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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
21e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 JUIN 2023
N° RG 21/02246 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UUGI
AFFAIRE :
[W] [Y]
C/
S.A.R.L. CHIDIAC GROUP
Décision déférée à la cour : Jugement rendu
le 24 Juin 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ARGENTEUIL
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 20/00136
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Alissar ABI FARAH
Me Antoine DUMOND
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [W] [Y]
né le 15 Juin 1958 à [Localité 4] (97)
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par : Me Alissar ABI FARAH, Plaidant/Constitué avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1747
APPELANT
****************
S.A.R.L. CHIDIAC GROUP
RCS de Pontoise n° 521 708 347
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par : Me Antoine DUMOND, Plaidant/constitué, avocat au barreau de PARIS susbstitué par Me TEMAM Fanny avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 16 Mai 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Mme Odile CRIQ, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
FAITS ET PROCÉDURE
M. [W] [Y] a été engagé par contrat à durée indéterminée, à compter du 4 avril 2018, en qualité de chauffeur poids lourd, par la société à responsabilité limitée Chidiac Group, qui a pour activité le transport de marchandises et notamment le ramassage de terres et gravats sur les chantiers de travaux publics, emploie moins de 11 salariés et relève de la convention collective nationale des transports routiers et auxiliaires de transports.
M. [Y] percevait une rémunération de 2.773, 29 euros bruts pour 151,67 heures mensuelles.
Considérant qu’il effectuait des heures supplémentaires pour terminer son service à 15 heures au lieu de 12h50, M. [Y] a sollicité le paiement de ses heures supplémentaires, heures de nuits et repos compensateurs à son employeur par courriers datés des 19 août et 23 septembre 2019.
Convoqué le 3 octobre 2019 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 14 octobre suivant, M. [Y] a été licencié par lettre datée du 17 octobre 2019 énonçant une cause réelle et sérieuse.
Il a saisi, le 16 juillet 2020, le conseil de prud’hommes d’Argenteuil aux fins de voir son licenciement jugé dénué de cause réelle et sérieuse, de demander le paiement des heures supplémentaires, des heures de nuit, d’une indemnité au titre du travail dissimulé et de voir condamner la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi l’employeur s’opposait.
Par jugement rendu le 24 juin 2021, notifié le 28 juin 2021, le conseil a statué comme suit :
Juge le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Déboute M. [Y] de l’intégralité de ses demandes
Déboute la société Chidiac Group de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Met les éventuels dépens à la charge de M. [Y].
Le 9 juillet 2021, M. [Y] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 4 octobre 2021, M. [Y] demande à la cour de :
Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il l’a débouté de ses demandes au titre des heures supplémentaires à 25% et 50 % et prime d’heures de nuit pour les années 2018 et 2019
Statuant à nouveau, condamner la société Chidiac Group à lui verser les sommes suivantes :
– heures supplémentaires majorées à 25 % pour 2018 : 5.622, 05 euros bruts
– congés payés afférents : 562, 20 euros bruts
– heures supplémentaires majorées à 50 % pour 2018 : 2.715 euros bruts
– congés payés afférents : 271, 50 euros bruts
– heures supplémentaires majorées à 25 % pour 2019 : 5.918,15 bruts
– congés payés afférents : 591, 81 euros bruts
– heures supplémentaires majorées à 50 % pour 2019 : 2.871,14 euros bruts
– congés payés afférents : 287,11 euros bruts
– prime heures de nuit 2018 : 387,68 euros bruts
– Congés payés afférents : 38,76 euros bruts
– prime heures de nuit 2019 : 410,70 euros bruts
– Congés payés afférents : 41,07 euros bruts
Fixer la moyenne de salaire à 3.749,57 euros bruts.
Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre du travail dissimulé et statuant à nouveau condamner la société Chidiac Group à lui verser la somme de 24.494 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé.
Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré fondé son licenciement pour cause réelle et sérieuse et statuant à nouveau déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En conséquence, condamner la société Chidiac Group à lui verser les sommes suivantes :
– Solde d’indemnité légale de licenciement : 366 euros
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 7.498 euros (2 mois de salaire)
– Dommages et intérêts pour préjudice moral : 2.500 euros
Condamner la société Chidiac Group à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Assortir les condamnations des intérêts au taux légal avec capitalisation.
Condamner la société Chidiac Group aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 6 décembre 2021, la société Chidiac Group demande à la cour de :
Débouter M. [Y] de l’intégralité de ses demandes ;
Confirmer le jugement entrepris dans toutes ses dispositions notamment en ce qu’il a :
– Débouté M. [Y] de l’intégralité de ses demandes
– Jugé le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse
– Mis les éventuels dépens à la charge de M. [Y]
Condamner M. [Y] à payer la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 19 avril 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 16 mai 2023.
MOTIFS
I – Sur la Durée du Travail
Sur les heures supplémentaires
M. [Y], qui observe que l’employeur ne verse pas aux débats l’enregistrement mécanique de ses heures travaillées, rappelle avoir été dans l’obligation de rechercher le camion stationné à 15 minutes de son domicile avant de se rendre sur le chantier débutant à 7 heures, ce qui l’obligeait à embaucher à 5 heures du matin pour effectuer le nombre de tours demandés, jusqu’à 15 heures.
L’employeur dément avoir commandé le travail dont le paiement est demandé. Il précise que l’intéressé ne devait pas embaucher à 5 mais à 7 heures, et que les heures faites de 12h50 à 15h ne venaient pas en supplément.
L’article L.3171-4 du code du travail exprime qu’ ‘en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. ”
Il résulte de ces dispositions qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Il est acquis aux débats que M. [Y] avait pour mission d’enlever les gravats des chantiers à la décharge selon un nombre de tours variables dont il recevait l’instruction précise et qu’il était autorisé à garer le camion près de son domicile en sorte qu’il ne passait jamais par l’entreprise avant de se rendre sur les chantiers.
M. [Y] calculant chaque jour 2,10 heures supplémentaires de midi cinquante à 15 heures, son décompte est suffisamment précis pour que l’employeur, à qui il appartient d’assurer le contrôle des heures de travail effectuées, puisse répondre. Cela étant, le litige se déporte en réalité sur les heures effectuées le matin, puisque les parties concèdent que M. [Y] débauchait aux environs de 15 heures, et que cette amplitude se retrouvait de 5 à 7 heures.
Or, il ressort des nombreux messages d’instruction adressés par l’employeur au cours de la relation de travail, et notamment durant l’année 2019, que le chargement devait se faire au mieux après 7 heures, voire plus tard, et que les camions n’étaient pas toujours autorisés à stationner aux alentours des chantiers.
Dès lors, M. [Y] est mal fondé de prétendre devoir embaucher chaque jour à 5 heures.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences légales et réglementaires. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Etant précisé qu’aucune heure supplémentaire ne fut jamais réglée à l’intéressé, compte tenu des éléments apportés par l’une et l’autre parties, il lui sera alloué pour l’année 2018, 2.000 euros et pour l’année 2019, 420 euros au titre des heures supplémentaires majorées du quart, augmentées des congés payés afférents. Le jugement sera infirmé dans son expression contraire.
Sur la prime de nuit
M. [Y] fait valoir les dispositions de la convention collective prévoyant la majoration de 20% des heures travaillées entre 21 heures et 6 heures.
Compte tenu de ce qui précède, il ne ressort de nul élément du dossier que l’intéressé aurait travaillé la nuit, en sorte qu’il lui serait dû la prime réclamée. Ses prétentions seront rejetées par confirmation du jugement.
Sur le travail dissimulé
M. [Y] fait valoir les heures supplémentaires manquantes sur ses bulletins de paie.
Selon l’article L.8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire.
L’article L.8221-5 dispose notamment qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
Cela étant, le salarié n’invoque ni un défaut de déclaration d’embauche, ni une soustraction aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale.
Il ne résulte pas des éléments en la cause une quelconque intention de l’employeur de ne pas avoir indiqué sur les bulletins de paie l’intégralité des heures de travail effectuées.
Les conditions de l’article L.8221-5 du code du travail n’étant pas réunies, la demande doit être rejetée et le jugement confirmé de ce chef.
II – Sur le licenciement
La lettre de licenciement est ainsi libellée :
” Vous avez été engagé le 4 avril 2018 en qualité de chauffeur poids lourds par notre société.
Vous avez négocié un salaire important en m’assurant que vous ne regardiez pas vos heures et que vous vous organiseriez.
Je vous ai confié un camion neuf à votre embauche et vous avez donc été mis dans les meilleures dispositions pour travailler.
Votre travail consiste à faire des transports de matériaux à raison de deux à six voyages par jour.
II s’agit le plus souvent du tout venant, terre, sable, gravats provenant de chantiers de démolition et qu’il faut transporter jusqu’à une décharge.
Depuis plusieurs mois vous ne respectez pas mes instructions et n’en faites qu’à votre tête.
Ainsi pour le chantier de [Localité 5] pour lequel vous avez déchargé à [Localité 6], vous avez refusé de vider à l’endroit indiqué par le client.
Vous ne travaillez pas conformément à ce que je vous demande, vous faites le plein du camion le soir alors que j’ai toujours exigé qu’il soit fait le matin afin d’éviter les filouteries la nuit.
Vous avez systématiquement instruction par SMS de charger à 7 heures. Or vous prenez quelquefois de votre propre initiative le camion à 5 heures du matin malgré mon interdiction.
Cela n’est pas justifié puisque vous habitez à 15 minutes du lieu de stationnement du véhicule.
Lors de l’entretien préalable le conseiller du salarié qui vous accompagnait, auquel j’ai montré les SMS que je vous envoie, vous a expliqué que lorsque vous prenez le camion plus tôt ce n’est pas du travail pour l’entreprise puisque vous n’êtes pas en service commandé.
Vous lui avez répondu que c’était votre plaisir de prendre le camion à 5 heures.
En réalité vous ne faites que ce que vous voulez, ainsi le 27 août 2019 vous n’avez fait que 4 tours dans la journée alors que toutes les autres entreprises (5 ou 6) qui travaillaient sur le chantier en ont fait 7 et le client ROISSY TP nous a enlevé le marché, je vous ai transmis son ordre d’arrêter le chantier le soir même.
Le 30 septembre 2019 je vous ai demandé de passer votre camion au contrôle technique, vous n’avez pas attendu que j’arrive avec les papiers, vous êtes reparti sans que le contrôle ne soit effectué.
Le 1er octobre 2019 vous avez recommencé à faire des tours en moins.
Vous exigez de ne travailler qu’avec le client ECT alors qu’il faut bien faire le travail commandé par les autres clients.
Votre impatience sur les chantiers indispose tout le monde, les clients comme les autres entreprises, vous ne voulez jamais attendre votre tour pour charger ou décharger et voulez passer devant tout le monde.
Votre comportement est devenu incompatible avec l’exercice de vos fonctions.
Alors que vous aviez reçu le 5 octobre 2019 la convocation à entretien préalable, vous avez persisté dans votre comportement.
Ainsi le mercredi 9 octobre 2019 vous n’avez fait que 2 tours au lieu de 3 sur le chantier du client ECT, le jeudi 10 octobre : 3 au lieu de 7 et encore le lendemain de l’entretien préalable 2 tours au lieu de 3.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que vous avez été convoqué à un entretien préalable à licenciement qui s’est tenu le l4 octobre 2019 et à l’occasion duquel vous étiez assisté par Monsieur [L] [E], conseiller du salarié.
Les faits qui vous sont reprochés sont constitutifs de motifs réels et sérieux d’un licenciement qui vous est notifié par la présente.
[‘] ”
En vertu de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par un motif réel et sérieux, et l’article L.1235-1 du même code impartit au juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs fondés sur des faits précis et matériellement vérifiables invoqués par l’employeur, de former sa conviction en regard des éléments produits par l’une et l’autre partie. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Sur la cause
L’employeur soutient les griefs de non-respect des horaires portés chaque matin à la connaissance de l’intéressé par messages en démentant qu’il fut dans l’obligation de passer au siège de l’entreprise récupérer le camion garé près de chez lui, d’absence d’entretien du camion, conventionnellement prévu, de non-respect des consignes de travail sur le nombre de tours dans les chantiers, et de comportement problématique.
M. [Y] fait essentiellement valoir la carence probatoire de son contradicteur, et signale la coïncidence de sa réclamation en paiement de ses heures supplémentaires et de son licenciement.
L’insubordination
En l’occurrence, les griefs d’avoir déchargé dans un autre lieu qu’exigé, de faire le plein d’essence le soir, d’ailleurs non soutenus, ne sont étayés par aucun élément.
Il n’est pas établi non plus, par l’échange de correspondance entre l’employeur et le salarié que la société Roissy TP sollicita l’arrêt du chantier qui prévoyait le 27 août 2019, 7 tours, faute de tours suffisants, ni plus généralement d’une insuffisance de tours les 1er, 9, 10 et 15 octobre 2019.
En revanche, M. [Y] fait aveu de conduire le camion dès 5 heures, alors que la consigne lui ait donnée de ne venir sur les chantiers qu’à compter, le plus souvent, de 7 heures, parfois après, la précision étant à l’occasion faite de ne pas stationner devant et de ne pas se présenter avant, sous peine d’éviction. Ce grief est ainsi établi.
Il fait aussi aveu de n’avoir pas attendu au contrôle technique l’arrivée de son employeur, au motif d’un horaire tardif dont il ne justifie pas et ce, dans le contexte d’heures supplémentaires non réglées, partiellement avéré. Le contrôle du véhicule confié ressortissant de ses obligations professionnelles selon l’article 1 de son contrat de travail disant ” vous participez à l’entretien du camion “, le grief est fondé.
Le comportement
Si la société Chidiac soutient que la société ECT ne voulut plus travailler avec M. [Y] à compter de la mi-octobre 2019 en raison des ” problèmes ” posés, toujours est-il que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, n’en parle pas, et dit au contraire, que M. [Y] aurait exigé seulement de travailler avec ce client. Le moyen est ainsi sans portée.
Elle justifie en revanche par l’attestation de M. [N], de la société cliente ECT, qu’au printemps 2018 M. [Y], alors que la police avait interdit tout déplacement lors de l’explosion d’une bombe de la 2ème guerre mondiale retrouvée sur le chantier, voulut quitter les lieux et que le témoin dut l’en empêcher en bloquant la sortie avec les engins, suite à quoi le salarié s’enragea et manqua de le frapper. Cela étant, M. [Y] souligne à raison l’ancienneté de ces doléances afférentes à son impatience et au final la tolérance de l’employeur.
Il en reste que si les griefs, objectifs et imputables à l’appelant, sont partiellement fondés, ils ne sont pas suffisamment sérieux, vu, selon le cas, leur indifférence sur la marche de l’entreprise dans le contexte d’un emploi plutôt autonome, leur caractère isolé, ou leur ancienneté, pour justifier son licenciement, d’ailleurs prononcé juste après sa réclamation en partie admise, en la cause, de paiement de ses heures supplémentaires.
Sur les conséquences
M. [Y] exprime n’avoir reçu aucune indemnité légale de licenciement en dépit de son ancienneté de 18 mois, que l’employeur acquitta toutefois en cours de procédure à la mesure, insuffisante, de 1.039,87 euros.
En application des articles L.1234-9, R.1234-2 et R.1234-4 du code du travail, compte tenu des heures supplémentaires allouées à M. [Y], il lui reste dus 16,10 euros.
Par ailleurs, en application de l’article L.1235-3 du code du travail, le salarié peut prétendre au paiement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre un montant minimal d’un demi mois de salaire brut et un montant maximal de deux mois de salaire brut. Vu l’ancienneté de M. [Y] et sa situation professionnelle, il lui sera alloué 3.000 euros de dommages-intérêts.
M. [Y] sollicite 2.500 euros en réparation du préjudice moral né de son licenciement ordonné pour avoir réclamé paiement de ses heures supplémentaires non réglées. Cependant, ce préjudice est déjà réparé par l’allocation de l’indemnité allouée en application de l’article L.1235-3, qui a vocation à indemniser l’ensemble des dommages nés de la perte de l’emploi, y compris immatériels.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté les demandes de M. [W] [Y] en paiement de primes d’heure de nuit et d’indemnité de travail dissimulé;
Statuant de nouveau ;
Condamne la société à responsabilité limitée Chidiac Group à payer à M. [W] [Y] la somme de 2.000 euros bruts au titre des heures supplémentaires faites en 2018, outre 200 euros bruts pour les congés payés afférents ;
Condamne la société à responsabilité limitée Chidiac Group à payer à M. [W] [Y] la somme 420 euros bruts au titre des heures supplémentaires faites en 2019, augmentées de 42 euros bruts pour les congés payés afférents ;
Dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Condamne la société à responsabilité limitée Chidiac Group à payer à M. [W] [Y] 16,10 euros pour solde de l’indemnité légale de licenciement ;
La condamne à payer à M. [W] [Y] 3.000 euros de dommages-intérêts en réparation de sa perte d’emploi injustifiée ;
Ordonne la remise des documents de fin de contrat (attestation Pôle-emploi, solde de tout compte et certificat de travail) conformes à la présente décision dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt ;
Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date, et à compter de chaque échéance devenue exigible, s’agissant des échéances postérieures à cette date, et que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;
Ordonne la capitalisation de ces intérêts à condition que ces intérêts soient dus au moins pour une année entière ;
Confirme le surplus ;
Condamne la société à responsabilité limitée Chidiac Group à payer à M. [W] [Y] 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société à responsabilité limitée Chidiac Group aux dépens.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,