Indemnité d’éviction : 14 février 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/59492

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Indemnité d’éviction : 14 février 2024 Tribunal judiciaire de Paris RG n° 23/59492

14 février 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
23/59492

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 23/59492 – N° Portalis 352J-W-B7H-C3R7R

N°: 4

Assignation du :
19 Décembre 2023

EXPERTISE [1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:
+1 copie expert

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 14 février 2024

par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, tenant l’audience publique des Référés par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Daouia BOUTLELIS, Greffier,
DEMANDEUR

Monsieur [Z] [G] exploitant sous l’enseigne WOOD’STOCK
[Adresse 2]
[Localité 7]

représenté par Me François ELBERG, avocat au barreau de PARIS – #C1312

DÉFENDERESSE

S.C.I. [Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 6]

représentée par Maître Romain LAFONT de la SELEURL RL AVOCAT, avocats au barreau de PARIS – #B0758

DÉBATS

A l’audience du 17 Janvier 2024, tenue publiquement, présidée par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président et assitée de Daouia BOUTLELIS, Greffier

FAITS ET PROCÉDURE

Aux termes d’un acte sous seing privé signé le 30 mars 2015, les époux [D], aux droits desquels vient la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES LOTS [Adresse 4], ont consenti, au profit de Monsieur [Z] [G], au renouvellement d’un contrat de bail portant sur plusieurs locaux à usage commercial situés [Adresse 2] pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2013.

Par acte extrajudiciaire du 24 novembre 2021, le preneur a fait délivrer au bailleur une demande de renouvellement du bail commercial à compter du 1er janvier 2022. Par acte extrajudiciaire du 23 février 2022, le bailleur a fait signifier au preneur son refus de renouvellement du bail avec offre de versement d’une indemnité d’éviction.

C’est dans ces conditions que par exploit délivré le 19 décembre 2023, Monsieur [Z] [G] a fait citer la SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES LOTS [Adresse 4] devant le président de ce tribunal, statuant en référé, en désignation d’un expert afin d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction, la consignation devant être mise à la charge du bailleur.
A l’audience, le requérant maintient le bénéfice de son acte introductif d’instance et conclut au rejet de la demande reconventionnelle aux fins de voir évaluer l’indemnité d’occupation compte tenu de la prescription de l’action en paiement de l’indemnité d’occupation.

En réponse, la partie défenderesse formule ses protestations et réserves et sollicite que la mission de l’expert soit étendue à l’évaluation de l’indemnité d’occupation à verser par le preneur depuis le 1er janvier 2023, s’en rapportant à justice quant à la prescription de son action.

Elle s’oppose par ailleurs à la mise à sa charge de la provision à valoir sur les honoraires de l’expert et sollicite la condamnation du requérant à lui verser la somme de 5000€ au titre des frais irrépétibles.

MOTIFS

En vertu de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.

* sur la mesure d’instruction relative à l’indemnité d’éviction

Le refus de renouvellement signifié par le bailleur en vertu de son droit d’option ouvre droit au profit du locataire, en vertu des articles L.145-14 et L.145-57 du code de commerce, à une indemnité d’éviction dont le principe n’est pas discuté en l’espèce.

L’acte extrajudiciaire de refus de renouvellement ayant offert une indemnité d’éviction, le principe du droit du preneur d’en bénéficier n’est pas contesté et le requérant justifie d’un motif légitime, au sens de l’article 145 du code de procédure civile, pour recourir à une mesure d’expertise afin de voir évaluer le montant de l’indemnité d’éviction.

* sur la mesure d’instruction relative à l’indemnité d’occupation

L’article L.145-28 du code de commerce dispose qu’aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d’éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l’avoir reçue. Jusqu’au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré. Toutefois, l’indemnité d’occupation est déterminée conformément aux dispositions des sections 6 et 7, compte tenu de tous éléments d’appréciation.

Aux termes de l’article L.145-60 du code de commerce, toutes les actions exercées en vertu du présent chapitre se prescrivent par deux ans.

Il résulte de ces dispositions que l’action en fixation de l’indemnité d’occupation est soumise à la prescription biennale de l’article L.145-60 précité. Le point de départ de l’action en paiement de l’indemnité d’occupation est le jour où est définitivement consacré, dans son principe, le droit du locataire au bénéfice d’une indemnité d’éviction.

Ce délai commence à courir, soit à compter de la date d’effet du congé dès lors que ce congé offre une indemnité et que ce droit n’est pas contesté, soit, en cas de contestation, à compter du jour où est définitivement consacré dans son principe le droit du locataire au bénéfice d’un indemnité d’éviction.

En l’espèce, il résulte du refus de renouvellement signifié le 23 février 2022 que le bailleur a offert une indemnité d’éviction au preneur, quel que soit son montant. Il a donc reconnu, dans son principe, le principe du droit du preneur au bénéfice de celle-ci. Il ne l’a par la suite d’ailleurs pas contesté.

Dès lors, le point de départ de l’action en paiement de l’indemnité d’occupation doit être fixé à la date d’effet du congé, soit le 1er janvier 2022. Il n’est pas contesté que la demande reconventionnelle relative à l’évaluation de l’indemnité d’occupation a été notifiée le 15 janvier 2024, alors que cette demande aurait du être effectuée avant le 1er janvier 2024 afin d’interrompre valablement le délai de prescription.

A défaut d’avoir valablement interrompu ce délai, il y a lieu de constater que l’action en paiement de l’indemnité d’occupation est prescrite depuis le 1er janvier 2024 de sorte que le procès envisagé sur ce point est manifestement voué à l’échec. Pour cette raison et à défaut de motif légitime, la demande d’expertise relative à l’évaluation de l’indemnité d’occupation sera rejetée.

* sur les demandes accessoires

Il y a lieu de mettre le coût de la consignation à la charge de la partie qui est requérante à la mesure d’expertise, tout comme les dépens en vertu de l’article 491 du code de procédure civile, étant précisé qu’aucun élément ne permet, à ce stade, de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction à verser et le montant réellement proposé par le bailleur, dans le cadre des discussions entre les parties ayant fait suite au refus de renouvellement.

Aucune raison d’équité ne justifie, en l’état, de faire droit à la demande d’indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance de référé, par mise à disposition au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,

Rejetons la demande d’expertise relative à l’évaluation de l’indemnité d’occupation ;

Donnons acte à la partie défenderesse de ses protestations et réserves ;

Ordonnons une expertise et désignons en qualité d’expert :

Monsieur [E] [S],
[Adresse 3]
☎ :[XXXXXXXX01]

avec mission de :

– se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission

– s’entourer, si besoin est, de tout sachant et technicien de son choix,

– visiter les lieux donnés à bail, les photographier en cas de contestation les mesurer, dresser la liste des salariés employés par le preneur dans ces locaux et sur ce fonds,

– Rechercher en tenant compte de la nature des activités professionnelles autorisées par le bail, de la situation et de l’état des locaux, tous éléments permettant de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction :
a) dans le cas d’une perte de fonds (valeur marchande déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, des frais et droits de mutation, afférents à la cession d’un fonds d’importance identique, de la réparation du trouble commercial et de tous autres postes de préjudice, ainsi que de la plus-value en résultant ; valeur marchande déterminée selon la valeur locative du marché si celle-ci est supérieure à celle déterminée selon les usages de la profession),
b) dans le cas de la possibilité d’un transfert de fonds sans perte conséquente de clientèle sur un emplacement de qualité équivalente (coût du transfert, acquisition d’un titre locatif ayant les mêmes avantages que l’ancien, frais et droits de mutation, frais de déménagement et de réinstallation, réparation du trouble commercial et de tous autres préjudices éventuels) ;

– Rechercher tous éléments permettant d’apprécier si l’éviction entraînera la perte du fonds ou son transfert ;

Faisons injonction aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions,

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

✏ convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;

✏ se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis ;

✏ à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :

→ en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent, sur le fondement de l’article 280 du code de procédure civile, et dont l’affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire de ce dernier au sens de l’article 269 du même code ;
→ en informant les parties, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

✏ au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex: réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte-tenu des délais octroyés devant rester raisonnables ;
→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;
→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du Code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.

Fixons à la somme de 5000 euros montant de la provision à valoir sur les frais d’expertise qui devra être consignée par la partie demanderesse auprès du Régisseur des Avances et Recettes du tribunal judiciaire de Paris pour le 14 mars 2024 ;

Disons que faute de consignation de la présente provision initiale dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera aussitôt caduque et de nul effet, sans autre formalité requise, conformément aux dispositions de l’article 271 du code de procédure civile ;

Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du Code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport au Greffe du tribunal judiciaire de Paris (contrôle des expertises) avant le 14 octobre 2024, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée ès du Juge du Contrôle ;

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code ;

Disons que, dans le but de favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée et le coût de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme OPALEXE et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Condamnons la partie demanderesse aux dépens de l’instance ;

Rejetons les demandes au titre des frais irrépétibles ;

Rappelons que la présente décision est de droit revêtue de l’exécution provisoire.

Fait à Paris, le 14 février 2024

Le Greffier,Le Président,

Daouia BOUTLELISAnne-Charlotte MEIGNAN

Service de la régie :
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris
☎ 01.87.27.98.58
Fax 01.44.32.53.46
[email protected]

Sont acceptées les modalités de paiements suivantes :

➢ virement bancaire aux coordonnées suivantes :
IBAN : [XXXXXXXXXX08]
BIC : [XXXXXXXXXX09]
en indiquant impérativement le libellé suivant :
C7 « Prénom et Nom de la personne qui paye » pour prénom et nom du consignataire indiqué dans la décision + Numéro de RG initial

➢ chèque établi à l’ordre du régisseur du TGI de Paris (en cas de paiement par le biais de l’avocat uniquement chèque CARPA ou chèque tiré sur compte professionnel)

Le règlement doit impérativement être accompagné d’une copie de la présente décision. En cas de virement bancaire, cette décision doit être envoyée au préalable à la régie (par courrier, courriel ou fax).

Espert : Monsieur [E] [S]

Consignation : 5000 € par Monsieur [Z] [G] exploitant sous l’enseigne WOOD’STOCK

le 14 Mars 2024

Rapport à déposer le : 14 Octobre 2024

Juge chargé du contrôle de l’expertise :
Service du contrôle des expertises
Tribunal de Paris, Parvis du Tribunal de Paris, 75017 Paris.

 


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