Chauffeur Poids-Lourd : décision du 3 mai 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/00756

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 3 mai 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/00756
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 03 MAI 2023

PRUD’HOMMES

N° RG 20/00756 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LOO6

Monsieur [Y] [M]

c/

Société GROUPE DONITIAN

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 janvier 2020 (R.G. n°F 18/01925) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Industrie, suivant déclaration d’appel du 11 février 2020,

APPELANT :

Monsieur [Y] [M]

né le 18 Août 1961 à [Localité 3] de nationalité Française demeurant [Adresse 1]

représenté et assisté de Me Hervé MAIRE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SA Groupe Donitian, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

N° SIRET : 379 679 152

représentée et assistée de Me Claudia BRAVO-MONROY, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 mars 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Bénédicte Lamarque, conseiller chargé d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au du 21 mai 2002, Monsieur [Y] [M], né en 1961, a été engagé en qualité de chauffeur poids lourds, groupe 7 coefficient 150M de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires des transports du 21 décembre 1950 par la SA Groupe Donitian.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M.[M] s’élevait à la somme de 2.024,83 euros.

Le 15 décembre 2016, M. [M] a été victime d’un accident du travail et placé en arrêt de travail, qui sera prolongé jusqu’au 2 mai 2018, suite à la déclaration de nouvelles lésions les 22 décembre 2016, 29 décembre 2016, 14 janvier 2017, puis à une rechute le 4 septembre 2017.

La caisse primaire d’assurance maladie (ci-après CPAM) a reconnu le caractère professionnel de l’accident du travail par décision du 26 décembre 2016 mais n’a pas reconnu le caractère professionnel aux nouvelles lésions et rechute.

Le 22 mars 2018, M. [M] a été examiné pour une visite de pré-reprise par le médecin du travail.

Le 3 mai 2018, après étude de poste, M.[M] a été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail dans les termes suivants : ‘inapte au poste de chauffeur PL avec contre-indication médicale à la manutention de charges, de posture contraignante sur le rachis et de conduite prolongée’.

Par courrier du 14 mai 2018, la société a informé M.[M] de son impossibilité de le reclasser dans un poste adapté à ses capacités actuelles au sein de la société et lui a indiqué qu’elle allait étendre ses recherches de reclassement auprès d’organismes et sociétés extérieures.

Par lettre datée du 29 mai 2018, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 11 juin 2018.

M.[M] a ensuite été licencié pour inaptitude d’origine non professionnelle par lettre datée du 15 juin 2018.

A la date du licenciement, M. [M] avait une ancienneté de 16 ans et la société occupait à titre habituel plus de 10 salariés.

M. [M] a saisi la formation de référé du conseil de prud’hommes de Bordeaux afin d’obtenir le paiement des sommes suivantes :

– 15.830 euros à titre d’indemnité spéciale de licenciement,

– 3.215 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, soit 321 euros,

– 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à son obligation de délivrance de documents de fin de contrat,

– 1.500 euros au titre de l’article 700, outre la remise de documents sous astreinte.

Le 11 octobre 2018, le conseil de prud’hommes a jugé qu’il n’y avait pas lieu à référé, en ce ‘ qu’il existe une contestation sérieuse sur l’existence d’un lien entre l’accident du travail et l’inaptitude de M.[M] que seule la juridiction compétente à examiner ce type de contentieux pourra en tirer les conséquences éventuelles de droit’.

A titre principal, soutenant que son licenciement repose sur une inaptitude d’origine professionnelle et est dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement et sollicitant la condamnation de la société au versement d’une indemnité à défaut de sa réintégration dans l’entreprise, M. [M] a saisi le 14 décembre 2018 le conseil de prud’hommes de Bordeaux qui, par jugement rendu le 17 janvier 2020, a :

– dit que le licenciement de M.[M] au titre d’une inaptitude non professionnelle est fondé,

– dit que la recherche de reclassement effectuée par la société Groupe Donitian est conforme à ses obligations légales,

– dit ne pas observer de retard de la société Groupe Donitian à délivrer dans les formes et les délais les documents relatifs à la fin de contrat de M. [M],

– débouté M.[M] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté les parties de leur demande respective fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration du 11 février 2020, M. [M] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 28 juillet 2022, M. [M] demande à la cour de réformer le jugement rendu le 17 janvier 2020 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux, de déclarer recevable et bien fondé son appel et, statuant à nouveau de :

A titre principal,

– dire sans cause réelle et sérieuse son licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle,

– condamner la société Groupe Donitian à lui verser :

* l’indemnité spéciale de licenciement, soit la somme de 15.830 euros,

* verser l’indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 4.049,72 euros et les congés payés y afférents, soit la somme de 404,97 euros,

– dire que l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement,

– dire qu’à défaut de sa réintégration dans l’entreprise, et, en cas de refus d’une des parties, il y a lieu à condamner la société Groupe Donitian au versement d’une indemnité de 27.335,60 euros, correspondant à 13,5 mois de salaire, conformément à l’article L.1226-15 du code du travail,

A titre subsidiaire,

– dire sans cause réelle et sérieuse son licenciement pour inaptitude d’origine non professionnelle,

– dire que l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement,

– condamner la société Groupe Donitian au versement d’une indemnité de licenciement abusif, soit la somme de 27.335,60 euros correspondant à 13 mois et demi de salaire,

– condamner la société Groupe Donitian à lui verser l’indemnité compensatrice de préavis, soit la somme de 4.049,72 euros, et les congés payés y afférents, soit la somme de 404,97 euros, sur le fondement du manquement à l’obligation de reclassement,

Et en tout état de cause,

– condamner la société Groupe Donitian au versement d’une indemnité pour insuffisance de motivation de la lettre de licenciement, soit la somme de 2.024,85 euros correspondant à un mois de salaire,

– condamner la société Groupe Donitian au versement d’une indemnité pour irrégularité de forme au titre de l’absence de notification des motifs d’impossibilité de reclassement à hauteur de 5.000 euros,

– condamner la société Groupe Donitian au versement de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en ce compris les dépens et frais d’exécution.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 30 juillet 2020, la société Groupe Donitian demande à la cour de, rejetant toutes conclusions contraires comme injustifiées ou mal fondées, confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en date du 17 janvier 2020 en toutes ces dispositions et, en conséquence de :

– débouter M. [M] de l’ensemble de ses demandes,

– condamner M. [M] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [M] aux dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2023 et l’affaire a été fixée à l’audience du 14 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de reconnaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude

M. [M] conteste la décision de l’employeur qui l’a licencié pour inaptitude d’origine non professionnelle et l’a ainsi privé des indemnités afférentes à la procédure de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle.

Il soutient que l’inaptitude ayant justifié son licenciement avait pour origine son accident du travail survenu le 15 décembre 2016.

Rappelant que les règles protectrices s’appliquent aux salariés inaptes, victimes d’un accident du travail ou de maladie professionnelle, dès lors que l’inaptitude est constatée ou invoquée, il mentionne n’avoir jamais repris le travail à partir de l’accident de travail du 15 décembre 2016, déclaré en tant que tel, prolongé de manière explicite par le médecin et ce, jusqu’à la date de la visite médicale. Pour étayer le caractère professionnel de son inaptitude, M. [M] invoque les formulaires CERFA réservés aux accidents du travail et maladies professionnelles remplis par le médecin pour les prolongations, mais aussi par le médecin du travail pour rédiger l’avis d’inaptitude.

Pour voir confirmer le jugement du conseil de prud’hommes, la société soutient au contraire que le licenciement de M. [M] pour inaptitude non professionnelle a été effectué conformément à la constatation du médecin du travail du caractère non professionnel de l’inaptitude contenue dans son avis du 3 mai 2018, avis qui n’a pas été contesté par M. [M] dans le délai de 15 jours, pas plus qu’il n’a contesté les décisions de la CPAM lui refusant la reconnaissance professionnelle de ses lésions successives.

***

Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle s’appliquent dès lors que l’inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l’employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

L’application de l’article L. 1226-10 du code du travail n’est pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d’assurance maladie du lien de causalité entre l’accident du travail et l’inaptitude.

Il appartient au juge de vérifier si l’inaptitude du salarié a, au moins partiellement, une origine professionnelle.

En l’espèce, le 15 décembre 2016, M. [M] a été placé en arrêt de de travail suite à un accident du travail, reconnu par la CPAM comme ayant un caractère professionnel. Aucune indication n’est donnée sur cet accident, en dehors de la mention portée par le médecin sur le certificat médical d’accident du travail d’une chute du plateau du camion d’une hauteur de 1,20m environ. Cet arrêt de travail, déclaré comme accident de travail et reconnu comme ayant un caractère professionnel par la CPAM dans sa décision du 26 décembre 2016 a fait l’objet de prolongations.

Tous les arrêts de travail qui se sont succédés, liés à l’apparition de lésions ont été renseignés sur une fiche Cerfa ‘accident du travail maladie professionnelle’ et portent mention d’arrêt de ‘prolongation’, faisant le lien avec l’accident du travail :

– arrêt de travail du 22 décembre 2016 : ‘lombalgie persistante à J+7, chute de 1,20m, début sciatique droite. Radio : lombarthrose étage L1 à S1. Pas de tassement, pas d’anomalie bassin (scanner)’,

– arrêt de travail du 29 décembre 2016 : ‘lombalgie persistante. TDM du rachis lombaire : discopathie dégénérative L1 – L2 (…) volumineuse ostéophytose marginale antérieure et postérieure latérale gauche à l’attache du conflit disco radiculaire’,

– arrêt de travail du 14 janvier 2017 : ‘lombalgie persistante suite chute camion 15 décembre 2016. TDM rachis lombaire: discopathie dégénérative L1 – L2 ++ avec (…) Postérieur et en L5-S1 avec ostéophytose marginale’.

A partir du 28 février 2017, M. [M] a été placé en arrêt de travail ‘ordinaire’ qui sera prolongé par des arrêts de travail ordinaires.

L’arrêt de travail du 4 septembre 2017 mentionne dans la notice Cerfa ‘accident du travail’, une ‘rechute lombosacralgie gauche suite à une chute du plateau du camion le 15 décembre 2016 au travail.’

Le caractère professionnel de cette rechute n’a toutefois pas été reconnu par la CPAM. A compter de cette date, le médecin de M. [M] a établi des arrêts de travail ordinaires de prolongation, sans aucune mention, jusqu’au 2 mai 2018.

M. [M] établit par les arrêts de travail produits qu’il avait des douleurs au dos et souffrait de lombalgie.

Toutefois, il n’est pas démontré que ces douleurs et la discopathie confirmée par les études d’imageries auxquelles il a été procédé dans les jours suivants l’accident, seraient en lien avec la chute du camion. Aucun élément médical n’est versé aux débats permettant de connaître l’état de santé de M. [M] avant son accident ni d’éventuels antécédents de problèmes de dos.

Dans son avis de pré-reprise du 22 mars 2018, le médecin du travail mentionne une contre-indication médicale à la manutention de charges, postures contraignantes du rachis et conduite prolongée et après étude de poste ; l’avis du 3 mai 2018 le déclare ‘inapte au poste chauffeur PL avec contre-indication radicale à la manutention de charges postures contraignantes sur le rachis et de conduite prolongée’.

Le formulaire de ‘demande d’indemnité temporaire d’inaptitude’ remis par le médecin du travail à M. [M] ne saurait valoir reconnaissance de l’origine professionnelle de l’inaptitude, le médecin n’ayant jamais fait mention de ce que l’avis d’inaptitude qu’il a rédigé était en lien avec l’accident de travail du 15 décembre 2016.

La cour ne peut déduire des seuls arrêts de travail produits, dont les mentions portées sont très succinctes et parfois illisibles, et en l’absence d’avis médical ou de compte-rendu de consultation, que l’accident de travail du 15 décembre 2016 ayant consisté en une chute d’une hauteur de 1,20 m est en lien avec les lombalgies persistantes dont souffraient le salarié et qui ont conduit à son inaptitude en mai 2018.

Il n’est donc pas établi que l’inaptitude, constaté le 22 mars 2018 avait partiellement pour origine l’accident de travail du 15 décembre 2016 ; dès lors l’employeur était fondé à respecter la procédure de licenciement pour inaptitude d’origine non professionnelle.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté M. [M] de ses demandes de ce chef.

Sur l’obligation de reclassement

M. [M] soutient que l’employeur ne pouvait s’appuyer sur les seules conclusions écrites du médecin du travail pour démontrer que le reclassement était impossible et devait procéder à un examen individuel des possibilités de reclassement, au besoin en prenant en compte les préconisations du médecin du travail. Il fait également valoir que la société ne justifie pas avoir procédé de manière loyale aux recherches de reclassement dans les autres sociétés du groupe, n’ayant précisé ni ses aptitudes ni ses qualifications, pas plus qu’elle n’a cherché à aménager son poste.

La société soutient avoir rempli son obligation de reclassement, ayant pris attache avec le médecin du travail pour qu’il étudie un aménagement possible de poste, ce qui n’était pas possible au regard de l’unique activité de transport et de levage de la société qui comportait moins de 15 salariés au moment des faits. Elle ajoute que les horaires préconisés pour l’aménagement du poste du salarié n’étaient pas compatibles avec les cycles de travail imposés par les clients et qu’elle a recherché auprès d’autres entreprises une possibilité de reclassement.

***

Lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu’il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Il appartient à l’employeur de justifier du caractère loyal de la recherche effectuée et des démarches précises réalisées pour parvenir au reclassement du salarié devenu inapte, et ce, tant au niveau de l’entreprise qu’au niveau du groupe auquel elle appartient.

En l’espèce, lors de l’étude de poste réalisée le 3 avril 2018 le médecin du travail a décrit le poste occupé par M. [M], lequel ne comportait pas de manutention, comportait le

sanglage des marchandises avec harnais, et des horaires de travail de 6h/ 12h et de 13h/15h.

L’avis d’inaptitude du médecin du travail en date du 22 mai 2018 est limité au poste de chauffeur poids lourd et comporte des restrictions sur la manutention ou la conduite prolongée.

C’est donc à tort que l’employeur se base notamment sur des restrictions horaires qui ne figurent pas sur l’avis d’inaptitude pour faire part de l’absence de poste disponible.

Il ne produit par ailleurs aucun justificatif tel que le registre du personnel permettant de démontrer qu’aucun poste autre que chauffeur ou transporteur n’était disponible, ni qu’aucun aménagement n’était possible, conformément aux réserves émises par le médecin du travail.

L’employeur n’établissant pas l’impossibilité de reclassement du salarié au sein de l’entreprise, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur les irrégularités de procédure

M. [M] soulève deux irrégularités de procédure :

– en ne lui notifiant pas l’impossibilité de reclassement au sein du groupe avant d’engager la procédure de licenciement mais uniquement dans le lettre de convocation à l’entretien préalable, l’employeur aurait manqué à ses obligations. Il sollicite 5.000 euros à ce titre à titre de dommages et intérêts ;

– l’insuffisance de motivation de la lettre de licenciement, qui se contente de notifier au salarié que son reclassement a été recherché mais n’a pu aboutir, en se référant uniquement à l’avis du médecin et son déplacement sur site pour étudier les possibilités de reclassement. Il soutient que la société a été défaillante dans les motivations qui ont empêché le reclassement et qu’il ne pouvait connaître le motif de son licenciement. Il sollicite 2.024,86 euros à ce titre.

La société a informé le salarié le 14 mai 2018 de son impossibilité de le reclasser dans un poste adapté à ses capacités actuelles, au regard de l’avis d’inaptitude repris en intégral et en mentionnant de façon explicite l’activité exclusive de levage et de transport.

Ce courrier a été adressé avant que soit engagée la procédure de licenciement, par l’envoi du courrier en date du 29 mai 2018 le convoquant à l’entretien préalable, la société n’appartenant à aucun groupe et n’ayant pas d’obligation de reclassement dans des entreprises extérieures.

L’entreprise a donc respecté la procédure de licenciement en informant au préalable le salarié de l’impossibilité de son reclassement en interne et en motivant suffisamment la lettre de licenciement.

La demande de M. [M] sera rejetée et le jugement déféré confirmé de ce chef.

Sur les demandes financières

Le licenciement étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il convient de condamner la société à verser à M. [M] la somme de 4.049,66 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 404,96 euros au titre des congés payés y afférents.

Compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [M], de son âge au moment du licenciement (56 ans), de son ancienneté (16 ans), mais en l’absence d’élément sur sa situation après le licenciement qui n’est ni justifiée ni même précisée, il convient de fixer à 6.500 euros la somme de nature à assurer la réparation du préjudice subi par M. [M] à la suite de son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par l’employeur à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié depuis son licenciement dans la limite d’un mois d’indemnités.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société, partie perdante, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement à M. [M] de la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cours d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA Groupe Donitian à verser à M. [M] les sommes de :

– 4.049,66 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 404,96 euros au titre des congés payés y afférents,

– 6.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement,

– 1.500 euros au titre des frais irréptibles,

Ordonne le remboursement par la SA Groupe Donitian à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées à M. [M] depuis son licenciement dans la limite d’un mois d’indemnités,

Condamne la SA Groupe Donitian aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

 


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