Diffamation : décision du 17 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/08911

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Diffamation : décision du 17 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 22/08911
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRET DU 17 NOVEMBRE 2022

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/08911 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFYW4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Avril 2022 -Président du TJ de PARIS – RG n° 22/51777

APPELANT

M. [Z] [R] Directeur Général de l’Assistance Publique des Hopitaux de [Localité 3] (APHP)

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté et assisté à l’audience par Me Mario-pierre STASI de la SELARL OBADIA – STASI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1986

INTIMES

M. [E] [N]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté et assisté à l’audience par Me David DASSA – LE DEIST, avocat au barreau de PARIS, toque : E1616

M. [W] [G]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté et assisté à l’audience par Me Luc BROSSOLLET de la SCP D’ANTIN BROSSOLLET, avocat au barreau de PARIS, toque : P0336

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Octobre 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller chargé du rapport et Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 30 janvier 2022, une interview de M. [W] [G], lequel assurait la promotion de son livre « Treize Pillards – Petit précis de la Macronie », était diffusée sur la chaîne Youtube et le compte Facebook de l’émission « Les Incorrectibles », présentée par M. [E] [N].

Par acte du 1er mars 2022, M. [R] a assigné M. [N] et M. [G] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, sur le fondement des articles 29 alinéa 1er, 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, aux fins de voir :

– juger que les propos suivants publiés sur la chaîne Youtube et la page Facebook de l’émission « Les Incorrectibles » sont constitutifs du délit de diffamation publique envers lui, en sa qualité de fonctionnaire public :

« il va piller les ressources de l’AP-HP pour le coup factuellement, il va y avoir un désaccord avec les oligarques comme [F] [D] sur la question du musée enfin des hôtels particuliers qui vont être vendus pour des sommes dérisoires, qui vont être revendus par [F] [D] après cinq fois plus chers, il va gagner des dizaines de millions d’euros de plus-value au détriment de l’Etat. Ça ce sont les affaires de corruption pures » ;

– ordonner sous astreinte la suppression des vidéos litigieuses ;

– condamner M. [G] à lui verser une provision de 10.000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice moral ;

– condamner les défendeurs à lui verser la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [N] a demandé au premier juge de débouter le demandeur de ses prétentions, de dire n’y avoir lieu à référé, de condamner M. [R] à lui verser 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [G] a demandé de débouter le demandeur de l’ensemble de ses prétentions, de le condamner à lui verser la somme de 5.000 euros en raison du caractère abusif de la procédure, de le condamner à lui verser la somme de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance contradictoire du 22 avril 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

– dit n’y avoir lieu à référé ;

– rejeté la demande au titre de l’abus de droit d’ester en justice formée par M. [G] ;

– condamné M. [R] à payer à M. [G] et à M. [N] la somme de 2.000 euros chacun en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné M. [R] aux dépens ;

– rappelé que la présente ordonnance est exécutoire de plein droit nonobstant appel.

Par déclaration du 3 mai 2022, M. [R] a relevé appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 23 juin 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [R] demande à la cour, au visa de l’article 835 alinéas 1 et 2 du code de procédure civile, des articles 29 alinéa 1, 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, des articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet 1982, de :

– infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire de Paris du 22 avril 2022 ;

et en conséquence,

– dire et juger que les propos suivants publiés sur la chaîne Youtube et la page Facebook de l’émission « Les Incorrectibles » et accessibles respectivement via les adresses URL https://www.youtube.com/watch’v=Ey9yXP5SXIk&t=3216s et https://www.facebook.com/watch/’v=1362636124203479&ref=sharing sont constitutifs du délit de diffamation publique envers lui, fonctionnaire public :

« il va piller les ressources de l’AP-HP pour le coup factuellement, il va y avoir un désaccord avec les oligarques comme [F] [D] sur la question du musée enfin des hôtels particuliers qui vont être vendus pour des sommes dérisoires, qui vont être revendus par [F] [D] après cinq fois plus chers, il va gagner des dizaines de millions d’euros de plus-value au détriment de l’Etat. Ça ce sont les affaires de corruption pures » ;

– dire et juger qu’il convient de faire cesser le trouble manifestement illicite qui est ainsi occasionné à celui-ci ;

– ordonner la suppression des vidéos litigieuses sur la chaîne Youtube et la page Facebook identifiées sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard ;

– condamner M. [G] à lui payer une provision de 10.000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice moral résultant de la publication des propos diffamatoires ;

– condamner MM. [N] et [G] à lui verser la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

M. [R] soutient en substance :

– que les propos prononcés par M. [G], diffusés le 30 janvier 2022 sur la chaîne Youtube et le compte Facebook de l’émission « Les Incorrectibles », caractérisent à l’évidence le délit de diffamation publique au sens de l’article 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 et réprimée, s’agissant d’une diffamation publique envers un fonctionnaire public, par les articles 30 et 31 de cette même loi ;

– que la condition de publicité est constituée dès lors que la vidéo de l’interview a été diffusée le 30 janvier 2022 sur la chaîne Youtube de l’émission « Les Incorrectibles » et sur la page Facebook de la même émission ; que la vidéo est toujours librement accessible au public ;

– que la condition de « personne identifiée ou identifiable » est établie en ce qu’il est directement visé par ces propos et que c’est en tant que fonctionnaire public qu’il est ciblé à raison de cette qualité ;

– que le fait précis portant atteinte à son honneur et à sa considération est caractérisé en ce que lui sont imputés des faits pénalement répréhensibles, notamment des manquements au devoir de probité prévus aux articles 432-10 à 432-16 du code pénal avec l’utilisation des termes « pillé les ressources de l’AP-HP », « dérisoire » et « au détriment de l’Etat » ;

– que la bonne foi de l’auteur des propos ne peut être établie dès lors qu’il était parfaitement conscient du caractère calomnieux des allégations, puisqu’il savait que M. [R] était totalement étranger à la vente de l’hôtel de Miramion par l’AP-HP à M. [F] [D] ;

– que les pièces versées n’ont en aucune façon pu être une base factuelle sérieuse permettant de retenir la bonne foi de M. [G] dès lors que leur contenu est étranger aux accusations précises et diffamatoires portées, ne permettant pas de soutenir qu’il se serait rendu coupable de corruption, ni même d’avoir participé à la vente d’un bien immobilier de l’AP-HP à un prix dérisoire ;

– que la bonne foi suppose pour être établie l’absence d’animosité personnelle, ce qui n’est pas le cas en l’espèce puisque M. [G] a consacré un chapitre contre lui, dans son pamphlet « Treize Pillards » ;

– que M. [N] sera condamné en tant que directeur de publication de la chaîne Youtube et de la page Facebook de l’émission « Les Incorrectibles » en vertu des articles 93-2 et 93-3 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors qu’il en est l’animateur et le créateur, qu’il a la maîtrise éditoriale de ces services de communication au public par voie électronique ;

– qu’il y a lieu de faire cesser le trouble manifestement illicite par la suppression de la vidéo, le trouble grave justifiant aussi l’octroi d’une provision.

Dans ses dernières conclusions remises le 21 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [G] demande à la cour de :

– confirmer purement et simplement l’ordonnance du 22 avril 2022 ;

– condamner M. [R] à lui payer une somme de 4.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;

– condamner M. [R] en tous les dépens de première instance et d’appel.

M. [G] soutient en substance :

– qu’aucun directeur de la publication ou responsable n’a été assigné ;

– qu’aucune indication n’est fournie quant à la qualité qu’aurait [W] [G] dans la commission du prétendu délit ;

– qu’aucune explication n’est proposée à la cour sur la compatibilité de la principale mesure demandée avec les dispositions de l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme ;

– que le passage incriminé se réfère aux ventes de plusieurs hôtels particuliers, sans concerner l’Hôtel de Miramion ;

– que le premier juge ne peut être suivi lorsqu’il considère qu’il ressort des propos une imputation diffamatoire selon laquelle les ventes stigmatisées auraient permis à M. [R] de trouver un poste à suivre, ce qui est incohérent chronologiquement eu égard aux propos réellement tenus ;

– que le caractère diffamatoire des propos ne relève pas de l’évidence ;

– qu’à tout le moins, le débat sur la bonne foi relève des juges du fond, plusieurs pièces produites faisant référence à des opérations immobilières survenues postérieurement à l’arrivée de M. [R] comme directeur général de l’AP-HP, les éléments versés aux débats autorisant la mise en cause de M. [R] dans sa gestion du patrimoine immobilier de l’institution.

Dans ses conclusions remises le 22 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [N] demande à la cour, au visa de l’article 835 alinéas et 2 du code de procédure civile, des articles 23, 29 alinéa 1, 32 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, de l’article 835 du code de procédure civile, de l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme, de :

– confirmer l’ordonnance rendue le 22 avril 2022 par M. le président du tribunal judiciaire de Paris ;

en conséquence,

– débouter M. [R] de l’ensemble des ses moyens, fins et conclusions ;

– dire n’y avoir lieu à référé ;

– condamner M. [R] à lui verser la somme de 4.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

M. [N] soutient en substance :

– qu’il n’est pas démontré qu’il serait le directeur de la publication des supports de diffusion des propos poursuivis, ce qui ne résulte d’aucune pièce ;

– qu’il est en réalité journaliste et qu’aucun directeur de la publication n’a été assigné ;

– qu’il n’est en outre intervenu qu’en qualité de journaliste intervieweur ;

– qu’il ne saurait y avoir trouble manifestement illicite dès lors que le journaliste se limite à poser des questions ; que la seule limite à la responsabilité du journaliste ou du directeur de publication intervieweur réside dans la retranscription tronquée, incomplète ou dénaturée des termes recueillis ;

– que de plus l’analyse des propos débattus, particulièrement complexes, ainsi que l’examen des éléments de bonne foi particulièrement étayés, relèvent des juges du fond ;

– que les propos ont été dénaturés par l’appelant, dans la mesure où il n’est pas du tout fait état de manière suffisamment claire et univoque de la cession par M. [R] de l’Hôtel de Miramion ; que les propos ne pas suffisamment précis ; qu’aucun acte illicite ou immoral n’est imputé à M. [R] ;

– que, s’agissant de la bonne foi, il n’est pas contestable que le patrimoine immobilier de l’AP-HP a été largement mis sur le marché des ventes immobilières de luxe et que ce mouvement s’est accéléré sous la mandature de M. [R] ;

– que les mesures sollicitées constituent enfin une atteinte disproportionnée et non justifiée à la liberté d’expression, M. [R] étant une personnalité publique et les propos n’ayant pas dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression en la matière.

SUR CE LA COUR

Il sera rappelé que :

– l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé ;

– il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure – caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait – et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée ;

– l’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises ;

– la diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent.

En outre, l’article 31 de la loi du 29 juillet 1881 ne punit de peines particulières les diffamations dirigées contre les personnes revêtues des qualités qu’il énonce que lorsque ces diffamations, qui doivent s’apprécier, non d’après le mobile qui les a inspirées ou d’après le but recherché par leur auteur, mais selon la nature du fait sur lequel elles portent, contiennent la critique d’actes de la fonction ou d’abus de la fonction, ou encore établissent que la qualité ou la fonction de la personne visée a été soit le moyen d’accomplir le fait imputé, soit son support nécessaire ; en revanche, si le fait imputé ne constitue ni un acte, ni un abus de la fonction ou du mandat public, la diffamation n’atteint que la personne privée.

Par ailleurs, ni les parties ni les juges ne sont tenus par l’interprétation de la signification diffamatoire des propos incriminés proposée par l’acte initial de poursuite. Il appartient aux juges de rechercher si ceux-ci contiennent l’imputation formulée par la partie demanderesse ou celle d’un autre fait contenu dans les propos, les juges étant également libres d’examiner les divers passages poursuivis ensemble ou séparément pour apprécier leur caractère diffamatoire.

Enfin, les imputations diffamatoires sont réputées, de droit, faites avec intention de nuire, mais elles peuvent être justifiées lorsque leur auteur établit sa bonne foi, en prouvant qu’il a poursuivi un but légitime, étranger à toute animosité personnelle, et qu’il s’est conformé à un certain nombre d’exigences, en particulier de sérieux de l’enquête, ainsi que de prudence dans l’expression, étant précisé que la bonne foi ne peut être déduite de faits postérieurs à la diffusion des propos.

S’agissant d’un sujet d’intérêt général, une base factuelle suffisante permet à l’auteur des imputations diffamatoires de démontrer sa bonne foi.

En l’espèce, s’agissant du caractère diffamatoire des propos, il sera relevé :

– que les propos s’inscrivent dans une interview donnée par M. [G] et doivent s’apprécier dans le contexte dans lesquels ils ont été tenus, aux fins de dégager leur signification et leur portée ;

– que M. [G] fait en substance état de ce que M. [R] aurait, en tant que directeur général de l’AP-HP, vendu des biens immobiliers à bas prix à de riches personnes (“oligarques”), qui vont après les revendre cinq fois plus chers, ce au détriment des finances publiques, étant pris l’exemple de M. [D] qui aurait gagné ainsi des dizaines de millions d’euros de plus-value ;

– qu’il sera d’abord observé, comme l’a d’ailleurs rappelé le premier juge, qu’il n’est pas établi que M. [G] fasse spécifiquement référence à l’hôtel de Miramion vendu à M. [D], alors qu’il s’agit selon les propos d’un comportement répété et aurait concerné plusieurs immeubles, étant dénoncé une politique générale menée par l’administration visée ;

– que l’imputation d’avoir vendu à bas prix un patrimoine immobilier public, même si elle est formulée en des termes assez virulents, ne présente pas en elle-même un caractère diffamatoire, un tel fait ne caractérisant pas à l’évidence une infraction pénale, ni même un comportement moralement condamnable contraire à la probité attendue d’un agent public, la circonstance que des biens ont été vendus en-dessous de leur valeur ne traduisant pas nécessairement une atteinte à l’éthique attendue d’un fonctionnaire, une telle critique pouvant se limiter à mettre en cause une très mauvaise gestion des deniers publics ;

– que l’expression “piller les ressources de l’AP-HP” peut, dans ce contexte, constituer une critique virulente de la gestion de son patrimoine immobilier par l’AP-HP, sans pour autant constituer un propos diffamatoire à l’encontre de M. [R] ;

– que si M. [G] utilise, à la fin du passage poursuivi, les termes “affaires de corruption pure”, il ne s’en déduit pas pour autant que M. [R] soit mis en cause pour avoir commis des faits de corruption au sens strict du code pénal, les éléments de l’infraction pénale n’étant pas indiqués ;

– qu’il n’est pas plus établi que la vente des immeubles à bas prix porterait atteinte à une règle éthique ou à un comportement moral ;

– que l’expression “affaires de corruption pure”, à supposer d’ailleurs qu’elle s’applique à M. [R], vient en effet conclure une première partie des propos de M. [G] retraçant le parcours professionnel de l’intéressé auprès de l’abbé [X] puis du gouvernement de M. [H], lui reprochant notamment l’utilisation de son image à des fins de carrière ;

– que s’oppose en outre aux “affaires de corruption pure”, dans la suite de l’entretien, la supposée “destruction de l’hôpital public”, ce qui démontre que l’emploi du mot “corruption” dans ce contexte est particulièrement imprécis, pouvant à tout le moins constituer une réprobation du parcours professionnel de l’intéressé, sans pour autant imputer des manquements à l’éthique ;

– que, s’agissant d’une éventuelle contrepartie à la vente à bas prix des immeubles, c’est à tort que le premier juge a indiqué que les ventes auraient été décidées par M. [R] afin que les acheteurs puissent lui servir pour trouver “le point de chute qui va suivre” dans sa carrière professionnelle, ce en usant de leur influence, étant observé que les intimés relèvent, à juste titre, que, dans un passage non poursuivi, M. [G] fait référence en réalité, s’agissant du point de chute, à l’arrivée de M. [R] comme directeur général de l’AP-HP à la suite d’expériences gouvernementales ;

– qu’ainsi, les ventes à bas prix ne peuvent pas être reliées à la recherche d’un point de chute professionnel pour venir à l’AP-HP, puisque les fonctions de directeur général de l’AP-HP sont évidemment les seules permettant de décider de la vente des biens immobiliers de cet organisme.

De l’ensemble de ces éléments, il se déduit que le caractère diffamatoire des propos visés, certes virulents mais aussi particulièrement confus et imprécis et qui se limitent finalement à évoquer la vente à bas prix d’immeubles de l’AP-HP sous le mandat de M. [R], n’est pas établi avec l’évidence requise devant le juge des référés, juge de l’évidence, le trouble manifestement illicite, qui suppose ici une violation évidente de la loi du 29 juillet 1881, n’étant pas caractérisé, ce sans préjudice du sort d’une éventuelle action au fond.

Il y a donc lieu de confirmer l’ordonnance entreprise, en ce compris le sort des frais et dépens de première instance exactement réglé par le premier juge.

A hauteur d’appel, l’appelant sera condamné à indemniser les intimés pour leurs frais non répétibles exposés et sera condamné aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

 Confirme l’ordonnance entreprise,

Y ajoutant,

Condamne M. [Z] [R] à verser à M. [E] [N] et à M. [W] [G], à chacun, la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;

Condamne M. [Z] [R] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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