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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 6
ARRET DU 01 MARS 2023
(n° 2023/ , 2 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/01635 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDFP3
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Octobre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 18/07504
APPELANT
Monsieur [R] [W]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Bernardine TYL-GAILLARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0462
INTIMÉE
S.A.R.L. BASV
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Delphine MARATRAY-BACCUZAT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0021
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre
Madame Nadège BOSSARD, Conseillère
Monsieur Stéphane THERME, Conseiller
Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats
ARRÊT :
– contradictoire,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
M. [R] [W], de nationalité srilankaise, a été embauché par la société BASV le 1er janvier 2014 lors de la reprise du fond de commerce de restauration exploité sous l’enseigne Le Regalia au [Adresse 1] et dans lequel il travaillait en qualité d’officier de cuisine.
Par avenant en date du 1er septembre 2014, les horaires et a durée du travail de M. [W] ont été modifiés avec effet au 1er novembre 2014 pour être réduit à 108H33 pour un salaire de 1266,09 euros bruts.
Par courrier en date du 31 mai 2017, la société BASV a notifié un avertissement à M. [W] pour une altercation avec son chef de cuisine M. [T] [C].
Par courrier du 14 juin 2017, M. [W] a dénoncé subir un harcèlement moral de la part de son chef, M. [T] [C].
Il a réitéré cette alerte par courrier le 11 septembre 2017.
Le 7 juin 2018, la société l’a mis en demeure de justifier son absence du 4 juin 2017.
Le 17 juillet 2018, la société BASV a adressé un courrier au salarié en lui reprochant une absence du 16 juillet 2018.
Le 26 juillet 2018, la société BASV a convoqué M. [W] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 3 août 2018, avec mise à pied à titre conservatoire.
Par courrier en date du 8 août 2018, la société BASV a notifié à M. [W] son licenciement pour faute grave.
M. [W] a contesté son licenciement par courriers en date du 14 août 2018 et du 5 septembre 2018.
Il a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 5 octobre 2018.
Par jugement en date du 5 octobre 2020, signifié le 19 janvier 2021, le conseil de prud’hommes de Paris a débouté M. [W] de ses demandes et la société BASV de sa demande reconventionnelle.
M. [W] a interjeté appel le 4 février 2021.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le 23 décembre 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, M. [W] demande à la cour de :
Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [W] de l’ensemble de ses demandes,
Statuant à nouveau,
Dire que le licenciement ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
Condamner la société BASV à verser à M. [W] les sommes suivantes :
– 2.696,16 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis
– 269,62 euros au titre des congés payés afférents
– 2.415,31 euros au titre de l’indemnité de licenciement
– 10.785 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
– 584,37 euros à titre de rappel de salaire mise à pied du 27/07/2018 au 08/08/2018
– 58,44 euros au titre des congés payés afférents
– 5.607,36 euros à titre de rappel d’indemnité repas
– 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral
Avec intérêts au taux légal
Ordonner la remise des bulletins de salaire conformes aux condamnations sous astreinte de 100 euros par jour de retard,
Condamner la société BASV au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
La condamner aux entiers dépens.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 27 septembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société BASV demande de :
A titre principal,
Débouter M. [W] de son appel, le dire mal fondé dans son intégralité
Confirmer intégralement le jugement du conseil de prud’hommes de Paris en date du 5 octobre 2020
A titre subsidiaire
Juger que le licenciement de M. [W] est justifié et repose sur une cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
Juger que les condamnations pécuniaires de la société BASV doivent être limitées au paiement du salaire relatif à la période de mise à pied, à une indemnité compensatrice de congés payés correspondant à deux mois de salaire soit 2 696,16 € bruts, aux congés payés afférents (269,61€ bruts) ainsi qu’à l’indemnité de licenciement (2 415, 31 €).
Dans tous les cas,
Juger que le harcèlement moral n’est pas caractérisé
Débouter M. [W] de ses demandes indemnitaires au titre du prétendu harcèlement moral,
Juger que M. [W] a déjà été indemnisé des primes de repas tel que cela résulte de ses bulletins de salaire
Statuant à nouveau
Condamner M. [W] à payer à la société BASV la somme de 3 600 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile
Condamner M. [W] aux entiers dépens de l’instance.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2022.
MOTIFS :
Sur le harcèlement moral:
Selon l’article L1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’article L1154-1 prévoit que lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L.1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
M. [W] expose avoir subi un harcèlement moral de la part de son chef de cuisine, s’être vu infligé des sanctions injustifiées, avoir subi un contrôle de son arrêt de travail prétendant qu’il n’était pas à son domicile alors qu’il y était, avoir systématiquement reçu des mises en demeure de justifier des absences qu’il avait pourtant déjà justifiées.
M. [W] a dénoncé auprès de son employeur subir un harcèlement par courrier en date du 2 juin 2018 et justifie avoir déposé une plainte pénale à l’encontre M. [T] [C].
M. [G], salarié en cuisine, atteste que M. M. [T] [C], chef de cuisine les soumettait à des ‘cadences infernales’ et leur tenait des propos insultants à l’égard de leurs épouses et moqueurs concernant M. [W] sur le fait qu’il n’avait pas d’enfant après six ans de mariage, leur donnait des commandes contradictoires.
Il n’est pas contesté que M. [W] a été sanctionné à deux reprises par des avertissements pour des altercations avec son chef de cuisine dont il dénoncé être victime.
La société BASV a fait procéder à un contrôle de son état de santé à son domicile le 20 juillet 2018.
Elle l’a à deux reprises, les 7 juin 2018 et 17 juillet 2018 mis en demeure de justifier de ses absences alors qu’il avait adressé un certificat médical par lettre recommandée avec avis de réception.
Ces éléments, pris dans leur ensemble, font présumer une situation de harcèlement moral.
L’employeur justifie l’exercice d’un contrôle médical au domicile de M. [W] par le droit dont il dispose en vertu de l’article 1226-1 du code du travail qui autorise l’employeur à faire procéder une contre-visite médicale et ce dès le premier jour d’absence.
Il justifie avoir sanctionné non seulement M. [W] mais également M. [T], chef de cuisine, avec lequel il avait eu une altercation et justifie de la réalité de celle-ci par l’attestation de Mme [S], responsable de salle.
L’employeur verse aux débats les plannings signés par M. [W] et les bulletins de paie mentionnant le paiement des heures contractuelles.
Il ne s’explique en revanche pas sur les mises en demeure de justifier d’absences alors qu’il avait été destinataire des justificatifs et son absence de réaction aux dénonciations de fait de harcèlement moral subi.
Au regard de l’ensemble de ces éléments, la cour a la conviction que M. [W] a subi un harcèlement moral. Le préjudice moral subi consécutivement sera réparé par l’allocation de la somme de 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.
Sur le licenciement :
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.
La lettre de licenciement est libellée comme suit:
« Je fais suite à l’entretien qui s’est déroulé le 3 août dernier en présence d’une traductrice et d’une conseillère syndicale.
Au cours de cet entretien, qui a duré plus d’une heure, je vous ai exposé les raisons et les faits pour lesquels j’envisageais votre licenciement et vous m’avez fait part de vos observations.
Je vous indique que je suis contraint de vous licencier pour les raisons suivantes :
– Le 24 juillet 2018, vous m’avez adressé un courrier en ces termes :
« Je suis victime de votre escroquerie depuis le 01/01/2014 où vous avez repris le restaurant. Quoi qu’il arrive et quelque soit votre escroquerie, elle prend une ampleur, je suis prêt pour découdre avec vous en droit pénal.
Je vous présente mes horaires de travail depuis votre arrivée, cet horaire suivant qui est la réalité :
Lundi ‘ de 13h30 à 23h30
Mardi’ de 10h00 à 17h00
Mercredi’ de 11h à 1h + de 19h30 à 23h30
Jeudi’ de 11h à 15h + de 19h30 à 23h30
Vendredi’ de 10h00 à 17h00
Vous avez fait des escroqueries non seulement avec moi et aussi avec d’autres salariés c’est le travail dissimulé et au noir et payés en espèce.
Depuis votre arrivée, vous nous avez fait signer les plannings de l’escroquerie.
En expression, vous nous avez mis le couteau sous le cou pour obtenir nos signatures sous les plannings de l’escroquerie. C’est terminé, le 24 juillet 2018.
Je ne signerai pas sur vos plannings de l’escroquerie. C’est carrément interdit.
Par ce présent courrier, je vous invite de bien vouloir respecter mon planning que j’avais travaillé jusqu’à là jusqu’ici.
Vous me restituerez tous mes plannings que j’avais signés jusqu’à ici dans le cadre de l’escroquerie.
Je respecterai mes plannings réels, et vous pouvez me fournir du travail selon les plannings réels.
Vous ne pouvez pas m’imposer les plannings de l’escroquerie à partir du 24 juillet 2018.
C’est carrément de la criminalité.
Rendez-vous au Tribunal correctionnel.
Rendez-vous au procureur de la République.
Nous verrons largement ».
Je considère que ce courrier est diffamatoire et calomnieux à mon égard.
Je ne peux pas accepter d’être traité d’escroc à de nombreuses reprises.
Je ne peux pas accepter que vous m’accusiez de pratiquer le travail dissimulé et au noir.
Je ne peux accepter d’être menacé de poursuites pénales.
Je ne peux pas accepter que vous refusiez de signer votre planning de travail attestant des heures effectuées dans l’entreprise.
Ces accusations sont mensongères.
Je vous indique vous avoir rappelé votre planning exact, à savoir du lundi au vendredi de 11h30 à 14h30 et de 19h30 à 22h00, à de nombreuses reprises et notamment par courrier en date du 20 octobre 2017 et ce conformément à un avenant écrit à votre contrat de travail en date du 01 septembre 2014.
Vous n’avez jamais contesté vos bulletins de salaires depuis plusieurs années. Vous avez signé les plannings correspondant à vos horaires.
Vous avez, certes, effectué des heures complémentaires au cours des mois de février à mi-mai 2018, ces heures complémentaires n’ayant pas vocation à durer.
Je vous rappelle que vous avez été absent pour maladie et congés payés (pris à votre demande) entre le 23 mai et le 23 juillet 2018.
Ce courrier intervient après d’autres éléments factuels motivant eux aussi ce licenciement :
– Le 23 juillet 2018, je vous ai demandé de me communiquer un justificatif à jour de votre titre de séjour.
Vous avez refusé purement et simplement.
Or ce refus n’est pas admissible et met le commerce que j’exploite en danger.
– Vous deviez reprendre votre poste de travail le 16 juillet dernier, après plusieurs semaines de congés payés pris à votre demande et que je vous ai accordé malgré les difficultés d’organisation que cela représentait pour moi puisque la fermeture annuelle du commerce intervient le 12 août prochain.
Vous ne vous êtes pas présenté et n’avez pas cru nécessaire de me prévenir même par SMS.
Or, vous connaissez parfaitement mes coordonnées de téléphone portable pour m’adresser de nombreuses demandes par ce biais.
Comme vous le savez, j’exploite un commerce de petite taille où le poste de chacun compte. Votre silence a désorganisé le travail de vos collègues et a causé un préjudice à l’établissement.
– Vous m’avez adressé un courrier recommandé le 21 juillet 2018 indiquant que je ne remettais pas les bulletins de paie et que je risque « une procédure devant la formation de référé du CPH uniquement pour les bulletins de salaire».
Je vous rappelle que les bulletins de salaire vous sont remis chaque mois, en main propre.
Vous avez eu l’intégralité de vos bulletins de salaire à l’exception de ceux des mois de mai et juin 2018, période durant laquelle vous avez été absent et durant laquelle je n’ai donc pas pu vous les remettre.
– En outre, vous indiquez « vous n’avez pas respecté le contenu de mon courrier du 2 juin 2018.
En fait les harcèlements moraux continuent ».
Je vois mal comment les prétendus harcèlements moraux du chef à votre égard auraient pu continuer puisque vous étiez absent depuis plus de deux mois.
En outre, des mesures ont été prises pour éviter toute difficulté (votre collègue s’est vu rappelé ses obligations et vous n’avez pas travaillé à ses côtés depuis votre reprise de travail).
Au demeurant les termes de vos courriers relatifs au chef sont difficilement compréhensibles.
Les propos tenus à l’encontre de ce dernier (« haut-parleur qui parle sans arrêts et aucun bouton pour arrêter ce haut-parleur » « fou ») sont insultants.
Quant aux autres accusations portées dans ce courrier indiquant que vous seriez discriminé en raison de vos « insuffisances linguistiques primaires, différend de la langue maternelle de la religion, différend du communautarisme, refus de l’esclavage moderne’ » , là encore elles sont diffamatoires vis-à-vis de l’employeur que je suis.
Enfin, vous m’avez adressé un dernier courrier recommandé daté du 26 juillet me traitant de menteur en ces termes « la main dans le sac vous avez été attrapé par le mensonge de votre courrier’ par conséquent, je dois déposer plainte contre le médecin trompeur ou contre vous si vous vous trompez. Veuillez me communiquer ses coordonnées immédiatement ».
Les termes de ce courrier sont là encore inacceptables.
La gravité de vos agissements rend donc impossible votre maintien dans l’entreprise, y compris durant la période de préavis.
Vous cesserez de faire partie des effectifs de l’entreprise à compter de la date de la première présentation des présentes sans qu’aucune indemnité de préavis, ni de licenciement ne vous soit versée ».
Contrairement à ce que soutient M. [W], la lettre de licenciement ne lui reproche pas d’avoir agi en justice mais de lui avoir reproché de ne pas lui avoir remis ses bulletins de paie alors qu’ils lui ont été délivrés et de le menacer d’une procédure prud’homale. Au demeurant, M. [W], qui rappelle dans ses conclusions que le grief reprochant à un salarié sa saisine de la justice rend le licenciement nul, ne sollicite pas la nullité de son licenciement.
S’agissant de l’envoi d’un courrier comportant des propos calomnieux, la société BASV verse aux débats le courrier que lui a adressé M. [W] le 24 juillet 2018 dans lequel il accuse son employeur d’escroquerie à six reprises et l’accuse de lui ‘avoir mis le couteau sur le cou’ pour obtenir sa signature sur les plannings. Si cette dernière expression est utilisée au sens figuré, elle participe de la violence du ton utilisé. Les termes utilisés excédent la liberté d’expression. M. [W] expose certes ne pas maîtriser la langue française et avoir eu recours à un traducteur et à un écrivain public, pour autant, la réitération du mot ‘escroc’ dans la lettre alors qu’il était assisté d’un traducteur ne peut qu’être volontaire. M. [W] a usé du même ton accusateur par lettre adressée le 26 juillet 2018 soit deux jours plus tard en écrivant à son employeur que ‘La main dans le sac, vous avez été attrapé par le mensonge de votre courrier.’ C’est également sans en démontrer la réalité que M.[W] a accusé son employeur de travail dissimulé et d’absence de remise de bulletins de salaire. Le grief de diffamation et de calomnie est caractérisé.
Mme [S], responsable de salle atteste également avoir été témoin le 23 juillet 2018 du refus de M. [W] de remettre son titre de séjour à son employeur. Si ce dernier soutient être titulaire une carte de séjour de dix ans en qualité de réfugié politique expirant le 13 janvier 2018, et qu’il disposait d’un récépissé de demande de carte de séjour établi le 6 juin 2018, il ne verse aucun élément probatoire contraire à l’attestation produite pas l’employeur. Ce grief est donc caractérisé.
S’agissant de l’absence de reprise du travail le 16 juillet 2018, M. [W] justifie avoir été placé en arrêt de travail à cette date et avoir adressé cet avis d’arrêt de travail à son employeur par lettre recommandée adressée le 17 juillet 2018 avec avis de réception signé par son employeur le 18 juillet 2018. Ce grief n’est donc pas caractérisé.
La réitération de faits de dénonciation calomnieuse et diffamatoire, même privée, est constitutive d’une faute du salarié qui rendait impossible la poursuite de son contrat de travail. Le licenciement pour faute grave est en conséquence justifié.
Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef et en ce qu’il a débouté M. [W] de ses demandes indemnitaires subséquentes.
Sur l’indemnité de repas :
Il est d’usage au sein de la branche de la restauration que le salarié présent sur son lieu de travail aux heures des repas soit nourri par son employeur.
En vertu de l’article 35.2 de la convention collective des cafés, hôtels restaurants, ‘Il est toutefois rappelé que tout salarié prenant son repas sur place, à l’occasion du travail, dans un établissement préparant des denrées alimentaires, ne pourra se voir réclamer par l’employeur une contribution supérieure à l’évaluation de l’avantage en nature fixée par la réglementation en vigueur.
Il est convenu que les entreprises ne procéderont plus aux déductions prévues aux articles D. 141-6 et D. 141-8 du code de travail.
Pour le calcul des cotisations, les avantages nourriture et logement sont évalués conformément aux dispositions de l’arrêté du 9 janvier 1975.
Tout salarié prenant son repas sur place, à l’occasion du travail, dans un établissement préparant des denrées alimentaires, ne pourra se voir réclamer par l’employeur une contribution supérieure à l’évaluation de l’avantage en nature fixée par la réglementation en vigueur.’
Au regard des horaires de M. [W] prévues à l’avenant à son contrat de travail, il était présent sur son lieu de travail de 11H30 à 14H30 et de 19H30 à 22H de sorte que deux indemnités de repas lui étaient dues, une pour le midi, une pour le soir.
Or, il résulte de ses bulletins de paie qu’il n’en a perçu qu’une seule par jour.
Il sollicite la somme de 5.607,36 euros soit 44 indemnités de 3,54 euros pendant 36 mois.
Il a toutefois bénéficié d’un avantage en nature par jour travaillé.
Dès lors, l’indemnité compensatrice du repas du soir due s’élève à 2 336,40 euros.
La société BASV est en conséquence condamnée à lui payer la somme de 2 336,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes.
Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur la remise des documents de rupture :
Il convient de condamner la société BASV à remettre à M. [W] une attestation destinée Pôle emploi, un bulletin de paie rectificatif et un solde de tout compte conforme au présent arrêt.
Les circonstances de la cause ne justifient pas de prononcé une astreinte. La demande est rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
La société BASV est condamnée aux dépens de première instance et d’appel et au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et la demande d’indemnité de repas,
L’INFIRME de ces chefs,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
CONDAMNE la société BASV à payer à M. [R] [W] les sommes de :
– 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
– 2 336,40 euros à titre d’indemnité compensatrice de repas, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes,
CONDAMNE la société BASV à remettre à M. [W] une attestation destinée Pôle emploi, un bulletin de paie rectificatif et un solde de tout compte conforme au présent arrêt,
REJETTE la demande d’astreinte,
CONDAMNE la société BASV à payer à M. [R] [W] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société BASV aux dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT