invoquer la réitération par ce salarié de faits fautifs permet de relever la persistance d’un comportement fautif du salarié.
M. [C] a ainsi, malgré un rappel clair et répété de ses obligations le 19 octobre 2016, a perduré courant novembre dans son comportement en se présentant avant les horaires fixés, faussant ainsi son temps de travail et a dès lors été convoqué par lettre du 29 novembre 2016 à un entretien préalable pouvant aller jusqu’au licenciement.
Par conséquent, au vu des faits fautifs jugés établis, le licenciement de M. [C] est justifié par une cause réelle et sérieuse. Il convient de rejeter l’ensemble des demandes formulées de ce chef par voie de confirmation de la décision déférée.
Sur les demandes accessoires :
Il convient de confirmer la décision de première instance s’agissant des dépens et des frais irrépétibles.
M. [C] est condamné au paiement de la somme de 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,
DECLARE M. [C] recevable en son appel,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ces dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE M. [C] à payer la somme de 500 euros à sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens en cause d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Jean-Pierre DELAVENAY, Président, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière, Le Président,