Chauffeur Poids-Lourd : décision du 26 septembre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/00664

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Chauffeur Poids-Lourd : décision du 26 septembre 2023 Cour d’appel de Metz RG n° 21/00664
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Arrêt n° 23/00427

26 septembre 2023

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N° RG 21/00664 –

N° Portalis DBVS-V-B7F-FOO6

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Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de METZ

16 février 2021

20/00168

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

Chambre Sociale-Section 1

ARRÊT DU

Vingt six septembre deux mille vingt trois

APPELANTE :

S.A.S. MBS TRANS prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Valérie DOEBLE, avocat au barreau de METZ

INTIMÉ :

M. [Z] [W]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Eric MUNIER, avocat au barreau de THIONVILLE

(bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2021/004274 du 07/06/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de METZ)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 avril 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre

Mme Anne FABERT, Conseillère

M. Benoit DEVIGNOT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Catherine MALHERBE

ARRÊT : Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

Signé par Mme Véronique LAMBOLEY-CUNEY, Présidente de chambre, et par Mme Catherine MALHERBE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

M. [Z] [W] a été embauché en qualité de chauffeur poids lourds par la SAS MBS Trans en exécution d’un contrat à durée déterminée à compter du 4 septembre 2018 jusqu’au 31 octobre 2018, puis du 7 janvier 2019 au 28 février 2019.

Un avenant au contrat en date du 28 février 2019 a été rédigé par la SAS MBS Trans et a prévu une prolongation de l’embauche de M. [W] de trois mois.

M. [W] a été placé en arrêt maladie à compter du 27 mai jusqu’au 19 juin 2019. M. [W] a repris son travail à cette date, sans signer de contrat de travail.

M. [W] a été victime d’un accident de travail le 12 septembre 2019, et a dès lors été placé en arrêt de travail ininterrompu à partir de cette date.

Par courrier en date du 14 octobre 2019, la SAS MBS Trans a notifié à M. [W] la fin du contrat de travail à durée déterminée à la date du 31 octobre 2019, et lui a transmis le bulletin de salaire du mois d’octobre 2019 ainsi qu’un certificat de travail faisant état d’une embauche du 7 janvier 2019 au 31 octobre 2019.

Par requête en date du 9 mars 2020 enregistrée au greffe le 11 mars 2020, M. [Z] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Metz en contestant la rupture des relations contractuelles, et en sollicitant également des montants au titre de l’exécution du contrat de travail. Bien que régulièrement citée par voie d’huissier la société MBS Trans n’a pas comparu et ne s’est pas faite représenter.

Par jugement réputé contradictoire en date du 16 février 2021, le conseil de prud’hommes de Metz a statué comme suit :

‘Constate l’absence de contestations sérieuses,

Déclare les demandes de M. [W] recevables et bien fondées,

Par conséquent :

Ordonne la requalification de la relation de travail de M. [W] avec la SAS MBS Trans en un contrat de travail à durée indéterminée en date du 4 septembre 2018 ;

Condamne la SAS MBS Trans, prise en la personne de son représentant légal, à payer à M. [W] [Z] les sommes suivantes :

1 901,51 € au titre d’indemnité de requalification du contrat de travail,

20,47 € au titre de rappel de salaire,

537,82 € brut au titre des sommes prélevées de l’impôt à la source,

134,68 € au titre des congés payés s’y afférent,

140,42 € brut au titre de travail des jours fériés,

14,04 € brut au titre des congés s’y afférent,

1 901,51 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

190,15 € brut au titre des congés payés s’y afférent,

ces sommes portant intérêt de retard au taux légal à compter de la date de saisine, soit le 11 mars 2020

1 901,51 € au titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

3 803,02 € au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

ces sommes portant intérêts de retard au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

Condamne la SAS MBS Trans, prise en la personne de son représentant légal, à remettre à M. [W] les rapports de conduite de septembre 2018 à octobre 2019 sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la présente décision,

Condamne la SAS MBS Trans, prise en la personne de son représentant légal, à remettre à M. [W] les bulletins de salaire rectifiés de septembre et octobre 2019, le certificat de travail et l’attestation Assédic conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 € par document et par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la présente décision,

Se réserve le droit de liquider l’astreinte,

Dit n’y avoir lieu à statuer sur la demande d’aide juridictionnelle provisoire,

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision conformément à l’article R 1454-28 du code du travail,

Condamne la SAS MBS Trans, prise en la personne de son représentant légal, aux entiers frais et dépens.’

Par déclaration transmise par voie électronique le 15 mars 2021, la SAS MBS Trans a régulièrement interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 18 février 2021.

Par ses conclusions en date du 15 juin 2021, la SAS MBS Trans demande à la cour de statuer comme suit :

‘Infirmer l’intégralité de la décision du conseil de prud’hommes du 16 février 2021,

Statuant à nouveau,

Débouter M. [W] de ses demandes, fins et conclusions contraires ;

Condamner M. [W] à régler à la société MBS Trans la somme de 5 000 € pour procédure abusive et dilatoire.

En tout état de cause ;

Condamner M. [W] à régler à la société MBS Trans la somme de 3 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers frais et dépens afférents à la procédure.’

Sur la requalification des relations contractuelles, la société MB Trans expose que M. [W] « a signé un contrat de travail à durée déterminée le 4 septembre 2018 et a signé également plusieurs avenants ».

Sur la mauvaise application du prélèvement à la source, elle fait valoir qu’en cas d’erreur de taux (d’imposition), le salarié doit se tourner vers les impôts afin de solliciter le remboursement du trop-perçu.

Au titre du maintien de salaire au cours de l’arrêt de travail, la société MBS Trans indique que la remise d’un certificat médical est obligatoire pour justifier une absence, même de courte durée, et qu’en l’absence d’élément nouveau concernant les absences M. [W] doit être débouté de ses demandes. Elle observe qu’il n’est pas versé au débat le ou les certificats médicaux ou arrêts de travail mentionnant que le salarié était en arrêt pour maladie.

Sur le paiement du travail les jours fériés la société MBS Trans soutient qu’elle a payé tous les jours travaillés.

Sur la délivrance des rapports de conduite la société appelante indique qu’elle « doit vérifier ce point en effet il n’est pas sûr qu’elle soit encore en possession des rapports de conduite ».

Sur la rupture du contrat de travail, la société appelante fait valoir que M. [W] ne peut solliciter la requalification du contrat de travail « compte tenu du fait que le salarié a conclu un contrat de travail avec la société MBS Trans », et qu’elle n’avait donc pas à respecter la procédure de licenciement » compte tenu du fait de la fin du contrat de travail, en effet il ne s’agit pas d’un contrat à durée indéterminée ».

Par ses conclusions en date du 2 septembre 2021, M. [Z] [W] demande à la cour de statuer comme suit :

‘Débouter MBS Trans de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions ;

Confirmer intégralement le jugement rendu le 16 février 2021 par le conseil des prud’hommes de Metz sauf en ce qu’il a accordé 3 803,02 € de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail à M. [W].

Statuant à nouveau,

Condamner la SAS MBS Trans à verser à M. [W] 11 409,06 € de dommages et intérêts compte tenu de la nullité du licenciement intervenu.

Constater que M. [W] bénéficie d’un maintien intégral de l’aide juridictionnelle selon décision du 7 juin 2021.

Condamner la SAS MBS Trans aux entiers frais et dépens.’

Au soutien de la requalification des relations contractuelles en un contrat à durée indéterminée, M. [W] indique qu’il n’a signé aucun contrat de travail pour la période du 4 septembre 2018 au 31 octobre 2018, ni pour la période du 7 janvier au 28 février 2019, ni pour la période de juin à octobre 2019. Il précise que le seul document qui lui a été remis est un avenant qui lui a été remis le 28 février 2019 par l’employeur prévoyant une prorogation d’embauche de trois mois.

Il se prévaut des observations suivantes :

– la signature de ces CDD est apposée sur une page qui n’est pas la suite logique du contrat, qui peut être une page volante et qui, en outre, ne mentionne aucune date, et ce alors que cette signature aurait pu figurer en page 3 ;

– que sa signature telle qu’elle est apposée sur sa carte d’identité et sur des contrats de travail, est totalement différente de celle figurant sur ces CDD ;

– que la mention « lu et approuvé » ne correspond pas à son écriture, notamment les lettres u qu’il écrit en faisant un carré ;

– que la communication au salarié de ces contrats dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche ni même leur signature à leur date ne sont établies ;

– qu’il occupe depuis le 7 janvier 2019 un emploi lié à l’activité durable et permanente de l’entreprise ;

– que l’avenant produit par l’employeur prévoyant une prorogation de 4 mois ne lui a jamais été présenté et n’est signé que par l’employeur.

Sur les rappels de salaire, M. [W] revendique l’application d’un taux horaire de 9,97 euros brut pour le coefficient 138 M conformément à l’accord du 6 mars 2018, alors que le taux appliqué par l’employeur était de 9,88 €. Outre un rappel de salaire pour les 169 heures prestées de 15,21 €, il fait valoir que s’ajoutent 0,09 € d’heures de nuit et 1,58 € d’heure supplémentaire, soit un total de 16,88 € auquel se rajoute l’indemnité de précarité pour 1,69 € et l’indemnité compensatrice de congés payés pour 1,9 € soit un total de 20,47 €.

S’agissant des prélèvements à la source de l’impôt sur les revenus, M. [W] soutient qu’il n’est pas imposable ; il lui a été prélevé 80,24 € sur la paie de mars 2019, 39,39 € en avril, 319,37 en mai, 22 € en juillet, 61,32 € en août 2019 et 15,50 € avec la fiche de paie d’octobre 2019, soit un montant total de 537,82 € dont il réclame restitution en observant que l’employeur ne rapporte pas avoir versé ce montant aux impôts.

S’agissant du maintien de salaire, M. [W] se prévaut des dispositions de la convention collective des transports routiers qui prévoient un maintien de salaire de 100 % du 1er au 28e jour, puis à 75 % du 31è au 90e jour.

En ce qui concerne la rémunération de jours fériés travaillés (vendredi saint, 1er mai 2019 et 15 août 2019) M. [W] indique qu’il doit bénéficier d’une indemnité de 100 %.

M. [W] évoque avoir rappelé à son employeur par lettre recommandée du 17 septembre 2019 avoir travaillé ces jours- là, néanmoins cette lettre est restée sans réponse.

En ce qui concerne les montants réclamés au titre de la rupture des relations contractuelles, M. [W] indique que l’employeur n’a pas respecté la procédure de licenciement.

M. [W] retient que le licenciement est nul car la rupture est intervenue alors qu’il était en accident du travail, l’arrêt de travail ayant couru du 12 septembre au 15 décembre 2019.

M. [W] se prévaut de ce que la CPAM a pris en charge son accident du travail par décision notifiée le 24 septembre 2019.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er mars 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celles-ci conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il est constant que M. [W] a été embauché par la société MBS Trans en qualité de chauffeur poids lourd coefficient 138 niveau M à compter du 4 septembre 2018 jusqu’au 31 octobre 2018, avec une rémunération au taux horaire de 9,88 euros brut et 169 heures de travail mensuel, avec application de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires de transport.

M. [W] a été à nouveau embauché par la société MBS Trans à compter du 7 janvier 2019 au même niveau de qualification, avec une rémunération au taux horaire de 10,03 euros brut jusqu’au 31 octobre 2019.

Par courrier en date du 14 octobre 2019 adressé à M. [W] durant une suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail du 12 septembre 2019, la société MBS Trans a informé M. [W] que son contrat de travail à durée déterminée arrivait à son terme le 31 octobre 2019.

Sur la requalification des relations contractuelles en contrat à durée indéterminée

Aux termes de l’article L 1242-12 alinéa 1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. Le défaut de signature par le salarié équivaut à une absence d’écrit, qui entraîne la requalification en contrat à durée indéterminée.

L’article L. 1242-13 du même code dispose que « le contrat de travail est transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche. ».

En l’espèce, la société MBS Trans produit aux débats :

– un contrat de travail à durée déterminée à temps complet non daté pour une période courant du 4 septembre au 31 octobre 2018 au motif d’un surcroît temporaire d’activité, signé par l’employeur et par le salarié ;

– un contrat de travail à durée déterminée à temps complet non daté pour la période du 7 janvier au 28 février 2019 au motif d’un surcroît temporaire d’activité signé par l’employeur et par le salarié ;

– un avenant prolongeant le second contrat à durée déterminée de quatre mois, qui comporte la date du 28 février 2019 sur le premier feuillet, et qui comporte la signature des parties sur un autre feuillet.

La cour relève qu’aucun contrat n’est produit par la société MBS Trans pour la période d’embauche postérieure au 28 juin 2019.

M. [W] revendique une requalification des relations contractuelles en contrat à durée indéterminée dès le 4 septembre 2018 en contestant avoir apposé sa signature sur les trois écrits produits par la société appelante.

Il ressort de l’examen des documents litigieux que le premier contrat de travail dont se prévaut l’employeur comporte une signature apposée en biais sur un feuillet à un endroit décalé de l’emplacement qui lui était dédié.

Aussi la société MBS Trans ne développe aucune observation face aux divers arguments émis par M. [W] au soutien de sa contestation de l’authenticité des documents contractuels dont elle se prévaut, soit que :

– les signatures figurant sur les premier et second contrat sont apposées sur des pages isolées, qui peuvent donc être des pages volantes, et qui ne sont pas datées ;

– ces signatures sont différentes de celles apposées sur la carte d’identité et sur les précédents contrats de travail conclus par M. [W] ;

– la mention « lu et approuvé » qui est censée avoir été écrite par le salarié ne correspond pas à ses habitudes de rédaction (notamment la calligraphie du « u » en un carré).

La cour rappelle que le doute doit profiter au salarié, et relève de surcroît qu’aucune pièce ne démontre que l’employeur – à qui il appartient de s’assurer de la signature du contrat de travail à durée déterminée ‘ a adressé dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche à M. [W] ledit contrat afin que celui-ci y appose sa signature.

En conséquence, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a requalifié la relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 4 septembre 2018.

Sur la demande de dommages-intérêts pour licenciement nul

L’article L 1226-9 du code du travail dispose qu’« Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut rompre ce dernier que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie. »

Il convient de préciser que lorsque l’employeur connaît l’origine professionnelle de l’accident dont a été victime un salarié, il doit appliquer les règles protectrices de l’article L. 1226-9, peu important que le jour du licenciement il ait été informé d’un refus de prise en charge au titre du régime des accidents de travail.

L’article L 1226-13 du même code prévoit que toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L 1226-9 et L 1226-18 est nulle.

En l’espèce, il ressort des pièces produites que M. [W] a été victime d’un accident du travail le 12 septembre 2019 – ce qui n’est pas contesté par l’employeur ‘ et qu’il a été indemnisé par l’organisme social au titre de ce risque professionnel durant une période courant du 12 septembre au 15 décembre 2019, étant précisé que cet accident du travail a été reconnu d’origine professionnelle par une décision de la caisse primaire en date du 24 septembre 2019.

Aussi, au vu de la requalification des relations contractuelles en contrat à durée indéterminée, la rupture de la relation de travail le 31 octobre 2019 a les effets d’un licenciement nul, le salarié étant alors en arrêt suite à son accident du travail, et non d’une rupture abusive. Le jugement déféré est infirmé en ce sens.

M. [W] sollicite la somme de 11 409,06 euros à titre de dommages-intérêts, montant qui correspond à six mois de salaire conformément à l’article L. 1235-3-1 du code du travail.

La société MBS Trans ne contestant pas ce chiffrage, il convient d’accorder à M. [W] le montant qu’il sollicite à titre d’indemnité pour licenciement nul.

Sur les dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement

M. [W] sollicite la confirmation du jugement de première instance qui a condamné la société MBS Trans à payer à M. [W] la somme de 1 901,51 euros à ce titre.

La société MBS Trans indique dans ses écritures qu’elle « n’avait pas à respecter la procédure de licenciement compte tenu du fait de la fin du contrat de travail en effet il ne s’agit pas d’un contrat à durée indéterminée » (sic).

La cour rappelle que le salarié victime d’un licenciement nul peut prétendre à la réparation intégrale du préjudice résultant du caractère illicite de la rupture.

En conséquence, au regard de ce que la rupture des relations contractuelles a les effets d’un licenciement nul, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a fait droit aux prétentions de M. [W] à hauteur d’un mois de salaire.

Sur l’indemnité compensatrice de préavis

Le contrat de travail de M. [W] étant requalifié en contrat à durée indéterminée et le licenciement étant nul, le salarié est en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis.

Aussi, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné la société MBS Trans à payer à M. [W] la somme de 1 901,51 euros brut à ce titre, ainsi que celle de 190,51 euros brut au titre des congés payés afférents.

Sur le rappel de salaire

M. [W] soutient que l’accord du 6 mars 2018 portant revalorisation des rémunérations dans les entreprises de transports routiers de marchandises dispose qu’à compter du 1er avril 2018, le montant de la rémunération minimale annuelle pour un coefficient 138 M est de 21 359,32 à l’embauche pour 169 heures mensuelles, ce qui correspond à un taux horaire de 9,97 euros.

Il estime que l’application de ce taux entraîne un rappel de salaire pour les 169 heures prestées de 15,21 euros auquel s’ajoutent 0,09 euros d’heures de nuit et 1,58 euros d’heures supplémentaires, soit un total de 16,88 euros, auquel se rajoute l’indemnité de précarité pour 1,69 euros et l’indemnité compensatrice de congés payés pour 1,9 euros, soit un total de 20,47 euros.

La société MBS Trans ne conteste cette demande ni dans son principe ni dans son calcul.

En conséquence le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné la société MBS Trans à payer à M. [W] la somme de 20,47 euros brut à ce titre.

Sur le remboursement des sommes prélevées à la source

M. [W] soutient que son employeur a prélevé sur ses revenus des montants divers entre les mois de mars et octobre 2019, soit un total de 537,82 euros alors qu’il n’est pas imposable sur le revenu.

Si la société MBS Trans rétorque que cette situation relève du service des impôts, il s’avère que des sommes ont été prélevées par l’employeur au mois de mars (80,24 euros), avril 2019 (39,39 euros), mai 2019 (319,37 euros), juillet 2019 (61,32 euros), et août 2019 (61,32 euros) et en octobre 2019 (15,50 euros) avec des taux non personnalisés différents.

M. [W] produit aux débats une pièce n° 7 qui consiste en une capture d’écran qui mentionne que son taux individualisé est de 0%.

Au vu de ces éléments, et en l’absence de contestation par l’employeur des montants chiffrés par M. [W] et de toute explication sur les prélèvements effectués, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné la société MBS Trans à payer à M. [W] la somme de 537,82 euros brut à ce titre.

Sur le complément de salaire suite à l’accident de travail du 12 septembre 2019

M. [W] se rapporte aux dispositions de la convention collective nationale des transports routiers, en vertu desquelles le salarié qui a plus d’un an d’ancienneté dont l’incapacité de travail est d’au moins 28 jours, a droit au maintien de sa rémunération à 100 % du 1e au 30e jour d’arrêt, puis à 75 % du 31e au 90e jour d’arrêt.

Il soutient que l’employeur devait maintenir son salarié à 100 % du 12 septembre au 11 octobre 2019 puis à 75 % du 13 octobre au 31 octobre, déduction faite des indemnités journalières versées entre le 11 et le 31 octobre à raison du taux journalier de 54,91 euros.

Il sollicite ainsi le paiement de la somme de 1 346,77 euros à titre de complément de salaire du 12 septembre au 31 octobre 2019.

La cour relève que M. [W] produit une attestation de la caisse primaire qui précise que le salarié a été placé en arrêt maladie suite à son accident du travail du 12 septembre 2019 à compter du 13 septembre 2019 jusqu’au 15 décembre 2019, qu’il a perçu la somme de 41,71 euros par jour durant 28 jours, et celle de 54,91 euros par jour durant 66 jours.

Il ressort de l’examen des bulletins de salaire des mois de septembre et octobre 2019 produits que la société MBS Trans n’a pas maintenu le salaire de M. [W] à 100 % durant le premier mois, et qu’elle a ensuite cessé de verser sa rémunération puisqu’elle a mis fin à son contrat par courrier du 14 octobre 2019.

La société MBS Trans, qui n’ignorait pas l’accident du travail dont M. [W] a été victime le 12 septembre 2019, se contente d’affirmer qu’aucun certificat médical ne lui a été transmis dans le délai légal par le salarié.

Au vu de ces éléments, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a ordonné à la société MBS Trans de payer à M. [W] la somme de 1 346,77 euros à ce titre ainsi que celle de 134,68 euros au titre des congés payés afférents.

Sur les jours fériés non payés

M. [W] soutient avoir travaillé les jours fériés des 19 avril 2019 (correspondant au vendredi Saint précédant Pâques), 1er mai 2019 et 15 août 2019 sans être indemnisé alors que les dispositions de la convention collective prévoient que les ouvriers ayant au moins six mois d’ancienneté bénéficient du paiement d’une indemnité de 100 % s’ils travaillent le 1er mai et 5 jours fériés non compris le 1er mai.

Si l’employeur, qui ne conteste pas les dispositions conventionnelles auxquelles se rapporte M. [W], affirme avoir ”payé toutes les heures travaillées”, ces allégations sont inopérantes au vu de l’examen des bulletins de paie du salarié durant les périodes concernées par ses prétentions.

En conséquence le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a fait droit aux prétentions de M. [W].

Sur la remise des rapports de conduite

M. [W] sollicite la remise des rapports de conduite des mois de septembre 2018 à octobre 2019, et rappelle que l’employeur a l’obligation de communiquer au salarié la durée des temps de conduite et des temps de services mensuellement, conformément à l’article 10 du décret du 26 janvier 1983 et au règlement européen n°3821/85 du 20 décembre 1985.

La société MBS Trans indique dans ses écritures d’appel qu’elle doit « vérifier ce point il n’est pas sûr qu’elle soit encore en possession des rapports de conduite » (sic).

Le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à remettre à M. [W] les rapports de conduite de septembre 2018 à octobre 2019, sans toutefois qu’il soit nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte. Le jugement déféré est infirmé sur ce point.

Sur la remise des documents de fin de contrat

M. [W] sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a ordonné à la société MBS Trans de lui remettre les bulletins de salaire rectifiés, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi, sous astreinte de 100 euros par document et par jour de retard à compter du 8e jour de la notification de la décision à intervenir.

Il y a lieu d’ordonner la remise par la société MBS Trans des documents administratifs rectifiés conformes au présent arrêt, soit un bulletin salaire, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi conformes au présent arrêt.

En revanche aucun élément ne justifie qu’il est nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte. Le jugement déféré est infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts de la société MBS Trans

Les demandes de M. [W] étant fondées, la procédure initiée par le salarié ne peut être considérée comme abusive ou dilatoire, étant de surcroît observé que la société MBS Trans ne rapporte aucune preuve en ce sens.

La demande de dommages-intérêts de la société MBS Trans à ce titre ne peut qu’être rejetée.

Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens sont confirmées.

La société MBS Trans qui succombe en son recours est condamnée aux dépens d’appel et sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, chambre sociale, statuant en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Metz le 16 février 2021 sauf en ce qu’il a condamné la SAS MBS Trans à payer à M. [Z] [W] la somme de 3 803,02 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, en ce qu’il a assorti la remise par la SAS MBS Trans des rapports de conduite de septembre 2018 à octobre 2019 d’une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la décision, et sauf en ce qu’il a assorti la remise des documents administratifs d’une astreinte de 100 euros par document et par jour de retard à compter du 8ème jour de la notification de la présente décision ;

Statuant à nouveau sur les points infirmés, et y ajoutant :

Dit que la rupture des relations contractuelles a les effets d’un licenciement nul ;

Condamne la SAS MBS Trans à payer à M. [Z] [W] la somme de 11 409,06 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

Condamne la SAS MBS Trans à remettre à M. [Z] [W] les rapports de conduite du mois de septembre 2018 au mois d’octobre 2019 sans astreinte ;

Condamne la SAS MBS Trans à remettre à M. [Z] [W] un bulletin de salaire, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi rectifiés conformément à la présente décision sans astreinte ;

Rejette toutes les demandes formées par la SAS MBS Trans y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SAS MBS Trans aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente

 


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