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9ème Ch Sécurité Sociale
ARRÊT N°
N° RG 21/04072 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RZSG
CPAM DU MAINE-ET-LOIRE
C/
[T] [F]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 03 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre
Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère
Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Philippe LE BOUDEC lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 28 Février 2023
devant Madame Cécile MORILLON-DEMAY, magistrat chargé d’instruire l’affaire, tenant seule l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 03 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 12 Mars 2021
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Tribunal Judiciaire de NANTES – Pôle Social
Références : 19/03089
****
APPELANTE :
LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU MAINE-ET-LOIRE
[Adresse 2]
[Localité 4]
non représentée, dispensée de comparution
INTIMÉ :
Monsieur [T] [F]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Sarah TORDJMAN, avocat au barreau d’ANGERS
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 26 août 2016, la société [5] a déclaré un accident du travail dont M.[T] [F], salarié en tant que chauffeur poids lourd, a été victime le 24 août 2016 dans les circonstances suivantes en mettant un filet de protection sur la benne, M. [F] aurait perdu l’équilibre et serait retombé au sol debout sur ses pieds.
Le certificat médical initial, établi le 30 août 2016 par le [6], fait état de contusions pulmonaires bilatérales – fracture bilatérale des calcanéums, avec prescription d’un arrêt de travail jusqu’au 4 décembre 2016.
La caisse primaire d’assurance maladie du Maine-et-Loire (la caisse) a pris en charge l’accident au titre de la législation professionnelle.
La date de sa consolidation a été fixée au 6 mars 2018.
Le 29 mai 2018, la caisse a notifié à M. [F] une décision lui attribuant un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) évalué à 27%.
Contestant le taux retenu par la caisse, M. [F] a saisi le tribunal du contentieux de l’incapacité des Pays de la Loire le 18 juin 2018.
Par jugement du 12 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Nantes, désormais compétent, a :
– infirmé la décision de la caisse ;
– fixé le taux d’IPP de M. [F], du fait de son accident du travail du 26 août 2016, à 35% ;
– rappelé que les frais de la consultation médicale confiée au docteur [V] seront à la charge de la Caisse nationale d’assurance maladie ;
– condamné la caisse aux autres dépens de l’instance.
Par déclaration adressée le 14 avril 2021, la caisse a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 22 mars 2021.
La caisse a présenté une demande de dispense de comparution le 26 août 2021 et par ses écritures parvenues au greffe le 2 septembre 2021, elle demande à la cour:
– de confirmer le jugement entrepris sur l’évaluation d’un coefficient professionnel de 3% non contesté par l’assuré ;
– d’infirmer le jugement entrepris sur l’évaluation médicale du taux d’IPP à la consolidation de l’accident du travail du 24 août 2016 dont a été victime M. [F] ;
– de confirmer le taux médical de 27% évalué par le médecin conseil et confirmé par le médecin du tribunal avant application de la règle de calcul des capacités restantes.
Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 13 janvier 2021 auxquelles s’est référé et qu’a développées son conseil à l’audience, M.[F] demande à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
* infirmé la décision de la caisse ;
* fixé le taux d’incapacité permanente partielle de M. [F], du fait de son accident du travail du 26 août 2016, à 35% ;
* rappelé que les frais de consultation médicale confiée au docteur [V] seront à la charge de la Caisse nationale d’assurance maladie ;
* condamné la caisse aux autres dépens de l’instance ;
Et statuant à nouveau :
– condamner la caisse à verser à M. [F] la somme de 2 000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
En l’absence de tout représentant de la caisse à l’audience, le conseil de M.[F] a demandé à ce que la cour déclare l’appel non soutenu.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, la cour entend dispenser la caisse de comparution au regard de sa demande du 26 août 2021.
Sur l’évaluation du taux d’IPP
L’article L. 434-2, 1er alinéa du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes générales et sa qualification professionnelle, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
Selon l’article R. 434-32 du même code, au vu de tous les renseignements recueillis, la caisse primaire se prononce sur l’existence d’une incapacité permanente et, le cas échéant, sur le taux de celle-ci et sur le montant de la rente due à la victime ou à ses ayants droit. Les barèmes indicatifs d’invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d’incapacité permanente d’une part en matière d’accidents du travail et d’autre part en matière de maladies professionnelles sont annexés au présent livre. L’annexe 1 applicable aux accidents du travail est issue du décret n°2006-111 du 2 février 2006.
En son chapitre préliminaire, au titre des principes généraux, il est rappelé à l’annexe I que ce barème répond à la volonté du législateur et qu’il ne peut avoir qu’un caractère indicatif. Les taux d’incapacité proposés sont des taux moyens, et le médecin chargé de l’évaluation garde, lorsqu’il se trouve devant un cas dont le caractère lui paraît particulier, l’entière liberté de s’écarter des chiffres du barème ; il doit alors exposer clairement les raisons qui l’y ont conduit.
Le barème indicatif a pour but de fournir les bases d’estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail et, éventuellement, des maladies professionnelles dans le cadre de l’article L. 434-2 applicable aux salariés du régime général et du régime agricole. Il ne saurait se référer en aucune manière aux règles d’évaluation suivies par les tribunaux dans l’appréciation des dommages au titre du droit commun.
Les quatre premiers éléments de l’appréciation concernent donc l’état du sujet considéré, du strict point de vue médical.
Le dernier élément concernant les aptitudes et la qualification professionnelle est un élément médico-social ; il appartient au médecin chargé de l’évaluation, lorsque les séquelles de l’accident ou de la maladie professionnelle lui paraissent devoir entraîner une modification dans la situation professionnelle de l’intéressé, ou un changement d’emploi, de bien mettre en relief ce point susceptible d’influer sur l’estimation globale.
En l’espèce, M. [F] a été hospitalisé à la suite de son accident du travail du 24 au 30 août 2016. Le certificat médical initial du 30 août 2016 établi par le médecin du [6] mentionne des contusions pulmonaires bilatérales et la fracture bilatérale des calcaneums. Le certificat médical final établi le 6 mars 2018 par le docteur [M], fait état de la fracture des deux calcaneums avec osteosynthèse par plaques puis retrait de matériel en octobre 2017.
Par courrier du 9 avril 2018, la caisse a déclaré la consolidation de son état au 6 mars 2018.
Le 29 mai 2018, la caisse lui a notifié l’attribution d’un taux d’IPP de 27 % tenant compte de la ‘limitation des mouvements de la cheville gauche dans le sens antéro postérieur donnant lieu à un taux de 5 %, blocage de la partie médiane du pied gauche donnant lieu à un taux de 15 %, limitation de la partie médiane du pied droit donnant lieu à un taux de 7 %, soit un taux global à 27 %’.
Il ressort du jugement de première instance dont les termes ne sont pas sérieusement contestés, que le docteur [V], médecin consultant, a fait à l’audience un rapport oral selon les termes suivants : ‘limitation de 5 % du mouvement de la cheville gauche dans le sens antéro-postérieur, un blocage de 15 % de la partie médiane du pied gauche, une limitation de 7 % de la partie médiane du pied droit.’
Il estime que, compte-tenu des dispositions du barème indicatif d’invalidité et de la règle dite de ‘[B]’, qui consiste à prendre les incapacités dans leur ordre décroissant et à calculer le taux d’incapacité suivant sur la capacité restante des précédents, un taux d’incapacité permanente partielle de 32 % peut être retenu, qu’il convient de majorer de 3 % pour perte d’emploi.
La caisse ne conteste pas la majoration de 3 %, dans la mesure où M. [F] a bénéficié d’un contrat aidé par pôle emploi à compter du 2 avril 2018.
Par ailleurs, il y a lieu de constater que les conclusions du médecin consultant du pôle social sont identiques à celles du médecin conseil de la caisse, s’agissant de l’évaluation de chacune des séquelles, prise isolément, mais que la caisse critique les modalités d’application de la règle de [B] qui ont conduit le docteur [V] à fixer un taux d’IPP global de 32 %, au lieu de 27. Elle estime qu’en appliquant cette règle, le taux retenu devrait être de 25 % au lieu de 27 et qu’elle a donc appliqué la méthode de calcul la plus favorable à l’assuré.
A cet égard, en son chapitre préliminaire, le barème indicatif d’invalidité (accidents du travail et maladies professionnelles), précise ce qu’il convient de faire lorsqu’il existe des infirmités multiples (infirmités qui intéressent des membres ou des organes différents) résultant d’un même accident :
‘Lorsque les lésions portant sur des membres différents intéressent une même fonction, les taux estimés doivent s’ajouter, sauf cas expressément précisés au barème.
Pour des infirmités multiples ne portant pas sur une même fonction, il y a lieu d’estimer en premier, l’une des incapacités. Le taux ainsi fixé sera retranché de 100 (qui représente la capacité totale) : on obtiendra ainsi la capacité restante. Sauf cas particulier prévu au barème, l’infirmité suivante sera estimée elle-même, puis rapportée à la capacité restante. On obtiendra ainsi le taux correspondant à la deuxième séquelle : l’incapacité globale résultera de la somme des deux taux, ainsi calculés. Celle-ci sera la même quel que soit l’ordre de prise en compte des infirmités.
Cette façon de calculer l’incapacité globale résultant de lésions multiples ne garde bien entendu qu’un caractère indicatif. Le médecin chargé de l’évaluation peut toujours y apporter des modifications ou adopter un autre mode de calcul à condition de justifier son estimation.’
Le barème fournit un exemple de calcul selon la méthode [B] :
‘Exemple : Une lésion A entraîne une incapacité de 40 %. La capacité restante est donc de 60 %.
Une lésion B, consécutive au même accident, entraîne une incapacité chiffrable, selon le barème, à 20 %. L’incapacité due pour cette deuxième lésion sera : 20 % de 60 % de capacité restante, soit 12 %.
L’incapacité globale sera donc : 40 % + 12 % = 52 %, et ainsi de suite …
Dans le cas d’une troisième lésion, pour l’exemple choisi, la capacité restante serait de 48 %.’
Au regard de ces indications, la cour constate que le calcul du Docteur [V] est inexact. Il devra donc être écarté.
Il est également précisé au barème, s’agissant des membres inférieurs que ‘Dans le calcul des incapacités permanentes, les deux membres inférieurs sont considérés comme ayant une valeur fonctionnelle égale.’
En l’espèce, M. [F] a été blessé simultanément aux deux talons, ce qui a entraîné le calcul d’un taux d’IPP pour chacun des membres, et les lésions concernent la même fonction, la locomotion. Conformément aux préconisations du barème, c’est à juste titre que la caisse considère qu’il convient d’additionner chacun des taux sans appliquer la règle de [B], qui en tout état de cause aurait donné un résultat moins favorable pour l’assuré.
Par conséquent, le jugement sera infirmé et il sera retenu pour M. [F] un taux médical d’IPP de 27 %, outre un coefficient professionnel de 3 %.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les dépens de la présente procédure d’appel, exposés postérieurement au 31 décembre 2018, seront laissés à la charge de M. [F] qui succombe à l’instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris sur le taux d’incapacité permanente partielle,
Statuant à nouveau,
Fixe le taux d’incapacité permanente partielle de M. [F] du fait de son accident du travail du 26 août 2016, à 27 % au titre du taux médical et 3 % au titre du coefficient professionnel,
Déboute M. [F] de sa demande d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [F] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT